Mercredi 13 décembre 2017

«Les honneurs, je les méprise, mais je ne déteste pas forcément ce que je méprise »
Jean d’Ormesson (16/06/1925 – 05/12/2017) dans «Dieu, les  affaires et nous»

Il faut des mots du jour court.
En voici un.

Le mot du jour a plusieurs fois fait appel à Jean d’Ormesson :

Le mot du mardi 2 février 2016 :

« La vie naturellement est une vallée de larmes
C’est aussi une vallée de roses.»
Jean d’Ormesson

C’est lui aussi qui avait accueilli Simone Veil à l’Académie française. Et j’avais cité la fin de son discours :

« Je baisse la voix, on pourrait nous entendre : comme l’immense majorité des Français, nous vous aimons, Madame. Soyez la bienvenue au fauteuil de Racine, qui parlait si bien de l’amour. »

Je l’avais aussi mobilisé pour décrire François Mitterrand :

«c’est un homme qui avait un rapport complexe avec la vérité».

Pour revenir à l’exergue de ce mot du jour et pour l’éclairer il faut peut-être faire appel à Nietzsche qui aurait dit selon Fabrice Lucchini :

« Ce sont nos contradictions qui nous rendent féconds »

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Mercredi 21 juin 2017

« Le triomphe de Macron pose un problème d’éthique démocratique et de représentativité des partis. »
Jean Garrigues

La semaine dernière, après le premier tour des législatives, mon ami Marc m’a écrit : « Je compte sur toi pour que tu inspires nos réflexions sur la représentativité d’un parlement quand plus d’un électeur (inscrit sur les listes électorales) sur deux a choisi de ne pas voter »

J’ai préféré me taire entre les deux tours. J’ai eu raison, il y a bien triomphe des Macronistes, mais un peu plus modeste que celui que prévoyait les sondeurs après le premier Tour.

Emmanuel Macron, avec beaucoup de talent, une vision d’entrepreneur de start up nous a joué cette pièce que les plus audacieux tentent : « sur un malentendu cela peut passer !».

Je ne rappelle pas toutes ces étapes qui ont conduit d’abord Macron à obtenir au 1er tour des présidentielles 24,01 % des suffrages exprimés ce qui représentait 18,19% des inscrits et ses candidats au premier tour des législatives 32,32% des suffrages exprimés (La République en marche (REM) 28,20 et MODEM 4,12). Mais si on rapporte ces suffrages par rapport aux inscrits, le taux n’est plus que de 15,39%.

Par la grâce du système électoral, du positionnement des candidats macronistes et des institutions de la 5ème République, à partir de 32,32% des voix, la majorité présidentielle (REM et MODEM) a eu au second tour 350 élus sur 577, ce qui représente 60,66 % des sièges. C’est ce que l’on peut appeler un coefficient multiplicateur de la 5ème république, il est ici de 1,88.

Nous aimons nous comparer.

En Grande Bretagne, viennent aussi de se dérouler des élections législatives. C’est comme chez nous, mais il n’y a qu’un tour, celui qui est arrivé en tête gagne. Le Parti Conservateur de Theresa May a eu 42,4% des exprimés et quand même 29,14% des inscrits. Toujours est-il qu’avec 42,4% des voix elle a obtenu 317 sièges des 650 ce qui représente 48,8% des sièges. Il y a un coefficient multiplicateur britannique mais modeste 1,15.

Celui qui est arrivé second était le Labour de Corbyn qui avec 40,0% des voix a obtenu 40,3% des sièges, on peut parler d’un coefficient de stabilisation.

Voilà comment cela se passe dans le pays qui a inventé la démocratie parlementaire moderne.

Chez nos amis allemands, le système électoral est plus compliqué mais en résumé il aboutit à une représentation proportionnelle pour tous les partis qui ont obtenu plus de 5% des voix. ¨Par construction ce système électoral conduit à une représentation proportionnée entre les voix exprimés et les sièges. Il y a un petit coefficient multiplicateur qui provient du fait que les partis ayant des sièges récupèrent la proportion abandonnée par les partis ayant obtenu moins de 5%

Bref, nous comprenons toute l’incongruité de notre système électoral en le comparant. Ce n’est pas un système démocratique, c’est une organisation qui vise à donner une majorité à un homme, même s’il a été élu sur un malentendu.

Ce phénomène était déjà à l’œuvre en 2012 avec François Hollande. La majorité socialiste avait obtenu 39,86% des voix exprimés et 57,37% des sièges avec un coefficient multiplicateur français de 1,44 toujours incongru par rapport à nos voisins mais largement inférieur au résultat de cette année. Je sais bien que techniquement cela s’explique très bien grâce au scrutin majoritaire à deux tours où il faut être en capacité d’attirer des électeurs qui n’ont pas voté pour vous au premier tour, ce qui est encore facilité si vous vous trouvez au centre de l’échiquier et qu’un électeur de gauche préférera un candidat « En marche » contre un  candidat de droite et un électeur de droite un candidat en Marche à un candidat de gauche.

Nous pouvons être cependant rassuré puisqu’au lendemain du premier tour, les sondeurs avait prévu plus de 70 % des sièges pour la majorité présidentielle et que nous sommes en deçà. C’est sur cette base que l’historien Jean Garrigues avait répondu la phrase que j’ai mis en exergue, dans un entretien à Challenges. On constate, par la comparaison avec nos pays voisins, que cette opinion reste parfaitement exacte à 60%.

Le plus instructif est quand même qu’Emmanuel Macron a conceptualisé lui même l’incongruité de cette situation. Je cite le futur Président jupitérien  :  «Dans tous les sondages, aucun candidat ne fait résolument plus de 25%. Alors oui, y’en a qui ont des partis, des vieux partis, avec beaucoup d’intérêts. Mais est-ce que quelqu’un peut penser raisonnablement que, élu président, il aura une majorité présidentielle uniquement avec son parti?», s’interrogeait le futur chef de l’Etat. «Moi je n’y crois pas», ajoutait Emmanuel Macron. Avant de marteler: «Non seulement ça n’est pas possible, mais ça n’est pas souhaitable! Parce que ça serait un hold-up ! ».

