Mardi 31 mars 2015

Mardi 31 mars 2015
«La mafia des tutelles»
Valérie Labrousse
Valérie Labrousse est une journaliste qui après huit années d’enquête a publié un livre sur les personnes placées sous tutelle judiciaire.
Le mot du jour est un extrait du titre de ce livre «les Dépossédés, enquête sur la mafia des tutelles»
Un article du Nouvel Obs : <Spoliation, violence, déshumanisation: le cauchemar des tutelles> présente ce livre.
Je vous en livre quelques extraits, si vous ne voulez pas lire l’article dans son entier :
«Un tuteur malhonnête ou négligent, qu’il travaille dans un hôpital, une association, ou qu’il exerce en libéral, agit toujours avec la complicité active ou passive des «charognards de la tutelle» écrit l’auteur, notaire, marchand immobilier ou commissaire priseur, juge et autre directeur de pompes funèbres.
Tout un petit monde susceptible de prendre sa part de marché tutélaire, cet «or gris» si facile à ramasser, et encore plus si un médecin vient poser un diagnostic de paranoïa, coupant court à toute protestation. Siphonage d’une assurance-vie, maison de famille revendue à des prix sans rapport avec ceux du marché, vol de meubles : aucune statistique à ce jour sur cette pagaille lucrative.
Dans ce mal contemporain, qui s’abat sur l’handicapé psychique à qui on «oublie» de verser son pécule de survie comme sur le vieillard maltraité en maison de retraite, que son protecteur officiel ne défendra pas dans un réflexe de soutien à l’institution, Valérie Labrousse, en lectrice attentive d’Hannah Arendt, entrevoie les symptômes de la banalité du mal – servilité, relativisme de l’horreur, refus du jugement moral et rationalisme bureaucratique sur fond d’indifférence à la souffrance de l’autre.
[…L’article donne un extrait concernant ] une vieille dame de quatre-vingt-huit ans qui vient d’appeler au secours un collectif luttant contre les abus tutélaires.
Un certain Gilles B serait venu frapper à sa porte, se prétendant envoyé par la SPA. L’association est propriétaire du studio qu’elle occupe, rue Jean Goujon, dans le 8e arrondissement de Paris. Il aurait tenté de l’intimider, affirmant qu’il voulait absolument «récupérer le bien», qu’elle devait déguerpir. La voilà menacée d’expulsion, elle déjà si seule face à de grandes difficultés financières depuis la mort de son mari, Georges, qui était expert agronome, notamment pour le compte de l’Unesco.
Quelques jours plus tôt, elle s’est rendue au service social de la mairie afin qu’on l’aide à obtenir la pension de réversion de Georges et depuis, plus encore que la précarité, elle craint d’être mise sous tutelle. Cela semble en prendre le chemin. Deux femmes, sans doute des assistantes sociales, se sont déjà présentées à son domicile…
C’est, en général, ainsi que tout commence. Solitude, vieillesse, incurie aboutissent à un signalement sous la forme d’un rapport d’enquête des services sociaux. Il est adressé au parquet puis au juge des tutelles qui siège au Tribunal d’instance.
Sur la base de ce rapport et d’un certificat médical établissant que l’individu concerné n’a plus la faculté suffisante pour pourvoir seul à ses intérêts, le juge des tutelles peut prononcer une décision de protection juridique: une mesure d’urgence appelée mandat spécial, une tutelle, ou bien encore une curatelle. Puis il désigne un mandataire pour assister la personne ou la représenter. […]
Je m’aperçois vite que le système se défend avec rage. Que les abus sont relégués de «regrettables exceptions», imputés à la saturation des tribunaux. Comme si cela pouvait justifier l’étendue des spoliations, des maltraitances, ou expliquer leur récurrence systémique. Je me heurte au silence des pouvoirs publics, ministère de la Justice en tête. Je découvre un monde secret où soit on ne me répond pas, soit on me refuse des documents a priori anodins.
D’un côté l’omerta. De l’autre la souffrance. Depuis huit ans que je plonge dans les abysses des tutelles, j’entends la même histoire, pour chacun si singulière: «Je ne sais pas où sont mes meubles, le tuteur a épuisé mes économies, le juge m’a dit que c’était quelqu’un de très bien. Je ne l’ai vu que quelques minutes. Il m’a grondé. Je suis logé dans un foyer. Le médecin ne m’a pas cru. C’est moi qui suis fou. L’assistante sociale m’avait dit qu’elle allait m’aider… Du jour au lendemain, je n’avais plus de quoi m’acheter à manger, le tuteur ne me donnant aucun argent pour vivre… L’avocat m’a dit qu’il ne voulait pas attaquer le tuteur. C’est trop compliqué. Et puis ça ne sert à rien… On ne peut pas attaquer la justice…»
Autant de drames, et toujours le même scénario: une dépossession progressive et totale, depuis la volatilisation du mobilier, la vente du bien immobilier et l’expulsion du domicile, les humiliantes demandes d’un pécule de survie, et l’«incarcération» en maison de retraite… Avec aussi, la neutralisation de celui qui entend soutenir sa mère ou son ami contre la violence du système.
C’est toujours la même histoire perverse et sophistiquée où la victime, coupable d’être trop vulnérable, se retrouve maltraitée au lieu d’être protégée, déniée dans la reconnaissance de sa souffrance et dans ses droits par ceux-là même qui devraient les lui garantir et qui sont: le médecin pressé au diagnostic péremptoire et la justice méprisante.»
ou mieux le livre :

Lundi 30 mars 2015

Lundi 30 mars 2015
«Le gouvernement des émotions»
Pierre Le Coz

Pierre Le Coz est professeur de philosophie et dirige le département des sciences humaines de la Faculté de médecine de Marseille. Il a publié en 2014 un livre : «Le gouvernement des émotions»

Cette réflexion sur les émotions telles que la compassion, la peur, l’angoisse, l’indignation ou la complaisance morbide immergées dans un bain médiatique me paraît particulièrement appropriée à la fin d’une semaine d’hystérie médiatique autour d’un acte meurtrier produit probablement par un déséquilibré isolé et extrêmement rare.

