Mardi 30 juin 2020

«Toute la panoplie des instruments que la doxa libérale a longtemps décriée doit continuer à être mobilisée pour lutter contre la crise.»
Daniel Cohen

Daniel Cohen rédige de petites chroniques dans l’Obs comme celle qu’il a publiée le 26 juin 2020 : <Guérir ces maladies du capitalisme révélées par le Covid-19>

Daniel Cohen écrit :

« La montée irrépressible du chômage et des faillites d’entreprises gronde comme un orage qui avance. »

Cet article du 9 juin < les dégâts du virus sur l’emploi> nous donne déjà un petit aperçu de l’orage.

Et Daniel Cohen de poser cette question :

« Comment un choc, somme toute limité à deux mois de vacance de l’activité, peut-il produire un tel cataclysme ?  »

La réponse est dans l’immense fragilité du capitalisme.

Gaël Giraud l’avait déjà expliqué : « Avec cette pandémie, la fragilité de notre système nous explose à la figure », c’était le mot du jour du 7 avril 2020.

Guérir du Covid consiste donc à essayer de réparer ses faiblesses.

Et il pose ainsi le constat :

« Si la France était une personne unique, un « agent représentatif » comme les économistes aiment parfois à penser les nations, la crise serait simple à décrire : atteinte par une maladie imprévue, elle a peu travaillé et peu consommé, passant deux mois à se soigner. Le seul coût rémanent serait le déficit des paiements vis-à-vis du reste du monde, qui mesure le solde des dépenses qu’elle n’a pu couvrir par ses ventes à autrui. Les chiffres disponibles estiment, pour le mois d’avril, un déficit commercial en légère hausse de 1,8 milliard. La France a importé plus de masques et exporté moins d’avions… Le reste de l’ajustement peut s’interpréter comme un jeu à somme nulle entre Français. Si nous étions capables d’agir de manière solidaire, coordonnée, le coût de la crise serait totalement négligeable. »

Si nous étions capables d’agir de manière solidaire…par la coopération. Le système centré en premier sur la compétition montre ici toute sa limite.

Bien sûr, les grandes firmes du numérique continuent à pleinement profiter même de la pandémie.

Le mot du jour du 8 avril 2020 avait déjà donné la parole à Daniel Cohen : « La crise du coronavirus signale l’accélération d’un nouveau capitalisme, le capitalisme numérique »

Et il a réitéré cette thèse, début juin, dans WE demain : « On dirait que cette crise a été faite pour les GAFAM »

Enfin il faut être plus précis que cela, l’économiste distingue à l’intérieur des GAFAM

« Les gagnants, on les connaît : ce sont les GAFAM (Google, Apple, Facebook Amazon, Microsoft) et les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi), en réalité moins ceux qui dépendent de la publicité – qui s’est effondrée –, comme Google, que ceux qui ont réinventé le commerce en ligne, comme Amazon. On a le sentiment que cette crise a été faite pour eux : la distanciation sociale condamne toutes les activités où le client et le prestataire sont en vis-à-vis, du commerce traditionnel à la santé ou à l’éducation.

L’objectif du numérique, c’est de réduire les contacts, avec toujours l’obsession de réduire les coûts, d’économiser sur les relations de face-à-face. C’était déjà le rêve du monde bancaire : plus besoin d’agence, de banquier, de cartes puisque tout est dématérialisé. Même chose pour Amazon : pourquoi aller dans une librairie, dans un commerce, faire la queue, alors qu’on peut tout vous apporter chez vous ?…

Idem pour Netflix : pourquoi aller au cinéma, alors qu’une salle représente un coût énorme, et reste sous-utilisée en dehors des soirées et des week-ends ?

L’économie numérique vise à réduire les coûts de tous ces lieux de contact qui font le sel de la civilisation urbaine. Voyez encore les transports en commun : ça peut paraître absurde quand ils sont bondés, mais prendre un bus et traverser une ville fait partie de ces moments de détente dont on prend pleinement conscience quand on ne les a plus et que l’on est enchaîné à des réunions en ligne.

C’est tout ça que l’économie numérique veut affronter. Les grands gagnants sont bien les GAFAM. D’ailleurs, Jeff Bezos est le seul milliardaire qui s’est enrichi pendant la crise. »

Il faudra donc ajouter NETFLIX aux gagnants et probablement au GAFAM

Pour le commun des mortels, les préoccupations immédiates sont plus prosaïques

« Mais les loyers doivent être payés, les traites honorées. Les inégalités traversant la société créent des phénomènes irréversibles, qui laissent des traces durables sur le corps social. Quand une firme fait faillite ou qu’un salarié est licencié, c’est comme un arbre qu’on abat. La défaillance des uns n’est pas compensée par la bonne santé (relative) des autres. »

Daniel Cohen montre une autre fragilité du système, celle d’être incapable de se poser mais d’être toujours dans l’anticipation de ce qui doit arriver de sorte le plus souvent de créer ce que l’on a craint :

« La seconde fragilité du capitalisme est son extrême sensibilité à l’égard du futur. Si les firmes pensent que la situation va s’aggraver, les embauches ralentissent et la situation s’aggrave vraiment : les crises peuvent être autoréalisatrices. C’est l’une des différences majeures avec les lois de la physique. En économie, l’anticipation d’un événement peut suffire à le déclencher. L’incertitude liée à la crise sanitaire est d’une autre nature mais tout aussi radicale : on ne sait quel modèle utiliser pour appréhender son évolution. […] Tant que ces questions n’auront pas de réponses, les entreprises resteront attentistes, et aucune ne prendra le risque de recruter. C’est pour cette raison que le flux normal d’entrée et sortie du marché du travail est désormais bloqué et le chômage en train d’exploser. »

Daniel Cohen esquisse des idées et des actions à mener. Elles ne sont pas dans la panoplie du parfait libéral.

« La montée des inégalités et la peur de l’incertitude sont les deux maladies que les politiques publiques doivent guérir. Eviter les licenciements, soutenir les secteurs les plus menacés, maintenir le revenu des personnes en difficulté : toute la panoplie des instruments que la doxa libérale a longtemps décriée doit continuer à être mobilisée pour lutter contre la crise. Une contribution exceptionnelle permettant de payer les loyers des victimes de la crise pourrait être aussi envisagée.

Il faut également réfléchir à des mécanismes innovants, adaptés à l’incertitude du moment. L’économiste Joseph Stiglitz proposait ainsi d’inventer des contrats contingents à l’évolution du virus. Par exemple : vous achetez un appartement à crédit mais le contrat prévoit une clause qui retarde les échéances en fonction de la pandémie. Le coût du report du paiement (pas l’échéance elle-même) serait pris en charge par l’Etat. Une indemnisation plus généreuse du chômage pourrait également être accordée, en alignant le retour à la normale à l’évolution de la situation du marché de l’emploi. Une crise aussi extraordinaire que celle que nous connaissons exige des idées nouvelles. »

Il faut, en effet, des idées nouvelles.

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Lundi 29 juin 2020

«Nous nous dirigeons vers un monde où nous aurons moins de moyens pour plus de problèmes.»
Jean-Marc Jancovici

Jean-Marc Jancovici est un spécialiste de l’énergie et un acteur de la lutte pour une économie décarbonée, c’est-à-dire une économie qui ne crée plus de gaz à effet de serre et ne contribue plus au réchauffement climatique.

Il est ainsi le président du think thank :<THE SHIFT PROJECT> dont l’ambition est justement d’œuvrer en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone. Sur son site il est écrit :

[Nous sommes] une Association loi 1901 reconnue d’intérêt général et guidée par l’exigence de la rigueur scientifique, notre mission est d’éclairer et influencer le débat sur la transition énergétique en Europe.

Pour renvoyer vers une vidéo de plus de 2 heures, dans laquelle Jancovici répond aux questions des internautes à la fin de la période de confinement le 8 mai 2020, Yann Arthus-Bertrand le présente ainsi

« Jean-Marc Jancovici, […] me fascine toujours par son esprit de synthèse et son bon sens. Cette vidéo dans laquelle il répond aux questions des internautes le démontre une fois de plus : la langue de bois est absente de ses réponses. Ça fait du bien ! Sans être forcément toujours d’accord sur toutes ses propositions, elles méritent d’être écoutées et réfléchies. À écouter absolument car ça fait réfléchir. »

C’est très bien synthétisé, il fait réfléchir, les arguments qu’il apporte sont toujours précis, rationnels.

C’est un esprit très brillant, polytechnicien, Ingénieur Télécom né en 1962.

Si on s’intéresse à son parcours, on constate qu’il est entré très tôt dans la conscience écologique et dans la réflexion sur l’énergie.

Il ainsi collaboré avec l’Ademe Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie pour la mise au point du bilan carbone dont il est le principal développeur.

Il a aussi joué un rôle de premier plan dans la fondation Nicolas Hulot, notamment en étant coauteur du Pacte écologique signé par les différents candidats à la présidentielle de 2007. Par la suite il s’est éloigné de Nicolas Hulot en raison d’un désaccord sur la place de l’énergie nucléaire dans le cocktail énergétique à moyen terme.