Un hold-up ! rien que cela…S’il s’était arrêté simplement à «Moi je n’y crois pas», on aurait pu dire qu’il n’était pas assez optimiste. Mais avec le hold-up ! il condamne ce qui est arrivé à sa majorité présidentielle.

Il y a cependant des raisons pour se réjouir, comme le montre cet article du Monde, le nombre de sièges occupés par des femmes a progressé en grand nombre : elles seront 223 députées à siéger dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, ce qui représente 38,65 % des sièges, soit 68 femmes députées supplémentaires par rapport à l’Assemblée élue en juin 2012 (elles représentaient 27 % de la précédente Assemblée). En outre, ce que je trouve encourageant c’est que le différentiel entre le pourcentage de candidates et le pourcentage d’élues a fortement diminué. Ainsi il y avait 42,4% des candidats qui étaient des femmes pour obtenir 38,65% des sièges. Il y a 10 ans il y avait 41,6% de candidates mais que 18,5% de femmes ayant obtenu un siège. Bref on réservait les sièges gagnables aux hommes. C’est toujours le cas, mais en beaucoup plus faible proportion.

En outre, l’assemblée se rajeunit, avec une moyenne d’âge de 48 ans et 240 jours, la XVe législature est plus jeune de cinq ans que la précédente (53 ans et 195 jours).

Et puis, il y a vraiment des piliers du bar de l’assemblée nationale qui ont été enfin remerciés. Exemple emblématique : Gérard Bapt, 71 ans, membre du Parti socialiste a été sèchement battu après 35 ans de mandats cumulés, il aspirait à 40 ans de mandat jusqu’à 76 ans, considérant que l’expérience était la valeur suprême du représentant du peuple.

En même temps, l’inexpérience n’est pas forcément un atout surtout quand elle se cumule avec l’incompétence. Certains candidats, En marche, sont apparus lors d’émissions de télévision particulièrement ridicules. Je n’aurai pas l’indélicatesse de les nommer mais vous pouvez les trouver aisément sur internet.

En revanche, l’article du Monde montre que les élus ne sont pas représentatifs des profils sociaux et des professions des français. Ce sont, les professions aisées qui dominent la nouvelle Assemblée.

Ce sont les gagnants de la mondialisation. Sauront-ils penser aux perdants et améliorer leur situation ?

Car maintenant, il faudra gouverner et arbitrer. C’est une chose de savoir brillamment gagner des élections grâce à son talent, à une part importante de chance et un système électoral très favorable. Mais gouverner c’est autre chose.

Nous qui aimons la France, ne pouvant qu’espérer qu’Emmanuel Macron trouvera des solutions pour améliorer la situation des français, d’une grande majorité de français.

Il a certainement de bonnes idées comme la volonté d’unifier les systèmes de retraite à terme, d’autres me semblent plus problématiques, mais j’en ai déjà parlé.

Certains de mes amis de l’ex Parti socialiste continue à prétendre que François Hollande était un bon président. Ce n’est pas mon avis. Non qu’il soit un homme sans qualité, mais il fut un président médiocre. En revanche il est et restera probablement un très bon analyste politique.

La journaliste Françoise Degois vient de publier « Il faut imaginer Sisyphe heureux : les 100 derniers jours de François Hollande. » Pour cette raison, elle était l’invitée de Anne-Sophie Lapix dans l’émission C à vous du 09/06/2017. Vous trouverez cette émission derrière ce lien <Les 100 derniers jours de Hollande>.

Et dans cette émission (à 12:35) François Degois fait dire à François Hollande cette prophétie : « Le jeune roi sera nu, un jour »

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Lundi 18 avril 2016 ou du 49 mars 2016

« Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. »
Pierre Victurnien Vergniaud

Ce matin nous sommes le 49 mars du calendrier du mouvement « Nuit debout ».

Ce mouvement étonnant a démarré le 31 mars et, probablement en référence au calendrier révolutionnaire, a voulu créer un nouveau calendrier. Ils ont fait simple, continuer indéfiniment le mois de mars qui a vu le début de ce mouvement.

Mais MEDIAPART a consacré une « soirée live » à ce mouvement et a invité des participants à s’exprimer, ce qui est difficile puisqu’ils refusent de nommer des porte-paroles et qu’ils se méfient énormément des médias. Finalement, MEDIAPART probablement en raison de son positionnement est arrivé à en convaincre quelques-uns. < C’est ici>

Parmi les invités, il y avait Leila Chaibi, membre du Parti de gauche et ancienne candidate aux municipales à Paris. Elle fait partie des initiateurs de ce mouvement, c’est ce qu’elle explique dans l’émission de Mediapart, avec le journal FAKIR d’Amiens qui annonce d’entrée :

« Journal fâché avec tout le monde. Ou presque »

Wikipedia nous apprend que

« Fakir est un journal indépendant et alternatif engagé à gauche. Il a été créé en 1999 à Amiens, en Picardie. Selon deux formules consacrées présentes au début de chacun de ses numéros, le journal se présente comme n’étant lié à « aucun parti politique, aucun syndicat, aucune institution » et comme « entièrement rédigé et illustré par des bénévoles ». Il connaît une diffusion nationale depuis le 26 avril 2009. Le magazine confectionné à Amiens diffuse entre 10 000 et 20 000 exemplaires par numéro.»

Le rédacteur en chef et fondateur de ce journal est <François Ruffin>.

Pour le situer un peu, on apprend qu’il a participé comme reporter plusieurs fois à l’émission de France Inter<Là-bas si j’y suis de Daniel Mermet> qui a été supprimé dans la polémique en 2014. François Ruffin a pris la défense de Daniel Mermet.

Et en 2015, il réalise son premier film, « Merci Patron ! », film critiquant Bernard Arnault, dont la sortie nationale a eu lieu le 24 février 2016. Ce film a aussi joué un rôle de premier plan, un rôle fédérateur dans le déclenchement de ce mouvement.

Je n’ai pas encore eu l’occasion de le voir, Bien que Pascale me l’ait vivement conseillé en précisant qu’il devrait me plaire.

Le mouvement DAL « Droit au logement » a également été présent dans le tout début du mouvement, notamment pour le conseil logistique.

Et enfin il y a l’intellectuel Frédéric Lordon, dont j’ai déjà parlé (en bien).

