Mercredi 30 octobre 2013

Mercredi 30 octobre 2013
«La liberté du consommateur et de l’individu moderne,
c’est la liberté du cochon devant son auge. »
Peter Sloterdijke

Peter Sloterdijke est un philosophe allemand né en 1947.

Je ne le connaissais pas, mais il a été cité par Hervé Juvin pendant les matins de France Culture du 16/10/2013.

Hervé Juvin avait été invité pour la sortie de son livre : « La grande séparation. Pour une écologie des civilisations »

Intellectuellement très fin, difficile à classer sur l’échiquier politique, Hervé Juvin a une hantise : l’avènement d’un « homme nouveau » partout sur la planète, l’homo economicus, réduit à son seul pouvoir économique.

Il explique très simplement que nul n’a plus le droit de discriminer selon l’origine, la religion, l’orientation sexuelle, mais il reste un critère de discrimination unique et massif : la richesse.

Cette discrimination est réelle, elle sépare, elle fait vivre les individus dans des mondes différents, elle justifie des comportements et des traitements différents.

Et c’est alors qu’il dénonce l’illusion de la liberté individuelle poussée à son paroxysme qui n’est devenu rien d’autre qu’une liberté à consommer. Consommer des biens, des idées, des loisirs, des services, des droits (du type droit à l’enfant).

Toutes choses dont on tient à nous convaincre que sans ces biens de consommation nous ne sommes rien.

Pour illustrer cette liberté de consommer il cite Peter Sloterdijke

A cela il oppose la liberté collective, la liberté de la nation et tout ce qui nous réunit et nous dépasse et nous permet de connaître nos racines et de sentir la solidarité de ceux qui partagent la même culture.

<Faut–il redécouvrir le vrai sens de la politique afin de préserver nos diversités ?>

Hervé Juvin est très clivant. Les réactions des auditeurs de France Culture sur la page, dont je vous envoie le lien, sont aux deux extrêmes, les uns crient au génie les autres disent que France Culture se diabolise à inviter cet intellectuel proche de Raymond Barre et de Marcel Gauchet.

<186>

Mardi 29 octobre 2013

Mardi 29 octobre 2013
Cela devient cher d’être pauvre
Martin Hirsch
Titre du livre que Martin Hirsch vient de faire paraître.
Martin Hirsch tend à démontrer que les plus précaires payent, en proportion, plus cher que le reste de la population pour les mêmes produits et services.
Il multiplie les exemples en commençant par le logement où plus les surfaces sont petites, plus le prix au mètre carré est onéreux : « Quand le coût de l’abonnement pour l’électricité et le gaz est un prix uniforme, sa répercussion sur chaque kilowatt sera plus élevée pour ceux qui, parce qu’ils ont un appartement plus petit ou moins d’équipement, consomment moins. »
De la même manière ils n’ont pas accès aux forfaits téléphones, ils doivent acheter des cartes et dans ce cas le prix de la minute de conversation est plus cher.
L’article du Nouvel Obs. qui est consacré à ce livre rappelle Coluche : « Chez nous, les fins de mois étaient difficiles, surtout les trente derniers jours. »

Lundi 28 octobre 2013

Lundi 28 octobre 2013
«Aujourd’hui un enfant qui regarde un magazine pense que c’est un ipad en panne.»
Dominique Reynié, président de la Fondapol
Intervention lors de l’émission questions critiques de Jean-Marie Colombani, lors de l’émission du Vendredi 18 octobre 2013 consacré « au discours dominant sur l’identité française « 
Cette intervention était censée donner une image « choc » montrant la révolution dans le monde de la culture et de l’accès à l’information

Vendredi 25 octobre 2013

Vendredi 25 octobre 2013
« Tout l’espoir n’est pas de trop pour regarder le siècle en face »
Aimé Césaire Revue Tropiques Nr 1, 1941
La Revue Tropiques qu’il avait fondée avec sa femme Suzanne.
Je suis allé voir le spectacle historiquement exact et humainement émouvant au TNP de Villeurbanne, « Une saison au Congo » d’Aimé Césaire qui raconte les quelques mois où Patrice Lumumba a été le premier ministre du Congo indépendant jusqu’à sa mort brutale devant la coalition des intérêts et des lâchetés.
Ce mot d’espoir, mais qui dit aussi les défis qu’il nous faut affronter a été cité par Christine Taubira mais je l’ai trouvé aussi dans l’hommage que l’Assemblée Nationale avait rendu à Aimé Césaire le Lundi 24 juin 2013
M. Thomas Thévenoud. : […]  » C’est l’appel de 1941 qui ouvre le premier numéro de la revue Tropiques et qui marque l’avènement du discours chez le poète.
Avant même d’être élu pour la première fois en 1945, Césaire appelle à la mobilisation collective :
« Nous sommes de ceux qui disent non à l’ombre. Nous savons que le salut du monde dépend de nous aussi.
Que la terre a besoin de n’importe lesquels d’entre ses fils. Les plus humbles.
L’Ombre gagne.
Ah ! tout l’espoir n’est pas de trop pour regarder [le siècle] en face !
Les hommes de bonne volonté feront au monde une nouvelle lumière, mais il n’est plus temps de parasiter le monde, c’est de le sauver plutôt qu’il s’agit.
Il est temps de se ceindre les reins comme un vaillant homme. » »
Voici le lien vers l’hommage de l’Assemblée Nationale : http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2012-2013/20130281.asp

