Jeudi 25 juin 2020

«Le point Godwin»
L’instant dans un débat ou dans une discussion où apparait la comparaison avec Hitler ou les nazis

Au commencement, il n’était pas question de « point » mais de Loi Godwin et cette dernière s’appliquait aux discussions en ligne. Reprenons cela.

C’est un avocat américain qui s’appelle Mike Godwin qui a énoncé cette Loi empirique en 1990 :

« Plus une discussion en ligne dure, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de un. »

Ce qui signifie que la probabilité qu’elle se réalise est proche de 100%

Xavier de La Porte avait consacré une chronique en 2014 à ce sujet : <Pour en finir avec le point Godwin>. Il rappelle que Mike Godwin a réalisé ses observations sur Usenet qui constituait des prémices de l’Internet .

C’est pourquoi cette règle s’appliquera facilement à Internet dans une logique de continuité.

Xavier de La Porte fait remonter cette Loi à un philosophe allemand :

« En fait, Mike Godwin applique aux conversations en ligne un phénomène identifié dès le début des années 1950 par le philosophe Léo Strauss sous le nom de « reductio ad hitlerum » (« réduction à Hitler »), et qui consiste à disqualifier l’argumentation de l’adversaire en l’associant à Hitler, au Nazi ou à toute autre idéologie honnie de l’Histoire. »

<Wikipedia> est une nouvelle fois d’un grand secours et permet d’apporter à la fois des nuances et des précisions.

Dans son application première, la Loi de Godwin entend conceptualiser ce moment où l’argument disparaît pour être transformé en des analogies extrêmes essayant de discréditer la position de l’adversaire. Il constitue aussi l’arrêt de la discussion puisque les arguments cessent.

La nuance est que la comparaison avec les nazis n’est pas toujours une figure rhétorique mais peut être légitime quand des paroles ou des actions peuvent rappeler l’époque nazi. C’est le cas lorsque certains commencent à évoquer des discriminations ethniques ou religieuses.

Par exemple, Mike Godwin est intervenu lui-même dans la presse au cours des manifestations de Charlottesville d’août 2017 (rassemblant des supremacistes blancs, des néonazis et d’autres branches de l’alt-right américaine) pour dire que, bien sûr, les participants aux marches pouvaient être comparés à des nazis :

Mais ce n’est pas dans ce cas que la Loi Godwin est pertinente. Il faut plutôt que le sujet de la discussion soit très éloigné d’un quelconque débat idéologique, une comparaison de ce genre est alors considérée comme un signe d’échec de la discussion.

Wikipedia précise :

« Selon Mike Godwin, « le point Godwin » est une expression qui s’est développée dans les milieux francophones : « Pour être tout à fait clair, j’ai inventé la « loi de Godwin », pas « le point Godwin » – cette expression s’est développée chez les francophones. Ceux-ci parlent de « point Godwin » quand ils atteignent, dans la discussion, le stade de la comparaison avec les nazis : ils se décernent mêmes des « points Godwin » par dérision ! J’apprécie cette inventivité linguistique mais, à ma connaissance, cette expression est propre aux francophones.»

C’est pourquoi je trouve intéressant de parler de « point » à partir duquel il est temps de clore le débat, dont il ne sortira plus rien de pertinent.

On dit que l’on a atteint le « point Godwin » de la discussion. Wikipedia analyse :

« Bien que le point Godwin ait originellement le sens de « point de non-retour », les francophones jouent sur deux sens du mot « point », qui peut désigner :

  • soit le moment de la discussion auquel le dérapage survient ; dans ce sens du terme, on atteint le point Godwin ;
  • soit le point en tant que récompense ou mauvais point attribué au participant qui aura permis de vérifier la loi de Godwin en venant mêler Adolf Hitler, le nazisme ou toute idéologie extrémiste à une discussion dont ce n’est pas le sujet ; dans ce sens du terme, on marque ou gagne un point Godwin.»

Recevoir un point Godwin devrait faire réaliser qu’on a été ridicule dans son argumentation.

Il existerait même des « remises de prix » publiques de points Godwin.

Depuis, le point Godwin s’est étendu à d’autres sphères qu’internet.

Par exemple le domaine politique : Le chef d’Etat Recep Tayyip Erdogan, en 2017 a comparé les Pays-Bas et l’Allemagne aux nazis parce que ces deux pays européens avaient refusé l’organisation de meeting turc sur leur territoire.

Pourquoi je parle aujourd’hui du point Godwin ?

Parce que je n’en ai jamais parlé et que cela étend encore les sujets évoqués par le mot du jour.

Mais aussi, parce qu’il a été atteint dans les élections municipales et métropolitaines à Lyon.

Vous savez qu’il est possible que les écologistes s’emparent de la mairie de Lyon et aussi de la métropole de Lyon. C’est pour cette raison que Gérard Collomb s’est associé à la Droite pour éviter ce résultat.

Dans un premier temps, assez naturellement Collomb et ses alliés ont traité les écologistes d’incompétents.

Puis, ils sont allés plus loin, comme le rapporte de journal <Les Echos> Ils les ont traités « d’extrémistes »

« Son camp et celui de la droite dénonçaient le « péril rouge-vert » et « l’extrémisme écologiste ». »

Puis des textes et des mails ont circulé, Annie en a reçu, dans les milieux économiques pour appeler à faire barrage aux écologistes.

Ils se sont nommés « des Acteurs de Lyon ». Ce collectif revendique l’anonymat, de peur d’exposer leurs entreprises qui dépendent parfois de la commande publique.

On peut lire par exemple :

« Les écologistes, c’est la décroissance et la misère. »

Une étape plus loin, Christophe Marguin, président des Toques Blanches lyonnaises qui est une associations de cuisiniers opérant à Lyon, a traité les électeurs des écologistes de « connards ».

Cet homme inélégant est lui-même chef cuisinier du restaurant « Le Président », il est aussi candidat sur la liste LR dans la circonscription Lyon Nord.

Et enfin…

Le Point Godwin a été atteint par un bijoutier lyonnais : Jean-Louis Maier

<Lyon Capitale> rapporte :

« Jean-Louis Maier a franchi un nouveau cap dans un podcast d’Arte Radio publié ce mercredi en comparant les Verts à Adolf Hitler. « Hitler est arrivé au pouvoir démocratiquement. Ce n’était pas une bonne idée », lâche-t-il. « Le danger est au même niveau entre l’arrivée de Bruno Bernard à la tête de la métropole et celle d’Adolf Hitler pour la population lyonnaise ? », le reprend le journaliste. « Oui. Quand vous avez perdu la démocratie vous ne la retrouvez pas facilement », répond, le ton presque inquiet, Jean-Louis Maier. »

Je pense que nous pouvons attribuer le Point Godwin à Monsieur Jean-Louis Maier.

Je me demande quand même si toutes ces agitations ne sont pas contreproductives et ne vont pas conduire des électeurs moins convaincus à voter vert pour rejeter tous ces excès.

Et je ne résiste pas à finir ce mot du jour par une affiche d’antan

Gérard Collomb n’avait pas expliqué, à cette époque, qu’il était pour la retraite à 60 ans …
pour les autres …

Il a fêté le 20 juin ses 73 ans. Dans 6 ans à la fin du mandat qui commencera après les prochaines élections il en aura 79.

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