Vendredi 12 mai 2017

« Un monopoly amélioré »
Invention de l’Observatoire des inégalités

Aujourd’hui je vous propose un jeu.

En fait il s’agit d’une vidéo montrant des enfants jouant à un jeu bien connu, mais avec des règles particulières.

Je vous renvoie vers cette vidéo que vous trouverez derrière ce lien : http://www.videobuzzy.com/Quand-des-enfants-jouent-au-Monopoly-avec-des-regles-injustes-14445.news

Je vous la décris brièvement :

Des enfants sont installés autour d’une table pour jouer au Monopoly.

Mais il y a un maître du jeu qui fixe les règles :

Une moitié des joueurs commencent le jeu avec 1500 euros, l’autre avec 750.

Un des joueurs favorisés aura 3 rues et 2 maisons dès le début du jeu

Un joueur possède une carte qui lui permet de ne jamais aller en prison.

Etc..

Vous comprenez.

Les enfants protestent, disent c’est injuste, ça ne va pas. Mais le jeu continue.

En fait ce n’est pas un jeu.

C’est ainsi que cela se passe dans la vraie vie !

La séquence a été réalisée par lObservatoire des inégalités, un organisme indépendant qui collecte des données et des statistiques sur les inégalités sociales pour les rendre public.

Peut-être qu’ainsi il est plus facile d’appréhender la réalité du monde, du marché libre et concurrentiel où tout le monde a sa chance…

Cela ne contredit pas le mot du jour d’hier et les réflexions de Slotedijk, cela les complète.

Jeudi 11 mai 2017

« [Cette élection] : voilà bien la preuve que la France possède encore un esprit ouvert à la surprise. »
Peter Sloterdijk


Peter Sloterdijk est un philosophe et essayiste allemand né en 1947. Il est d’usage de voir en lui une figure importante de la pensée européenne.

Le Point lui donne la parole pour réagir à l’élection de notre jeune président. Sa pensée n’a pas pour vocation d’être consensuelle mais d’apporter un éclairage décapant et qui peut sans doute heurter quelques sensibilités de gauche. Mais on ne peut progresser qu’en entendant et en comprenant des pensées alternatives qui nous obligent à sortir de notre quiétude de pensée et nos certitudes indolentes.

Vous trouverez cet article derrière ce lien : <Les français ont choisi Macron pour se renouveler eux-memes>

J’en livre quelques extraits :

« [Cette élection] : voilà bien la preuve que la France possède encore un esprit ouvert à la surprise. Ce qui est déjà un constat remarquable dans un pays où politique et administration se sont confondues depuis cinquante ans et où tout se réglait, précisément, par l’élimination de la surprise : partis puissants, candidats ayant fait carrière dans ces outils en place que la philosophe Simone Weil voulait d’ailleurs, notons-le, supprimer chez vous dès la Seconde Guerre mondiale. « Si on confiait au diable l’organisation de la vie publique, il ne pourrait rien imaginer de plus ingénieux », écrivait-elle de ces appareils à reproduire le même… Ce qu’on peut déduire du succès du « marcheur » Macron, c’est que les Français eux-mêmes ont compris que la France ne pouvait pas continuer dans cette voie sans issue.

[…] Du point de vue psychopolitique, c’est une personnalité qui fonctionne comme un émetteur-récepteur : c’est un collecteur de rayons de soleil et de séismes encore peu perceptibles dans le pays, ces « grands événements » qui « arrivent toujours sur des pattes de pigeon », comme disait Nietzsche. Macron me semble incarner le désir de la majorité des Français de sortir de cet état de dépression et d’hystérie qui caractérise les hommes et les femmes de l’Hexagone depuis un bout de temps. Ils l’ont choisi, lui, un représentant si frais, si neuf, afin de pouvoir se renouveler eux-mêmes. […]

Lors d’une émission de radio j’ai entendu cette réflexion d’un commentateur qui m’a interpellé : « Cette campagne pénible et déprimante a finalement accouché d’un vainqueur optimiste  »

Mais ce philosophe ose des éclairages s’appuyant sur l’Histoire européenne plus ancienne. Car rappelons que la Réforme n’a pas pu s’imposer en France et que Louis XIV a rompu avec l’Edit de Nantes de Henry IV ce qui a eu pour conséquence de faire fuir les protestants français hors de France pour enrichir la Suisse, la Prusse et aussi les Pays Bas. Max Weber avait théorisé un lien étroit entre le développement du capitaliste libéral et le protestantisme.