La première fois où je l’ai écouté c’était lors des matins de France Culture du 7 novembre 2019, lors que Guillaume Erner l’avait invité sur le sujet : « Transition énergétique : avons-nous encore le temps ? »

Dans cette émission, il a exposé sa thèse de la prééminence de l’énergie dans la société économique que les humains ont bâti :

« Tout ce que nous avons aujourd’hui dans le monde moderne, notre pouvoir d’achat et les retraites, c’est l’énergie qui l’a permis. »

Dans une interview du <Figaro> il précise sa pensée sur ce point ;

«  La quantification économique a pris le pas sur d’autres métriques pour juger l’utilité de quelque chose. On pense spontanément que ce qui est utile vaut cher, que tout ce qui fait notre vie s’achète, or comme l’énergie ne coûte pas très cher dans notre poste de dépense (environ 10% pour un ménage pour logement et transports), le lien de dépendance n’est pas ressenti. Or ce qui fait notre mode de vie : les villes, le pouvoir d’achat, les études longues, le basculement dans le tertiaire, les week-ends, les 35h, les retraites, les six semaines de congés payés, la viande à tous les repas, c’est l’énergie, et très majoritairement les combustibles fossiles.

Les machines sont invisibles dans la convention économique : on continue à dire que les gens travaillent mais en réalité ce sont surtout les machines qui produisent. La puissance des machines dans le monde occidental, c’est 500 fois la puissance des muscles des Occidentaux. Pour que la France produise ce qu’elle produit aujourd’hui, sans machines, il faudrait multiplier sa population par 500 à 1000. Les machines sont totalement dépendantes de l’énergie, qui est un facteur beaucoup plus limitant que la force de travail pour l’économie. On ne se rend pas compte car on juge les choses à travers leur prix, convention humaine qui ne tient pas compte des réalités physiques. Dans le système économique moderne, on a considéré que tout ce qui venait de la nature était gratuit, n’avait pas de prix. En ce sens le pétrole est aussi gratuit que le vent car personne n’a rien payé pour qu’il se forme. La gratuité de ces sources énergétiques fait qu’elles ne sont pas dans notre radar. Nous sommes des urbains déconnectés des flux physiques qui nous permettent de vivre. Le thé que nous sommes en train de boire en ce moment a poussé à des milliers de kilomètres d’ici ! »

Dans l’émission de France Culture je l’ai trouvé assez irritant parce qu’il était  méprisant à l’égard des questions de Guillaume Erner.

D’ailleurs cette émission avait conduit à un certain nombre d’articles en soutien à Guillaume Erner et aussi d’auditeurs qui ont écrit et que <La page de la Médiatrice de France Culture > a publié :

« Mon message est un message de soutien et d’encouragement au mérite à l’attention de Guillaume Erne, qui ce matin (jeudi 7 novembre), et à ma complète stupéfaction, a dû essuyer les assauts hautains et répétés de son invité dans la matinale, j’ai nommé M. Jean-Marc Jancovici, […]

Fidèle auditrice de France Culture depuis plus de 40 ans (oui !) […] C’est pourquoi je souhaite vous dire mon indignation après avoir entendu pendant plus d’une heure les propos arrogants […]

En écoutant cette agressivité et cette hargne remplie de certitudes !!! »

Toutefois au-delà de cette tension qui avait davantage à voir avec l’émotion qu’avec l’intelligence, j’ai fait des recherches sur Internet et j’ai constaté qu’en effet cet homme un peu rugueux était quand même quelqu’un d’intéressant qui argumentait et présentait ses réponses sans langue de bois pour reprendre l’expression de Yann Arthus-Bertrand.

Par la suite j’ai compris que Jean-Marc Jancovici est présenté comme un lobbyiste pro-nucléaire et qu’il avait demandé à Guillaume Erner que le sujet du nucléaire ne soit abordé que de manière marginale. Guillaume Erner ne respecta pas cette promesse.

Jancovici défend en effet la conservation d’une énergie nucléaire conséquente mais uniquement pour atténuer l’impact sur nos modes de vie de la diminution de l’énergie carbonée.

Laissant de côté l’affect et l’irritation je suis revenu vers ses arguments :

« Donc discuter de l’énergie, c’est discuter de tout ce qui nous entoure aujourd’hui. L’essentiel de ce qui permet ça dans le monde, ce n’est pas du tout le nucléaire, ce sont les combustibles fossiles, c’est à dire le pétrole, le charbon ou le gaz. Il se trouve qu’en France, deux tiers de nos émissions de CO2, c’est à dire ce qui provoque le changement climatique, viennent du pétrole, un quart vient du gaz, 5% vient du charbon, et 0% du nucléaire. Le nucléaire a des inconvénients. Mais ne parler que du nucléaire est quelque chose qui finit par devenir un peu contre-productif. […]

Le risque zéro n’existe pas. Par contre, ce qui est dommage aujourd’hui, c’est que dans le public il y a une compréhension du risque nucléaire qui est totalement erronée. Je vais vous donner un premier exemple de faillite médiatique : 80% des Français pensent que le nucléaire contribue au changement climatique. Il peut avoir tous les défauts de la Terre, mais pas celui-là. Les déchets nucléaires font plus peur à la population que, tenez-vous bien, les accidents de la route ou que les accidents domestiques. Les accidents domestiques, c’est 20 000 morts par an. Les déchets nucléaires, c’est zéro. Ça fait plus peur que l’obésité chez les jeunes, ça fait quasiment aussi peur que le tabagisme. »

Pour résumer ce qu’il dit :

  • La priorité c’est de diminuer les énergies fossiles qui augmentent la température ;
  • Selon lui cette diminution nécessite que nous devenions beaucoup plus sobres et consommions beaucoup moins d’énergie. Ce qui aura pour conséquence une diminution de notre train de vie
  • Il pense pour différentes raisons que les énergies renouvelables solaires et éoliennes ne pourront pas remplacer le pétrole, le gaz et le charbon d’abord parce qu’ils donnent de l’énergie intermittente dépendant du soleil et du vent et d’autre part parce qu’ils nécessitent pour leur construction et leur renouvellement d’éléments très perturbants écologiquement et qu’enfin il nécessite une grande emprise foncière pour pouvoir fonctionner.
  • Ainsi pour atténuer l’atterrissage comme dirait Bruno Latour, le moindre mal reste l’énergie nucléaire.

Il dit :

« Globalement, il faut baisser de 4% par an nos émissions de CO2. Alors là-dedans, ni les énergies renouvelables, ni le nucléaire ne permettront de compenser cette baisse pour conserver le confort moderne. Il faut bien comprendre que de lutter contre le changement climatique, c’est de se mettre au régime. […] Le non-dit politique majeur aujourd’hui, c’est que cela n’est pas compatible avec la croissance économique. Ce n’est même pas compatible avec le maintien de la production économique actuelle. Donc, cela veut dire perte de pouvoir d’achat, pour être très clair, pour tout le monde, pas juste pour les riches. »

Pour lui, tous ou quasi tous les occidentaux sont concernés et consomment trop d’énergie. Il a ajouté, dans un autre article, dans ce monde de diminution, les inégalités actuelles avec les hyper riches seront encore plus insupportables.

Il a été réinvité par Guillaumer Erner, dans une émission beaucoup plus calme avec des échanges beaucoup plus apaisées le 14 mai 2020 : <La pandémie va-t-elle accélérer la transition énergétique>

C’est lors de cette émission qu’il a eu cette phrase que j’ai mis en exergue :

« Nous nous dirigeons vers un monde où nous aurons moins de moyens pour plus de problèmes »

Dans cette émission il a apporté une nouvelle analyse que je n’ai pas entendu ailleurs :

« Il y a une transition énergétique cachée derrière cette crise dont on ne se rend pas compte qui concerne le pétrole. Avant la crise du covid, la production de pétrole dans le monde s’est arrêtée de croitre depuis maintenant un an et demi. Et le covid n’a fait qu’accélérer cette tendance-là. La crise économique a fait plonger les prix du pétrole vers le bas. Et l’offre de pétrole va baisser. […]

La transition énergétique qui va se faire sans qu’on s’en rende compte, c’est que l’après ne pourra pas revenir au niveau de l’avant parce qu’il n’y aura pas assez de pétrole. Donc, une partie du tourisme ne pourra pas revenir. Quoi qu’on fasse, une partie des déplacements ne pourra pas revenir quoi qu’on fasse tout comme une partie de l’économie. »

[…] On va opérer graduellement une transition de force car on n’a pas voulu faire celle qui était de gré. En ce moment la transition énergétique est une diminution de la consommation subie. En France comme dans beaucoup de pays européens, on voit la transition énergétique comme une évolution technologique dans un univers en croissance. On a des lois en France de « croissance verte ». En fait, la transition énergétique va passer par une privation du pétrole, du charbon et du gaz. Donc toute cette production va se contracter et l’économie va elle-même se contracter. Et la grande question est d’organiser un monde dans lequel il n’y a pas de plus en plus mais de moins en moins. […] »

La voiture électrique ne trouve pas non plus grâce à ses yeux. Il pense plutôt qu’il faut remplacer les SUV par des petites voitures :

« La chose la plus évidente pour remplacer une voiture qui consomme 6L/100km, c’est de la remplacer par une voiture qui consomme 2L/100Km. Il y a aussi le passage sur le vélo, le vélo électrique en particulier, est quelque chose qui a un potentiel très important dès que vous avez 10 ou 15 km à faire, parce que c’est un vélo sans effort. Le problème du vélo électrique, c’est de construire des pistes cyclables pour avoir une voirie séparée pour les vélos. »

Dans l’article du Figaro, déjà cité, il donne des pistes qui lui semblent judicieuses pour les individus afin de diminuer leur empreinte carbone :

« Pour les individus : Nous avons sorti une étude avec Carbone 4 intitulée « Faire sa part» pour essayer de calculer comment diminuer de moitié son empreinte carbone par des gestes et des investissements sans que ça soit trop violent. Il y a quatre gros postes d’émissions carbone chez les particuliers. D’abord l’alimentation : un premier geste peut être de manger moins de viande. En France, il faudrait diviser le cheptel bovin par deux et multiplier les prix unitaires par trois pour que les éleveurs puissent se payer correctement. Ensuite, les déplacements. Le particulier doit privilégier les voitures les plus petites possibles, et les déplacements sans voiture (bus, vélo, marche, train, diminution des trajets en portée, ou covoiturage). L’état devrait mettre une prime à la casse extrêmement élevée dès lors qu’on achète une voiture neuve qui consomme moins de la moitié de l’ancienne. Il peut aussi remettre en place la vignette et réglementer à la baisse les émissions des voitures neuves. Troisième poste d’émission : la consommation : il faut acheter moins de « tout », que ce soit des vêtements ou de l’électronique (cette dernière représente un pas qui croit très vite!). Enfin, le chauffage : on peut baisser le thermostat, isoler, ou changer sa chaudière fioul ou gaz pour une pompe à chaleur ou au bois en milieu rural. »

C’est donc une pensée sans concession, mais qui me semble indispensable à connaître et à lire, pour réfléchir et se poser des questions pertinentes.

