Jeudi 28 Janvier 2016

Jeudi 28 Janvier 2016
« La ville faite par et pour les hommes »
Parler de la violence contre les femmes dans l’espace public, ramène forcément à s’interroger sur les villes, sur la place des femmes dans les villes, dans les rues, sur les places, dans les transports.
Je commencerai d’abord par une expérience personnelle de la cour de récréation de la primaire que je n’ai décrypté que bien plus tard quand j’ai commencé à être sensible à la remise en cause de la société patriarcale.
Quand j’ai débuté dans l’école primaire en 1964, elle n’était pas mixte, il y avait l’école des garçons et l’école des filles. Aujourd’hui, encore beaucoup de bâtiments dédiés à l’école primaire, toutes mixtes désormais, portent à leur fronton « École de garçons » ou « École de filles ».
Mais quand je suis entré au cours moyen 2, l’école est devenue mixte. Dans l’organisation de mon école de la Verrerie-Sophie, la classe de CM2 allait se faire dans les bâtiments qui étaient avant ceux des filles.
Et quand des garçons se retrouvaient à cette époque dans la cour de récréation, que faisaient-ils ? Ils, jouaient au football.
En résumé, les garçons sont venus, ont colonisé l’espace de la cour de récréation des filles et ont joué au football sans les filles, ne laissant plus qu’une petite place, dans les marges de la cour, aux filles ! Et tout le monde trouvait cela normal. Même les institutrices qui étaient toutes restées dans le bâtiment des filles n’ont rien dit : un partage de l’espace de 80 % pour les garçons 20% pour les filles était normal !
Ce sujet concernant la place laissé aux femmes dans nos villes a été le thème de l’émission : « Un jour en France du 9 novembre 2015 »
C’est une question que l’on n’a abordé que récemment.
Il y a d’abord, pour le symbole, le nom des rues et des places qui portent le nom d’hommes,  beaucoup de généraux. Peu portent des noms de femme et c’est toujours des petites rues, des petites places, des écoles maternelles.
Les équipements sportifs sont faits essentiellement pour les garçons. Et lorsqu’ils sont réputés mixtes, par exemple les skate parcs, ils sont quasi exclusivement occupés par les garçons.
L’émission « Sur les docks du 24/11/2015 » avait abordé ce sujet et révélait notamment :
«Une étude récente menée dans le bois de Vincennes souligne que la présence des femmes diminue dans les espaces aménagés dès que les hommes les investissent. Ainsi les pistes cyclables du bois sont principalement fréquentées par des hommes pratiquant le vélo de course. L’espace urbain « concocté » par les urbanistes en concertation avec les élus nous rappelle ce monde pensé au masculin : rampes de surf, terrains de foot, cages à volleyball, terrains de boules ? Conséquence : la fréquentation des équipements urbains affiche deux tiers d’hommes pour un tiers de femmes. »
Tout cela se déroule dans un espace public où le harcèlement sexuel à l’égard des femmes est général.
D’ailleurs, quand sur une place comme « la Place du Pont » de Lyon dont j’ai parlé récemment, il y a des regroupements de personnes qui stationnent, ce sont toujours exclusivement des humains du genre mâle.
Souvent les femmes marchent vite, pour ne pas avoir à subir d’avances ou de remarques déplacées. Les femmes évitent les regards pour ne pas avoir de mauvaise surprise etc…
Bien sûr la France est un paradis par rapport à d’autres pays. Et en France cela dépend des quartiers et bien sûr cela dépend de l’heure. Et alors dans certains quartiers et à certaines heures…
Force est de constater que cette liberté fondamentale de sortir et de se déplacer dans la ville à n’importe quelle heure de la journée et donc le soir et la nuit n’est pas pleinement respectée, même en France !
Dans beaucoup de pays du monde c’est impossible pour les femmes ou très très dangereux, par exemple à New Delhi
Dans cet article on apprend que c’est beaucoup trop dangereux et que les autorités ont trouvé une disposition absolument surréaliste : verbaliser les femmes qui sortent seules le soir ! Ce sont encore les victimes qui sont pénalisées.
Mais le harcèlement est aussi la réalité de la rue et des transports de notre beau pays. Les femmes pour y faire face sont obligées de pratiquer l’évitement ou d’avoir des stratégies pour pallier ces atteintes à la liberté de circuler librement et sans risque.
Ce sont des choses absolument inacceptables.
Peut-être faudrait-il interdire à certains hommes de sortir le soir et pour certains même la journée. Eh bien oui, il  n’arrive pas à se contrôler ou simplement « à taire leurs pulsions animales ! ». Souvent on continue à leur chercher des excuses où à minimiser leurs actes et propos obscènes.
Mais c’est une vraie prise de conscience qu’il faut avoir à ce sujet. Ne pas rester dans la seule posture individuel de l’évitement.
Au Portugal la question se pose de criminaliser le harcèlement dans la rue : http://www.courrierinternational.com/article/controverse-faut-il-criminaliser-le-harcelement-sexuel-dans-la-rue
Vous trouverez aussi des réflexions très riches sur ce sujet sur une page de l’Express : http://www.lexpress.fr/actualite/societe/loi-sur-le-harcelement-sexuel_1623990.html
Je rappelle aussi ce site gouvernemental déjà cité : http://www.stop-harcelement-sexuel.gouv.fr/
Et bien sûr le livre dont j’ai choisi le titre comme exergue à ce mot du jour
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