« L’élection de Macron pourrait être une réponse inconsciente à l’expulsion des protestants par Louis XIV, qui a fermé à la France la voie de la Réforme. Aujourd’hui, on parlerait « des » réformes… C’est le même mot. La France a oublié que le catholicisme a concentré un énorme pouvoir politique et idéologique jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le catholicisme a été le troisième élément dans le trio infernal des antilibéraux qui a marqué l’histoire du XXe siècle, le national-socialisme et le communisme étant les deux autres pôles. En France, on a cru éliminer le catholicisme en le remplaçant par une laïcité acharnée, mais l’attitude antilibérale restait intacte. Vous aurez noté que la Conférence des évêques de France a refusé d’appeler à voter expressément contre le Front national, et encore moins pour Macron. Les démons de l’antilibéralisme sont encore en embuscade. Mais la tragédie de la France remonte à un passé plus profond. Dans ce pays, il a toujours existé deux peuples différents qui malheureusement portent le même nom : les Français enfants de la Révolution et les autres Français, enfants de la France catholique éternelle. La grande force de De Gaulle, c’était d’avoir réconcilié ces deux peuples français. Aujourd’hui, les effets de la réconciliation se délitent, et c’est sans doute pour cela que l’ensemble du petit monde politique, chez vous, en appelle aux mânes de votre Général et prétend même enfiler son costume mythique, au risque de le salir. Oui, c’est cette rupture que l’on sent encore aujourd’hui faire gémir et convulser le pays, et c’est beaucoup plus profond que le clivage gauche-droite, qui n’est pas totalement obsolète mais qui représente, pour moi, plutôt une « façade » folklorique.

Il exprime ensuite des mots très durs pour Mélenchon dont il dit :

« La touche personnelle de Mélenchon, c’est son invention d’un national-anarchisme, et son antigermanisme primaire, son programme économique d’un romantisme vénézuélien qui mise sur un miracle économique artificiel par l’explosion de la dette publique, sa haine de l’argent même gagné par le travail, ce ne sont pas des traits révolutionnaires, mais plutôt fascisants  ! Et je ne parle pas, chez ce fonctionnaire issu du cercle des courtisans de Mitterrand, de son narcissisme hologrammique, »

Et puis il explique avec ses mots sa vision de l’Europe et de la France quant à l’ultralibéralisme qui est exagéré et nous renvoie à notre difficulté de perdre ce qu’il appelle notre « rente de civilisation. »

« Soyons réalistes  ! L’Europe continentale n’a jamais été ultralibérale, et encore moins la France, qui est une nation profondément étatisée reposant sur une fiscocratie ultraperformante. Avec un taux de prélèvements obligatoires de 44  % du PIB, il serait tout simplement aberrant de prétendre que le néolibéralisme est au pouvoir. L’agitation contre le néolibéralisme prétendument dominant n’est qu’une ruse de la rhétorique de gauche pour aller encore plus loin dans la direction du semi-socialisme réel. Le populisme de gauche et de droite qui sévit en France et dans le reste de l’Europe est l’expression d’un ressentiment devant la perte d’un certain nombre de privilèges qui ont été ceux de l’Européen des classes populaires depuis les années 1950. On profitait d’une sorte de « rente de civilisation » qui faisait que, quand on naissait en France ou en Allemagne, on avait des avantages considérables sur un compétiteur né en Inde ou en Chine. À l’époque, des ouvriers peu qualifiés pouvaient se permettre une maison, une voiture, une famille. On pourrait dire, à un moment précaire et intenable de l’évolution économique, qu’on se faisait payer pour le simple fait d’être français ou allemand. Comme le maître de Figaro chez Beaumarchais, on ne s’est longtemps donné que la peine de naître… au bon endroit  ! Avec le progrès de la mondialisation, la rente européenne se dissout. Les masses se mettent en colère contre leurs dirigeants, qui ne peuvent rien au fait que les autres nous rattrapent. L’anomalie de la rente de civilisation va disparaître peu à peu, c’est dans la logique des choses, même si vous me dites que vous êtes insoumis.

Tant mieux, mais expliquez : insoumis à quoi  ? À la compréhension de la situation globale. »

Et il finit par une citation de Goethe :

« Notre sage de Weimar, le vieux Goethe, avait remarqué, le 8 mai 1830, face à un savant polonais : « La nation française est la nation des extrêmes; elle ne connaît en rien la mesure. Équipé d’une énergie puissante, morale et physique, le peuple français pourrait soulever le monde s’il découvrait un point d’appui ; mais il ne semble pas savoir que, lorsqu’on veut soulever de lourdes charges, on doit trouver leur centre de gravité. » Alors, Français, encore un effort si vous voulez être à la hauteur de l’époque  ! » »

Mercredi 10 mai 2017

« Le choc des légitimités »
Autres réflexions et regards sur cette présidentielle qui vient de s’achever

Mon neveu Grégory qui a répondu au mot du jour d’hier avec cette constatation étonnée : « le président est plus jeune que moi ! » avait eu cette belle formule, il y a 5 ans à propos de François Hollande : « Il faut laisser sa chance au produit »

Cinq ans plus tard, la chance est passée…

Nous repartons donc avec un nouveau produit pour 5 ans !

Je vais tenter une analyse froide, neutre de ce qui me semble être la problématique de fond de ce qui va suivre dans notre vie politique nationale.

Emmanuel Macron avait émis deux critiques sur la manière dont François Hollande avait conduit la réforme du code du travail dite « Loi El Khomri » : La première critique était qu’elle arrivait trop tard dans le quinquennat et la seconde qu’elle n’avait pas été annoncée lors de la campagne présidentielle. Et il expliquait que les électeurs de François Hollande pouvaient se sentir trahis parce qu’on ne leur avait rien dit et que dans leur esprit ils ne l’avaient pas élu pour ça.

Sur le fond Emmanuel Macron considère qu’il faut aller beaucoup plus loin dans la dérégulation du droit du travail en permettant de très larges marges de manœuvre au niveau de la négociation dans l’entreprise.