Rien n’interdit cependant d’apporter d’autres réponses que Jankovici. Il dispose d’un site que vous trouverez derrière ce lien : https://jancovici.com/ Ce mot du jour a été publié le jour de la fermeture définitive de la centrale nucléaire de Fessenheim.

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Vendredi 26 juin 2020

«Pause»
Un jour sans mot du jour

Pas de mot du jour nouveau aujourd’hui.

Le 26 juin 2019 je faisais une nouvelle fois appel à Michel Serres pour parler des nomades et des sédentaires :

« Je ne crois pas que l’on puisse imaginer un monde sans agriculture. »

Un combat éternel disait-il.

L’agriculteur est un sédentaire.

Et il en référait même à Cain et Abel.

Ce sont les nomades qui sont les vainqueurs de la mondialisation.

Mais le COVID fait s’interroger sur le nomadisme effréné.

<Mot sans numéro>

Jeudi 25 juin 2020

«Le point Godwin»
L’instant dans un débat ou dans une discussion où apparait la comparaison avec Hitler ou les nazis

Au commencement, il n’était pas question de « point » mais de Loi Godwin et cette dernière s’appliquait aux discussions en ligne. Reprenons cela.

C’est un avocat américain qui s’appelle Mike Godwin qui a énoncé cette Loi empirique en 1990 :

« Plus une discussion en ligne dure, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de un. »

Ce qui signifie que la probabilité qu’elle se réalise est proche de 100%

Xavier de La Porte avait consacré une chronique en 2014 à ce sujet : <Pour en finir avec le point Godwin>. Il rappelle que Mike Godwin a réalisé ses observations sur Usenet qui constituait des prémices de l’Internet .

C’est pourquoi cette règle s’appliquera facilement à Internet dans une logique de continuité.

Xavier de La Porte fait remonter cette Loi à un philosophe allemand :

« En fait, Mike Godwin applique aux conversations en ligne un phénomène identifié dès le début des années 1950 par le philosophe Léo Strauss sous le nom de « reductio ad hitlerum » (« réduction à Hitler »), et qui consiste à disqualifier l’argumentation de l’adversaire en l’associant à Hitler, au Nazi ou à toute autre idéologie honnie de l’Histoire. »

<Wikipedia> est une nouvelle fois d’un grand secours et permet d’apporter à la fois des nuances et des précisions.

Dans son application première, la Loi de Godwin entend conceptualiser ce moment où l’argument disparaît pour être transformé en des analogies extrêmes essayant de discréditer la position de l’adversaire. Il constitue aussi l’arrêt de la discussion puisque les arguments cessent.

La nuance est que la comparaison avec les nazis n’est pas toujours une figure rhétorique mais peut être légitime quand des paroles ou des actions peuvent rappeler l’époque nazi. C’est le cas lorsque certains commencent à évoquer des discriminations ethniques ou religieuses.

Par exemple, Mike Godwin est intervenu lui-même dans la presse au cours des manifestations de Charlottesville d’août 2017 (rassemblant des supremacistes blancs, des néonazis et d’autres branches de l’alt-right américaine) pour dire que, bien sûr, les participants aux marches pouvaient être comparés à des nazis :

Mais ce n’est pas dans ce cas que la Loi Godwin est pertinente. Il faut plutôt que le sujet de la discussion soit très éloigné d’un quelconque débat idéologique, une comparaison de ce genre est alors considérée comme un signe d’échec de la discussion.

Wikipedia précise :

« Selon Mike Godwin, « le point Godwin » est une expression qui s’est développée dans les milieux francophones : « Pour être tout à fait clair, j’ai inventé la « loi de Godwin », pas « le point Godwin » – cette expression s’est développée chez les francophones. Ceux-ci parlent de « point Godwin » quand ils atteignent, dans la discussion, le stade de la comparaison avec les nazis : ils se décernent mêmes des « points Godwin » par dérision ! J’apprécie cette inventivité linguistique mais, à ma connaissance, cette expression est propre aux francophones.»

C’est pourquoi je trouve intéressant de parler de « point » à partir duquel il est temps de clore le débat, dont il ne sortira plus rien de pertinent.

On dit que l’on a atteint le « point Godwin » de la discussion. Wikipedia analyse :

« Bien que le point Godwin ait originellement le sens de « point de non-retour », les francophones jouent sur deux sens du mot « point », qui peut désigner :

  • soit le moment de la discussion auquel le dérapage survient ; dans ce sens du terme, on atteint le point Godwin ;
  • soit le point en tant que récompense ou mauvais point attribué au participant qui aura permis de vérifier la loi de Godwin en venant mêler Adolf Hitler, le nazisme ou toute idéologie extrémiste à une discussion dont ce n’est pas le sujet ; dans ce sens du terme, on marque ou gagne un point Godwin.»

Recevoir un point Godwin devrait faire réaliser qu’on a été ridicule dans son argumentation.

Il existerait même des « remises de prix » publiques de points Godwin.

Depuis, le point Godwin s’est étendu à d’autres sphères qu’internet.

Par exemple le domaine politique : Le chef d’Etat Recep Tayyip Erdogan, en 2017 a comparé les Pays-Bas et l’Allemagne aux nazis parce que ces deux pays européens avaient refusé l’organisation de meeting turc sur leur territoire.

Pourquoi je parle aujourd’hui du point Godwin ?

Parce que je n’en ai jamais parlé et que cela étend encore les sujets évoqués par le mot du jour.

Mais aussi, parce qu’il a été atteint dans les élections municipales et métropolitaines à Lyon.

Vous savez qu’il est possible que les écologistes s’emparent de la mairie de Lyon et aussi de la métropole de Lyon. C’est pour cette raison que Gérard Collomb s’est associé à la Droite pour éviter ce résultat.

Dans un premier temps, assez naturellement Collomb et ses alliés ont traité les écologistes d’incompétents.

Puis, ils sont allés plus loin, comme le rapporte de journal <Les Echos> Ils les ont traités « d’extrémistes »

« Son camp et celui de la droite dénonçaient le « péril rouge-vert » et « l’extrémisme écologiste ». »

Puis des textes et des mails ont circulé, Annie en a reçu, dans les milieux économiques pour appeler à faire barrage aux écologistes.

Ils se sont nommés « des Acteurs de Lyon ». Ce collectif revendique l’anonymat, de peur d’exposer leurs entreprises qui dépendent parfois de la commande publique.

On peut lire par exemple :

« Les écologistes, c’est la décroissance et la misère. »

Une étape plus loin, Christophe Marguin, président des Toques Blanches lyonnaises qui est une associations de cuisiniers opérant à Lyon, a traité les électeurs des écologistes de « connards ».

Cet homme inélégant est lui-même chef cuisinier du restaurant « Le Président », il est aussi candidat sur la liste LR dans la circonscription Lyon Nord.

Et enfin…

Le Point Godwin a été atteint par un bijoutier lyonnais : Jean-Louis Maier

<Lyon Capitale> rapporte :

« Jean-Louis Maier a franchi un nouveau cap dans un podcast d’Arte Radio publié ce mercredi en comparant les Verts à Adolf Hitler. « Hitler est arrivé au pouvoir démocratiquement. Ce n’était pas une bonne idée », lâche-t-il. « Le danger est au même niveau entre l’arrivée de Bruno Bernard à la tête de la métropole et celle d’Adolf Hitler pour la population lyonnaise ? », le reprend le journaliste. « Oui. Quand vous avez perdu la démocratie vous ne la retrouvez pas facilement », répond, le ton presque inquiet, Jean-Louis Maier. »

Je pense que nous pouvons attribuer le Point Godwin à Monsieur Jean-Louis Maier.

Je me demande quand même si toutes ces agitations ne sont pas contreproductives et ne vont pas conduire des électeurs moins convaincus à voter vert pour rejeter tous ces excès.

Et je ne résiste pas à finir ce mot du jour par une affiche d’antan

Gérard Collomb n’avait pas expliqué, à cette époque, qu’il était pour la retraite à 60 ans …
pour les autres …

Il a fêté le 20 juin ses 73 ans. Dans 6 ans à la fin du mandat qui commencera après les prochaines élections il en aura 79.

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Mercredi 24 juin 2020

«L’antiracisme est un combat juste. Il ne doit pas devenir un acte de vandalisme intellectuel ou de désordre dans ce monde si fragile.»
Kamel Daoud

Lors des derniers mots du jour, j’ai évoqué à plusieurs fois le racisme de blancs à l’égard des noirs, des crimes contre les noirs et des questions de mémoire aussi.

La mémoire que l’on met en avant dans un récit et qui se reflète dans des statues que l’on érige dans les villes ou les noms qu’on donne à des boulevards ou des avenues et aussi ceux qu’on donne à des ruelles ou des impasses.