Ainsi, sur tous les médias on n’entendait plus que cette histoire mille fois répétée, avec un ton anxiogène et l’impression que c’était devenu le problème le plus important de l’Humanité : comment éviter qu’une personne prise de folie meurtrière et suicidaire, aux commandes d’un avion, puisse le détruire avec tous ses passagers.

Dans l’émotion certains ont pris immédiatement des mesures : Il faut une deuxième personne dans le cockpit.

Un commandant de bord a expliqué combien cela apparaissait délirant :

On allait imposer une contrainte qui dans 99,9999% des cas est inutile.

Et si dans le cockpit le pilote ou celui qui le surveille ont décidé de faire cet acte insensé, il dispose d’une hache qui se trouve dans l’habitacle, pour sans crier gare, exécuter d’abord l’empêcheur de leur acte  puis réaliser exactement le même délire. Et même sans la hache, d’autres moyens existent pour neutraliser l’autre.

En outre, on peut estimer qu’il y a dans ce cas un double risque : dans un groupe de deux personnes il y a rationnellement deux fois plus de chance qu’il y ait un fou que dans un singleton.

Il y a même un journaliste qui a émis cette idée géniale qu’on pourrait prévoir un  système qui permette de prendre les commandes de l’avion à distance. Donc pour répondre à un risque extrêmement faible on ouvrirait une possibilité à des milliers de hacker, pour qui ce serait évidemment un défi exaltant de parvenir à prendre le contrôle d’un avion en vol pour jouer, obtenir une rançon ou plus brutalement perpétrer un acte terroriste.

Tout cela alors que, contrairement à l’impression que les médias peuvent donner : l’aviation  civile entraîne de moins en moins de morts chaque année bien qu’il y ait de plus en plus de personnes qui prennent l’avion.

Vous prenez beaucoup plus de risque, quand vous prenez chaque matin votre voiture. Mais ce raisonnement est rationnel.

L’émotion permet la manipulation et entraîne des réactions souvent peu pertinentes comme le montre cette fausse bonne idée de doubler les personnes présentes dans le cockpit.

L’émotion de celles et ceux qui sont touchés par ce drame est naturelle et digne de compassion, mais l’émotion planétaire que veulent déclencher les médias n’est en aucune façon guidée par l’intérêt public ou la noblesse des sentiments. C’est uniquement un évènement qui leur permet de « faire de l’audience et donc du fric » alors que leur rôle devrait être de prioriser l’information pour l’intérêt de tous.

Et les politiques ! Que viennent faire dans ce lieu de l’émotion légitime des familles, le président français, la chancelière allemande et le premier ministre espagnol. Ils sont élus pour nous préparer au monde de demain, aux bouleversements que va créer dans l’économie les problèmes écologiques terribles qui sont prégnants, un monde où l’automatisation de plus en plus intense des processus intellectuels vont conduire à un monde avec de moins en moins d’emplois, sans compter un monde de vieux en trop grand nombre pour les capacités de nos systèmes sociaux. Et sur tous ces sujets ils sont absents, constants dans leurs recettes anciennes qui ne sont plus adaptées au monde d’aujourd’hui et de demain.

Face à leur vacuité devant les problèmes vraiment importants, ils se réfugient dans un rôle d’assistants psychologues pour drames médiatisés !

Et que dire du Ministre de l’intérieur qui débarque dans cet endroit pour annoncer devant la presse, (toujours la presse !) qu’il allait coordonner l’ensemble des services de sécurité et de secours.

Il n’y a pas de préfet ? Ce haut fonctionnaire est devenu incompétent ? Le ministre de l’intérieur va s’installer pendant 5 jours dans les Alpes de Haute Provence pour remplacer le préfet ?

Ecoutez donc Pierre Le Coz dans cette émission de France Inter : <La tête au carré : le gouvernement des émotions>

Sur la page de cette émission on peut lire la débauche «d’excitations sensorielles soulève des enjeux éthiques majeurs. Car, quand nos émotions sont dévoyées, ce sont nos jugements de valeur qui se trouvent pervertis.»

Ou plus court cette vidéo de 4 minutes : <Le gouvernement des émotions – Pierre Le Coz> . Il dit notamment que

« L’émotion a toujours été le cheval de Troie de toutes les manipulations»

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Vendredi 27 mars 2015

« Une théorie qui n’est réfutable par aucun événement qui se puisse concevoir est dépourvue de caractère scientifique. »
Karl Popper

Récemment j’ai assisté à la fin d’une discussion entre deux jeunes filles où l’une des deux avait cet argument définitif :

« Tu ne peux pas le contester, c’est scientifique ! »

C’est « scientifique » était, dans son esprit, la meilleure manière de clore la discussion.

Puisque c’est scientifique, il n’y a rien à ajouter, c’est la Vérité !

Et bien cette formule est une ânerie et ne vaut guère mieux qu’une autre formule entendue souvent :

« C’est vrai, puisqu’ils l’ont dit à la télé ! »

Il y a en effet, une idée absolument fausse qui consiste à croire que la démarche scientifique c’est élaborer conceptuellement une hypothèse et la vérifier par des expériences.