Mais en pleine cohérence avec sa critique de François Hollande, il a, dans sa campagne, annoncé très rapidement qu’il voulait faire évoluer le code du travail dans le sens qu’il souhaitait. En outre, pour aller plus vite il prévoyait de réaliser cette loi par voie d’ordonnances.

Ce qui signifie que l’assemblée nationale donne l’autorisation au gouvernement dans un domaine précis et dans un cadre défini d’écrire la Loi dans le détail, ce qui est normalement du seul ressort du pouvoir législatif. Une fois la loi écrite, le Parlement doit vérifier si le domaine et le cadre ont été respectés et ratifier les ordonnances. Il y a donc bien intervention du parlement, mais le travail de fond et bien sûr les débats qui sont la raison d’être du Parlement lui ont totalement échappé.

Emmanuel Macron considère que le problème principal de la France est le chômage de masse et que l’assouplissement des contraintes du droit de travail constitue une solution essentielle à ce problème.

Il n’a jamais varié sur ce point.

Les Français l’ont élu. Ils ne pouvaient ignorer qu’au centre de son projet il y avait cette réforme à réaliser en toute urgence. Il a voulu être élu pour faire cela, il n’a trompé personne. Devant les demandes explicites de Jean-Luc Mélenchon de renoncer à cette réforme ou au moins de renoncer de la faire par la procédure des ordonnances comme prix ou compromis pour qu’il appelle à voter pour lui, le futur Président a encore répondu négativement.

Il est donc totalement légitime de mettre en œuvre cette réforme puisqu’il a été élu.

Mais face à cette légitimité, celles et ceux qui refusent cette réforme en opposent une autre en expliquant qu’au premier tour Emmanuel Macron n’a obtenu que 24% des voix et qu’une grande partie de ces électeurs n’ont pas fait un vote d’adhésion mais un vote d’évitement : éviter que face à la candidate d’extrême droite se trouve un candidat dont il voulait encore moins que Macron.

Le second tour étant quant à lui un véritable vote de rejet de l’autre candidate et d’aucune manière une approbation du programme proposé par notre jeune Président.

Il y a donc choc des légitimités.

Mais comment reprocher à Emmanuel Macron de vouloir appliquer le programme qu’il a annoncé et qui selon lui règle une grande part du problème qui est posé à la France à savoir le chômage de masse.

Comment sort-on d’une telle contradiction ?

Très simplement en allant voter aux élections législatives et non pas en s’abstenant comme cela s’est toujours passé lors des épisodes précédents de ce feuilleton qui n’existe qu’en France où il faut voter 4 fois avant d’avoir un pouvoir exécutif et législatif en capacité de fonctionner. Ce feuilleton auquel s’ajoutent 2 autres tours si on participe à des primaires.

Donc il faut voter aux législatives :

Si vous voulez qu’Emmanuel Macron puisse mettre en œuvre le programme auquel il croit, il faut voter pour la ou le candidat qui soutient le Président.

Si vous voulez le contraire, il faut voter pour la ou le candidat qui veut le contraire.

Et après cet exercice démocratique, le choix des français s’imposera dans un sens ou dans l’autre.


 

Mardi 9 mai 2017

« Tu te sens très vieux le jour où tu t’aperçois que le président de la République a 20 ans de moins que toi »
Réflexions personnelles après l’élection de dimanche

La première fois que j’ai eu conscience de la politique c’était en 1969, j’étais un très jeune enfant, et les français avaient élu Georges Pompidou qui évidemment m’apparaissait très vieux.

En 1974, j’avais 16 ans et je n’avais pas le droit de vote mais je me suis très intéressé à cette bataille électorale.

A partir de 1974, jusqu’en 2007, c’est-à-dire 33 ans, donc pour l’instant plus de la moitié de ma vie, la Présidence de la République a été accaparée par 3 hommes Giscard d’Estaing né en 1926, Mitterrand né en 1916 et Chirac né en 1932.

Même si Giscard est arrivé au pouvoir jeune, à 48 ans, il était beaucoup plus vieux que moi. Le plus jeune des 3 avait 26 ans de plus que moi.

Mitterrand et Chirac, lors des grandes cérémonies mondiales étaient souvent les vieux de ces aréopages.

En 2007 et 2012, les élus devenaient davantage mes contemporains, Sarkozy était né 3 ans avant moi et Hollande 4 ans.

Tout ceci était fort raisonnable, je ne m’attendais donc pas en 2017 à une telle rupture générationnelle.

D’ailleurs Emmanuel Macron, sera le benjamin lors du prochain G20.

Les politiques français ne m’avaient pas préparé à un tel choc, et le monde n’était pas habitué que la France puisse apparaître aussi jeune.

Jusqu’à présent c’était eux qui se moquaient de notre incapacité à renouveler notre personnel politique.

Mais maintenant avec un Président de 39 ans, c’est la France qui fait rayonner sa jeunesse.

Tony Blair est devenu premier ministre anglais à 44 ans, comme David Cameron.

Comme José Zapatero, premier ministre espagnol à 44 ans, battu par son prédécesseur José Maria Aznar 43 ans.

Le premier ministre canadien Justin Trudeau l’est devenu à 44 ans aussi.

Et c’est finalement en Italie qu’on trouve Matteo Renzi qui était devenu premier ministre à 39 ans.