Mercredi 23 octobre 2013

Mercredi 23 octobre 2013
«Les impôts c’est comme le cholestérol,
ce n’est pas la dernière tranche de fromage
qui fait la mauvaise analyse de sang. «
Bernard Cazeneuve – Ministre du budget – successeur de Jérôme Cahuzac
Propos tenu hier à l’Assemblée Nationale
Une communication de plus en plus innovante, Des images de plus en plus en plus hardies : «Les impôts c’est comme le cholestérol ».
La chute montre une préoccupation pédagogique louable.
Mais il fallait oser comparer les impôts à une maladie

Mardi 22 octobre 2013

Mardi 22 octobre 2013
«La seule certitude que j’ai, c’est d’être dans le doute.»
Pierre Desproges

Titre d’un livre paru en 2001 qui est la transcription d’un entretien, très libre, de Pierre Desproges avec Yves Riou et Philippe Pouchain en décembre 1986.

C’est aussi le titre d’un spectacle de textes de Desproges lu par Christian Gonon qui passe actuellement Du 19 au 27 octobre 2013 à Paris, au Studio-théâtre de la Comédie-Française et qui viendra du 5 au 16 novembre à Villeurbanne au Théâtre national populaire.

C’est surtout un mot plein de sens que l’on pourrait compléter par le mot suivant : « Les personnes pleines de certitudes me plongent dans le doute ».

http://www.rue89.com/rue89-culture/2013/10/20/desproges-a-comedie-francaise-etonnant-non-246778

Lundi 21 octobre 2013

Lundi 21 octobre 2013
«Lorsque vous nommez une chose,
le mot vous distrait, vous éloigne de l’observation»
Krishnamurti Entretiens à Morcelo (Porto Rico)
Dans son livre « Aux Etudiants » paru chez Stock
Il y eut une époque où je lisais beaucoup ce philosophe d’origine indienne.
L’affaire Léonarda m’a rappelé cette parole de sagesse.
Je ne parle pas du fond de l’affaire : était-il justifié d’expulser cette famille, les policiers qui sont allés chercher cette jeune fille ont-ils agit humainement ? Ni de l’attitude des médias.
Ce dont je parle, c’est l’utilisation de « mots » qui classent, qui rangent dans la bonne case permettant d’éviter d’observer et de réfléchir à la réalité.
Ainsi quand on nomme une chose « l’immigration », « les roms », « la reconduite à la frontière », ce sont des concepts qui certes peuvent entraîner des raisonnements. Mais qui ne représentent pas la réalité.
Alors quand on parle de Léonarda qui est un prénom, on ne parle plus d’un concept, ni d’une case mais d’une personne, qui a un visage, une histoire, qui parle, qui a une humanité.
Et là on est interpellé et tout devient plus compliqué, les certitudes peuvent s’amollir.
Krishnamurti continue son discours par cette explication :
« Lorsque vous dites « c’est un cyprès », vous regardez l’arbre à travers le mot, donc vous ne le regardez pas vraiment mais à travers l’image que vous avez construite et cette image vous empêche de voir. »