Karl Popper (1902-1994), philosophe de la science a montré que la seule démarche scientifique possible consiste à pratiquer des expériences susceptibles de montrer qu’une théorie est fausse.

Ce qui signifie qu’une théorie scientifique n’est jamais exacte mais simplement la plus satisfaisante, à un moment donné, parce qu’on n’est pas encore arrivé à la réfuter, c’est à dire à prouver qu’elle était fausse.

Cette réalité ne peut rendre que le scientifique modeste et la science respectable.

Ce qui n’est pas toujours le cas, notamment dans le monde médical.

Pour Popper, la démarcation entre « la science » et la « non science » est justement la capacité de concevoir et de pouvoir réaliser des tests capables de réfuter une théorie.

Si de tels tests existent, nous sommes dans le domaine de la science, sinon nous n’y sommes pas.

Cette introduction pour partager avec vous, une conférence que m’a indiquée, il y a plusieurs mois mon ami Didier et où ce remarquable pédagogue qu’est Hubert Reeves illustre parfaitement la démarche scientifique :

Il nous explique qu’on n’est pas sûr que la théorie du big bang soit la bonne et il nous donne l’ensemble des observations et des tests (11) qui ont été réalisés et qui étaient en mesure de la réfuter.

Or pour l’instant, aucune de ces observations ou tests ne l’a réfutée.

Elle est donc la meilleure, pour l’instant car on n’a pas pu prouver qu’elle était fausse !

<La crédibilité de la théorie du big bang par Hubert Reeves>

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Jeudi 26 mars 2015

Jeudi 26 mars 2015
« Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB)»
Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures  créée par la Chine
Le 18 mars 2015 le ministre Fédéral des Finances Allemand a publié cette annonce très officielle : « La France, l’Italie et l’Allemagne ont annoncé le 17 mars 2015 leur intention de devenir membres fondateurs de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (AIIB).
Cette nouvelle banque d’investissement, qui aura vocation à travailler en partenariat avec les banques multilatérales d’investissement et de développement existantes, pourra jouer un rôle important dans le financement des infrastructures dont l’Asie a un besoin majeur. L’AIIB participera ainsi au développement économique et social de la région et contribuera à la croissance mondiale.
La France, l’Italie et l’Allemagne, en étroite collaboration avec leurs partenaires internationaux et européens, sont désireuses de s’associer aux membres fondateurs de l’AIIB pour travailler à la création d’une institution respectueuse des meilleures pratiques en termes de gouvernance, de sécurité, de prêts et de marchés publics.»
La semaine précédente : la Grande-Bretagne avait exprimé son intention de rejoindre l’AIIB. Cette décision avait suscité, le mécontentement, et ce mot est peut être faible, de Washington.
Vous trouverez en pièce jointe un article du Monde qui détaille l’importance géostratégique, au niveau financier, de ces évolutions.
C’est un pas de plus qui fait basculer le centre du Monde des Etats-Unis vers la Chine. Le centre est encore, pour l’instant, plus près des Etats-Unis que de la Chine, mais il s’éloigne de l’un vers l’autre.
En résumé et en simplifiant de quoi s’agit-il ?
A la fin de la seconde guerre mondiale, les Alliés avec la prédominance des Etats Unis ont mis en place, par les accords de Bretton Woods de 1944 : un système financier mondial ayant pour objectif de réguler et de lutter contre les désordres financiers à l’échelle planétaire. De ces accords sont issus le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement (BAD). Ce système est contrôlé par les Occidentaux, qui en détiennent les principales parts de vote et les postes clés. Traditionnellement, la Banque mondiale est dirigée par un Américain, le FMI par un Européen, la BAD par un Japonais.
Evidemment si on met ce classement au regard du PIB en 2015 (en milliards de dollars) : USA 18 287, Chine 11 285, Japon 4 882, Allemagne 3 909, Royaume-Uni 3 003, France 2 935, on constate qu’il y a un problème.
Les pays émergents, et les Chinois en particulier, ont contesté cette domination, qui ne correspond plus à la réalité du poids économique des uns et des autres et des ajustements ont été négociés et une meilleure représentation de la Chine a été adoptée.
Mais cette réforme est, depuis, bloquée au Congrès américain par le Parti républicain dont la stupidité contre-productive pour le leadership américain ne sera jamais assez dénoncée. Car après avoir donné aux Etats Unis un président (GW Bush) qui a installé le chaos dans la Mésopotamie, il a invité au Congrès américain, sans en informer le président Obama, le premier ministre Israélien en pleine campagne électorale, venir contester la politique internationale des États-Unis à l’égard de l’Iran. Inimaginable !
Toujours est-il que la Chine a manifesté son impatience et a créé une banque concurrente : l’AIIB
Je cite le « Monde » 
« Ainsi, l’AIIB peut être vue comme une réplique de la BAD. A une différence près, et elle est de taille : les Japonais ne contrôlent que 15,7 % des parts de la BAD, à peine plus de 30 % si l’on ajoute celles des Américains. La Chine, elle, contrôlera 49 % des parts de l’AIIB. Sous l’appellation multilatérale, l’AIIB sera d’abord un outil chinois. […] La Chine n’en fait pas mystère : elle veut mettre ses énormes réserves financières au service de projets d’infrastructures (routes, ponts, ports, chemins de fer, aéroports, télécommunications) dont l’Asie a cruellement besoin pour se développer. Le président Xi a souvent exalté son projet de « nouvelle route de la soie » grâce auquel Pékin déploiera son savoir-faire et ses moyens jusque dans ce que les Chinois appellent l’Asie occidentale, que nous appelons, nous, le Moyen-Orient. L’un des premiers projets financés par l’AIIB devrait d’ailleurs être la ligne de chemin de fer Pékin-Bagdad.»
Bagdad, la capitale de l’Irak, centre de tous les tensions provoquées par l’intervention américaine ! Étonnant non ?
Le Monde change, les européens n’écoutent plus les injonctions américaines, mais ne sont-ils pas en train de devenir les vassaux des chinois ?