Mais maintenant la France peut dire, nous avons élu un président de 39 ans.

Sa jeunesse est un atout, il peut certainement mieux comprendre le monde du XXIème siècle que ceux qui sont restés dans leurs schémas du XXème siècle !

Saura t’il pour autant trouver les voies pour réconcilier les français et faire évoluer l’Europe dans le sens de la protection de ses habitants ?

Ce sont des défis énormes, il faut bien l’enthousiasme et l’énergie d’un jeune homme brillant et cultivé de 39 ans pour espérer s’approcher de ces objectifs.

Vendredi 5 mai 2017

Vendredi 5 mai 2017
« Je crois à une France lumineuse qui se battra toujours pour ses valeurs. »
Fatou Diome lors de l’émission du Gros Journal de Canal + du 22 mars 2017
Mon ami Philippe a mis en lien sur facebook cet extrait du Gros Journal de Canal+ où le journaliste Mouloud Achour reçoit l’écrivaine et universitaire franco-sénégalaise Fatou Diome et lui pose la question : « Vous avez peur de Marine Le Pen ou pas ? »
Et qu’elle répond : « Je n’ai peur d’elle, c’est elle qui a peur de moi ! »
Cette réponse déclenche un fou rire chez le journaliste. Quand le journaliste arrive enfin à se calmer et demande à Fatou Diome d’expliquer, cette dernière se lance dans un plaidoyer remarquable, prononcé d’une seule traite, qui conduit le journaliste à rester en suspens et puis effacer une larme à l’œil.
Fatou Diome, c’est cette femme noire qui a été découverte par la France entière alors qu’elle était invitée par Frédéric Taddei à l’émission de France 2, le 24 avril 2015, après un nouveau naufrage à Lampedusa de migrants cherchant refuge en Europe : http://www.dailymotion.com/video/x2o4viv
Dans cette émission elle se lance aussi dans une harangue qui cloue le bec à ses contradicteurs et elle dit notamment :
«  Ces gens-là qui meurent sur les plages, et je mesure mes mots, si c’était des blancs, la terre entière serait en train de trembler ! Mais là, ce sont des noirs et des arabes (…) Si on voulait sauver les gens, on le ferait, mais on attend qu’ils meurent d’abord ! Et on nous dit que c’est dissuasif, mais ça ne dissuade personne, car celui qui part pour sa survie, considère que sa vie (qu’il peut perdre lors du voyage) ne vaut rien, celui-là n’a pas peur de la mort !”
A la réponse d’un invité sur l’importance de fermer les frontières pour éviter l’arrivée massive de migrants, Fatou Diome a présenté l’homme “blanc” comme un poisson rouge : « Monsieur, vous ne resterez pas comme des poissons rouges dans la forteresse Européenne ! A l’heure d’aujourd’hui, l’Europe ne sera plus jamais épargnée, tant qu’il y aura des conflits ailleurs dans le monde (…) Alors il faut arrêter l’hypocrisie, on sera riche ensemble ou on se noiera tous ensemble !  »
Vous trouverez un article de l’Humanité où elle répond à un entretien après cette émission
Mais revenons à sa réponse à Mouloud Achour où elle explique qu’elle n’a pas peur de Marine Le Pen :
« Non je n’ai pas peur d’elle !
Vous savez le rejet a toujours peur de l’amour.
Moi je suis une fille, je suis venu en France par amour. Donc rien, aucune haine, aucun rejet ne me fera rejeter la France.
Et quand vous dites cela, vous faites peur aux sectaires, vous faites peur aux populistes.
Parce que moi, quand je dis cela, je m’accroche aux lumières européennes.
Quand je dis cela, je dis vos idées ténébreuses ne peuvent pas enterrer Montesquieu.
Vos idées ténébreuses ne feront pas enterrer Marianne.
Vos idées ténébreuses n’empêchent pas que cette République a mis Marie-Antoinette au trou et Victor Hugo au Panthéon, il y a des raisons à cela.
L’amour est plus fort que la haine.
Et la culture est toujours plus forte que l’ignorance.
Je crois à une France lumineuse qui se battra toujours pour ses valeurs.
C’est pour cela que je la respecte.
Et je la somme de me donner une preuve que tout ce qu’elle m’a enseigné est absolument véridique.
Je la somme de me montrer qu’elle est à la hauteur de son histoire lumineuse et humaniste.
[…]
Je veux que la France de Victor Hugo me dise que le simple rejet des misérables d’aujourd’hui ne justifie pas le racisme
La liberté gagné à la guerre, cette liberté-là n’est pas que pour que les enfants blancs de Marianne.
Cette liberté là c’est pour tous les enfants de Marianne et tous ceux qui sont morts au front pour la défendre et pour la léguer à leurs enfants.
Je suis une de ces enfants »
Le journal l’Humanité, déjà cité, raconte son histoire :
Fatou Diome est une enfant de l’amour et du scandale. Ses parents avaient (?) 18 ans, ils s’aimaient et n’étaient pas mariés. Elle naît en 1968 à Niodior, (?) une île de pêcheurs du Sénégal. Élevée par sa grand-mère, Aminata, sa référence, elle fréquente l’école en cachette et devra se débrouiller pour aller au collège.
Commencent les petits boulots, elle n’a pas encore 14 ans.
Fatou veut être professeur de français. Elle va à l’université de Dakar. En 1994, elle arrive en France, suivant l’homme qu’elle aime et a épousé. Rejetée par sa belle-famille, elle divorce et poursuit ses études à l’université de Strasbourg. À nouveau les galères: ménages, gardes, cours … pour payer son agrégation ? de français et sa thèse de lettres.
En 2001, Fatou publie un recueil de nouvelles, « la Préférence nationale».
Elle connaît la consécration, dès 2003, avec son premier roman, « le Ventre de l’Atlantique », traduit dans plus de 20 langues. « Je n’étais pas une femme de ménage devenue écrivain, j’étais une étudiante qui faisait des petits boulots », répond-elle à ceux qui veulent faire de son parcours un conte de fées.
Si vous voulez voir l’émission du Gros journal de Canal dans son intégralité : http://www.dailymotion.com/video/x5fpitw_le-gros-journal-avec-fatou-diome-l-integrale-du-22-03-canal_tv
Elle vient de publier un nouveau livre dont parle l’émission de Canal + : <Marianne porte plainte !>, il est paru en mars 2017
Voilà ce que j’avais envie d’écrire comme mot du jour avant le vote du 7 mai 2017.