Vendredi 18 octobre 2013

Vendredi 18 octobre 2013
[contre les américains] « Si nous nous battons à la russe nous ne pouvons pas tenir deux heures.
Mais nous nous battrons à la vietnamienne et nous vaincrons. »
Général Vo Nguyen Giap
Réponse de Giap à Kossyguine qui l’interpellait : « Camarade Giap, vous me parlez de vaincre les Américains. Je me permets de vous demander combien d’escadrilles d’avions à réaction avez-vous et combien, eux, en ont-ils ? »
Et les vietnamiens ont bien fait ce que le général Giap annonçait.
Il a raconté cela lors d’une interview à L’humanité le 7 mai 2004, à l’époque il n’avait que 93 ans. Il est mort à 102 ans, il y a quelques jours.
Général Giap.[…] Les Américains étaient naturellement sûrs de leur victoire et n’ont pas voulu entendre les conseils des Français qui avaient fait l’expérience de se battre contre les Vietnamiens.
Les États-Unis avaient effectivement engagé des forces colossales et peu de gens, même parmi nos amis, croyaient en notre capacité de les vaincre.
Mais les Américains n’avaient aucune connaissance de notre histoire, de notre culture, de nos coutumes, de la personnalité des Vietnamiens en général et de leurs dirigeants en particulier.
À MacNamara, ancien secrétaire à la Défense des États-Unis que j’ai rencontré en 1995, j’ai dit :  » Vous avez engagé contre nous de formidables forces artilleries, aviation, gaz toxiques mais vous ne compreniez pas notre peuple, épris d’indépendance et de liberté et qui veut être maître de son pays.  » C’est une vérité que l’histoire a de tout temps confirmée. Pendant 1 000 ans de domination chinoise, (jusqu’au Xe siècle), nous n’avons pas été assimilés. Contre les B52, ce fut la victoire de l’intelligence vietnamienne sur la technologie et l’argent. Le facteur humain a été décisif. C’est pourquoi lorsqu’un conseiller américain du service de renseignements m’a demandé qui était le plus grand général sous mes ordres, je lui ai répondu qu’il s’agissait du peuple vietnamien.  » J’ai apporté une contribution bien modeste, lui ai-je dit. C’est le peuple qui s’est battu « .
J’ai aussi eu l’occasion de recevoir des anciens combattants américains venus visiter le Vietnam. Ils me posaient la question : nous ne comprenons pas pourquoi vous nous accueillez aujourd’hui si bien ?  » Avant, vous veniez avec des armes en ennemis et vous étiez reçus comme tels, vous venez maintenant en touristes et nous vous accueillons avec la tradition hospitalière traditionnelle des Vietnamiens. « .
[…]
Vous avez fait allusion au fait que peu de personnes croyaient en votre victoire finale sur les Américains…
Général Giap. C’est vrai. C’est le passé, […]
Une autre fois, j’étais à Moscou pour demander une aide renforcée et j’ai eu une réunion avec l’ensemble du bureau politique. Kossyguine m’a alors interpellé :  » Camarade Giap, vous me parlez de vaincre les Américains. Je me permets de vous demander combien d’escadrilles d’avions à réaction avez-vous et combien, eux, en ont-ils ?  »  » Malgré le grand décalage des forces militaires, ai-je répondu, je peux vous dire que si nous nous battons à la russe nous ne pouvons pas tenir deux heures. Mais nous nous battrons à la vietnamienne et nous vaincrons. « 

Mercredi 16 octobre 2013

Mercredi 16 octobre 2013
« La force de la bienveillance »
Matthieu Ricard
Matthieu Ricard est le fils du philosophe Jean-François Revel, avec qui il a écrit un livre à double main : « Le moine et le Philosophe », car lui est moine bouddhiste tibétain
Il réside habituellement au monastère de Shéchèn au Népal.
Avant de donner cette voie il avait fait des études brillantes en médecine.
Il a achevé une thèse en génétique cellulaire à l’Institut Pasteur, sous la direction du Pr François Jacob (prix Nobel de médecine).
C’est après qu’il a décidé de s’établir dans l’Himalaya où il vit depuis 1972, étudiant et pratiquant le bouddhisme tibétain auprès de grands maîtres spirituels
Il était l’invité de de Jean-Jacques Bourdin sur RMC, il y a quelques jours (eh oui je n’écoute pas que France Culture…), pour présenter son nouveau livre : « Plaidoyer pour l’altruisme » dont le sous-titre est la force de la bienveillance.
Il développe une théorie basée sur des expériences concrètes montrant que l’altruisme et la bienveillance permettent de résoudre bien des problèmes.
Cette théorie s’inscrit dans un mouvement plus large qui tente de s’appuyer sur le positif pour progresser.
Notons que cette approche est révolutionnaire, surtout en France.
A l’école comme dans notre travail quotidien, notre méthode c’est de voir ce qui va mal, pour le critiquer. Cette méthode pense que si on améliore ce qui va mal, ce sera mieux.
Ce n’est pas faux, mais ce n’est pas aussi simple que cela.
A l’école, par exemple, si on regarde d’abord les fautes, on mettra en exergue celui qui ne fait pas de faute. C’est ainsi qu’on crée une élite et qu’on laisse sur le côté un très grand nombre.
Si on s’appuyait sur le positif pour progresser vers le plus positif, la démarche serait bienveillante, souvent moins décourageante et conviendrait au plus grand nombre.
Même celui qui ne fait pas de faute, aurait aussi l’idée de progresser puisque son positif peut aller encore plus loin.
Le Monde lui a aussi consacré un article le 10 octobre duquel je tire l’extrait suivant :
« L’antidote au narcissisme individualiste, au « moi moi moi » du matin au soir, passe par la considération d’autrui, la bienveillance et l’attention à l’autre. Comme le disait Martin Luther King, « nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir ensemble comme des idiots ». Il faut oser l’altruisme, oser dire qu’on peut le cultiver, oser enseigner l’apprentissage coopératif dans l’éducation. Oser dire qu’il peut y avoir une économie altruiste, et que la question de l’environnement se ramène à une question d’altruisme. »
Il dispose aussi d’un site :