Lundi, j’évoquais la proposition de donner le nom de Franz Fanon à une ruelle d’un nouveau quartier de Bordeaux. Ce n’était pas grand-chose, ce n’était qu’une ruelle. Mais c’était encore trop pour ceux qui continuent à raconter le récit de l’Algérie française. Dans ce récit un opposant au colonisateur ne peut pas être honoré, même d’une ruelle.

En revanche, il n’y a pas de problème en France d’avoir des rues et des statues au nom du Maréchal Bugeaud qui fut un responsable de la colonisation de l’Algérie. C’est la réflexion que je me faisais, hier soir, en passant par la rue Bugeaud dans le cossu 6ème arrondissement de Lyon.

Une avenue parisienne porte son nom dans le 16e arrondissement de Paris qui est un peu l’équivalent du 6ème de Lyon. La place centrale de la ville de Périgueux porte une monumentale statue de ce maréchal de France. J’ai lu qu’une rue porte aussi son nom dans le 3ème arrondissement de Marseille.

Le Maréchal Bugeaud qui a dit

« Le but n’est pas de courir après les Arabes, ce qui est fort inutile ; il est d’empêcher les Arabes de semer, de récolter, de pâturer, […] de jouir de leurs champs […]. Allez tous les ans leur brûler leurs récoltes […], ou bien exterminez-les jusqu’au dernier. »

Ou encore

« Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac aux Sbéhas ! Fumez-les à outrance comme des renards. »

Cet article <des Inrocks> donne la parole à Benjamin Stora pour essayer de décrire le personnage et ses actes.

Article qui avait été écrit après qu’Eric Zemmour ait dévoilé son récit de la France, qu’hélas un trop grand nombre partage :

« Quand le général Bugeaud arrive en Algérie, il commence à massacrer les musulmans, et même certains juifs. Eh bien moi, je suis aujourd’hui du côté du général Bugeaud. C’est ça être Français ! »

Voilà qui est dit !

Mais s’il est possible de s’interroger, de se poser des questions sur ce sujet des récits, sur des hommes qu’on a mis en avant jusqu’à présent et aussi sur les femmes et les hommes qu’on pourrait aujourd’hui mettre en avant, il est tout aussi possible de ne pas partager tous les combats de celles et ceux qui aujourd’hui se prétendent de la lutte antiraciste.

On peut désapprouver une femme noire qui insulte un policier de peau noire et le traite de <vendu> parce que selon ses préjugés antiracistes, on ne peut être noir et policier de la République. Pour elle un policier est blanc et c’est la police des blancs. Avec ce type de réaction, nous n’allons pas avancer beaucoup dans notre société.

C’est ce que dénonce Caroline Fourest dans son livre « génération offensée » dans lequel elle dénonce l’antiracisme identitaire et des procès en appropriation culturelle qui peuvent menacer la liberté d’expression et de création artistique. Puisque pour ces antiracistes, un blanc ne peut pas avoir un discours ou créer un ouvrage artistique qui défend les noirs ou simplement dénonce l’injustice qui leur est faite. Il n’a pas le droit de le faire parce qu’il n’est pas noir et ne peut donc pas comprendre les souffrances et les sentiments des noirs.

J’aime beaucoup Caroline Fourest.

J’aime aussi Kamel Daoud qui est un esprit libre et qui comme Caroline Fourest aspire à une pensée universaliste et non sectaire.

Car, avant, le contraire du raciste était l’universaliste celui qui considérait que tous les humains étaient égaux et que chaque humain avait le droit de défendre un autre humain même s’il n’appartenait pas à sa tribu. Et chaque humain avait le droit de critiquer sa tribu et des humains de sa tribu.

Rien de tel chez beaucoup d’antiracistes d’aujourd’hui, pour qui la défense de sa tribu ne permet aucune nuance.

Kamel Daoud est universaliste et il est ainsi critiqué parce qu’on le soupçonne de trahir sa tribu. Le journal algérien « El Watan » rapporte, en janvier 2020, les propos de Rachid Boudjedra, l’auteur de « la Répudiation », sur Kamel Daoud :

« Kamel Daoud dont les œuvres récentes, sont idéologiquement plus référencées à la mentalité de l’ancien colonisateur qu’au patrimoine historique et culturel de son pays. Il lui adressa en ce sens une critique sans concession qui a eu du mal à passer dans les milieux intellectuels algériens, une diatribe frontale pour lui signifier que sa « soumission » psychologique à l’intelligentsia outre-Méditerranée est une véritable dérive. Le rapport à l’écriture est ainsi vu comme une grave altération à la liberté de penser et de s’exprimer à partir de l’instant où il devient dépendant et s’exécute en fonction d’un imaginaire trompeur et souvent perfide, qui va trop loin aussi dans la déformation de la vérité. »

Et le journal d’ajouter :

« Tout est sciemment articulé autour de ce « lien » avec l’ancien colonisateur qui doit être visible et pas seulement suggéré »

Kamel Daoud a publié une tribune dans le journal le Monde publié le 22/06/2020, tribune que je veux partager aujourd’hui : « L’Occident est imparfait et à parfaire, il n’est pas à détruire »

Il interroge d’abord sur cette obsession de vouloir détruire, piétiner l’occident :

« Faut-il détruire l’Occident ? Le mettre à feu et à sang pour mieux le reconstruire ou mieux le piétiner dans ses ruines ? […] On aura beau le nier et le relativiser, il y a déjà un instinct de mort dans les airs de la révolution totale imaginée par chacun. L’Occident étant coupable par définition selon certains, on se retrouve non dans la revendication du changement mais, peu à peu, dans celle de la destruction, la restauration d’une barbarie de revanche. »

Il ne faudrait en effet pas oublier que les arabes ont aussi été des colonisateurs et ont aussi été des très grands esclavagistes.

Quand aujourd’hui on ne critique que l’occident démocratique et qu’on est complaisant, voire admiratif pour la Chine qui est un pays totalitaire avec un régime oppressif qui ne connait aucun contre-pouvoir, ne fait-on pas fausse route ?

Kamel Daoud signale cette faiblesse de critiquer ceux qui acceptent la critique et de ne pas critiquer ceux qui font pire mais qui ne tolèrent pas la contradiction.

« Ces procès anti-Occident à la soviétique, si faciles et si confortables, à peine coûteux quand on ne vit pas dans la dictature qu’on a fuie, menés par les intellectuels du sud en exil confortable en Occident ou par des fourvoyés locaux sont une impasse, une parade ou une lâcheté. Ils n’ont ni courage, ni sincérité, ni utilité. […]

La règle de ce confort est qu’il est plus facile de déboulonner la statue d’un tyran, au nord, sous les smartphones, que de déboulonner un vrai tyran vivant au « sud ». Et il n’est pas même utile de répondre à ceux qui, lorsque vous tenez ces propos pourtant réalistes, vous accusent de servilité intellectuelle. »

Et il fait ce que lui reproche le journal « El Watan » il ne trouve pas tous les torts du côté de l’occident et tous les vertus du côté de ceux qui le critique :

« Le fait même de défendre l’Occident comme espace de liberté, certes incomplète et imparfaite, est jugé blasphématoire dans cette nouvelle lutte des classes et des races. Il est interdit de dire que l’Occident est aussi le lieu vers où l’on fuit quand on veut échapper à l’injustice de son pays d’origine, à la dictature, à la guerre, à la faim, ou simplement à l’ennui. Il est de bon ton de dire que l’Occident est coupable de tout pour mieux définir sa propre innocence absolue. […]

Erreurs et illusions coûteuses. L’Occident est à la fois coupable et innocent. Or, tuer un coupable ne brise pas la chaîne de la douleur. Elle fait échanger les robes des victimes et des bourreaux. On le sait tous, et c’est une banalité utile à remémorer.

Il est urgent de rappeler que sur les colères d’aujourd’hui se greffent trop de radicalités pour qu’on puisse éviter la violence si on continue dans le même aveuglement. Brûler l’Occident, ce rêve si facile qu’Internet et ces militants agitateurs des réseaux commercialisent en guise de « néopureté » et de légitimité, est une erreur qui aura de lourdes conséquences. »

On se retrouvera, dans quelques décennies, à vivre dans ces champs nus, à construire la barbarie qu’on a cru dénoncer. »

Voilà des paroles fortes et j’aime particulièrement sa conclusion :

« Monstrueux quand il a faim, selon l’expression d’un internaute, injuste et au passé vandale, beau, fascinant dans la nuit du monde, nimbé dans le rêve et le fantasme pour le migrant, vertueux par une démocratie inachevée, hypocrite à cause de sa prédation des ressources, son passé colonial tueur, inconscient et heureux, l’Occident est ce qu’il est : imparfait et à parfaire. Il n’est pas à détruire. Ceux qui en rêvent sont ceux qui n’ont pas su avoir de rêve meilleur que la barbarie de revanche, pas su dépasser des rancunes intimes. […] L’antiracisme est un combat juste. Il ne doit pas devenir un acte de vandalisme intellectuel ou de désordre dans ce monde si fragile. Son but est un avenir meilleur, pas un passé aveuglant […] »

Paroles de la nuance, de la complexité.

Non pas un monde binaire dans lequel d’un côté il y a tout le bien et de l’autre tout le mal.

<1444>

Mardi 24 juin 2020

«Requiem pour Wolf Musique, institution de la vie musicale européenne depuis près de deux siècles.»
Titre du Figaro annonçant la fermeture de ce magasin de musique de Strasbourg

C’était une institution strasbourgeoise de 195 ans, située 24 rue de la Mésange. C’est-à-dire la rue qui relie la Place de Broglie où se trouve l’Hôtel de ville et l’Opéra du Rhin et la Rue des Arcades qui permet d’atteindre, en deux pas, la Place Kléber. Nous sommes dans l’hyper centre de Strasbourg.