Tout ceci pour dire, comme le révèle Leila Chaibi, que ce mouvement n’est pas venu de nulle part, une création spontanée ex nihilo.

Au départ, il y a la mobilisation contre la Loi Travail et l’idée de quelques-uns dont notamment ceux cités précédemment qui ont eu l’intuition qu’il ne fallait pas manifester et puis rentrer chez soi. Mais qu’il fallait se réunir, parler ensemble, créer un élan démocratique, ce qu’ils appellent un mouvement horizontal dans un monde où la démocratie représentative est à bout de souffle en France, mais aussi dans tous les autres pays occidentaux.

Cela commence à 16′ de l’émission de Mediapart donné en lien en début de message.

Le mot d’ordre du noyau de ce mouvement était : on ne rentre pas chez nous après la manif.

Et puis ils se sont posés la question de Lénine <Que faire ?>

Une première idée était de réaliser un tract de revendication dans une perspective de «convergence des luttes », concept qui a été abondamment repris dans leurs discussions.

Cette première idée a été repoussée pour faire place à cette innovation qui me paraît très intéressante : Mettre en place une organisation (logistique, repas, concert, les règles de prise de parole…) permettant à tous ceux qui le souhaitent de débattre, sans que les initiateurs prennent un rôle prépondérant.

Cette position qui semble respecté, pour l’instant, constitue la force du mouvement mais aussi sa faiblesse pour aller plus loin et se structurer.

Pour revenir à Leila Chaibi, elle raconte donc que l’appel à se réunir « Place de la République » et à organiser les échanges, devait s’accompagner d’un site internet et qu’il fallait donc trouver un nom. [Se trouve à 33:30 de l’émission de Mediapart] :«Au départ on a pensé à « convergence des luttes ». Puis on a pensé aux « nuits blanches » qui sont organisées par la mairie de Paris et on a proposé « Nuit Rouge ». Et Lordon a dit : « attention, l’objectif n’est pas de se retrouver entre nous, entre militants [de la gauche de la gauche]. L’objectif est de faire un mouvement massif, alors attention au vocabulaire trop marqué mouvement ouvrier ou gauchiste. » Alors en référence à la citation de La Boétie « Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. » nous avons décidé d’appeler ce mouvement la nuit debout »

A ce stade de mon étude je suis retourné vers l’extraordinaire encyclopédie, Wikipedia à laquelle il faudra bien que je consacre un mot du jour, tant cette institution est une formidable et positive création de l’esprit collaboratif et de la modernité.

Donc Wikipedia nous apprend dans son article consacré à <La servitude volontaire de la Boétie> qu’«On attribue à tort, semble-t-il, la citation suivante à ce texte, car elle ne peut être trouvée dans aucun des principaux textes publiés : « Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. ». En réalité, elle provient de Pierre Victurnien Vergniaud». Vergniaud qui fut un des leaders des girondins.

C’est toujours Wikipédia qui nous apprend que «Pierre Victurnien Vergniaud (31 mai 1753 à Limoges – guillotiné 31 octobre 1793 à Paris) était un avocat, homme politique et révolutionnaire français. Bien plus que l’orateur du parti girondin, il fut l’un des plus grands orateurs de la Révolution française. Il reste un des grands acteurs de la Révolution. Président à plusieurs reprises de l’Assemblée législative et de la Convention nationale, c’est lui qui déclara la « patrie en danger » (discours du 3 juillet 1792). C’est également lui qui prononça la suspension du roi au 10 août 1792 et le verdict qui condamna Louis XVI à la mort. Il fut pour beaucoup dans la chute du trône, et la levée en masse des citoyens pour la guerre. »

J’ai consacré, une grande partie de mon temps de cerveau disponible de ces derniers jours à m’intéresser à ce mouvement « Nuit debout », mais je m’aperçois que ce mot du jour va devenir de longueur exagérée si je ne m’interromps pas.

Alors je voudrais simplement faire part de la réflexion d’une amie qui m’a été rapporté par Annie et qui remarquait que l’échange de parole, la qualité de l’écoute sur la Place de la République était absolument remarquable, un vrai travail moderne de professionnel des débats.

Le symbole de cette organisation étant les gestes codifiés que vous trouverez ci-après et qui permettent à la foule de réagir immédiatement à ce que l’orateur dit :

Nuit debout  a donc un site : http://www.nuitdebout.fr/

Et déjà une page Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Nuit_debout

J’en resterai à ce stade pour le mot du jour d’aujourd’hui.

Je regarde ce mouvement avec sympathie, étonnement mais aussi un peu d’incrédulité sur son devenir et sa capacité à faire bouger les choses.

L’exergue du mot du jour « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. » est en revanche une formule qui me paraît plein de sens, dans ce monde où les 1% les plus riches accaparent une part de plus en plus extravagante des richesses produites.

Mais toute la question est aussi de savoir : pourquoi sommes-nous à genoux ?

Cette question pouvant se décliner sur deux modes : Qu’avons-nous à perdre ? Ou qu’avons-nous à gagner à la conservation du système actuel ?

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Vendredi 29 Janvier 2016

Vendredi 29 Janvier 2016
« La conquête de l’espace public par les femmes est très important. Le fait de pouvoir sortir seule, le soir, la nuit ce qui est encore considéré comme un danger pour les femmes, c’est quelque chose qui doit cesser, partout ! »
Michelle Perrot

Il faut conclure cette semaine consacrée aux violences faites aux femmes dans l’espace public, même en France.

Dans l’esprit de beaucoup, le fait que les femmes doivent faire attention, éviter certaines tenues, éviter certains quartiers, ne pas sortir seule à partir d’une certaine heure est intégré et surtout semble normal.

Que dans le monde tel qu’il existe il vaut mieux être prudent, cela se comprend, mais que cela soit normal !

Non ce n’est pas normal !

C’est une vraie prise de conscience qu’il faut développer, mais aussi l’inscrire dans la réalité avec les moyens appropriés pour rendre l’espace public sur, sécurisé et apaisé.

Les évènements de Cologne pourraient conduire à une régression si la peur l’emportait.

Une autre régression à l’égard des femmes menace la France en raison du communautarisme qui s’est développé dans des populations issues de l’immigration de population venant de pays et de culture qui sont encore à un stade plus archaïque des relations femme/homme.