Mercredi 25 mars 2015

Mercredi 25 mars 2015
«Ne vous inquiétez pas, en Europe nous avons le système qui permet de ne pas tenir compte des élections.»
Propos d’un fonctionnaire européen rapporté par Raphael Glucksmann
Raphael Glucksmann vient de publier un livre « Génération gueule de bois » qu’il a écrit en réaction aux attentats de janvier en France.
Il était l’invité de Nicolas Demorand et a rapporté ce propos <http://www.franceinter.fr/emission-un-jour-dans-le-monde-linternationale-reactionnaire> un peu après 10mn du début de l’émission
Raphael Glucksmann est le fils du philosophe André Glucksmann. Il est aussi l’époux de Eka Zgouladze qui fut vice-ministre de l’intérieur en Georgie <Et qui depuis est devenu ukrainienne et membre du gouvernement ukrainien>.
Je prends toutes ces précautions, parce que je ne connais pas Raphael Glucksmann et qu’il y a quelques points de son parcours qui sont un peu « étrange »
La Géorgie est ce pays du Caucase qui a vu naître un de ces monstres qui se dispute avec quelques autres le titre de plus grand criminel de l’Histoire humaine je veux parler de Joseph Vissarionovitch Djougachvili connu sous le nom de « Staline ».
Toujours est-il que Raphael Glucksmann était conseiller du président de l’Etat de Géorgie, Mikheil Saakachvili, et son épouse était membre du gouvernement.
Dans l’émission il décrit Mikheil Saakachvili, comme un homme politique responsable qui a été battu aux élections par un candidat démagogue. Admettons.
Mais ce que je souhaite mettre en exergue dans ce mot du jour, c’est cet extraordinaire aveu d’un fonctionnaire européen en réponse à Raphaël Glucksmann qui se plaignait des peuples qui élisaient des démagogues.
Je ne sais pas comment vous réagissez mais, pour ma part, j’ai toujours énormément de mal à admettre que nous soyons vraiment dans cette situation où nous serions prisonniers d’un système se basant sur une multitude de traités et qui fonctionnent en anesthésiant les effets des élections.
Il y a pourtant des signes absolument inquiétants :
– On a abondamment commenté cet entretien féroce et humiliant où Merkel et Sarkozy ont intimé au premier ministre grec de renoncer à son idée « iconoclaste » de soumettre le plan d’austérité à un référendum.
– J’ai rapporté lors du mot du jour du 5 mars 2013, ce propos du président de la commission d’alors Manuel Barroso : « Doit-on déterminer notre politique économique en fonction de considérations électorales ? », question qui impliquait une réponse négative.
– Sans compter ces référendums qui avaient été organisés sur le traité européen et qui ont abouti à un rejet par certains pays dont la France et qui par des artifices rhétoriques ont été ignorés. Je rappelle cet épisode douloureux alors même que j’avais plaidé pour le oui et voté oui au référendum.
Devant ces « faits » comment s’étonner que de plus en plus de citoyens se réfugient dans des votes extrêmes où confusément ils espèrent que ce que ce fonctionnaire européen a décrit puisse enfin être mis en échec.
Je finirai par le rappel d’un autre mot du jour du  02 juillet 2013 :    « Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils en chérissent les causes. » Bossuet
En pièce jointe, un article sur le livre de Raphaël Glucksmann dont je n’ai finalement pas parlé dans ce mot du jour.
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Mardi 24 mars 2015