Cette institution était un magasin de musique : « Wolf Musique » l’un des plus anciens magasins de musique de France.

Ce magasin a été fondé en 1825 par Seeligman Wolf, négociant juif dont la famille venait d’Allemagne.

Mais en 1825, Strasbourg était française et la France était dans cette période que l’on appelait « La Restauration ». Charles X venait de succéder à son frère, Louis XVIII décédé en septembre 1824.

Strasbourg va devenir allemand entre 1870 et 1918.

C’est pendant cette période, qu’en 1905 c’est passé un évènement qui faisait, encore de nos jours, la fierté de ce magasin :

C’est <Le Figaro> qui le raconte le plus précisément :

« Mais sa légende, c’est à deux compositeurs qu’il la doit. Dix ans plus tard, à l’été 1905, Richard Strauss et Gustav Mahler se retrouveront dans sa boutique. Là, au milieu des instruments, Strauss s’accompagnant lui-même au piano, lui fera lecture, en chantant, de son opéra Salomé tout juste achevé. Alma Mahler, épouse du chef et compositeur, témoignera de la réaction enthousiaste de ce dernier en même temps que de l’excitation du moment : « Nous arrivâmes au passage de la Danse des sept voiles. « Ça, je ne l’ai pas encore écrit », dit Strauss, et il continua à jouer, après ce grand vide, jusqu’à la fin. Mahler suggéra : « N’est-il pas dangereux de laisser de côté la danse, et de l’écrire plus tard quand on n’est plus dans l’atmosphère du travail ? » Alors Strauss se mit à rire de son rire frivole : « ça, j’en fais mon affaire ! » » Quelques semaines plus tard, à tête reposée, Mahler lui-même exprimera par écrit à Strauss, encore grisé par l’émotion :

« C’est votre sommet. Oui, je prétends que rien de ce que vous avez écrit jusqu’à présent ne peut se comparer à cela…» »

Wolf Musique était une véritable institution pour tout le monde musical français et une bonne partie du monde musicale d’outre-Rhin.

La boutique avait commencé, en 1825, par vendre des partitions, au début du XXème siècle des instruments s’y ajoutèrent.

Lazare Wolf, fils du fondateur, eu l’idée d’ajouter à son activité de vente, l’organisation de concerts.

Et c’est ainsi que les plus grands musiciens se sont retrouvés dans le magasin ou liés d’une manière ou d’une autre à l’institution. Richard Strauss et Gustav Mahler qui dirigèrent des concerts de leurs œuvres à Strasbourg dans des concerts organisés par Wolf Musique furent les plus grands. Mais on peut aussi citer Hans von Bülow, Furtwaengler, Klemperer et Charles Münch le régional de l’étape.

Après les années 1950, le magasin vendit aussi des disques et du matériel Hifi. Lors des 3 années que j’ai passées à Strasbourg entre 1976 et 1979, j’y allais régulièrement pour les disques. Je me souviens même d’y avoir acheté les 9 symphonies de Beethoven par Klemperer. La FNAC est arrivée à Strasbourg en 1978, Wolf a pu résister 10 ans pendant lesquels il a encore vendu des disques.

Le séisme provoqué par l’arrivée des grandes surfaces contraint Wolf Musique à se recentrer sur la vente d’instruments de musique et de partitions.

Wolf Musique créa aussi le célèbre Festival de Musique de Strasbourg.

La première édition eut lieu en 1932 avec le Philharmonique de Berlin sous la direction de Furtwängler. Wolf musique continua à participer à l’organisation de ce festival jusqu’en 2013. En 2014 le festival s’arrêta suite au dépôt de bilan de la Société des Amis de la Musique de Strasbourg… Dépôt de bilan annonciateur de celui de Wolf Musique, six années plus tard : fragilisé comme de nombreux professionnels du secteur par la montée en puissance d’internet, la vente en ligne puis par la baisse de clientèle liée aux attentats de 2015, qui ont amené les autorités à renforcer les mesures de sécurité autour du marché de Noël et à boucler une partie du centre-ville.

La pandémie lui aura donné le coup de grâce. Wolf Musique, n’a pas survécu à la crise économique liée au coronavirus, la boutique a baissé son rideau définitivement samedi 13 juin 2020.

Le magasin comptait encore 6 salariés. Dans les années 1960, Wolf Musique connaissait son âge d’or avec 49 employés répartis dans 9 boutiques

Cette fermeture n’est pas passée inaperçue, les sites et journaux ont donné un écho à cet évènement :

France Musique : <A Strasbourg, fermeture de Wolf, l’un des plus anciens magasins de musique de France>

Le Figaro <Requiem pour Wolf Musique, institution de la vie musicale européenne depuis près de deux siècles>

Le Parisien : <Strasbourg : Wolf, le plus vieux magasin de musique de province, tire le rideau>

Le Monde : <A Strasbourg, Wolf, institution du monde de la musique, fait entendre ses dernières notes>

Cette faillite, rendue inéluctable par la perte de son chiffre d’affaires liée au Covid-19, n’est pas un cas isolé. Il vient s’ajouter à une liste hélas grandissante de vénérables lieux de culture et de musique, victimes un peu partout dans le monde des conséquences économiques du coronavirus.

Le Figaro écrit :

« C’est ainsi que l’on a appris, il y a quarante-huit heures, la fermeture du plus ancien disquaire de Manhattan, à New York : Record Mart, fondé en 1958. Le mois dernier, c’était aussi le choc pour de nombreux mélomanes et musiciens néerlandais, qui découvraient que Hampe & Berkel, la plus ancienne boutique d’instruments et partitions d’Amsterdam, venait de mettre définitivement la clef sous la porte, après 178 ans de bons et loyaux services. »

Le monde de la musique et plus généralement de la culture est terriblement impacté par cette crise économique.

Souvent des institutions étaient déjà fragilisées en raison de l’évolution des modes de consommation, le COVID-19 a été dans ces cas l’épreuve de trop..

D’autres commerces aussi sont impactées.

Que deviendront nos villes quand un nombre de plus en plus important de commerces fermeront leurs portes et leurs vitrines ?

On me dit qu’Amazon va bien…

<1443>

Lundi 22 juin 2020

«Pause»
Un jour sans mot du jour

Pas de mot du jour nouveau aujourd’hui.

Les derniers mots du jour concernaient le racisme anti-noir et aussi le récit un peu étriqué que la France faisait à travers les statues qui parent nos villes comme aussi les noms des avenues, boulevards et rues.

Le nombre d’hommes blancs ayant un rôle plus ou moins étroit avec les choses militaires est proportionnellement excessivement important.

S’il faut trouver des hommes de peau noire, on pourrait laisser une place à Franz Fanon.

Je lui avais consacré le mot du jour du 27 février 2019.

Et ce mot du jour donnait comme information que justement à Bordeaux

« Le maire de Bordeaux, Alain Juppé, a décidé de «surseoir» à la proposition de nommer une ruelle d’un des nouveaux quartiers de la ville du nom de Frantz Fanon (grande figure anticolonialiste). «Aujourd’hui, le choix du nom de Frantz Fanon suscite des incompréhensions, des polémiques, des oppositions que je peux comprendre. Dans un souci d’apaisement, j’ai donc décidé de surseoir à cette proposition», »

Gallieni, Bugeaud et d’autres assassins ne posent pas problème, en revanche Franz Fanon non.

Que lui reprochait t’on ?

« L’opposition municipale Rassemblement National ainsi que des internautes avaient critiqué le choix de nommer cette ruelle du nom de l’humaniste martiniquais, proche du Front de libération nationale (FLN) algérien qui a mené la guerre d’indépendance contre la France. »

La manière dont on nomme les rues constitue un récit et un choix que l’on fait dans la hiérarchie des mémoires qu’on veut privilégier.

<Mot sans numéro>

Vendredi 19 juin 2020

«Le Tata sénégalais de Chasselay»
Cimetière militaire de la Seconde Guerre mondiale

C’était il y a 80 ans.

Des hommes venant majoritairement du Sénégal, mais aussi du Mali, de Guinée, de Côte d’Ivoire, du Gabon se sont battus pour la France en 1940. Ils appartenaient à toutes les ethnies de la région, peuls, bambaras ou malinké. On les appelait les « tirailleurs sénégalais » mais on leur avait aussi donné le nom d’« armée noire ». Wikipedia nous apprend que jusqu’en, 1905, ce corps intégrait des esclaves rachetés à leurs maîtres locaux.

En 1940, ils faisaient encore partie de l’empire colonial français.

L’armée française les avait convaincus de venir se battre au côté de leur colonisateur pour défendre la France qui était attaqué par l’Allemagne nazi.

Et en juin 1940, le 25e régiment de tirailleurs sénégalais fait partie des troupes déployées au nord de Lyon, sur une ligne de défense censée retarder l’entrée des Allemands dans Lyon.

Ces affrontements des 19 et 20 juin sont parmi les derniers combats de la campagne de France.

Ce sont des combats de l’inutile car la bataille de France est déjà perdue, le 17 juin, le maréchal Pétain a annoncé un cessez-le-feu et demandé l’armistice, signé le 22 juin à Rethondes, le 18 juin qui reste la date la plus célèbre de juin 40, le général de Gaulle appelle, depuis Londres les Français à poursuivre le combat.

A Chasselay, ni les tirailleurs ni leurs officiers n’ont évidemment entendu le message lancé sur les ondes de la BBC. Malgré tout, ils vont contribuer, dès le lendemain, à entretenir cette « flamme de la résistance française » que l’exilé appelle de ses vœux.