Mais Michelle Perrot, dans les matins de France Culture, reste optimiste :

«  Il y a des stades dans le développement des « cultures » dans ce domaine. Toutes les cultures n’en sont pas au même stade et le facteur religieux est important. Les religions n’ont jamais été favorables aux femmes ni les unes ni les autres. Le christianisme a évolué, l’Islam peut le faire aussi. Ce n’est pas un fait éternel mais il peut y avoir des différences dans le temps. »

Bien entendu, sur certains points il faut être beaucoup plus ferme dans nos principes et à l’égard de certains mouvements salafistes qui n’acceptent pas certaines valeurs fondamentales de notre société.

Michelle Perrot a rappelé l’évolution dans notre société : « Au XVIIème siècle il se produit « une rupture d’évidence ». On pensait que les deux sexes étaient hiérarchisés et inégaux. Descartes dit : « la science n’a pas de sexe ». Ce qui veut dire, homme et femme sont égaux devant la science.

Et les disciples de Descartes produisent des traités sur le thème « De l’égalité des sexes » qui laissent entendre que les deux sexes pourraient bien être égaux. Et commence ainsi un long processus à travers les lumières.

L’occident va ainsi commencé à professer l’égalité des sexes mais c’est un processus très long.

« Très souvent cette prise de conscience s’accompagne de l’idée de la complémentarité. Ils sont égaux mais ils sont complémentaires et différents. De sorte que les hommes doivent toujours faire de la politique, gouverner, diriger. Et les femmes s’occuper de la maison etc.

Il faut encore conquérir l’idée que ce n’est pas la complémentarité mais que c’est l’universalité des individus qui est importante ».

Dans le monde des  idées, une deuxième étape sera élaborée par Alexis de Tocqueville notamment dans son ouvrage « De la démocratie en Amérique »

Tocqueville parle de l’égalité des conditions, en fragilisant toutes les relations hiérarchiques de subordination notamment entre les  hommes et les femmes.»

Wikipedia l’exprime de la manière suivante :

« Pour Tocqueville, il y a quasi équivalence entre la démocratie (au sens politique) et l’égalité des conditions. Il considère que tous les êtres humains possèdent comme attribut la liberté naturelle, c’est-à-dire la potentialité d’agir librement.»

Michelle Perrot ajoute :

«Puis il y a le XXème siècle qui sera pour les femmes le gain de la contraception qui permet le choix dans la naissance et par conséquence dans la sexualité.

Puis il y a eu cette rupture fondamentale du droit à l’avortement. Il y a eu une sorte de révolution qu’on a appelé l’Habeus corpus des femmes.

Cela est un vrai changement.  La conquête de l’espace public par les femmes est très importante.

Le fait de pouvoir sortir seule, le soir, la nuit ce qui est encore considéré comme un danger pour les femmes, c’est quelque chose qui doit cesser, partout ! »

Une partie du chemin a été réalisée dans les pays occidentaux, il reste encore des terrains à conquérir, dans d’autres partie du monde, c’est des pays entiers qui doivent être conquis.

Encore deux points :

Une pensée qui me semble très juste :

Véronique Nahoum-Grappe, déjà cité  et qui précise :

«La question de la domination masculine ne repose pas intégralement sur les individus homme et femme, dans leurs trajectoires de vie, dans leurs amours, dans leurs corps.

Des pratiques extrêmement cruelles à l’égard des femmes comme l’excision sont pratiqués par les hommes et les femmes, car la société est mixte à tous les niveaux.

On ne peut pas dire que les femmes soient plus gentilles que les hommes, au niveau éthique il y a des femmes qui sont aussi cinglées, aussi cruelles, aussi perverses [que certains hommes le sont] »

Cette réflexion ouvre vers d’autres perspectives où on doit constater que c’est plus largement le féminin qui a été et reste opprimé dans nos sociétés où ce qui est valorisé est la force, la virilité et les autres attributs que l’on prête au masculin.

Alors que la sensibilité et les attributs féminins sont dévalorisés. « Ne pleure pas, sois un homme ». Voilà une interjection, souvent entendu, et qui illustre cette réflexion. Le chemin que doivent parcourir les hommes, c’est aussi l’acceptation et la valorisation de leur part de féminin.

Ce sera peut-être l’objet d’un mot du jour futur.

Le second point est le témoignage d’Hélène après avoir lu les trois premiers mots du jour de cette semaine :

«Malheureusement je suis bien d’accord avec toi !

Hier j’étais à une soirée d’info professionnelle où était présent le Docteur Foldes le premier chirurgien à avoir proposé une chirurgie de reconstruction pour les femmes victimes de mutilations sexuelles « culturelles »

Avec d’autres personnes engagées il a ouvert un centre près de l’hôpital de Saint Germain en Laye, dans un local prêté par l ‘hôpital. [Ce centre est ouvert à toutes les violences faites aux femmes]

Ils essayent de prendre en charge la personne victime dans sa globalité avec une équipe pluridisciplinaire

En relation directe avec le parquet ils arrivent à avoir des mesures de protections d’urgences qui mettent plusieurs semaines lorsqu’une plainte est déposée en commissariat !  (Et on ne compte pas les plaintes sans suites car reçues par un policier qui n’a pas été formé à cela et qui rédige la plainte de façon irrecevable) […]

C’est le seul centre de ce genre en France ils n’ont aucune aide publique!!

Quand on pense que les violences touchent 1/4 de la population féminine et que la majorité des violences est perpétrée par des personnes proches de la victime et souvent avant sa majorité.

Le coût des violence faites aux femmes est estimé à plus de 4 milliards d’euros par an soit plus que le cancer du sein et ce genre d’institut a besoin d’un kilo de papier pour des subventions de l’ordre de 1000 euros !»

Mise à jour le 12/05/2020 après la constatation que le lien vers le site de cette association était devenu obsolète.

Le nouveau site de ce Centre : https://www.women-safe.org/

Voici la présentation de ce site :

En 2008, Frédérique Martz et le docteur Pierre Foldes font le constat que lorsque les femmes victimes libèrent enfin leur parole, elles déclarent cumuler plusieurs formes de violences (physique, psychologique, sexuelle, économique, rituelle…). Or, celles-ci étaient souvent traitées dans des dispositifs différents, morcelant la prise en charge. Il a fallu imaginer une nouvelle manière d’accompagner les victimes avec une approche globale et pérenne.