Mardi 24 mars 2015
«Dividend recapitalization»
Méthode utilisée par des actionnaires vautours pour s’enrichir rapidement au dépens d’une société qu’ils possèdent.
Grâce à deux articles de «Mediapart» je peux vous narrer une histoire du capitalisme d’aujourd’hui.
Mais c’est une histoire qui finit bien pour l’instant.
Je cite ci-après les deux articles avec quelques commentaires :
Au départ, c’est l’histoire d’une belle aventure industrielle d’une entreprise créée en 1982 par Marc Ettienne spécialisée dans la menuiserie industrielle sur mesure et notamment les fenêtres en PVC. Son nom : FPEE.
FPEE a grossi au fil des ans, au point d’englober 7 sociétés, d’employer 650 salariés répartis sur cinq sites de production, dont le principal est à Brûlon, dans la Sarthe, et de réaliser bon an mal an un chiffre d’affaires proche de 150 millions d’euros.
Par la suite Marc Etienne a transmis la présidence exécutive de la société à une jeune femme, Cécile Sanz, depuis de longues années dans l’entreprise, et n’a gardé que la présidence de la holding de tête, la société Fenetria.
Mais progressivement, la société a basculé dans un autre univers, où les logiques industrielles ne comptent pas pour grand-chose et les logiques financières pour beaucoup.  Marc Ettienne a en effet accepté une recomposition du capital de la société qu’il avait fondée.
Ne gardant plus que 30 %, il a fait entrer au tour de table trois fonds d’investissement, contrôlant les 70 % restants, soit 40 % des parts détenues par les fonds revenant à une société dénommée Atria, rebaptisée Naxicap depuis son absorption par Natixis ; 40 % revenant à un fonds dénommé Pragma et 20 % au fonds Equistone, l’ancienne société de gestion de la Barclay’s dans le « private equity », dénommée Barclays Private Equity.
Cette restructuration du capital s’est faite progressivement.
Au début donc, le fondateur de l’entreprise peut penser que cette alliance avec les fonds d’investissement est bénéfique pour tout le monde.
Pour l’entreprise qui est en fort développement, mais tout autant pour les trois fonds d’investissement, qui grâce à leur mise dans FPEE gagnent énormément d’argent.
Mais à l’évidence, les fonds sont insatiables et l’argent qu’ils gagnent ne leur suffit pas.
Les trois fonds ont, au début de l’année 2014, une idée : organiser ce que dans le sabir financier anglo-saxon on appelle un « dividend recapitalization »
La pratique est-elle légale ? Selon les juristes consultés par Mediapart, sans doute l’est-elle si la saignée financière reste dans la limite de l’intérêt social de l’entreprise, car sinon il peut s’agir d’abus de pouvoirs sociaux, ce que la loi réprime.
Et dans tous les cas de figure, c’est une pratique éthiquement stupéfiante, car cela met un pistolet financier sur la tempe des entreprises concernées, les contraignant à préempter pendant de longues années tous les bénéfices à venir pour rembourser une dette qui est devenue insupportable.
L’opération expliquée simplement est celle-ci : les actionnaires demande à l’entreprise de contracter un emprunt de 200 millions d’euros pour rembourser 67,1 millions d’euros de dette antérieurement contractée et pour servir sur le- champ aux actionnaires un dividende de 132,9 millions d’euros.
Pour les actionnaires, ce serait donc le jackpot immédiat ! C’est la nouvelle mode qui fait fureur dans le « private equity » : endetter les entreprises pour apporter tout de suite du… « cash » aux actionnaires.
Cécile Sanz et Marc Ettienne trouvent le projet contestable.  Un premier « dividend recap » a en effet déjà été organisé en 2011 pour 119 millions d’euros ;  et ils jugent injustifiable de ponctionner l’entreprise encore davantage.
Mais quand en avril 2014 les trois fonds demandent à la nouvelle patronne de PFEE, Cécile Sanz, de mettre en œuvre l’opération financière, celle-ci refuse de suivre l’injonction, estimant qu’elle plongerait l’entreprise dans une situation d’endettement trop dangereuse.
Elle reçoit le soutien du fondateur de la société, Marc Ettienne, qui s’oppose à son tour fermement au projet. Ce qui, soit dit en passant, n’est pas si fréquent dans la vie des affaires. Car le projet est ainsi monté que, contrôlant encore 30 % du capital de l’entreprise, il pourrait lui aussi réaliser une formidable culbute, en empochant pas loin de 35 millions d’euros de dividendes.  Inespéré, non ? Quel patron refuserait, en période de crise économique, d’empocher un tel montant ? Pour Marc Ettienne, c’est hors de question, et il s’indigne encore qu’on ait pu inventer un tel projet : « Je ne peux tout de même pas faire bosser des gens à 1 500 euros par mois et me prendre un chèque pareil ! », raconte-t-il à Mediapart.
Les trois fonds sont alors furieux et somment Cécile Sanz de leur faire une proposition alternative.
Mais aucune proposition ne parvient à satisfaire les fonds et Au beau milieu de la nuit du dimanche 1er au lundi 2 février 2015, vers 0 h 30, les dirigeants des trois fonds adressent par mail à Cécile Sanz et Marc Ettienne une convocation à une réunion du conseil de surveillance de Fenetria, qui doit se tenir le jour même, à 12 heures, à Paris. Réunion où ils démettent de leurs fonctions les deux impertinents qui ont eu l’audace de se mettre en travers de leur lucratif projet.
Mais les salariés se sont mobilisés avec les médias et ils ont mobilisé les pouvoirs publics, d’abord François Fillon élu de la Sarthe, Stéphane Le Foll, Emmanuel Macron et le second article nous apprend que :
Les trois fonds d’investissement ont dû céder devant la pression : Les deux responsables sont réintégrés et les fonds sont poussés à céder leurs parts.
Je ne vous explique pas en détail tout cela que vous pourrez lire dans les articles de Mediapart.
En conclusion, on voit donc comment pratique les fonds qu’on appelle vautours.
Et puis, quand même, que mobilisé et uni on peut arriver à leur faire mordre la poussière.

