Mardi 1 octobre 2019

« Une oppression, une servitude si dure, si horrible que jamais des bêtes n’y ont été soumises »
Bartolomé de las Casas , Brevisima Relacion de la destruccion de las Indias

Depuis longtemps on nous raconte le beau récit de Christophe Colomb, ce marin génois qui s’est mis au service des monarques catholiques espagnols Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon. Et en cherchant une route vers l’ouest pour atteindre les Indes, a découvert l’Amérique en 1492.

Il était courageux, opiniâtre et après beaucoup d’effort il a pu accomplir son exploit.

C’était aussi un remarquable cartographe comme le rappelle <Cet article> qui rappelle les péripéties et les différents voyages qui l’ont rendu célèbre.

Cette histoire qu’on nous raconte, n’est en réalité, pas une belle histoire.

Déjà le mot « découverte » pose question. L’Amérique et les iles caraïbes qui ont fait l’objet de l’accostage des navires du génois étaient habités par des humains. Il ne s’agissait donc pas de les « découvrir » mais de les « conquérir ».

Colomb n’est même pas le premier européen à avoir accosté sur le grand continent qui se trouve de l’autre côté de l’Atlantique, il a été précédé par les vikings.

Par ailleurs, Christophe Colomb n’a jamais eu une idée précise de la taille et de la profondeur de ce continent. D’ailleurs, le continent n’a pas été appelé Colombie mais Amérique en souvenir d’Amerigo Vespucci (1454 Florence, 1512 Séville) qui est aussi un explorateur controversé mais qui selon le récit européen serait le premier Européen à comprendre que les terres découvertes par Christophe Colomb font partie d’un nouveau continent.

La petite histoire dit que c’est en Lorraine, dans les Vosges, dans la ville de Saint-Dié que le cartographe Martin Waldseemüller et l’érudit Mathias Ringmann, désignent en son honneur ce nouveau monde du nom d’« America » dans le planisphère qu’ils éditent en 1507.

Donc si le continent ne s’appelle pas Colombie ou Colombus, Christophe Collomb est cependant très présent en Amérique et aux États Unis.

La grande université de New York s’appelle l’université <Columbia>. Des statues de Colomb se trouve quasi dans toutes les grandes villes des États-Unis, à New York, à Los Angeles et dans beaucoup d’autres.

Et puis, les Etats-Unis fêtent le <Columbus Day> (ou « Jour de Christophe Colomb » en français), le deuxième lundi d’octobre. L’Amérique latine et l’Espagne fêtent aussi ce jour.

Mais cela devient de plus en plus compliqué

Hier je vous racontais que Jacques Chirac, maire de Paris avait refusé de fêter les 500 ans de la fameuse « découverte » mais avait organisé, en 1992 au Petit Palais, une exposition sur la civilisation Tainos qui fait partie d’une ethnie plus large qui sont les arawaks, bref les « fameux indiens » que Colomb a rencontré puis massacré.

Cet épisode avait fait l’objet d’une conversation « virile »entre le maire de Paris et le roi d’Espagne. « C’est le fameux coup de fil que lui passe le roi d’Espagne [Juan Carlos] qui lui demande : « Qu’est-ce que tu vas faire pour commémorer la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb ? » Jacques Chirac [maire de Paris] lui répond, racontait-il souvent après : « Je ne vais rien faire pour cet assassin, mais je vais faire quelque chose en l’honneur du peuple qu’il a fait disparaître ». »

Et Le Monde.fr complète :

« Il usera des mêmes mots lors du dîner officiel d’inauguration de l’exposition sur l’art des Indiens Taïnos, ethnie amérindienne décimée par les conquistadors. « Offusqué par mes propos, l’ambassadeur d’Espagne quitta aussitôt la table, avec son épouse, en signe de protestation », racontera-t-il dans ses Mémoires. »

Chirac fut un précurseur. Cet <Article> de 2017 raconte un mouvement d’ampleur aux États-Unis qui tend à faire déboulonner les statues du navigateur sanguinaire :

« La majorité des villes majeures aux Etats-Unis possède une statue du célèbre explorateur. […] des critiques virulentes sont portées sur le personnage historique, accusé notamment d’avoir perpétré des massacres de natifs américains et initié le commerce triangulaire. Ce mois-ci, les statues de Houston, Baltimore ou encore New York ont été vandalisées. Au Columbus Triangle Park de New York, le message “Tear it down. Don’t honor genocide” y a été tagué, littéralement “Détruisez-la. Ne célébrez pas le génocide »

Dans la même philosophie le « Columbus day » est remis en cause. Il est de plus en plus souvent remplacé par « une Journée des peuples indigènes ».