En 2014, ils créent ensemble l’association Institut en Santé Génésique, située à Saint-Germain-en-Laye, et s’engagent dans un vrai combat pour les victimes de toutes formes de violences.

En 2017, L’Institut en Santé Génésique devient WOMEN SAFE (Soigner, Accompagner, Femmes et Enfants) association spécialisée en victimologie et psychotraumatologie, et étend son action auprès des enfants victimes ou témoins de violences avec la création du pôle « Mineurs ».

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Lundi 25 Janvier 2016

Lundi 25 Janvier 2016
« La nuit des chasseurs »
Annick Cojean
Il s’est donc passé des agressions contre des femmes, à grande échelle, par des bandes organisées dans la ville de Cologne le 31 décembre.
Les forces de l’ordre n’ont pas su maîtriser ces actes de violence et dans un premier temps ont communiqué dans un déni de la réalité. Ils ont osé affirmer que la nuit du réveillon s’est bien passée.
« La nuit des chasseurs » est le titre d’un article où la journaliste du Monde, Annick Cojean, donne la parole à des victimes. Vous trouverez cet article derrière ce lien.
Pour une fois je n’en citerai aucun extrait, car ce ne sont pas ces faits que je vais développer, mais un sujet beaucoup plus large, qui vient de loin, qui est toujours présent dans le monde entier, à des stades différents, mais toujours présent : je veux parler de la violence faite aux femmes…
C’est dans la sphère privée que cette violence est la plus forte, la plus présente, la plus extrême.
8 femmes violées sur 10 connaissent leur violeur et le viol se passe à leur domicile ou au domicile du criminel.
En France, on estime il y aurait un viol toutes les 6,3 minutes, ce qui fait à peu près 230 viols par jour.
Concernant les meurtres et les autres violences commises à l’égard des femmes, en France, c’est aussi et massivement le domicile qui est le lieu de l’acte et le criminel un proche, souvent le compagnon de la victime.
Mais ce n’est pas de la sphère privée que je vais prioritairement parler.
Cette semaine j’ai l’intention de parler, plus particulièrement, de la violence contre les femmes dans l’espace public.
Ce n’est pas la première fois que je parle de ce problème.
J’avais déjà fait appel à Annick Cojean, cette grande journaliste du Monde le 8 septembre 2014 pour ce mot du jour : « C’est juste pas de chance d’être une femme dans la plupart des pays du Monde »
Et le mot du jour du 18 novembre 2014 parlait d’une étude pilotée par Sylvie Ayral et Yves Raibaud « la  fabrique des garçons ».
Mais que s’est-il réellement passé à Cologne ? On ne le sait toujours pas très bien 25 jours après les faits.
Et n’est-ce pas cela le plus surprenant dans cette affaire ?
Certaines choses sont sûres :  de manière massive des femmes ont été harcelées sexuellement et pour certaines violées par des hommes en groupe et d’origine immigrée semble-t-il majoritairement.
Mais il y a aussi eu beaucoup de vols.
Dans l’émission la Grande Table de France Culture du 20 janvier L’anthropologue des mondes contemporains Véronique Nahoum-Grappe, ancienne élève de François Héritier qui a beaucoup travaillé sur la question des différences des sexes, sur la domination masculine et la violence faite aux femmes explique qu’en Occident on pensait plutôt que les foules étaient protectrices, qu’avec du monde on ne risquait rien
Et ce fut la sidération de Cologne. Le fait de constater que cette foule peut devenir hostile, créer un mur qui va vous isoler pour vous peloter, vous déshabiller, vous menacer sexuellement pour mieux  vous voler votre sac à main et peut être même vous violer, est terrifiant.
Les femmes n’étaient pas préparées à cela.
Peloter, s’en prendre aux attributs physiques de la femme pour la fragiliser et lui voler son sac dans une manipulation mafieuse, qu’est ce qui est premier ? S’en prendre au corps des femmes ou voler ?
Véronique Nahoum-Grappe parle d’une ratonnade d’un nouveau type. « Les mafias entrent dans toutes les failles, c’est une mafia un peu proto-proxénète qui allie le rapt et le racket »
Alors on a parlé du choc des cultures. Ces arabes et ces migrants qui ne savaient pas se tenir !
Il ne s’agit pas de nier que les pays arabo-musulman du golfe, du moyen orient comme les pays du Maghreb à l’exception de la Tunisie ont une pratique des relations homme-femme bien pire que dans nos pays.
Dans l’émission des matins du 20/01 l’écrivaine et une militante féministe algérienne Wassyla Tamzali a reconnu  : « Il y a un rapport spécifique d’inégalité dans les pays musulmans. Ce sont les seuls pays qui ne reconnaissent pas l’égalité des hommes et des femmes »
Je ne développerai pas cette polémique concernant la provenance des agresseurs. Pour l’instant il semblerait plutôt qu’il viendrait  du Maghreb et donc de ces bandes mafieuses évoquées ci-avant.
Mais après ce malaise de se dire qu’après 25 jours on ne sait toujours pas précisément ce qui s’est passé, c’est-à-dire qui l’a fait ? Pourquoi ? Y a-t-il eu préméditation ? Quel était l’objectif ?
Il y a un second malaise, c’est pourquoi ce silence ? Pourquoi les autorités n’ont-ils rien dit ?
Alors l’explication paraît évidente : les autorités ne voulaient pas stigmatiser les réfugiés !
Ils avaient peur, parce que quelques-uns avaient commis des « mauvais actes » la population pouvait vouloir se retourner contre tous.
Peut-être.
Constatons que c’est raté. Le fait de n’avoir rien dit rend la situation beaucoup plus dangereuse : « Ils nous l’ont caché ! Qu’est ce qu’il nous cache d’autre ? »
Mais l’explication principale n’est-elle pas le fait qu’il s’agit de violences faites aux femmes ?
Marianne Meunier, journaliste à la Croix et invité des matins de France Culture a expliqué : « Les évènements  de Cologne ont entrainé des révélations en Suède. L’extrême droite a pris ce prétexte pour expliquer que ce sont ses noires prévisions qui se sont réalisés : l’afflux de personnes qui ne respectent pas nos standards de vie. Mais d’autres qui sont des associations féministes rapportent que la violence faite aux femmes n’est pas seulement le fait des émigrés. C’est une expérience quotidienne et beaucoup plus récurrente qu’éprouve les femmes en Europe et pas seulement à  Cologne. »
Vous en avez entendu parler ?
La violence faite aux femmes c’est moins grave, semble-t-il !
Si cela est arrivé, c’est qu’elles ont été imprudentes et autres explications scandaleuses !
Véronique Nahoum-Grappe fustige ces attitudes :
 « Fureur ! Fureur de fond !
Parce que cela touche à la liberté, à la liberté de sortir, le soir entre copines !
[…] je suis sidéré par ce silence.
Parce qu’on ne veut pas dire du mal sur ces personnes sur ces migrants, parce que ça gène.
Ne parlons pas de ce qui dérange ! Restons politiquement correct !
Parce que ces violences sont faites aux femmes on peut les cacher ?
Ça c’est inouï !
Ce silence montre que les violences faites aux femmes ne sont jamais perçues aussi violentes que celles qui sont commises à l’égard d’autres groupes ! »
Oui je crois profondément que c’est une des raisons du silence et aussi du peu d’empressement pour intervenir et enquêter sur ces évènements.
La maire de Cologne, une femme ! a immédiatement donné des conseils qui laissaient entendre qu’il fallait être plus prudent…
Quand ce sont des violences faites aux femmes, il y a toujours un peu de la responsabilité de la fille d’Eve …
Fureur ! fureur oui !
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Lundi 30 mars 2015