Moins de 5 000 hommes dont 2 200 tirailleurs sénégalais vont s’opposer aux 20 000 soldats du régiment d’infanterie Grossdeutschland et de la division SS Totenkopf. Les Allemands se pensent déjà en terrain conquis ; ils ont traversé la Bourgogne sans rencontrer d’opposition et savent que Lyon a été déclarée « ville ouverte » le 18 au matin.

Tandis qu’ailleurs les soldats français préfèrent rompre et s’enfuir, à Chasselay et dans les communes environnantes, comme Lentilly, Fleurieu ou L’Arbresle, les tirailleurs sénégalais et quelques artilleurs aux moyens dérisoires font face à la Wehrmacht. Ils ouvrent le feu, le 19 vers 10 heures, sur les émissaires allemands venus leur intimer de se rendre. S’ensuivent plusieurs heures de combats meurtriers, notamment autour du couvent de Montluzin. Le lendemain, à la tête d’une poignée de braves regroupés dans le parc du château du Plantin, le capitaine Gouzy décide même d’un « baroud d’honneur ».

Les troupes françaises devront au bout du combat se rendre.

Et, le 20 juin 1940, en fin d’après-midi, quarante-huit tirailleurs sénégalais faits prisonniers sont conduits à l’écart des maisons de Chasselay, dans un champ, au lieu-dit Vide-Sac.

Désarmés, les bras en l’air, ils vont bientôt être fauchés par les mitrailleuses de deux chars, achevés au fusil et avec des tirs d’obus, certains écrasés par les chenilles des blindés lancés à la poursuite des fuyards.

Le Monde est revenu, le 16 juin, sur cette horrible histoire : <Ces tirailleurs africains massacrés par les nazis>

Le journal y revient parce qu’on a retrouvé des photos inédites de ce massacre.

Le Monde raconte :

« Huit photos terrifiantes, prises par un homme de la Wehrmacht, illustrent la rage raciste à l’œuvre lors des fameuses journées. Les photos en question, totalement inédites, dormaient dans un vieil album, mis sur un site d’enchères par un brocanteur outre-Rhin et acheté par un jeune collectionneur privé de Troyes, Baptiste Garin. Sur une double page était épinglé un massacre de tirailleurs. « J’ai été saisi d’une émotion étrange, d’un malaise et puis du sentiment d’un cauchemar en croisant le regard de ces pauvres types », raconte l’acquéreur. Il prend contact avec un historien, Julien Fargettas. Voilà un quart de siècle que cet ancien militaire de 46 ans travaille sur cet épisode. Il vient même d’y consacrer un livre : « Juin 1940. Combats et massacres en Lyonnais (Poutan, 250 pages, 21 euros) ». Julien Fargettas identifie la scène. […] Ces preuves photographiques d’un crime de guerre corroborent les descriptions des gradés français témoins de la scène. Avant le carnage, ces Blancs avaient été mis à l’écart et forcés à se coucher au sol sous la menace de mitraillettes. »

Selon Julien Fargettas, les photos permettent d’identifier l’unité et les soldats responsables de la tuerie :

« Il ne s’agissait pas de SS, comme on l’a longtemps cru, mais d’hommes de la Wehrmacht ».

Certains voulaient épargner l’armée officielle allemande qui était une armée respectable pas comme les SS. Ce n’est pas exact.

C’est un historien allemand Raffael Scheck qui a écrit un livre « UNE SAISON NOIRE. Les massacres de tirailleurs sénégalais (Mai-Juin 1940)» qui l’avait déjà révélé : la Wehrmacht aussi avait les mains sales.

Le Monde cite un témoignage, daté de 1975, du caporal Gaspard Scandariato :

« Tout à coup, un crépitement d’armes automatiques retentit, se renouvelant à trois ou quatre reprises, auquel se succédèrent des hurlements et des grands cris de douleur. Quelques tirailleurs qui n’avaient pas été touchés par les premières rafales s’étaient enfuis dans le champ bordant le chemin, mais alors les grenadiers panzers qui accompagnaient les blindés les ajustèrent sans hâte et au bout de quelques minutes les détonations cessèrent. L’ordre nous fut donné de nous remettre debout et, colonne par trois, nous passâmes horrifiés devant ceux qui quelques heures auparavant avaient combattu côte à côte avec nous et qui maintenant gisaient morts pour notre patrie. Quelques tirailleurs gémissaient encore et nous entendîmes des coups de feu épars alors que nous étions déjà éloignés des lieux du massacre. »

Ces homo-sapiens de peau noire étaient des hommes et des soldats. Mais les militaires allemands leur déniaient ce double statut et les appelaient « Affen » (« singes »).

Le Monde précise :

« Les nazis développeront par la suite une intense propagande contre ce qu’ils appelèrent « Die Schwarze Schande », « la honte noire ». « Envers ces soldats indigènes, toute bienveillance serait une erreur, ils sont à traiter avec la plus grande rigueur », pouvait-on lire dans un ordre venu de l’état-major du général Heinz Guderian, un des artisans de la victoire éclair contre la France. Après la capitulation, les exécutions de prisonniers noirs qui, selon l’historien Raffael Scheck, ont fait plusieurs milliers de victimes seront réduites à des péripéties de la guerre et jamais jugées. »

L’épisode de Chasselay fut le dernier d’une série d’exactions commises contre les tirailleurs africains pendant la campagne de France. Il faut ajouter qu’à Chasselay, les officiers blancs des tirailleurs sénégalais furent aussi fusillés, parce qu’ils commandaient des noirs.

Vous trouverez sur cette page Wikipedia : <Liste de massacres perpétrés par les forces allemandes en France durant la Seconde Guerre mondiale> une liste exhaustive des massacres allemands.

Sur cette liste il y a une erreur car le massacre de Chasselay est attribué au SS, alors que c’était la Wehrmacht qui était à l’œuvre.

Au lieu précis du massacre, le lieudit Vide sac, un cimetière a été érigé : « Le Tata sénégalais de Chasselay »

« Tata » signifie enceinte fortifiée en Afrique. L’édifice, entièrement ocre rouge, est constitué de pierres tombales entourées d’une enceinte rectangulaire de 2,8 mètres de hauteur. Son porche et ses quatre angles sont surmontés de pyramides bardées de pieux. Le portail en claire-voie, en chêne massif, est orné de huit masques africains.

On a fait venir de la terre de Dakar par avion, pour la mélanger à la terre française

Il sert aussi de sépulture à d’autres victimes de massacres de la région lyonnaise.

188 tirailleurs « sénégalais » ainsi que six tirailleurs nord-africains et deux légionnaires (un Albanais et un Russe) y sont inhumés.

C’était exactement, il y a 80 ans.

Ces hommes ont parcouru 5000 km du Sénégal jusque dans le Beaujolais pour défendre le territoire de la France.

Ils étaient noirs.

Et c’est pour cette unique raison qu’ils ont été abattus, assassinés par des soldats dont la peau était blanche.

Et dans notre langue on utilise le mot « noir » pour signifier le mauvais, le méchant « une âme noire », « des noirs desseins ».

Et on utilise le mot « blanc » pour désigner la pureté, l’innocence.

Mais il y a 80 ans, comme avant, comme après et comme encore aujourd’hui ce sont des blancs qui tuent des noirs, parce qu’ils sont noirs.

Le Tata de Chasselay

Vous pouvez regarder ce documentaire de 50 minutes consacré à ce lieu : <Le Tata Sénégalais de Chasselay – Mémoire des tirailleurs sénégalais>

<1442>

Jeudi 18 juin 2020

«Le choix des statues dans une ville est un choix politique […] l’inscription des mémoires qui sont mis en avant !»
Françoise Vergés

Sortir de sa zone de confort…

Lundi, j’avais évoqué ce mouvement qui veut déboulonner la statue de Colbert, parce qu’il avait été l’instigateur du « code noir ».

Emmanuel Macron avait affirmé solennellement « La République ne déboulonnera pas de statue. » et avait ajouté :

« Nous devons plutôt lucidement regarder ensemble toute notre Histoire, toutes nos mémoires, notre rapport à l’Afrique en particulier, pour bâtir un présent et un avenir possible, d’une rive l’autre de la Méditerranée avec une volonté de vérité et en aucun cas de revisiter ou de nier ce que nous sommes. »

J’étais plutôt d’accord avec lui.

Plusieurs ont exprimé cette idée d’accompagner les statues de Colbert d’une plaque expliquant ce que fut Colbert, son rôle positif dans la construction de l’Etat mais en rappelant aussi la tâche que fut sa participation à l’élaboration du code noir.

Et Françoise Vergés a répondu à Guillaume Erner qui avançait cette thèse :

« Mais si vous pensez cela, pourquoi vous n’acceptez pas qu’on érige des statues au Maréchal Pétain, c’est quand même le vainqueur de Verdun. ?»

Et elle ajoute qu’il suffirait aussi, dans ce cas, d’ajouter une petite plaque expliquant que sur ces vieux jours, il a fait d’autres choses qui ; elles ; étaient abominables. »

Et c’est là que l’on sort de sa zone de confort.

J’ai écrit une série de mot du jour sur l’antisémitisme, en montrant sa spécificité dans l’Histoire. La Shoah qui fut l’aboutissement d’un processus de haine extrême des juifs qui s’est développé tout au long de l’histoire chrétienne par des pogroms et des persécutions, jusqu’à cette volonté d’extermination, constitue une faute et une plaie insupportable de l’histoire d’homo sapiens.