Jeudi 4 mai 2017

«Et un sourire»
Paul Eluard
Pour mot du jour d’aujourd’hui, un poème d’Eluard.

«La nuit n’est jamais complète
Il y a toujours puisque je le dis
Puisque je l’affirme
Au bout du chagrin
une fenêtre ouverte
Une fenêtre éclairée
Il y a toujours un rêve qui veille
Désir à combler faim à satisfaire
Un cœur généreux
Une main tendue une main ouverte
Des yeux attentifs
Une vie la vie à se partager.»

Et un sourire
Paul ÉLUARD
Recueil : « Le Phénix »

Ce fut le poème que Jean-Luc Melenchon déclama à la fin de son dernier meeting avant le premier tour des présidentielles 2017.
C’est ce poème qui me vient à l’esprit après le chaos (1) du débat d’hier soir​.

(1) Il s’agit du débat d’entre deux tours entre Emmanuel Macron et la représentante de l’extrême droite qui a donné à ce moment une teneur très médiocre.
<886>

Vendredi 28 avril 2017

Vendredi 28 avril 2017
«C’est un peu rapide [de dire ] que deux France se feraient face ! »
Frédéric Gilli
Tourner autour du pot, pour voir le pot sous tous ses aspects…
Osons un peu de complexité, car la vie est complexité.
C’est l’arme des démagogues de tous bords de prétendre que les choses sont simples et que des solutions simples peuvent être trouvées.
Nous aussi sommes complexes :
Faisons-nous partie du peuple du web ou du peuple du mur ?
Sommes-nous libéraux ou non en matière économique, culturelle ou sociétale ?
Sommes-nous des « gens de n’importe où » ou appartenons au « peuple de quelque part ». ?
Mon ami Daniel répondait au mot du jour d’hier fort judicieusement : « j’ai du mal à me retrouver dans [cette] distinction. J’ai le sentiment d’être de quelque part culturellement mais pas physiquement par ailleurs j’aime l’ouverture aux idées tout en conservant mon sens critique. »
Pour ma part, je me sens plutôt faisant partie du peuple du web que du peuple du mur. Mais quand je discute avec mon fils Alexis je n’en suis plus si certain. Je fais certainement beaucoup moins partie du peuple du web que lui ou j’adhère beaucoup moins aux valeurs du peuple du web que lui. Suis-je pour autant du peuple du mur, sans le reconnaître ?
Et je ne me sens certainement pas de n’importe où, je suis plutôt de quelque part.
Je comprends et j’adhère à cet avis que Christophe Guilluy a émis et que j’ai repris dans le mot du jour du 7 octobre 2016 : « Personne au monde, ni en Algérie, ni au Sénégal, ni en Chine, ne souhaite devenir minoritaire dans son village. »
Les raisonnements binaires sont simplistes, or la vie, l’humanité est complexité.
Dans une tribune au « Monde » que vous trouverez en pièce jointe, Frédéric Gilli, chercheur à Sciences Po, estime que la géographie du vote ne dessine pas une claire opposition entre une France des villes vivant bien la mondialisation et une France périphérique en train de dépérir.
Je vous en livre quelques extraits :
« Deux France se feraient face. Une double fracture même, territorialement caractérisée à grand renfort de cartes synthétiques : d’une part les centres-villes s’opposant aux zones pavillonnaires et rurales et d’autre part des régions aux valeurs très différentes démarquées par une ligne Normandie-Provence-Alpes-Côte d’Azur…
C’est peut-être un peu rapide ! […]
Les instituts nous le disent, les électeurs d’Emmanuel Macron sont plus diplômés, plus urbains, plus optimistes… Le yuppie serait ainsi le candidat des bobos béats et de la mondialisation heureuse avec, face à lui, la France périphérique, repliée, xénophobe et fragile ?
[…] en 2017, la présence de Marine Le Pen en tête dans plusieurs départements et dans une majorité de communes occulte la grande diversité des municipalités dans lesquelles Emmanuel Macron réalise des scores très importants : il est arrivé largement en tête à Paris (35 %), la belle affaire ! Il est aussi arrivé en tête dans un département rural traditionnellement de droite comme l’Aveyron (26 % contre 17 % à Le Pen) et un département voisin traditionnellement de gauche comme le Puy-de-Dôme (27 % contre 18 % à Le Pen) et dans des villes moyennes fragilisées comme Bourges (Union des démocrates et indépendants, 28 %), Bar-le-Duc (Parti socialiste, 25 %) ou Châteauroux (Les Républicains, 25 %)…
Creusons donc un peu !