Lundi 30 mars 2015
«Le gouvernement des émotions»
Pierre Le Coz

Pierre Le Coz est professeur de philosophie et dirige le département des sciences humaines de la Faculté de médecine de Marseille. Il a publié en 2014 un livre : «Le gouvernement des émotions»

Cette réflexion sur les émotions telles que la compassion, la peur, l’angoisse, l’indignation ou la complaisance morbide immergées dans un bain médiatique me paraît particulièrement appropriée à la fin d’une semaine d’hystérie médiatique autour d’un acte meurtrier produit probablement par un déséquilibré isolé et extrêmement rare.

Ainsi, sur tous les médias on n’entendait plus que cette histoire mille fois répétée, avec un ton anxiogène et l’impression que c’était devenu le problème le plus important de l’Humanité : comment éviter qu’une personne prise de folie meurtrière et suicidaire, aux commandes d’un avion, puisse le détruire avec tous ses passagers.

Dans l’émotion certains ont pris immédiatement des mesures : Il faut une deuxième personne dans le cockpit.

Un commandant de bord a expliqué combien cela apparaissait délirant :

On allait imposer une contrainte qui dans 99,9999% des cas est inutile.

Et si dans le cockpit le pilote ou celui qui le surveille ont décidé de faire cet acte insensé, il dispose d’une hache qui se trouve dans l’habitacle, pour sans crier gare, exécuter d’abord l’empêcheur de leur acte  puis réaliser exactement le même délire. Et même sans la hache, d’autres moyens existent pour neutraliser l’autre.

En outre, on peut estimer qu’il y a dans ce cas un double risque : dans un groupe de deux personnes il y a rationnellement deux fois plus de chance qu’il y ait un fou que dans un singleton.

Il y a même un journaliste qui a émis cette idée géniale qu’on pourrait prévoir un  système qui permette de prendre les commandes de l’avion à distance. Donc pour répondre à un risque extrêmement faible on ouvrirait une possibilité à des milliers de hacker, pour qui ce serait évidemment un défi exaltant de parvenir à prendre le contrôle d’un avion en vol pour jouer, obtenir une rançon ou plus brutalement perpétrer un acte terroriste.

Tout cela alors que, contrairement à l’impression que les médias peuvent donner : l’aviation  civile entraîne de moins en moins de morts chaque année bien qu’il y ait de plus en plus de personnes qui prennent l’avion.

Vous prenez beaucoup plus de risque, quand vous prenez chaque matin votre voiture. Mais ce raisonnement est rationnel.

L’émotion permet la manipulation et entraîne des réactions souvent peu pertinentes comme le montre cette fausse bonne idée de doubler les personnes présentes dans le cockpit.

L’émotion de celles et ceux qui sont touchés par ce drame est naturelle et digne de compassion, mais l’émotion planétaire que veulent déclencher les médias n’est en aucune façon guidée par l’intérêt public ou la noblesse des sentiments. C’est uniquement un évènement qui leur permet de « faire de l’audience et donc du fric » alors que leur rôle devrait être de prioriser l’information pour l’intérêt de tous.

Et les politiques ! Que viennent faire dans ce lieu de l’émotion légitime des familles, le président français, la chancelière allemande et le premier ministre espagnol. Ils sont élus pour nous préparer au monde de demain, aux bouleversements que va créer dans l’économie les problèmes écologiques terribles qui sont prégnants, un monde où l’automatisation de plus en plus intense des processus intellectuels vont conduire à un monde avec de moins en moins d’emplois, sans compter un monde de vieux en trop grand nombre pour les capacités de nos systèmes sociaux. Et sur tous ces sujets ils sont absents, constants dans leurs recettes anciennes qui ne sont plus adaptées au monde d’aujourd’hui et de demain.

Face à leur vacuité devant les problèmes vraiment importants, ils se réfugient dans un rôle d’assistants psychologues pour drames médiatisés !

Et que dire du Ministre de l’intérieur qui débarque dans cet endroit pour annoncer devant la presse, (toujours la presse !) qu’il allait coordonner l’ensemble des services de sécurité et de secours.

Il n’y a pas de préfet ? Ce haut fonctionnaire est devenu incompétent ? Le ministre de l’intérieur va s’installer pendant 5 jours dans les Alpes de Haute Provence pour remplacer le préfet ?

Ecoutez donc Pierre Le Coz dans cette émission de France Inter : <La tête au carré : le gouvernement des émotions>

Sur la page de cette émission on peut lire la débauche «d’excitations sensorielles soulève des enjeux éthiques majeurs. Car, quand nos émotions sont dévoyées, ce sont nos jugements de valeur qui se trouvent pervertis.»