Mais il n’est pas acceptable, surtout pour celles et ceux dont les ancêtres en furent les victimes, de ne pas donner toute sa place à l’horreur et à la faute tout aussi insupportable d’avoir toléré et développé l’esclavage des noirs. D’avoir considéré l’homme de peau noire comme un bien meuble, qui n’avait aucun droit et pouvait être mis à mort sans procès, fouetter autant que son maître le souhaitait et aussi mutiler s’il s’enfuyait ce qui est quand même la chose la plus naturelle quand on est réduit au statut d’esclave.

Il ne s’agit pas de dire que ces deux abominations sont identiques. Mais vouloir les comparer pour essayer, au bout d’une argumentation de l’horreur, de prétendre que l’une serait plus grave que l’autre me semble une autre abomination.

Or, il en est beaucoup de « nos héros » qui ont joué un rôle abominable, je persiste dans ce mot, à l’égard des humains de peau noire.

Et nous ne le savons pas ! ou si peu.

Le Général Gallieni par exemple, il y a une rue importante de Montreuil sous-bois qui porte son nom, à Lyon c’est un pont sur le Rhône, à Paris c’est une Avenue entre le quai d’Orsay et les Invalides, et puis il y a bien sûr de nombreuses statues.

Joseph Gallieni, c’est bien sur celui qui en réquisitionnant les taxis de la Marne a pu réaliser une manœuvre stratégique qui a permis de surprendre l’armée allemande et de stopper sa progression vers Paris en 1914 et éviter de perdre prématurément la guerre qui fut gagnée par la suite.

Dans les livres d’Histoire que je lisais toujours avec passion, il n’y avait que cet épisode qui était relaté.

A 65 ans, tout à la fin de sa carrière, Joseph Gallieni fut nommé gouverneur militaire de la place de Paris et c’est en tant que tel qu’il participa à cette manœuvre disruptive pour l’époque, comme on dirait maintenant.

En 1916, il mourut.

Mais avant 65 ans que faisait-il ?

Vous pouvez aller lire sa page Wikipedia qui raconte ses différentes missions en Afrique noire (1876-1882), puis son poste de Commandant supérieur du Soudan français (1886-1888), et la Mission en Indochine (1892-1896) pour finir Gouverneur général de Madagascar (1896-1905). On parle de massacres, de répressions dures et de politiques coloniales sans états d’âme. Mais cette page n’entre pas trop dans le détail.

Je vous renvoie donc plutôt vers un blog de Mediapart, qui pose cette question <Qui était Joseph Gallieni ?>

Vous pouvez lire. Il parle par exemple du massacre d’Ambiki et renvoie vers une page plus complète sur cet épisode : <Le Massacre d’Ambiky en 1897, par Paul Vigné d’Octon.> :

« Le roi Touère, les personnages de marque, tous les habitants tombèrent sous les coups des mitrailleurs dans cette matinée ; les tirailleurs n’avaient ordre de tuer que les hommes, mais on ne les retint pas: enivrés de l’odeur du sang, ils n’épargnèrent pas une femme, pas un enfant. […] Quand il fit grand jour, la ville n’était plus qu’un affreux charnier dans le dédale duquel s’égaraient les Français, fatigués d’avoir tant frappé.

Les clairons sonnèrent le ralliement, les sous-officiers firent l’appel : nul des nôtres ne manquait. On se reposa, on mangea, des chants joyeux ne célébrèrent pas la victoire. Une boue rouge couvrait le sol. À la fin de l’après-midi, sous l’action de la chaleur, un petit brouillard s’éleva: c’était le sang des 5000 victimes, l’ombre de la ville qui s’évaporait au soleil couchant. »

Et ce blog cite Aimé Césaire qui disait en 1950 :

« On s’étonne, on s’indigne. On dit : «Comme c’est curieux ! Mais, Bah ! C’est le nazisme, ça passera !» Et on attend, et on espère; et on se tait à soi-même la vérité, que c’est une barbarie, mais la barbarie suprême, celle qui couronne, celle qui résume la quotidienneté des barbaries ; que c’est du nazisme, oui, mais qu’avant d’en être la victime, on en a été le complice ; que ce nazisme-là, on l’a supporté avant de le subir, on l’a absous, on a fermé l’œil là-dessus, on l’a légitimé, parce que, jusque-là, il ne s’était appliqué qu’à des peuples non européens ; que ce nazisme là, on l’a cultivé, on en est responsable, et qu’il est sourd, qu’il perce, qu’il goutte, avant de l’engloutir dans ses eaux rougies de toutes les fissures de la civilisation occidentale et chrétienne. »

Alors il ne faut pas accepter des statues de Pétain, mais des statues de Gallieni, pour lui il n’y pas de problème ?

Pétain eut un rôle plus important lors de la guerre 14-18 que Gallieni.

Et pour le reste ?

Les crimes de Gallieni ont été perpétrés contre des populations « non européennes » pour reprendre le mot d’Aimé Césaire.

Françoise Vergés est née en 1952 à Paris, mais a passé la plus grande partie de son enfance à l’île de la Réunion où son père Paul Vergès poursuivait une carrière politique proche du Parti communiste.

Le célèbre avocat Jacques Vergés était son oncle.

Paul et Jacques Vergés étaient les enfants de Pham Thi Khang, institutrice vietnamienne, et du docteur Raymond Vergès, consul de France au Siam, c’est-à-dire la Thailande.

La mère de Françoise Vergés était aussi une militante communiste et féministe : Laurence Deroin.

Françoise Vergés est une universitaire et militante féministe « décoloniale » française.

En effet, elle a publié en 2019 son livre « Un féminisme décolonial »

Elle explique dans l’émission <à Voix nue>

« Ce que j’appelle féminisme décolonial, c’est un féminisme qui, tout en reconnaissant qu’il y a une domination masculine, ne se focalise pas sur la question de l’égalité de genre. […] En faisant sienne la fiction selon laquelle le colonialisme a pris fin en 1962, le féminisme s’est leurré sur l’existence d’un vaste territoire ‘ultramarin’ issu de la période esclavagiste et post-esclavagiste comme la présence en France de femmes racisées. Complice alors des nouvelles formes du capitalisme et de l’impérialisme, il demeure silencieux sur les nouvelles formes de colonialité et de racisme d’État dans les Outre-mer et en France. […] La plupart des groupes qui constituent le mouvement féministe en France va rester aveugle et sourd à la question de sa propre généalogie, de sa propre histoire. Son récit se construit en rapport avec la domination masculine blanche (c’est la longue marche vers les droits) et l’histoire coloniale et raciale disparaît complètement de la construction de la société dans le récit féministe

Dans son livre précédent, « Le Ventre des femmes : capitalisme, racialisation, féminisme » elle rapporte que dans les années 70, on pratiquait des avortements et stérilisations, à leur insu, sur des centaines de femmes réunionnaises.

C’est cette femme que Guillaume Erner avait invité le 16 juin 2020 pour parler « des Mouvements antiracistes : un tournant dans l’histoire ? ».

Elle parle de sa voix calme et répond à l’attitude de Macron qui ne veut déboulonner aucune statue en rappelant que tout au long de l’Histoire on a évolué dans le statuaire, on en a enlevé certains, on en a ajouté d’autres.

Lors de la monarchie, c’était des statues de roi qu’on a remplacé sous l’Empire c’était différent et puis encore sous la République d’autres personnalités furent choisis, cela change constamment :

« Quand le Président dit qu’il sera intraitable sur le racisme et les questions d’égalité […] les demandes de retrait les statues est une question d’égalité. Il n’y a pas de justice dont la façon la France présente les monuments. (…) En réalité, il n’y a pas de récit figé. La République pourrait se demander les récits qu’elle voudrait mettre en avant (…). Quelles sont les statues que je vois quand je me promène à Paris ? Essentiellement des hommes blancs, dans des postures guerrières (..). Il n’y a pas d’égalité mémorielle. »

Et elle approfondit cette question des statues qui sont choisies pour remplir l’espace public, comme d’ailleurs les noms donnés aux Boulevards, places, rues, ruelles, impasse :

« Plus profondément, c’est la question d’une plus grande égalité, de l’anti-racisme. Quels sont les récits valorisés ? Qu’est-ce qui est enseigné à l’école ? Qu’est-ce que les enfants de France apprennent ? La question des statues est prise dans un contexte. […]

Les statues ce sont des choix politiques […] Ce sont constamment des choix. [Ne pas discuter de ce qu’il faut déboulonner et ce qu’il faut ajouter signifie] Rien ne changera et votre demande d’égalité ne sera pas entendu. C’est-à-dire ce que vous demandez, vous n’existez pas, vous n’appartenez pas à l’Histoire de France. Il n’y aura jamais de statue d’Aimé Césaire, il n’y aura jamais de statue de Léopold Sédar Senghor. […]

Il y a une sélection qui est faite, […] il y a une hiérarchie qui est donnée, à qui aura un boulevard, à qui aura une ruelle, une impasse. Il s’agit de l’inscription des mémoires qui sont mis en avant dans une ville. Ce que nous demandons c’est plus de justice, plus d’égalité »

[…] C’est une question d’égalité et de dignité pour l’histoire de plein de femmes et d’hommes qui sont dans la République française, qui sont des citoyens français. »

C’est une parole qui m’a fait évoluer dans ma perception de l’Histoire et des choix qui sont faits pour sélectionner, raconter et aussi de valoriser certains aspects, en cacher d’autres.

Je ne suis plus si sûr qu’il ne faille pas réfléchir à déboulonner certaines statues, ou du moins diminuer le nombre de certains personnages statufiés et ériger d’autres statues non encore présente dans la représentation publique.

Je vous invite vraiment à écouter cette émission pleine d’intelligence : « des Mouvements antiracistes : un tournant dans l’histoire ? ».