Lundi 23 mars 2015

Lundi 23 mars 2015
«Populisme»
Terme dont on affuble son adversaire politique pour tenter de le discréditer
Même si Melenchon et Marine Le Pen ont accepté le qualificatif de populiste, en expliquant, chacun à sa façon que leur combat est un combat contre les élites caractérisées par leur éloignement du peuple et leur corruption, en règle général un mouvement politique ne se revendique pas populiste.
C’est son adversaire qui le désigne ainsi. Ce terme devient alors synonyme de «démagogie».
Comment définir le populisme ?
«Le populisme désigne un type de discours et de courants politiques qui fait appel aux intérêts du « peuple » (d’où son nom) et oppose les intérêts du peuple avec ceux de l’élite et qu’il prend pour cible de ses critiques.»
C’est une définition que je tire de Wikipedia et qui me semble la plus neutre.
Dans son émission « Répliques » Alain Finkielkraut a invité Chantal Delsol auteur du livre « Populisme : « les demeurés de l’histoire »(2015) et Dominique Reynié «Les nouveaux populismes» (2013) pour essayer de réfléchir sur ce sujet sans tomber dans l’anathème et la seule dénonciation.
Bien sûr, les solutions proposées par le parti désigné comme le plus populiste en France ne sauraient régler les problèmes qu’il pose.
Mais il y a un sujet qui me paraît central et qui est abordé dans cette émission :
Dans le monde globalisé dans lequel nous vivons, les élites ne peuvent être qu’en phase avec la mondialisation et de ce fait profitent pleinement de celle-ci. Ils deviennent quelque part « hors sol », « hors frontière », « hors nation ».
Or, dans ce même monde, dans nos pays développés qui ont profité longtemps du déséquilibre du monde, [Car si les classes ouvrières et populaires ont pu améliorer énormément leur sort, ils le doivent grâce en partie à leur combat syndical et ouvrier, mais aussi parce que dans d’autres pays du monde des peuples laissés dans la pauvreté ont été exploités pour le bénéfice des pays développés dont profitaient aussi les ouvriers], les classes populaires ne profitent plus de la mondialisation. Pour eux, la nation apparaît comme le dernier rempart qui pourrait, peut-être, les protéger contre l’océan de la mondialisation qui les emporte.
Ces deux constatations montrent que les intérêts des « élites » et du « peuple » ne sont plus convergents.
Le populisme, dès lors, ne peut être résumé par cette réflexion de Gabin dans la traversée de Paris : « salaud de pauvres ! » que certains en termes moins fleuris  semblent lancer à ceux qui dans les milieux populaires votent le FN.
La question à se poser serait plutôt comment parvenir à rétablir une convergence d’intérêts et de compréhension entre l’élite et le peuple ?
Voici le lien vers cette émission très intéressante : <http://www.franceculture.fr/emission-repliques-qu-est-ce-que-le-populisme-2015-03-14>
et pour finir je ne résiste pas à rappeler, aux plus anciens l’hymne du Parti socialiste en 1977, 4 ans avant l’arrivée au pouvoir du Mitterrand.
« Changer la vie » Paroles de Herbert Pagani musique de Mikis Théodorakis Chantée pour la première fois au congrès socialiste de Nantes, 1977
 » Les voix des femmes, et les voix des hommes
Ont dû se taire beaucoup trop longtemps
Ne croyons plus aux lendemains qui chantent
Changeons la vie ici et maintenant
C’est aujourd’hui que l’avenir s’invente
Changeons la vie ici et maintenant
[Refrain
Prendre la parole
Décider nous-mêmes
Libérer nos vies des chaînes de l’argent
Écrire notre histoire à la première personne
Être enfin des hommes et non des instruments
France socialiste puisque tu existes
Tout devient possible ici et maintenant]
Ne versons plus au nom de leur puissance
Notre sueur, nos larmes, notre sang
Les travailleurs travaillent pour la France
Pas au profit de quelques possédants
Pour partager les fruits de l’abondance
Changeons la vie ici et maintenant
[Refrain]
Il nous faudra reprendre en main nos villes
Qui ne sont plus que des ghettos géants
Où le printemps n’a plus le droit d’asile
Où meurent les vieux, les arbres, les enfants
C’est dans nos propres murs qu’on nous exile
Changeons la vie ici et maintenant
[Refrain]
Un siècle meurt, un millénaire commence
Plus de prisons, de cages et de camps
Tendons la rose rouge de l’espérance
Aux opprimés de tous les continents
L’histoire est là qui nous offre une chance
Changeons la vie ici et maintenant
Libérer la femme
Libérer l’école
Donner la parole aux frères émigrants
Ecrire notre histoire à la première personne
Être enfin des hommes et non des instruments
[Refrain]
Oui, oui c’est décalé…
Si vous le voulez chanté <Il y a un exemple ici>
Bon c’était il y a près de 40 ans, au siècle dernier, dans un autre Monde.
Margareth Thatcher n’était pas encore au pouvoir, elle y arrivera le 4 mai 1979
Ni Reagan qui sera élu le 4 novembre 1980.
Et Brejnev déjà malade dirigeait l’Union Soviétique jusqu’à sa mort en novembre 1982.
C’était avant !
C’était populiste ?