Ou plus court cette vidéo de 4 minutes : <Le gouvernement des émotions – Pierre Le Coz> . Il dit notamment que

« L’émotion a toujours été le cheval de Troie de toutes les manipulations»

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Mardi 13 janvier 2015

Mardi 13 janvier 2015
« Dans un pays comme la France, je ne pense pas que les passions soient solubles dans l’Économie»
Bernard Maris
Dans l’émission ce soir ou jamais de Frédéric Taddeï du 07/11/2014 ayant pour thème : « L’entreprise peut-elle sauver la France ? »
J’aimais Bernard Maris. C’était un économiste pédagogue et encore beaucoup plus rare un économiste drôle.
Il était aussi humaniste et d’une érudition extraordinaire.
Je tire le mot du jour d’une émission de télévision d’il y a deux mois où l’économiste qu’il était, se changeait en philosophe pour dénoncer la vacuité de la pensée économique contemporaine :
« [l’économie] est une nouvelle morale.
Contrairement à ce qu’on croit, c’est une morale très dure.
[C’est une suite d’injonctions]
Tu dois être compétitif !
Tu dois être concurrentiel !
Tu dois marcher sur les autres !
Tu dois être dans la compétition de tous contre tous !
Et malheureusement surtout dans un pays comme la France, je ne pense pas que les passions soient solubles dans l’Économie
Que les passions soient solubles dans des taux de croissance ou des demi points de plus ou de baisse du taux de chômage.
Ce qui signifie que cette nouvelle morale, cette nouvelle religion, l’Économie, conduit à ce qu’il n’y a de vérité qu’économique
On ne parle plus que de cela.
[Cela] risque d’être désastreux à terme parce qu’on sera bien déçu une fois qu’on aura déshabillé l’économiste et l’économie, cette soit disant création de la richesse, création de valeur.
Car l’Économie crée de la richesse !
Personne ne se pose la question de ce que signifie « la richesse. »
On [croit] que désormais la richesse n’appartient plus qu’aux entreprises.
Il y a d’autres façons de voir la richesse.
Quand on verra que cette richesse est une pseudo richesse, qu’on verra que le roi est nu comme dans le conte, je pense que les passions vont se réveiller et des passions relativement mauvaises.
Et je pense que l’une des raisons [du renouveau] de certains nationalismes, de vieilles passions, de vieilles rancœurs tristes [se trouve dans le fait] que l’économie a pris le pas sur tout autre forme de discours.
Vous n’êtes plus qu’un taux de rentabilité, vous n’êtes plus qu’un chiffre dans des graphiques qui sont dressés par des gens qui ne sont pas très compétents.
Mais ce n’est pas ça, la vie d’une société !»
Vous trouverez ce propos ainsi que d’autres notamment de Régis Debray dans la vidéo ci-après : <Extrait de ce soir où jamais d’où est tiré le mot du jour> [à partir de 19:55]
Bernard Maris a participé à de nombreuses émissions et notamment pendant 7 ans au débat économique sur France Inter le Vendredi matin avec un économiste, moins drôle et plus orthodoxe ; Dominique Seux directeur de la rédaction des Echos.
C’était une émission de mon panel de podcasts que j’écoutais chaque semaine.
Ce vendredi 9 janvier, le débat n’a pas eu lieu, Bernard Maris est tombé sous les balles des fanatiques avec ses copains de Charlie. France Inter a remplacé le débat par une émission hommage : http://www.franceinter.fr/emission-le-debat-economique-hommage-a-bernard-maris
Un des extraits de cette émission montrait sa vision de l’Economie :
« C’est du jargon, c’est de la rhétorique, ce n’est pas de la science, c’est un peu de statistiques, c’est beaucoup de psychologie et pas mal de bavardages »
A la fin de cette hommage vous entendrez un extrait d’une chanson hilarante mais sérieuse enregistrée par Bernard Maris avec ses potes de Charlie Hebdo, dans lequel il écrivait sous le nom célèbre d’Oncle Bernard.
Derrière ce lien la version intégrale de <La Messe du CAC de Bernard et de Charlie Hebdo>
Bernard Maris avait 68 ans. Il était le fils de Républicains espagnols émigrés en France. Après de brillantes études d’économie, et une thèse en 1975, il avait suivi le cursus honorum qui devait le mener au poste de professeur. Il a publié des livres dont le titre est déjà un programme : Ah Dieu ! Que la guerre économique est jolie ! (en 1998), ou Lettre ouverte aux gourous de l’économie qui nous prennent pour des imbéciles (en 1999). Il fut  aussi l’auteur de  l’Antimanuel d’économie.
Depuis son assassinat, j’ai appris qu’il avait épousé en 2007, la fille de Maurice Genevoix, Sylvie Genevoix décédé d’un cancer en 2012.
Et une information qui n’avait pas été révélée jusque-là : il était franc maçon dans la même loge que Jean-Luc  Melenchon au Grand Orient de France (GODF).
Il aurait aussi dit : »Moi qui suis de gauche et athée, il n’y a aucune chance que je me retrouve à la Droite de Dieu>
Le rire est la meilleure part de l’humain
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Lundi 12 janvier 2015

Lundi 12 janvier 2015
« Le rire libère de la peur du diable, […]
Le rire distrait, quelques instants de la peur.
Mais la loi s’impose à travers la peur, dont le vrai nom est crainte de Dieu. […]
Et que serions nous, nous créatures pécheresses, sans la peur, peut être le plus sage et le plus affectueux des dons divins ? »
« Jorge de Burgos »
Le nom de la Rose, Septième jour : Nuit
Umberto Ecco

Vous avez probablement vu le film « Le nom de la Rose » et peut être, même mieux, lu le livre d’Umberto Ecco.

Vous vous souvenez que le moine Guillaume de Baskerville (joué dans le film par Sean Connery) enquêtait sur des morts suspectes de moines dans une abbaye bénédictine.

Au bout de son enquête, il se rend compte que ces moines étaient morts empoisonnés parce qu’ils avaient lu un livre de la bibliothèque et que les pages qu’ils tournaient après avoir mouillé leur doigt avaient été enduites de poison par le bibliothécaire aveugle de l’abbaye : Jorge de Burgos.

