Lundi 29 février 2016
« Tout le monde trouve Google cool »
Andréa Fradin, journaliste indépendante
Je vais tenter cette semaine de proposer des mots du jour sur les GAFA en général (GAFA = Google, Apple, Facebook, Amazon) et plus particulièrement sur Google qui semble toujours avoir une longueur d’avance.
Google Inc. s’est restructuré pendant l’été 2015 et a annoncé lundi 10 août 2015 la naissance d’ « Alphabet » qui est désormais la holding qui chapeaute toutes les activités de ce géant.
Wikipédia nous apprend qu’un alphabet (de alpha et bêta, les deux premières lettres de l’alphabet grec, dérivé de l’alphabet phénicien) est un ensemble de symboles destiné à représenter plus ou moins précisément les phonèmes d’une langue.
Cela signifierait-il que l’ambition de cette entreprise est de devenir l’alphabet de notre vie ?
Cette restructuration nous rappelle que Google n’est pas qu’un moteur de recherche, une messagerie, ou un réseau social. C’est une entreprise de plus de 53 000 salariés qui travaillent aussi à la création et au développement de voiture sans chauffeur, ou de remèdes contre des maladies graves. Tout comme Facebook ou Amazon. Et pour rassurer les investisseurs, il était nécessaire de distinguer le moteur de recherche qui avec la publicité génère les grands profits de Google et les autres branches qui sont dans des domaines médicaux, de robotiques ou d’intelligence artificielle plus risqués.
Le mot du jour est le propos tenu par la journaliste Andréa Fradin lors de l’émission du grain à moudre en parlant de la présentation de cette restructuration et de la création d’ « Alphabet ».
Plus précisément, elle a dit : «tout le monde trouve Google cool, je trouve ça horrible».
Parce que pour faire « fun » Google s’est référé à une boite virtuelle qui existe dans une série américaine « Silicon Valley » créé par HBO. Cette boite « Hooli » a, dans la série, un comportement parfaitement répréhensible et prédateur. Mais quand Google se compare à cette boite horrible, tout le monde trouve ça cool ! Vous trouverez ici des explications d’André Fradin plus fournies sur cette référence étonnante.
Il est vrai que lorsque je saisis dans le moteur de recherche « Google est »
La première réponse qui est suggérée : c’est que Google est ton ami.
La seconde est google est nul. Sens de l’autodérision probablement…
Comme l’explique déjà cet article déjà de 2010 :
«Google n’est pas seulement devenu en un temps record un mastodonte de l’économie mondiale. Il incarne la troisième révolution industrielle, celle du numérique. Entreprise postmédias, postidéologique et postcapitaliste, Google est le nouveau monde qui remplace l’ancien […].
Quand avez-vous pour la première fois « googlelisé » le nom de la nouvelle copine de votre ami d’enfance avant de les inviter à dîner tous les deux ? Ou celui de votre nouveau patron pour vous informer de ses antécédents ? Ou encore d’Isabelle Adjani pour vérifier son âge ? Quand avez-vous pour la première fois utilisé Google Earth ? Ouvert un compte Gmail ? Souvenez-vous : c’était il n’y a pas si longtemps. Et pourtant une éternité.
En à peine douze ans, Google s’est imposé dans nos vies, notre vocabulaire, nos yeux, nos cerveaux, notre façon de voir le monde. « Le terme “googleliser” est le premier néologisme de l’Histoire à figurer une action et non plus un simple objet », fait remarquer Stéphane Distinguin, qui a présenté La Méthode Google, du journaliste américain Jeff Jarvis. Le Times a parlé, à propos de Google, de « l’entreprise au développement le plus rapide de l’histoire du monde
97 % des recettes de Google proviennent en effet de la publicité. Une « Contre-enquête » du journal Le Monde, en avril 2010, résume assez bien le procédé : « Le groupe vend des mots-clés aux annonceurs, via un système d’enchères. Si ces mots-clés font l’objet d’une recherche (de la part de l’internaute), leur lien publicitaire apparaît au-dessus ou à droite des résultats “naturels” de la recherche. » Ainsi, Google rassemble des sommes microscopiques multipliées à l’infini, puisque tout mot au monde, et ce dans toutes les langues, est à vendre. Son système de relevé des compteurs est simplissime : l’annonceur en question n’a qu’à se connecter sur AdWords, la régie pub de Google, et s’y enregistrer. ».
Mais la description la plus « juste » est celle de Michael Malone, du Wall Street Journal qui décrit en ces termes « ton ami » dans l’excellent documentaire de Gilles Cayatte, « Google, la machine à penser » :
«Il y a un paradoxe dans Google. Le service est gratuit, le nom est sympa, c’est plein de jeunes, c’est branché.
C’est synonyme d’« ’éclate », de contre-culture
Mais en fait quand vous lisez les journaux, le Google que vous découvrez n’est pas le Google de votre imagination. Ce Google-là est énorme.
Il domine tous les secteurs qu’il a pénétrés. Il est en train d’avaler l’ensemble du monde de la publicité, morceau par morceau.
En Chine il a cédé au gouvernement sur la censure.
Il ressemble à un énorme prédateur mais dans votre esprit c’est Google ! »
Et voilà l’organigramme simplifié d’Alphabet :
C’est bien d’avoir un ami aussi riche et innovant !
Toutefois ne sommes nous pas la proie et ne sommes-nous pas en train d’aimer le prédateur ?
Et ce qui serait vraiment cool, c’est que Google paie ses impôts dus à la France : La DGFiP vient de réclamer 1,6 milliards à Google.
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