Vendredi 29 Janvier 2016

Vendredi 29 Janvier 2016
« La conquête de l’espace public par les femmes est très important. Le fait de pouvoir sortir seule, le soir, la nuit ce qui est encore considéré comme un danger pour les femmes, c’est quelque chose qui doit cesser, partout ! »
Michelle Perrot

Il faut conclure cette semaine consacrée aux violences faites aux femmes dans l’espace public, même en France.

Dans l’esprit de beaucoup, le fait que les femmes doivent faire attention, éviter certaines tenues, éviter certains quartiers, ne pas sortir seule à partir d’une certaine heure est intégré et surtout semble normal.

Que dans le monde tel qu’il existe il vaut mieux être prudent, cela se comprend, mais que cela soit normal !

Non ce n’est pas normal !

C’est une vraie prise de conscience qu’il faut développer, mais aussi l’inscrire dans la réalité avec les moyens appropriés pour rendre l’espace public sur, sécurisé et apaisé.

Les évènements de Cologne pourraient conduire à une régression si la peur l’emportait.

Une autre régression à l’égard des femmes menace la France en raison du communautarisme qui s’est développé dans des populations issues de l’immigration de population venant de pays et de culture qui sont encore à un stade plus archaïque des relations femme/homme.

Mais Michelle Perrot, dans les matins de France Culture, reste optimiste :

«  Il y a des stades dans le développement des « cultures » dans ce domaine. Toutes les cultures n’en sont pas au même stade et le facteur religieux est important. Les religions n’ont jamais été favorables aux femmes ni les unes ni les autres. Le christianisme a évolué, l’Islam peut le faire aussi. Ce n’est pas un fait éternel mais il peut y avoir des différences dans le temps. »

Bien entendu, sur certains points il faut être beaucoup plus ferme dans nos principes et à l’égard de certains mouvements salafistes qui n’acceptent pas certaines valeurs fondamentales de notre société.

Michelle Perrot a rappelé l’évolution dans notre société : « Au XVIIème siècle il se produit « une rupture d’évidence ». On pensait que les deux sexes étaient hiérarchisés et inégaux. Descartes dit : « la science n’a pas de sexe ». Ce qui veut dire, homme et femme sont égaux devant la science.

Et les disciples de Descartes produisent des traités sur le thème « De l’égalité des sexes » qui laissent entendre que les deux sexes pourraient bien être égaux. Et commence ainsi un long processus à travers les lumières.

L’occident va ainsi commencé à professer l’égalité des sexes mais c’est un processus très long.

« Très souvent cette prise de conscience s’accompagne de l’idée de la complémentarité. Ils sont égaux mais ils sont complémentaires et différents. De sorte que les hommes doivent toujours faire de la politique, gouverner, diriger. Et les femmes s’occuper de la maison etc.

Il faut encore conquérir l’idée que ce n’est pas la complémentarité mais que c’est l’universalité des individus qui est importante ».

Dans le monde des  idées, une deuxième étape sera élaborée par Alexis de Tocqueville notamment dans son ouvrage « De la démocratie en Amérique »

Tocqueville parle de l’égalité des conditions, en fragilisant toutes les relations hiérarchiques de subordination notamment entre les  hommes et les femmes.»

Wikipedia l’exprime de la manière suivante :

« Pour Tocqueville, il y a quasi équivalence entre la démocratie (au sens politique) et l’égalité des conditions. Il considère que tous les êtres humains possèdent comme attribut la liberté naturelle, c’est-à-dire la potentialité d’agir librement.»

Michelle Perrot ajoute :

«Puis il y a le XXème siècle qui sera pour les femmes le gain de la contraception qui permet le choix dans la naissance et par conséquence dans la sexualité.

Puis il y a eu cette rupture fondamentale du droit à l’avortement. Il y a eu une sorte de révolution qu’on a appelé l’Habeus corpus des femmes.

Cela est un vrai changement.  La conquête de l’espace public par les femmes est très importante.