Les inrocks ont publié un article « La fête de Christophe Colomb fracture l’Amérique » :

«  Un néophyte qui jetterait un œil aux festivités n’y verrait que la célébration bon enfant de la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb (en 1492). Parmi les nombreuses réjouissances prévues: exaltation du patriotisme, parades géantes, exposition de reliques du XVe siècle.

Mais ce succédané de 4 Juillet, la fête nationale, ne fait plus recette. Célébrer l’arrivée des colons espagnols, et avec elle son cortège génocidaire, fait mauvais genre. A tel point que certains États refusent purement et simplement de célébrer cette journée. […]

Austin, Las Vegas et une cinquantaine d’autres villes ont fait le choix de rebaptiser le jour férié en “Journée des peuples indigènes” (Indigenous People Day). La fête se veut ainsi plus respectueuse. »

« RFI » précise :

« Certains Amérindiens étaient venus plaider leur cause en tenue traditionnelle devant le Conseil municipal de Los Angeles. Par 14 voix contre une, il a finalement été décidé de créer une Journée des peuples indigènes en remplacement de Colombus Day, jour férié national célébrant Christophe Colomb depuis 1937.

Après Phoenix, Seattle, Denver, Portland, et d’autres, c’est une nouvelle victoire pour les peuples originels des Etats-Unis et tous ceux qui considèrent que l’explorateur italien est l’un des responsables du massacre de millions de personnes. « Ce n’est encore qu’un tout petit pas pour réparer les dommages qui ont été causés », a expliqué un élu de Los Angeles. « Il faut surtout changer l’enseignement qui est fait sur cette question à l’école », a rappelé le conseiller municipal d’une ville du Maine, qui a pris la même décision à l’extrême opposé du pays. »

Mais qu’en est-il de ce héros de nos livres d’Histoire ?

Le site Agoravox prétend nous donner <la vérité sur Christophe Colomb> :

« D’après des récits retrouvés, issus de son propre carnet de route, puis d’autres, écrits de la main de son propre fils, Fernando Colomb ou d’un prêtre et Historien accompagnateur : Bartolomé De Las Casas, le navigateur était un sanguinaire sans morale.

Les Arawak (indiens) l’ont accueilli de façon pacifique. Il les a d’ailleurs qualifiés dans son journal de bord, d’hommes gentils « qui ne portaient pas d’armes, ils ne savent pas ce qu’est une épée et lorsqu’ils l’ont touchée, ils l’ont prise par la lame et se sont coupés. Ce sont des gens gentils, les meilleurs du monde, qui ne connaissent rien du mal, ils ne tuent pas, ne volent pas.. Ils aiment leurs voisins comme eux-mêmes, ils parlent de façon douce et rient sans cesse ». Si ses écrits s’étaient arrêtés là, Colomb mériterait sans nulle doute, cette place dans l’Histoire. Mais il poursuit pourtant en indiquant « qu’ils feraient de bons serviteurs, ils sont très simples. Avec 50 hommes, nous pourrions tous les subjuguer et faire d’eux, ce que nous voulons ». Et le mal prenant le pas sur le bien, Christophe Colomb n’a pas hésité une seconde a mettre à profit ses mauvaises pensées afin d’obtenir des richesses et surtout, de convertir les natifs au Christianisme.

Couper des mains aux Indiens ne lui ramenant pas assez d’or, couper des oreilles ou des nez à ceux qui refusaient de suivre ses ordres et lois, couper des jambes aux enfants Indiens, cherchant à s’échapper et ce, afin de tester les lames des épées, telles étaient les sanctions pratiquées par Christophe Colomb. Bien décidé à s’approprier les Amériques ainsi que les Antilles, il ne laissa aucune chance aux autochtones déjà en place. Après avoir tué près de 10 000 Haïtiens en leur coupant des membres et en les laissant se vider de leur sang, il s’est attaqué à l’actuelle République Dominicaine, laissant derrière lui, une mare de sang.

Les consignes qu’il avait reçues étaient pourtant claires : « s’efforcer de gagner la confiance des habitants en s’abstenant du moindre mal » mais à l’autre bout du monde, avec un grand sentiment d’impunité, les actes étaient tout autres.

Ce n’était pas la guerre, mais bien pire encore Samuel Eliot Morison, historien, utilise même le terme de « génocide » pour décrire les atrocités des colons..

