Un jeune homme de 17 ans, français, de religion musulmane, a été tué, lors d’un contrôle routier, par un tir, à bout portant, d’un motard de la police nationale.
Le jeune garçon conduisait une voiture, avec deux passagers à bord.
Cette scène a été filmée.
La mort du jeune homme, d’origine algérienne comme le mentionne le communiqué du ministre des affaires étrangères algérien, a conduit à des manifestations de protestation de jeunes gens qui s’identifient à la victime, dans un premier temps.
Mais rapidement ces protestations ont fait place à des scènes de pillages, de destructions, d’agressions et de chaos dans les grandes métropoles françaises et aussi dans des villes de moindre population.
En parler est délicat, les choses sont compliquées.
Il vaut peut-être mieux se taire pour ne pas déplaire.
Mais ne pas savoir poser des mots sur ce qui se passe, c’est laisser la place à la violence.
Les mots c’est ce que la démocratie a trouvé pour gérer les conflits : débattre pour ne pas se battre.
Mais d’abord, il faut en revenir aux faits.
Il faudrait quand même pouvoir se mettre d’accord sur les faits, sinon comment débattre, comment analyser ?
« Le Monde » a publié un article le 5 juillet donnant les éléments de l’enquête mené par le parquet général de Versailles à ce jour : < les premières constatations de l’enquête >
La chronologie est la suivante :
- Lundi 26 juin, une Mercedes de type AMG, immatriculée en Pologne, est louée auprès d’une société de location de voiture, FullUp Location à Nanterre. Cette société avait été créée trois mois auparavant. A ce stade, il n’est pas précisé qui a loué.
- Mardi 27 juin, Avant que le jeune Nahel n’en prenne le volant, deux autres personnes l’ont utilisé dans des circonstances encore inconnues. Le jeune Nahel, 17ans, qui n’a pas de permis, prend le volant de ce véhicule onéreux et puissant capable de passer de 0 à 100 km/h en 3,9 secondes, selon sa fiche technique.
- D’après le brigadier qui a tiré, les deux motards ont remarqué « une Mercedes dont le moteur vrombissait et qui circulait dans la voie de bus ».
- Lorsque la Mercedes regagne le flot normal de la circulation, les motards de la police tentent une première fois de l’intercepter. Le brigadier se porte alors à la hauteur du passager et, sa sirène enclenchée, fait signe au conducteur de se ranger sur le côté. « Mais celui-ci, note le réquisitoire, avait alors accéléré brusquement et pris la fuite . Poursuivi par les deux motards, il avait conduit à vitesse élevée avec de brusques accélérations, des franchissements de feux rouges fixes et passages de carrefours « à pleine vitesse » et sans précaution pour les piétons…… Il avait même fait une embardée volontaire vers son collègue qui était venu se mettre à son niveau. »
- Après examen de la vidéosurveillance, le parquet note que, au cours de son périple, la Mercedes a « failli percuter un cycliste tandis qu’un piéton engagé sur un passage protégé avait dû faire demi-tour en courant pour éviter d’être percuté ». Celle-ci aurait également roulé plusieurs fois à contresens.
- Une fois la Mercedes à l’arrêt, bloquée par d’autres véhicules à proximité de la place Nelson-Mandela où elle finira sa course, les deux policiers mettent leur moto sur béquille et s’en approchent, leur arme de service dégainée, la visière de leur casque relevée. Le premier, gardien de la paix, que les enquêteurs de l’inspection générale de la police nationale (IGPN) désignent dans un rapport comme « P1 », se place face à la vitre du côté du conducteur. Le second, le brigadier (« P2 » pour l’IGPN), se positionne du côté avant gauche du capot, son pistolet automatique Sig Sauer pointé en direction du conducteur.
- C’est dans cette attitude que la séquence vidéo tournée par une passante saisit les deux fonctionnaires, quelques secondes avant que ne soit tiré le coup de feu mortel. C’est également à ce moment que le brigadier reconnaît avoir cogné contre le pare-brise – l’un des deux passagers évoque des coups de crosse contre Nahel M. – pour « attirer l’attention du conducteur ».
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L’exploitation de la séquence vidéo par l’IGPN confirme les mots prononcés par l’un des policiers, sans pour autant que celui-ci soit identifié à ce stade. Dans leur reconstitution des échanges, les enquêteurs notent : « Au début de la séquence, on entend un échange entre trois voix différentes (V1, V2, V3) avant la détonation, que nous interprétons comme suit :
- V1 : « … une balle dans la tête »
- V2 : « Coupe ! Coupe ! »
- V3 : « Pousse-toi ! »
- V1 : « Tu vas prendre une balle dans la tête » (propos pouvant être attribués à P1 qui agite son bras droit au même moment).
- V2 : « Coupe ! » »
- V1 : « … une balle dans la tête »
- D’après cette première analyse, ce serait donc le collègue du brigadier et non ce dernier qui aurait crié à l’adresse de Nahel « Tu vas prendre une balle dans la tête », des propos que le policier auteur du tir a, du reste, constamment nié avoir tenus lors de sa garde à vue.