Le livre dont il s’agissait était le second tome « de la Poétique d’Aristote » qui faisait un éloge du rire.

Le mot du jour est la réponse du moine chrétien fanatique à la question  de Guillaume de Baskerville :

« Mais qu’est-ce qui t’a fait peur dans ce discours sur le rire ? »

Les religions totalitaires et le totalitarisme de tout bord n’aiment pas le rire.

Le rire libère de la peur.

Le rire est une force, une résistance aux certitudes, un appel permanent au doute.

Le totalitarisme ne s’y trompe pas, celui qui rit conteste, ne croit pas ce qu’on lui dit, ce qu’on veut lui imposer.

Les soviétiques avaient développé toute une batterie de blagues pour supporter le régime totalitaire :

« Je fais semblant de travailler, pour que l’Etat puisse faire semblant de me payer ».

Ou encore plus sarcastique dans un camp du goulag :

« Tu as été condamné à combien ?
– 5 ans !
– Et tu as fait quoi ?
– Mais je n’ai rien fait, rien !
– Ça, ce n’est pas possible, quand on n’a rien fait c’est 3 ans ! ».

Et puis sur un autre plan je vous engage à regarder cette vidéo : <Nasser parle de son entretien avec les frères musulmans>

Cette vidéo montre Nasser lors d’un meeting politique expliquer qu’il a voulu discuter avec les frères musulmans, c’est à dire les salafistes, pour les associer au pouvoir. Et quand il dit que leur première exigence est que « nos femmes sortent dans la rue voilées » vous entendez, la salle qui éclate de rire.

Tout est dit. Il ne peut exister de réponse plus forte que ça. C’est beaucoup plus fort que si la salle criait « NON ». Vous pouvez écouter la suite de la vidéo, édifiant. Il faudrait pourvoir la comparer avec un meeting des frères musulmans.

Et le rire qui est joie, dédramatise aussi.

Dans ma modeste expérience, quand parfois, c’est plus dur au quotidien parce que mon corps est meurtri par des thérapies qui sont utilisées pour guérir un mal plus grand, c’est l’amour de mes proches, la musique qui apaise mais aussi l’humour et le rire qui redonnent force de vie et volonté de continuer le chemin, la tête haute.

C’est le rire qu’on a assassiné le 7 janvier dans les locaux de Charlie Hebdo, parce que le rire est insupportable à certains, parce qu’il libère de la peur comme dit le personnage d’Ecco et que cela ce n’est pas possible pour ceux qui veulent imposer une loi totalitaire pour tous.

Tous les dessins de Charlie Hebdo ne m’ont pas fait rire.

Mais aujourd’hui  je défends sans aucune restriction Charlie Hebdo, son droit de faire rire, de pratiquer la dérision.

Et puis le mot du jour insiste sur l’addiction des totalitarismes à la peur et c’est bien par la peur que ces fanatiques et les intellectuels qui les inspirent veulent imposer leur loi, leurs idées, leur vision du monde et de la société.

Charb a dit « je préfère mourir debout que vivre à genoux. » et il a ajouté  « L’humour est un langage que les intégristes ne comprennent pas. Eux s’appuient sur la peur. (…) Je n’ai pas l’impression d’égorger quelqu’un avec un feutre. Je ne mets pas de vies en danger. Quand les activistes ont besoin d’un prétexte pour justifier leur violence, ils le trouvent toujours. »

<Les inrocks ont repris cette interview>

Charb qui était en train d’écrire un livre contre l’islamophobie.

Je m’incline devant ce héros et les autres qui étaient avec lui.

Les manifestations de ce dimanche sont une grande réponse du peuple français à cette tentative de faire peur.

Mais n’oublions pas de rire, même si quelquefois ce sont les larmes qui submergent.

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Mercredi 7 janvier 2015

Mercredi 7 janvier 2015
«Mot de jour spécial»
Jour de l’attentat de Charlie Hebdo
Hommage à Cabu
Cabu est mort à 75 ans avec 9 autres journalistes ou salariés de Charlie Hebdo et 2 policiers qui devaient les protéger,sous les balles d’armes de guerre de deux fous fanatiques
Je suis en congé mais je sors de mon silence pour cet hommage.
Et en réaction à ce crime contre nos libertés
<mot sans numéro>

Mardi 03/06/2014

Mardi 03/06/2014
« Un enfant pleure,
devant lui, dans son assiette,
un ballon de foot a remplacé les aliments »
Paulo Ito
En réalité, le mot du jour est un dessin ou plutôt une fresque d’un artiste à Sao Paulo : Paulo Ito
La coupe du monde de football va commencer dans 10 jours.
Parmi les destinataires du mot du jour, il y a des passionnés de football, d’autres qui sont très hostiles à ce sport qui consiste à faire payer très cher à des gens modestes le droit d’aller regarder des millionnaires courir après un ballon, et il y a aussi des indifférents.
Tout le monde se retrouvera en revanche derrière la dénonciation du coût exorbitant de ce mondial au Brésil alors que les brésiliens ont tellement de besoins non satisfaits.
Ce dessin en dit plus que de nombreux discours.
Par exemple, il était demandé au Brésil de disposer de 8 stades, mais les autorités ont décidé d’en avoir 12 comme par exemple un stade au cœur de l’Amazonie qui a été entièrement construit dans une ville qui ne dispose d’aucun club en première division, alors que 90% de la population n’a pas accès au tout-à-l’égout.
Mais les brésiliens protestent de plus en plus vigoureusement comme le montre l’article de Mediapart joint et n’en déplaise à notre Platini national qui leur conseille de se taire pour ne pas gâcher la fête et de protester après la compétition. <Ici avec les commentaires de la presse Belge>
Pour les connaisseurs de football et d’Histoire, il faut reconnaître qu’il y a du progrès : en 1976 lors de la coupe du monde en Argentine, il n’y avait pas de manifestations sous la dictature militaire du sinistre Videla. D’ailleurs Platini y a participé en tant que joueur. C’est peut-être ce souvenir, qui le conduit, aujourd’hui, à considérer des manifestations avant le mondial comme incongru.
Au Brésil, en 2014, au moins il y a la démocratie et des brésiliens peuvent dire leur mécontentement et leur désaccord avec les priorités mis en œuvre.
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