Marine Le Pen en tête dans 19 000 communes C’est indéniablement dans les coeurs des grandes agglomérations que Macron réalise ses meilleurs résultats : il y capitalise 26 % des scrutins exprimés, quand Marine Le Pen n’en recueille que 18 %. Pour autant, si l’on compare les résultats des deux candidats arrivés en tête au premier tour en suivant les grandes catégories territoriales de l’Insee (les grandes aires urbaines, leur périphérie, les villes petites et moyennes, le rural), force est de constater que le paysage électoral est bien moins binaire que celui d’une France à moitié bleu Marine (la candidate FN arrive en tête dans 19 000 communes). Le vote FN croît bien à mesure que l’on s’éloigne du centre : 18 % dans les grandes agglomérations, 25 % à leur périphérie et 27 % au-delà ; 17 % dans les villes petites et moyennes, 22 % à leur périphérie, 29 % au-delà…
Le rural résistant mieux à cette poussée frontiste avec moins d’un quart des suffrages pour Marine Le Pen. On notera toutefois que, si ces chiffres sont indéniablement élevés, elle ne dépasse pas la barre des 30 % dans aucun de ces territoires (en moyenne, il est évident que cela peut masquer des situations municipales variables).
Et Macron dans tout cela ? Uniformité des résultats Eh bien, ses résultats sont particulièrement constants quel que soit le terrain. Il rassemble entre 20 % et 23 % des électeurs dans tous ces territoires : 21 % des ruraux, 22 % des électeurs des petites villes, 23 % des périurbains des grandes agglomérations…
Evidemment cela varie en fonction des communes et de leur composition sociale mais, si deux France se font face à travers Le Pen et Macron, ce ne sont de toute évidence pas la France des villes et celle des campagnes, puisque le candidat d’En marche ! brille plutôt par l’uniformité de ses résultats.
Le constat mérite aussi d’être affiné par grandes régions : une carte nationale montre en effet la nette prééminence du FN dans la moitié nord-est du pays, au-dessus d’une ligne Caen-Grenoble, ainsi que le long du littoral méditerranéen. En Normandie, dans les Hauts-de-France, le Grand-Est, en Bourgogne-Franche-Comté ou dans le Centre, Marine Le Pen arrive en tête, y compris dans les plus grandes aires urbaines (sauf dans l’hyper-centre de plusieurs d’entre elles, disputé par Macron et Mélenchon). Les communes rurales du nord et de l’est de la France composent d’ailleurs la seule grande catégorie territoriale où Marine Le Pen dépasse 30 % des votes en moyenne (31 %), et c’est en même temps les seuls endroits où Emmanuel Macron ne recueille pas en moyenne plus de 20 % des scrutins (et 14 % des inscrits, soit 260 000 bulletins recueillis sur 1 800 000 possibles).
[…] Si le vote FN est plutôt typé géographiquement, cela ne se traduit pas par une France coupée en deux, ni entre le Nord ou l’Est et le Sud ou l’Ouest, ni entre les villes et les campagnes. Et à tout prendre, au vu des cartes, si un vote répond nationalement à celui de Le Pen, ce serait plutôt celui en faveur de Mélenchon. Au contraire, le principal signe de continuité entre ces territoires, c’est précisément le vote Macron, qui est très stable à travers tout le pays, quels que soient les endroits.
Ces raccourcis seraient sans conséquences s’ils ne risquaient pas d’induire des erreurs de jugement.
En l’occurrence, deux erreurs sont possibles
La première serait, pour les analystes, de se méprendre sur l’état du pays. Le pays n’est pas traversé par une guerre de civilisation, ni coupé en deux entre des territoires aux trajectoires opposées. Si Macron est réellement le candidat de la modernité et de la mondialisation que nous présentent les médias, cela voudrait dire que l’on trouve dans ces territoires des gens ouverts au monde, à la création de richesse… ce que démontrent les nombreuses initiatives locales partout en France mais que les politiques de concurrence territoriale et de métropolisation s’obstinent à nier.
[…]
La seconde erreur serait, pour Emmanuel Macron, d’oublier d’ici au second tour mais surtout pendant son mandat qu’il est aussi l’élu de cette France-là. Au total, les quartiers pavillonnaires, les petites villes en déprise, les zones rurales lui donnent 3,6 millions de voix, soit près de la moitié de son électorat !»
Vos idées sont moins claires après avoir lu cette chronique ?
C’est normal, c’est cela la complexité.
Mais c’est beaucoup plus proche de la réalité.