- Nahel redémarre et le Brigadier (P2) tire, à bout portant, une balle mortelle.
Il existe ensuite une ambigüité. Tous les médias ont repris l’information que le Brigadier a menti en affirmant que la voiture fonçait sur lui alors qu’il était à côté de la voiture.
Je cite :
« Le parquet souligne que le premier compte rendu policier, à 8 h 22, six minutes après le tir policier, évoque un « individu blessé par balle à la poitrine gauche ». L’opérateur signale, dans une fiche de résumé d’intervention Pegase (pilotage des événements, gestion des activités et sécurisation des équipages) que « le fonctionnaire de police s’est mis à l’avant pour le stopper » et que « le conducteur a essayé de repartir en fonçant sur le fonctionnaire ». Ce qui soulève une interrogation importante sur l’origine de cette information démentie par la vidéo de la passante : comment est-elle remontée jusqu’à l’opérateur ? Le parquet note que le brigadier n’utilise jamais ces mots dans les conversations enregistrées sur la « conférence 32 » – en réalité, la « conférence 132 » qui est le réseau radio utilisé par l’ensemble des effectifs de la direction de l’ordre public et de la circulation, à laquelle appartenaient les deux policiers motocyclistes. »
Selon cette version, le brigadier n’aurait pas, lui-même, déclaré que la voiture lui fonçait dessus.
Dans sa version, le brigadier a déclaré qu’il avait peur que son coéquipier soit entraîné par la voiture parce qu’il pensait que son corps était engagé dans l’habitacle, alors qu’en réalité ce n’était que le bras qui était concerné. Enfin, il a affirmé que sa volonté était de viser vers les jambes du conducteur mais que déstabilisé par le démarrage le coup est parti vers le thorax.
Le brigadier, auteur du tir, a également révélé qu’il enchaînait son neuvième jour consécutif de travail
L’article du Monde fait aussi mention d’une situation extrêmement tendue dès les minutes qui ont suivi la mort de Nahel.
Le parquet relève que, au moment de la sécurisation des lieux, des « jeunes hostiles étaient présents » ainsi que des proches de la victime.
- Selon les policiers, la grand-mère de la victime aurait tenu les propos suivants : « Les deux policiers, ils vont pas sortir (…). Je les attendrai. J’ai des copains qui travaillent au dépôt. (…) Il y a un terroriste qui va tous les attraper Inch’Allah, un terroriste qui va tous les massacrer. »
- Un gardien de la paix, lui, est pris à partie par un ambulancier, dans une séquence également filmée et devenue virale où l’on peut entendre les propos, répétés à deux reprises : « Tu vas plus vivre tranquille, frère. »
- Le même jour, un jeune homme âgé de 20 ans a été condamné à dix-huit mois de prison dont douze mois avec sursis probatoire pour avoir diffusé les coordonnées personnelles du brigadier.
J’ai entendu un journaliste affirmer que l’adresse de l’hôtel dans lequel, la famille du policier avait trouvé refuge, a également été divulgué.
Très rapidement le Ministre de l’intérieur a eu des propos qui exprimait une défiance par rapport à l’attitude du policier. Et le Président de la République a eu ces mots, en contradiction formelle avec la présomption d’innocence, traitant le geste du policier « d’inexcusable » et d’inexplicable »
Probablement que le Président de la République et son Ministre espéraient ainsi calmer la colère des jeunes de banlieue qu’ils craignaient.
Il n’en fut rien : La France s’est embrasée malgré ces propos prenant délibérément partie contre le policier.
La Justice qui a pourtant inculpé le brigadier pour « homicide volontaire » et placé en détention provisoire n’est pas davantage parvenue à éviter ce qui allait devenir un chaos de destruction et de pillage.
Dans leur ensemble, tous les médias, mis à part ceux d’extrême droite, ont exprimé leur compassion pour le jeune homme, certain parlant « d’enfant » et ont présenté le brigadier comme un assassin.
Le footballeur né à Bondy et mondialement connu Kylian Mbappé a publié ce tweet en direction de ses 12,6 millions d’abonnés en évoquant « un petit ange ! » :
« J’ai mal à ma France. Une situation inacceptable. Toutes mes pensées vont pour la famille et les proches de Nahel, ce petit ange parti beaucoup trop tôt ».
Quand le chaos était à son comble, Jean-Luc Melenchon a pris la parole.
Il a été fidèle à son récit : Toutes ces horreurs viennent des inégalités économiques, de la discrimination à l’égard de la population des banlieues et du mauvais fonctionnement de la police qui tue et qui est raciste.
Il n’a pas appelé « au calme » mais à « la justice »
Il a demandé que les jeunes ne s’attaquent pas aux « Ecoles », « aux Bibliothèques » « aux gymnases », ce qui laisse à penser que pour les autres cibles, le saccage est une option ?