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Mercredi 17 juin 2020

«Les pays gouvernés par des femmes ont eu cinq fois moins de morts du coronavirus que les pays dirigés par des hommes.»
Edito du New York Times

C’est la revue de Presse de Claude Askolovitch de lundi, le 15 juin, qui a rappelé cette information de première importance:
« Je lis dans un bel édito du New York Times que les pays gouvernés par des femmes ont eu cinq fois moins de morts du coronavirus que les pays dirigés par des hommes. »

Le New York Times confirme donc ou répond à la question que posait le site de TV5 Monde le 20 avril qui lui-même rapportait une question de FORBES  : « Covid-19 : les pays dirigés par des femmes gèrent-ils mieux la crise ? »

« De Taiwan à l’Islande, en passant par l’Allemagne ou la Nouvelle-Zélande, quelques pays sont parvenus à limiter le bilan de la pandémie de coronavirus. Qu’ont-ils en commun ?

« Ils sont dirigés par des femmes », titre le magazine Forbes, daté du 13 avril 2020. Et elles ont fait face en déployant sans tergiverser franchise, détermination, empathie, réactivité et anticipation, qui sont aussi les clés d’une gestion efficace. Et sans jamais prononcer le mot « guerre »… »

Reprenons chacun de ces cas.

D’abord l‘Islande.

« Anticiper pour ne pas se laisser prendre de court – tel semble avoir été le mot d’ordre du gouvernement de Katrín Jakobsdóttir. Lorsque le premier malade est confirmé sur son territoire, le 28 février 2020, l’Islande dépistait déjà depuis un mois, ayant commencé alors que la maladie causée par le coronavirus n’était même pas encore baptisée Covid-19, ni la pandémie déclarée. »

Dans ce pays selon Wikipedia, au 22 avril 2020, le nombre total de cas enregistrés était de 1 785, dont 1 462 se sont rétablis et 10 sont décédés. Le taux d’infection est d’un cas pour 245 habitants, l’un des plus élevés au monde. Mais avec un taux de létalité lié au Covid-19 qui est le deuxième plus bas au monde, en avril.

J’ai trouvé cette mise à jour au 16 juin :

« Avec 1 810 infections dont seulement quatre en juin, l’Islande a presque éradiqué le Covid-19 de son territoire grâce à une politique de dépistages massifs. »

Au 16 juin, le nombre de décédés était resté à 10 soit un taux de létalité pour un pays de 362 860 habitants de 27,5 pour 1 000 000 d’habitants. En France nous en sommes à 435 pour 1 000 000 d’habitants

Voilà donc le bilan de Katrín Jakobsdóttir !

Ensuite Taiwan

« Dès le mois de janvier, soit bien avant que l’alerte ne soit lancée à l’échelle mondiale et que l’OMS reconnaisse la transmission humaine du virus, et 21 jours avant la détection du premier cas de personnes contaminées à Taiwan, la présidente Tsai Ing-wen avait imposé 124 mesures fortes pour bloquer l’épidémie. Des prises de température sont mises en place à l’atterrissage de tous les vols en provenance de Wuhan dès le 31 décembre 2019, par exemple. Bilan à ce jour, 6 décès et moins de 400 personnes contaminées pour près de 24 millions de Taiwanais, et ce sans confinement de la population. »

J’ajoute que Taiwan est vraiment tout près de la source de l’épidémie : la Chine. Elle a donc de bien meilleurs résultats que la Chine totalitaire avec un régime démocratique !

Une information du 16 juin porte le bilan de Taiwan à 445 personnes contaminées et sept décès.

Voilà donc le bilan de Tsai Ing-wen

Pour l‘Allemagne je n’insiste pas, nous avons eu suffisamment de précisions qui nous renvoyaient à nos faiblesses françaises.

Le bilan de Angela Merkel est remarquable, concernant ce point précis du COVID-19.

Juste une petite précision Merkel n’a pas parlé de guerre à ses concitoyens mais dès le 11 mars elle a fait cette déclaration solennelle

« La situation est sérieuse, alors prenez-la au sérieux. »

C’est que les Allemands ont fait, suivant à la lettre les ordres de leur dirigeante.

En Norvège :

Au 16 juin le nombre de décédés pour le coronavirus est de 242 soit un taux de létalité de 45 pour 1 000 000 d’habitants..

Erna Solberg, n’a pas non plus parlé de guerre. Elle s’est en revanche adressé directement aux enfants à la télévision pour leur dire :

« Je sais que ça fait peur et c’est normal d’avoir peur quand tout est bousculé, comme en ce moment »

En Finlande

Au 16 juin le nombre de décès s’élevait à 326 soit un taux de létalité de 59 pour 1 000 000 d’habitants.

TV5 donne ces informations :

« En décembre 2019, Sanna Marin devenait la plus jeune cheffe d’Etat du monde, à la tête d’une coalition exclusivement composée de femmes. Consciente que les médias traditionnels et les communiqués gouvernementaux ne sont pas les plus porteurs, surtout parmi les plus jeunes, elle a fait établir une liste d’influenceurs à suivre – bloggeurs, rappeurs, chroniqueurs, instagrameurs…. Sana Marin fait appel à ces « key workers » (acteurs essentiels) pour l’aider à partager l’information destinée à juguler la pandémie.

Les messages du gouvernement sont distribués au réseau de quelque 1500 influenceurs, qui restent libres de les relayer, ou non, à leur manière. La plupart ont eu à cœur de participer à cet effort national à leur échelle et se sont prêtés au jeu sans songer à demander de contrepartie, à l’instar d’Inari Fernández, une influenceuse professionnelle avec 34 000 followers sur Instagram. »

Au Danemark

Le taux de létalité est un peu plus élevé à 102 pour 1 000 000 d’habitants. Mais au Royaume-Uni du flamboyant Boris Johnson nous en sommes à 630 !

Le pays a fermé ses frontières dès le 13 mars, puis les autorités ont fait confiance aux Danois et cela a marché : « Les commerces ne sont pas engorgés et la distance sociale de deux mètres est respectée, y compris dans les parcs. Même à un feu, les piétons et les cyclistes reculent d’eux-même s’ils sont trop près les uns des autres, » expliquait un journaliste sur France Info le 13 avril.

C’est le bilan de Mette Frederiksen

Il reste la Nouvelle-Zélande de Jacinda Ardem

« Solidarité, proximité, empathie – les qualités que la Première ministre néozélandaise déploie dans la gestion de la crise sanitaire sont aussi celles qui avaient été remarquées il y a un an, dans l’onde de choc de la tragédie de Christchurch.

Jacinda Ardern et ses ministres ont décidé de réduire leurs rémunérations de 20 % en solidarité avec les victimes de la pandémie en Nouvelle-Zélande.

Dès les six premiers cas détectés, la Première ministre a ordonné la fermeture des frontières et le confinement. Elle a clairement annoncé à ses compatriotes le pourquoi et le comment de l’état d’alerte maximum dans lequel elle plaçait le pays. Il semble que l’intégrité de ses décisions et sa détermination ait épargné à son pays des milliers de morts : mi-avril la Nouvelle-Zélande ne déplorait que 4 décès dus au Covid-19 sur une population de 4,8 millions. »

Au 16 juin le bilan est monté à 22 décès, d’où un taux de létalité de 4 pour 1 millions.

Cependant, une information datant de quelques heures, au moment de cette rédaction, font état de nouveaux cas en Nouvelle Zélande après 25 jours de répit.

Comme le rappelle TV5, Jacinda Ardem est devenu célèbre dans le monde entier après la tragédie de Christchurch. Le 15 mars 2019, un suprémaciste blanc australien de 28 ans est entré dans deux mosquées de Christchurch a tué 51 personnes et blessé plusieurs dizaines d’autres.

Elle a su à la fois allier fermeté et une extraordinaire empathie pour ses compatriotes musulmans.

Elle a décidé d’aller à leur rencontre en portant le voile par signe de solidarité.

Quand Donald Trump lui a demandé ce qu’il pouvait faire pour la Nouvelle Zélande, elle a répondu :

« Avoir de la compassion pour les musulmans néo-zélandais »

Vous pouvez lire cet article de l’Obs : « L’appel de Christchurch » : 10 choses à savoir sur Jacinda Ardern, Première ministre de la Nouvelle-Zélande :

« Son attitude exemplaire après les attentats de Christchurch contre deux mosquées avait été saluée dans le monde entier. »

Ou cet article de France 24 : « Jacinda Ardern, première ministre, « le réconfort et l’acier » de la Nouvelle-Zélande »

Et encore cet article du Monde « Après les attentats de Christchurch, les Néo-Zélandais unis derrière Jacinda Ardern »

Plus globalement sur la capacité des femmes à bien gouverner, je partage cette conclusion de TV5Monde pleine de nuance et de pertinence :

« Est-ce qu’être une femme prédispose à la bonne gestion de crise ? Le syllogisme serait sexiste et, comme le souligne le quotidien britannique The Guardian, « une corrélation n’est pas un lien de cause à effet. Etre une femme ne donne pas automatiquement l’avantage dans la gestion d’une pandémie mondiale. Cela ne fait pas non plus de vous un meilleur chef d’Etat. » D’autres facteurs entrent en compte, souligne le Guardian, comme les politiques de santé mises en place par les gouvernements précédents ou la situation géographique d’un pays – moins il a de frontières terrestres, plus il est épargné. […] Il n’en reste pas moins que la gestion de crise exemplaire de certaines dirigeantes politiques devrait s’inscrire dans les annales. Et puis les femmes, dans un milieu politique majoritairement dominé par les hommes, ne doivent-elles pas être meilleures pour y arriver… ? »

Et puis quand même elles n’ont pas toujours le mot «guerre» et «combat» à la bouche, elles sont probablement plus pragmatiques et savent elles mieux ce que «prendre soin» veut dire

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