Le fait de pouvoir sortir seule, le soir, la nuit ce qui est encore considéré comme un danger pour les femmes, c’est quelque chose qui doit cesser, partout ! »

Une partie du chemin a été réalisée dans les pays occidentaux, il reste encore des terrains à conquérir, dans d’autres partie du monde, c’est des pays entiers qui doivent être conquis.

Encore deux points :

Une pensée qui me semble très juste :

Véronique Nahoum-Grappe, déjà cité  et qui précise :

«La question de la domination masculine ne repose pas intégralement sur les individus homme et femme, dans leurs trajectoires de vie, dans leurs amours, dans leurs corps.

Des pratiques extrêmement cruelles à l’égard des femmes comme l’excision sont pratiqués par les hommes et les femmes, car la société est mixte à tous les niveaux.

On ne peut pas dire que les femmes soient plus gentilles que les hommes, au niveau éthique il y a des femmes qui sont aussi cinglées, aussi cruelles, aussi perverses [que certains hommes le sont] »

Cette réflexion ouvre vers d’autres perspectives où on doit constater que c’est plus largement le féminin qui a été et reste opprimé dans nos sociétés où ce qui est valorisé est la force, la virilité et les autres attributs que l’on prête au masculin.

Alors que la sensibilité et les attributs féminins sont dévalorisés. « Ne pleure pas, sois un homme ». Voilà une interjection, souvent entendu, et qui illustre cette réflexion. Le chemin que doivent parcourir les hommes, c’est aussi l’acceptation et la valorisation de leur part de féminin.

Ce sera peut-être l’objet d’un mot du jour futur.

Le second point est le témoignage d’Hélène après avoir lu les trois premiers mots du jour de cette semaine :

«Malheureusement je suis bien d’accord avec toi !

Hier j’étais à une soirée d’info professionnelle où était présent le Docteur Foldes le premier chirurgien à avoir proposé une chirurgie de reconstruction pour les femmes victimes de mutilations sexuelles « culturelles »

Avec d’autres personnes engagées il a ouvert un centre près de l’hôpital de Saint Germain en Laye, dans un local prêté par l ‘hôpital. [Ce centre est ouvert à toutes les violences faites aux femmes]

Ils essayent de prendre en charge la personne victime dans sa globalité avec une équipe pluridisciplinaire

En relation directe avec le parquet ils arrivent à avoir des mesures de protections d’urgences qui mettent plusieurs semaines lorsqu’une plainte est déposée en commissariat !  (Et on ne compte pas les plaintes sans suites car reçues par un policier qui n’a pas été formé à cela et qui rédige la plainte de façon irrecevable) […]

C’est le seul centre de ce genre en France ils n’ont aucune aide publique!!

Quand on pense que les violences touchent 1/4 de la population féminine et que la majorité des violences est perpétrée par des personnes proches de la victime et souvent avant sa majorité.

Le coût des violence faites aux femmes est estimé à plus de 4 milliards d’euros par an soit plus que le cancer du sein et ce genre d’institut a besoin d’un kilo de papier pour des subventions de l’ordre de 1000 euros !»

Mise à jour le 12/05/2020 après la constatation que le lien vers le site de cette association était devenu obsolète.

Le nouveau site de ce Centre : https://www.women-safe.org/

Voici la présentation de ce site :

En 2008, Frédérique Martz et le docteur Pierre Foldes font le constat que lorsque les femmes victimes libèrent enfin leur parole, elles déclarent cumuler plusieurs formes de violences (physique, psychologique, sexuelle, économique, rituelle…). Or, celles-ci étaient souvent traitées dans des dispositifs différents, morcelant la prise en charge. Il a fallu imaginer une nouvelle manière d’accompagner les victimes avec une approche globale et pérenne.

En 2014, ils créent ensemble l’association Institut en Santé Génésique, située à Saint-Germain-en-Laye, et s’engagent dans un vrai combat pour les victimes de toutes formes de violences.

En 2017, L’Institut en Santé Génésique devient WOMEN SAFE (Soigner, Accompagner, Femmes et Enfants) association spécialisée en victimologie et psychotraumatologie, et étend son action auprès des enfants victimes ou témoins de violences avec la création du pôle « Mineurs ».

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