Vendredi 20 mars 2015

Vendredi 20 mars 2015
«Ce n’est pas une partie de la population musulmane française qui se tourne vers le djihad et le terrorisme, c’est une collection d’individus et de solitaires »
Olivier Roy
Je dois dire que je n’ai pas bien compris pourquoi Roger Cukierman avait été  si violemment critiqué lorsqu’il a déclaré que «toutes les violences antisémites sont commises par des jeunes musulmans». Il me semblait qu’il disait une évidence et je trouvais suspect qu’on ne puisse dire ces choses.
Mais j’ai changé d’avis quand j’ai réécouté Olivier Roy, philosophe, chercheur et spécialiste de l’Islam qui avait été l’invité de Patrick Cohen en janvier sur France Inter.
Son analyse était la suivante : «Ce n’est pas une partie de la population musulmane française qui se tourne vers le djihad et le terrorisme, c’est une collection d’individus et de solitaires.
Il y  a beaucoup plus de musulmans dans les forces de sécurité, dans l’armée et la gendarmerie que dans les réseaux d’Al-Qaeda ou des autres organisations terroristes.
D’ailleurs ces musulmans sont aussi la cible puisque Merah à Toulouse comme lors de l’attentat contre Charlie, des musulmans appartenant à ces institutions ont été froidement abattus.
Ce n’est pas une dérive de la population musulmane, c’est une dérive de la jeunesse, y compris une partie non musulmane qui alors se convertit pour faire le djihad.
C’est un mouvement de jeunes qui sont souvent, mais pas toujours en position d’exclusion sociale, et qui dans ce dernier cas s’auto-excluent pour rentrer dans la radicalité, une dérive sectaire où ils ne se retrouvent plus qu’avec des gens comme eux et qui se montent la tête avec des vidéos, des grands récits de guerre et cherchent sur Internet une cause et passent à la violence.
Ils ne sont en rien une avant-garde d’une communauté musulmane de France qui n’existe pas. »
C’est bien un problème de jeunes qui cherchent une cause pour laquelle ils peuvent se battre, nourrir leur soif de violence et mourir.
Et c’est ainsi que s’explique, le grand nombre de convertis qui se trouve dans cette dérive terroriste.
Dans un article de Libération, il a cette expression « marketing » : <Aujourd’hui, le jihad est la seule cause sur le marché.> :
«Ce sont des jeunes qui cherchent leur guérilla, comme nous dans les années 60. A l’époque, notre cause était la révolution, maintenant, c’est le jihad mondial. Dans son essai The Terrorist in Search of Humanity, l’historien Faisal Devji explique que, mis à part le fait que les terroristes tuent, il n’y a pas de différence fondamentale entre un humanitaire et un gars d’Al-Qaeda. Ce sont des militants d’un monde global, des nomades, souvent déracinés. Mais si on veut vraiment comprendre l’enrôlement des jihadistes, il faut regarder du côté de la fusillade du lycée de Columbine, en 1999, et des jeunes gens qui se perdent dans une même violence autodestructrice. En Orient comme en Occident, il existe une jeunesse fascinée par ce nihilisme suicidaire. L’islam donne une dimension globale, peut-être aussi mystique, un nom à une cause.
Aujourd’hui, le jihad est la seule cause sur le marché. Nous ne voulons pas voir les points communs, mais seulement les différences, et préférons nous enfermer dans une lecture monomaniaque du monde musulman. On se réfugie dans le choc des cultures sans voir l’aspect mondialisé du phénomène. Or, ces conflits sont le symptôme d’un même effondrement culturel. »
Je pense qu’Olivier Roy a raison, ce n’est pas le fait d’être né musulman qui constitue un risque de verser dans le terrorisme, mais le fait d’être un jeune déboussolé, qui cherche une cause qui lui paraisse adéquate pour sacrifier sa vie avec au préalable pouvoir laisser s’exprimer sa pulsion de violence et de mort.
Comme pour faire écho à ces propos d’Olivier Roy, une femme a appelé pendant l’émission pour dire le désarroi de sa famille catholique non pratiquante qui a vu son neveu s’engager dans le djihad et partir en Syrie.

Jeudi 19 mars 2015

Jeudi 19 mars 2015
«Traiter avec le diable ?»
Pierre Grosser
Le secrétaire d’Etat américain Kerry vient  de déclarer <Au final nous devrons négocier [avec Bachar el Assad] >. Alors que le Président français avait déclaré que Bachar El-Assad étant à la fois « le principal responsable du malheur de son peuple et de la montée des groupes terroristes en Syrie », il ne peut pas être « un interlocuteur crédible pour lutter contre Daech et préparer l’avenir » de ce pays. Depuis la diplomatie américaine est revenu partiellement sur ses déclarations.
Toujours est-il, que de plus en plus les Etats occidentaux expriment des positions tranchées et binaires : ligne rouge, axe du mal, dictateur avec qui il est interdit de parler. Avec ces positions si « peu diplomatiques », il sont le plus souvent acculés à se déjuger et laisser la ligne rouge être franchie sans réagir ou finalement parler quand même avec celui qu’ils avaient banni du champ diplomatique. Bref, ils se décrédibilisent.
Des invités défendaient la position qu’on ne pouvait négocier avec Bachar El-Assad mais le plus intéressant était Pierre Grosser auteur de l’ouvrage : « Traiter avec le diable ? Les vrais enjeux de la diplomatie au XXIe siècle »
Pierre Grosser parle de « La « disneyisation » des relations internationales [qui] amène à diviser le monde en diables, victimes et sauveurs. Le monde non-occidental serait un zoo de dictateurs qui n’ont pas compris le sens de l’histoire, mais aussi un stock de victimes absolues et d’icônes de la résistance, souvent féminines ([telles] Aung San Sui Kyi en Birmanie ou les femmes « victimes » de l’islamisme), implorant l’Occident pour qu’il agisse ».
Il précise encore que les diables peuvent être des figures du Mal, mais que toutes celles-ci ne sont pourtant pas des ennemis et que tous les ennemis ne sont pas des diables. Ce diable peut être un individu, un régime ou une puissance, mais aussi le terrorisme, la tyrannie ou la violence de masse s’exerçant contre les civils. On peut citer le cas d’Oussama Ben Laden, Saddam Hussein ou Bachar al-Assad sans compter l’Iranien Mahmoud Amaninejad.
Bref, on place un régime ou un homme dans le camp du mal ou du diable et on s’interdit de négocier avec lui.
Israël ne veut pas négocier avec le Hamas ni avec l’Iran. Et si on suit certains européens, il ne faudrait pas négocier avec la Russie de Poutine !
Mais on ne fait pas la paix avec ses amis ! on négocie et on traite forcément avec ses ennemis !
Les Alliés n’ont pas hésité de traiter avec Staline pour lutter contre Hitler, Staline responsable selon les dernières analyses de <9 millions de morts sur le territoire de l’Union Soviétique>
Par suite Nixon et Kissinger sont allés négocier avec Mao <A qui on attribue plusieurs dizaine de millions de victimes de ses concitoyens>.
El-Assad est un très petit joueur à côté de ces criminels.
Mais la diabolisation de l’ennemi est surtout une marque d’incohérence et d’inconséquence dans le panorama diplomatique d’aujourd’hui où les Etats occidentaux ne sont plus prêts financièrement à assurer les frais d’un conflit « total » et les peuples « à verser l’impôt du sang ».
Parce qu’on peut ne pas négocier avec Hitler mais alors il faut le détruire et accepter le coût que cela représente.
Et sinon, et nous sommes aujourd’hui dans ce cas, il faut accepter de négocier.
Je cite cet article :
« L’auteur s’interroge ainsi sur les processus de diabolisation de l’adversaire et les impasses auxquels ces derniers conduisent le plus souvent. Il entend identifier les « prismes cognitifs » qui bloquent la relation à l’autre une fois celui-ci diabolisé : « Il s’agit de mettre le doigt sur les perceptions et les raisonnements qui, loin d’éclairer l’action politique, l’entraînent sur des voies potentiellement dangereuses ».
[…] Les mécanismes de diabolisation fonctionnent à partir d’une (dis)qualification morale qui fige mentalement le jugement et, partant, les situations rendent ainsi « difficiles les interactions avec l’ennemi, une fois que celui-ci a été diabolisé ». Le propos de Grosser rejoint celui d’autres historiens des relations internationales, qui conduisent depuis plusieurs années des travaux sur les attitudes mentales et les images de l’autre, attitudes et images qui jouent inévitablement sur les processus de décision. « 
Je reprendrai la conclusion  » la diplomatie a été précisément créée pour traiter avec des monstres »
C’est une invite à réfléchir et ne pas se laisser enfermer dans des choix simplistes et binaires.