Mercredi 26 avril 2017

« Les fractures politiques françaises »
Réflexions après le premier tour des présidentielles de 2017
La décision du peuple français conduit donc à un second tour où s’affronteront le peuple du web contre le peuple du mur ou au moins le représentant de chacun de ces peuples.
Mais le premier tour montre ces fractures françaises
D’abord une fracture géographique qui est montrée par cette carte où le département porte la couleur du candidat ayant reçu le plus grand nombre de suffrages .
Il y a donc une ligne de fracture Est/ouest principalement et plus précisément Nord-Est / Sud-Est pour Le Pen et Ouest / Sud-Ouest pour Macron avec quelques tâches supplémentaires pour ce dernier :
D’abord la région parisienne sauf la Seine Saint Denis où Mélenchon a réalisé un score de 34% contre 24% pour Macron et 13,5 pour Le Pen.
Et puis il y a une partie de la Région Rhône-Alpes : Le Rhône, l’Isère et la Savoie ainsi que les Hautes Alpes. Et puis Macron a aussi gagné le centre de la Bourgogne : La Côte d’Or.
La seconde Fracture est celle des métropoles contre la France périphérique qu’a décrite Christophe Guilluy, même si dans le détail cette fracture est peut être plus complexe comme l’explique la géographe Béatrice Giblin et le démographe Hervé Le Bras lors des matins du France Culture de ce lundi. Ainsi Béatrice Giblin a dit lors de cette émission :« Les pauvres, les chômeurs votent Front national, les gagnants, ceux qui sont dans la mondialisation votent Macron. Il faut sortir de cette vision simpliste. Si on veut comprendre les choses, il faut rentrer dans une complexité un peu plus forte et dans des analyses plus fines. Vous pouvez à l’intérieur des métropoles, avoir des gens qui vivent très mal, qui sont aussi au chômage, qui ont du mal à boucler leurs fins de mois mais qui se trouvent au sein d’une dynamique sociale et culturelle qui fait qu’ils vont avoir les outils pour résister au vote Front national. En revanche, quand vous êtes dans une petite ville, dans une zone à 50 habitants au km2, où les activités sont à l’extérieur de la ville, là vous avez un sentiment d’abandon. Mais ce qui ne veut pas dire que vous allez forcément mal !»
Toujours est-il qu’on voit les résultats suivants dans les grandes Métropoles
Le Pen toujours inférieur à 10% et même en dessous de 5% à Paris.
Il y a l’exception de Marseille mais où Mélenchon arrive en tête.
Et quelques autres du Sud Est comme Nice.
Une autre quantification donne un repère : Le Pen a été en tête dans 18 845 communes et Macron que dans  7 222 communes : Les petites contre les grandes.
Vous trouverez en pièce jointe un article du Monde du journaliste  Patrick Roger qui précise cette double fracture
<Sur cette page du Monde réservée aux abonnés> vous trouverez des éléments de sociologie électorale
On constatera que les cadres votent à 34% pour Macron et 13% pour Le Pen, concernant les autres candidats ils votent comme le reste de la France 19% pour Mélenchon et 20 % pour Fillon et un peu plus que la moyenne pour Hamon 8%.
En revanche les ouvriers qui votent le font à 36% pour Le Pen (24% pour Melenchon) et 17% pour Macron.
Les retraités votent à 37% pour Fillon et 26% pour Macron et que 14% pour Le Pen.
Lorsqu’on s’intéresse aux retraités de plus de 70 ans, le vote va à 46% pour Fillon.
Inversement les jeunes de 18-24 ans ont voté pour Mélenchon à 31% et Le Pen à 20% et Emmanuel à Macron qu’à 18%.
Macron est en tête pour les 25-34 ans mais pour les 35-49 ans, c’est-à-dire le centre de la vie professionnelle Marine Le Pen est nettement en tête avec 29% contre 22% et 21% pour Mélenchon et Macron et que 12% pour Fillon.
Tous ces éléments montrent bien des fractures françaises.
Le défi d’un futur Président est en principe de réunifier les français et de parler à la France dans sa globalité.

Mardi 25 avril 2017

« La plupart des hommes politiques ne manquent certainement ni d’intelligence ni de volonté, mais ils manquent beaucoup de sagesse. »
Christophe André

La semaine de l’émission de France Culture « A voix Nue » du 3 au 7 avril 2017 était consacrée au psychiatre Christophe André interrogé par Xavier de la Porte.

Lors de la 5ème et dernière émission, ils ont eu cet échange :

A partir de la 10ème minute :

« Il y a un concept que j’aime beaucoup : c’est le concept d’intériorité citoyenne.

Le premier qui l’a proposé est un psychothérapeute belge qui s’appelle Thomas D’Ansembourg (*) […]

[Sa thèse en simplifiant est que ] Vous ne pouvez pas être un bon citoyen, si vous n’avez pas fait le ménage à l’intérieur de vous-même. C’est-à-dire que si vous êtes quelqu’un de profondément égoïste, impulsif, coléreux […] c’est compliqué pour vous de vous comporter de façon juste, cohérente, constructif avec votre environnement immédiat.

Notre comportement avec nos proches, c’est le début de la politique. Comment je me comporte en public, quels buts je privilégie etc… »

Xavier de la Porte :

« Mais l’Amérique a élu Donald Trump […] Nous sommes dans une époque politique un peu étrange, on se demande si nos dirigeants politiques ne sont pas fous ? »

A cela Christophe André répond :

« En tout cas, ils ne sont pas sages. Je ne sais pas s’ils sont fous, mais ils manquent de sagesse. La sagesse ce n’est pas seulement de l’intelligence ou de l’habileté. Dans la sagesse, il y a la notion d’avoir pacifié son tumulte émotionnel, son tumulte égotique, d’avoir de la bienveillance pour les autres.