Des enfants finissaient rôtis à la broche avant d’être découpés en morceaux, des jeux-défis étaient lancés entre Européens afin de savoir qui des deux dualistes pourraient couper d’un seul coup, la tête de sujets Indiens. La bestialité des soldats occidentaux les poussaient à décapiter sans raison aucune, les enfants qu’ils croisaient et pire encore, lorsque les chiens de meute de l’équipage étaient à cours de viande, ce sont des bébés Arawak qui étaient tués ou parfois donnés vifs en guise de repas. Des actes de barbarie de la sorte, les Indiens les ont endurés jour et nuit, et ce, pendant des années. Leur docilité a même donné l’idée à Christophe Colomb, de les ramener en Europe afin qu’ils soient exploités comme esclaves. Pendant les traversées, les femmes et les jeunes filles étaient violées puis battues à mort. […]

Les viols étaient récurrents et ce, dès que les fillettes atteignaient 9 ans. Le Professeur d’Histoire et sociologue de l’Université du Vermont : James Loewen, a souligné que « Dès 1493, le navigateur récompensait ses lieutenants avec des femmes Indiennes ». Bien bêtes sont ceux qui pensaient que des hommes pouvaient rester des mois et des mois en contenant leurs appétits sexuels !

Les chiffres parlent d’eux-mêmes, en 1493, les Arawak comptaient huit millions d’habitants étendus dans les Caraïbes (surtout en Haïti et République Dominicaine). A son départ, en 1504, il ne restait que 100 000 individus. »

Et ce texte est en effet confirmé par l’exemplaire prêtre dominicain <Bartolomé de las Casas> qui dénonça ces crimes et fut le défenseur des peuples indigènes.

Dans ce <récit historique> il dénonce :

« Des chrétiens rencontrèrent une Indienne, qui portait dans ses bras un enfant qu’elle était en train d’allaiter ; et comme le chien qui les accompagnait avait faim, ils arrachèrent l’enfant des bras de la mère, et tout vivant le jetèrent au chien, qui se mit à le dépecer sous les yeux mêmes de la mère (…). »

Vous trouverez aussi sur cette page, l’extrait suivant :

« C’est parmi ces douces brebis, ainsi dotées par le Créateur des qualités que j’ai dites, que s’installèrent les Espagnols. Dès qu’ils les connurent, ceux-ci se comportèrent comme des loups, et des tigres et des lions, qu’on aurait dit affamés depuis des jours. Et ils n’ont rien fait depuis quarante ans et plus qu’ils sont là, sinon les tuer, les faire souffrir, les affliger, les tourmenter par des méthodes cruelles extraordinaires, nouvelles et variées, qu’on n’avait jamais vues ni entendu parler. […]

Il y a eu deux façons principales pour ces gens qu’on appelle chrétiens, d’extirper et rayer ainsi de la terre ces malheureuses nations: la première ce furent les guerres cruelles, sanglantes, tyranniques; la seconde fut, après la mort de tous ceux qui pouvaient aspirer à la liberté et combattre pour elle – car tous les chefs et les hommes Indiens sont courageux – une oppression, une servitude si dure, si horrible que jamais des bêtes n’y ont été soumises. La raison pour laquelle les chrétiens ont détruit une si grande quantité d’êtres humains, a été seulement le désir insatiable de l’or, l’envie de s’emplir de richesses dans le délai le plus rapide possible, afin de s’élever à des niveaux sociaux qui n’étaient pas dignes de leur personne. »

Extrait tiré de : Bartolomé De Las Casas (1542), Brevisima Relacion de la destruccion de las Indias (= Très brève relation de la destruction des Indes).

Jacques Chirac avait raison en parlant de « cet assassin ».

Les monstres qui se comportaient ainsi, se prétendaient chrétiens. Christophe Colomb était très croyant. Et dire que cette ethnie arrogante, les européens chrétiens, prétendaient apporter la civilisation au monde. Nous, en tout cas moi je pensais qu’ils avaient été cruels parce qu’ils voulaient s’enrichir, gagner des terres et étendre leur pouvoir. La réalité est pire, ils étaient pervers et cruels par goût morbide.

<1280>

2 réflexions au sujet de « Mardi 1 octobre 2019 »

  • 1 octobre 2019 à 7 h 55 min
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    Un “bel” exemple de darwinisme social

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    • 1 octobre 2019 à 8 h 43 min
      Permalink

      Ils étaient cruels par perversité.

      Répondre

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