Michel Onfray lui a répondu avec véhémence : « Melenchon est prêt à tout pour arriver au pouvoir » :
« Quand je dis tout, c’est-à-dire détruire la France. C’est-à-dire mettre la France à feu et à sang. C’est-à-dire contribuer à ce que le sang puisse couler. Melenchon est prêt à tout ça »
et il ajoute:
« [on dit] Les gens sont mécontents, ils descendent dans la rue. Non ce ne sont pas des gens qui sont mécontents dans la rue. C’est un peuple qui se soulève contre un autre peuple ! »
Michel Onfray poursuit un autre récit, totalement opposé à celui de Melenchon, celui d’une « guerre civile à bas bruit »
A ce propos, j’ai entendu un sociologue estimer à 0,2% de la population des banlieues concernées par les faits de violence.
Par ailleurs pour qu’on puisse parler de « Peuple », il faudrait que ces personnes aient une conscience politique d’être un peuple ayant un destin commun. Je ne vois pas ce dessin politique mais surtout une rage de se défouler et un désir irréfragable de consommer des chaussures Nike, des Smartphones et autres marques de réussite.
Et lors du 20h de Darius Rochebin sur LCI le 1er juillet 2023, le premier argument utilisé par Hubert Vedrine, le secrétaire général de la présidence de la République de François Mitterrand et le ministre des affaires étrangères de Lionel Jospin est celui d’une immigration mal maîtrisée et il en appelle à l’exemple danois.
Chacun suit son récit, sans jamais rencontrer et même chercher à échanger avec l’autre.
<Le Monde> cite un éditorial de « La Tribune de Genève » qui appelle de son côté à sortir d’un « débat bloqué » entre « deux camps caricaturaux et irréconciliables » : « D’un côté une police parfaite qui ne fait jamais d’erreur, de l’autre des victimes indignées qui ne sont que des anges. » « Selon toute apparence, le policier n’avait pas à tirer », analyse l’auteur, qui ajoute, au sujet du jeune conducteur tué, que, « s’il avait obtempéré à la police, il vivrait ». « Dans le débat politique français, ces deux vérités ne sont jamais confrontées, elles s’affrontent stérilement, déplore le journal suisse. Pauvre débat, triste débat, qui ne fait qu’entretenir la violence, car chacun ne veut voir que celle de l’autre. »
Si je dois donner quelques mots de conclusion, ce serait les suivants :
- Si ce jeune homme n’avait pas pris le volant d’une voiture excessivement puissante alors qu’il n’avait ni le permis, ni d’assurance, il n’aurait pas été tué.
- S’il avait obtempéré à l’ordre de la police, il n’aurait pas été tué.
- On a écrit, il n’avait pas d’arme dans cette voiture. Mais enfin, la voiture qu’il conduisait pouvait tuer. D’ailleurs il a faillé renverser un piéton et un cycliste. Il était donc non seulement dans l’illégalité mais aussi un danger pour autrui.
- Les policiers n’auraient sans doute pas du sortir leur arme pour menacer parce que dans ce cas il se mettaient en posture et en risque de tirer et de mal tirer.
- Mais était-il raisonnable de laisser repartir cette voiture qui risquait de créer des accidents étant donné l’état d’excitation du jeune Nahel et probablement sa maîtrise limitée du bolide qu’il conduisait ? Je n’ai entendu personne expliquer comment immobiliser ce véhicule de manière efficace et sans utilisation d’arme létale. Il me semble que laisser repartir la voiture n’était pas une option.
Il y a certainement des problèmes au sein de la police. Sans doute une formation insuffisante, peut être une organisation et des méthodes d’interpellation à revoir. Il existe probablement des racistes au sein de la Police qu’il faut combattre.
Mais le déchainement de violence qui a eu lieu ces derniers jours doit aussi nous interroger sur ce que vivent nos policiers dans ces quartiers.
Que ferions nous s’il n’y avait plus de Police ?
SI tous les policiers déposaient brusquement tous leurs attributs en disant nous en avons marre de vivre cette violence, ces insultes et incivilités au quotidien, ce rejet systématique de l’autorité.
D’ailleurs contrairement à ce que pense ces gauchistes qui ont perturbé les comparutions aux Palais de Justice de Lyon et qui scandaient cette affirmation : « Tout le monde déteste la Police », les français sont plutôt du côté de la police.
<Selon ce sondage IFOP réalisé après la mort de Nahel> 43% et 14% ressentent de la confiance ou de la sympathie envers les forces du maintien de l’ordre, soit un total de 57% d’avis positifs. La police inspire de l’inquiétude ou de l’hostilité pour 32% des Français, tandis que 11% d’entre eux n’ont pas d’opinion.
Alors, il ne s’agit pas de nier les problèmes mais gardons-nous bien de solution simpliste comme croire que tout est la faute de la Police ou inversement que tout est de la faute de l’immigration.
Les choses sont infiniment plus complexes que cela.
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