Très clairement la plupart des hommes politiques contemporains manque de sagesse. Ils ne manquent certainement ni d’intelligence ni de volonté, mais ils manquent beaucoup de sagesse, sans être fou pour autant. »

Voici les quelques réflexions que je souhaitais partager avec vous au lendemain de cette élection présidentielle française de 2017.

(*) Thomas d’Ansembourg avait déjà été évoqué lors du mot du jour du 10 janvier 2017 : « La paix ça s’apprend » car il était le coauteur avec David Van Reybrouck du petit ouvrage dont le titre complet est  : « La paix ça s’apprend : comment guérir de la violence et du terrorisme » paru à Actes Sud, en novembre 2016.

<880>

mercredi 19 avril 2017

mercredi 19 avril 2017
« L’article 16 de la constitution »
Un article liberticide de la constitution qu’il ne faudrait pas mettre entre toutes les mains.
Grâce à Manuel Valls nous connaissons l’article 49-3 de la constitution, article qui permet d’obliger l’Assemblée Nationale d’accepter qu’un texte de Loi soit adopté sans le discuter, sauf à voter une motion de censure qui renverserait le gouvernement et très probablement conduirait à une dissolution de l’Assemblée ce qui aurait comme conséquence fâcheuse de ramener chaque député devant ses électeurs.
Grâce à François Asselineau qui est ce candidat qui à chaque question dégaine un article d’un Traité ou de la Constitution, nous sommes familier de l’article 5 de la constitution qu’il cite le plus souvent, celui qui donne au Président de la République l’injonction d’être « le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités.»
Mais l’article le plus problématique de la Constitution n’est pas beaucoup cité.
François Mitterrand a écrit au moment de la création de la Vème république un livre : « Le coup d’Etat permanent » dans lequel il fustigeait la 5ème république et dénonçait notamment l’article 16 de la constitution.
Il a été 14 ans au pouvoir sous cette constitution et il n’a pas voulu ou pas pu abroger cet article.
Tout à fait à la fin de son mandat, il a eu cette sentence : « Les institutions ont été dangereuses avant moi et le redeviendront après moi ».
Vous trouverez ces information sur l’excellent site de l’Institut François Mitterrand :  http://www.mitterrand.org/Qu-est-ce-que-le-mitterrandisme.html
Avant de continuer, citons in extenso cet article qu’aucun pays démocratique libéral et sérieux ne nous envie :
« Lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacés (1) d’une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des Présidents des Assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel.
Il en informe la Nation par un message.
Ces mesures doivent être inspirées par la volonté d’assurer aux pouvoirs publics constitutionnels, dans les moindres délais, les moyens d’accomplir leur mission. Le Conseil constitutionnel est consulté à leur sujet.
Le Parlement se réunit de plein droit.
L’Assemblée nationale ne peut être dissoute pendant l’exercice des pouvoirs exceptionnels.
Après trente jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs, aux fins d’examiner si les conditions énoncées au premier alinéa demeurent réunies. Il se prononce dans les délais les plus brefs par un avis public. Il procède de plein droit à cet examen et se prononce dans les mêmes conditions au terme de soixante jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà de cette durée. »
L’historien François Durpaire et le dessinateur Farid Boudjellal, ont fait une BD dont vient de paraître le 3ème tome : « La Présidente » où ils imaginent Marine Le Pen élue présidente le 7 mai 2017.
L’historien prévient que Marine Le Pen ressemble à Donald Trump, mais Donald Trump a contre lui un vrai pouvoir judiciaire qui l’arrête, stoppe ses décrets, un Parlement qui ne vote pas comme il le souhaite bien que son parti dispose de la majorité. Et même les membres du gouvernement qu’il nomme peuvent être récusés ou devoir démissionner dès qu’on s’aperçoit qu’il existe des conflits d’intérêts  Enfin c’est un Etat fédéral et les états fédérés comme la Californie peuvent largement s’éloigner des injonctions du pouvoir fédéral et disposent d’une large autonomie.
Il n’y a rien de tel pour arrêter Marine Le Pen qui en outre dispose de l’article 16.
Une fois au pouvoir, il y aura probablement de grands désordres.
Elle pourra alors considérer que les conditions de la mise en œuvre de l’article 16 sont réunies.

<Un journaliste de Challenges développe cette hypothèse>

Il y a deux dispositions de nature à freiner ce pouvoir absolu :
Un avis public du Conseil constitutionnel.
Le Parlement est réuni et l’Assemblée ne peut être dissoute.
Notez qu’il n’est pas prévu qu’une autorité mette fin, de manière autoritaire, aux pouvoirs exceptionnels contre l’avis du Président de la république !
Tout ceci me paraît bien léger … aucune comparaison possible avec les Etats-Unis…
Vous trouverez d’ailleurs sur ce thème et en pièce jointe, une tribune parue dans « Le Monde » le 11 avril et rédigée par un collectif composé de juristes qui estime que la Ve République permet au président de cumuler les pouvoirs législatif et exécutif et que confier une telle autorité à Marine le Pen ferait courir un grave danger à la démocratie.