Mercredi 18 mars 2015

Mercredi 18 mars 2015
«Ces moutons sont de véritables tondeuses à gazon écologiques et d’excellents désherbants»
Emilie Delloye promoteur immobilier à Lyon
Un article du Figaro a attiré mon attention sur un complexe immobilier en train de se construire à Lyon.
On parle d’immobilier de luxe, avec des appartements à 6000 euros le m2 en moyenne.
J’entends les parisiens rire : « Menfin Alain !  6000 euros ce n’est pas du luxe, c’est en dessous du prix  standard parisien »
D’accord, mais nous parlons de Lyon et d’un projet qu’on pourrait appeler : «des bobos, des appartements et des moutons»
De quoi s’agit-il ?
«Un terrain de deux hectares sur les hauteurs de la colline de Fourvière à Lyon – qui a abrité pendant 200 ans des sœurs vivant en autarcie – va accueillir un complexe immobilier haut-de-gamme d’ici à 2017. Présenté par le promoteur LEM au salon de l’immobilier de Lyon, Lugdunum, en référence au nom gallo-romain d’origine celtique de la métropole lyonnaise, [ce projet] veut conjuguer haut standing, qualité de vie et respect de l’environnement. Et la résidence va accueillir des locataires pour le moins inattendus en milieu urbain: un troupeau de moutons d’Ouessant et des ruches!
Pour son premier programme immobilier, Emilie Delloye, dirigeante de LEM et héritière du groupe sucrier la Vermandoise a vu les choses en grand pour le terrain sur les hauteurs de Fourvière. «J’ai eu un véritable coup de foudre pour ce terrain et l’atmosphère qui s’en dégageait», déclarait Emilie Delloye lors de la présentation du projet en février dernier. Avant même de consulter des architectes, la dirigeante de LEM rencontre des paysagistes parmi lesquels elle choisit Cédric Chardon. Ce dernier a la délicate mission d’harmoniser les espaces verts déjà présents avec les futures habitations. Il développe l’idée de créer «une grande broderie végétale», inspirée par la soierie lyonnaise, qui tissera le lien entre le bâti et le parc. Mais les véritables stars du verger de 8000 m² sont…des moutons d’Ouessant.
Depuis trois semaines, ils sont cinq à paître tranquillement. «Ce sont les véritables ambassadeurs du projet», confie Emilie Delloye. «Si les acheteurs ont été surpris au début, ils ont très vite été séduits. Ces moutons sont de véritables tondeuses à gazon écologiques et d’excellents désherbants», ajoute-t-elle.
Depuis plusieurs années, l’écopâturage se répand dans les villes françaises. Ainsi à Lyon, un troupeau de moutons a été installé au Fort de Loyasse sur un espace de 28.000 m². À Courbet (Seine-Saint-Denis), des moutons tondent depuis deux ans les parcelles vertes appartenant à la ville. Ils permettraient à la mairie d’économiser 24.000 euros par an!
Enfin, Emilie Delloye souhaite introduire davantage de biodiversité dans son projet immobilier. Trois ruches seront installées dans le verger de la résidence: «les abeilles sont en danger. La réimplantation de ruches en ville est un mouvement qui se répand, mais il y a encore trop peu de projets». Le miel produit par les abeilles sera redistribué à l’ensemble des propriétaires, qui devront débourser entre 400.000 et 700.000 euros pour acheter un appartement sur les lieux. »
C’est une piste pour rapprocher les citadins de plus en plus nombreux de la ruralité en faisant entrer la campagne à la ville.