Jeudi 28 mars 2013

Jeudi 28 mars 2013
« Penser, c’est dire non »
Alain Propos sur les pouvoirs, « L’homme devant l’apparence », 19 janvier 1924, n° 139 ou Propos sur la religion, LXIV
Je n’ai pas la culture et la force argumentaire de mon illustre homonyme philosophe.
Si j’osais rectifier son propos je dirai, Penser, c’est s’autoriser à dire non.
Nous vivons, notamment dans notre univers professionnel, dans un moule tellement conformiste.
Dans nos actes comme nos écrits nous disons si souvent oui à des pratiques, des organisations, des règles, alors que si nous y réfléchissions vraiment nous devrions dire non.
Pas un « non » abrupt qui signifie une impasse, mais un « non » ouvert, positif qui propose d’autres solutions.
Replacé dans son contexte voici ce que disait en 1924 Alain :
« Penser, c’est dire non.
Remarquez que le signe du oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et dit non.
Non à quoi ? Au monde, au tyran, au prêcheur ? Ce n’est que l’apparence.
En tous ces cas-là, c’est à elle-même que la pensée dit non. Elle rompt l’heureux acquiescement. Elle se sépare d’elle-même.
Elle combat contre elle-même. Il n’y a pas au monde d’autre combat.
Ce qui fait que le monde me trompe par ses perspectives, ses brouillards, ses chocs détournés, c’est que je consens, c’est que je ne cherche pas autre chose.
Et ce qui fait que le tyran est maître de moi, c’est que je respecte au lieu d’examiner.
Même une doctrine vraie, elle tombe au faux par cette somnolence.
C’est par croire que les hommes sont esclaves.
Réfléchir, c’est nier ce que l’on croit.
Qui croit ne sait même plus ce qu’il croit.
Qui se contente de sa pensée ne pense plus rien. »
ALAIN
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Mardi 12 mars 2013

Mardi 12 mars 2013
« Je l’ai su,
Mais je ne l’ai pas cru,
Et parce que je ne l’ai pas cru,
je ne l’ai pas su. »
Raymond Aron
Il y a des mots du jour qui parlent à l’intellect.
Il en est qui sont des traits d’humour, mais il en existe qui touchent au plus profond de l’âme humaine.
Raymond Aron vivait à Berlin en 1933, lors de l’arrivée au pouvoir d’Hitler, il a passé la guerre à Londres dans l’entourage de De Gaulle, il était donc très bien informé de ce qui se passait en Allemagne.
Bien après 1945 quand on lui a demandé : « Saviez-vous ce que les allemands faisaient aux juifs dans les camps de la mort ? »
Il a eu cette réponse extraordinaire :
« Je l’ai su, Mais je ne l’ai pas cru,
Et parce que je ne l’ai pas cru, je ne l’ai pas su. »
Quand une réalité se trouve en dehors de nos schémas de pensées, à l’extérieur de ce que nous estimons dans le champ du possible, nous ne croyons pas ce que nous savons et nous ne savons plus.
La lecture de ce mot du jour peut s’arrêter ici.
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Elle peut aussi continuer, si vous en avez la patience et souhaitez savoir pourquoi j’ai écrit ce mot du jour aujourd’hui et quel est le sens de l’introduction.
Si vous lisez les journaux, vous savez que se déroule actuellement le procès du fondateur de l’école en bateau et de ses complices.
L’école en bateau est, dans la suite de la pensée de 68, une expérience de pédagogie alternative à l’institution scolaire, où des enfants entre 9 et 15 ans, voire plus, apprennent non pas dans une salle de classe mais en voyageant sur un bateau, en prenant la responsabilité de son fonctionnement dans toutes ses dimensions.
Parmi les victimes se trouvent 3 garçons de ma famille proche.
J’ai rencontré plusieurs fois le fondateur et plus encore son second.
Cette expérience était pour moi à l’époque absolument passionnante et je la présentais sous les angles les plus positifs.
Si on reste dans les indicateurs objectifs et qu’on passe sous silence l’aspect humain, cette expérience a été remarquable.
Sachez que l’ainé de cette fratrie a quitté le système scolaire français pendant 4 ans, il l’a réintégré à 16/17 ans, en Terminale, c’est à dire sans aucune perte de temps dans son cursus scolaire.
Ce garçon a intégré, deux ans après, le nec plus ultra de la réussite scolaire française : l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm.
Le second est resté 5 ans sur ce bateau, il a réintégré le système en seconde. Il a réussi l’Ecole Centrale de Paris.
Le troisième qui n’est resté qu’un an poursuit également une belle carrière, il a fait Science Po Paris et a raté d’un rien l’ENA.
Ces 3 garçons parlent couramment plusieurs langues, ils sont très bricoleurs et très débrouillards dans la vie.
Mais sur le plan de l’équilibre et de l’épanouissement humain, la situation est plus difficile.
Le début du procès a déjà montré que la pédophilie du fondateur préexistait à cette aventure de l’école en bateau. Il est vraisemblable que toute cette expérience reposait sur la manipulation de cet homme organisant un harem d’enfants pour sa perversité, dans un lieu idéal pour assouvir ses fantasmes.
Les parents et moi-même, ne pouvions pas ne pas le savoir.
Il avait écrit un livre dont il est question dans les journaux et qui décrivait comment cet homme concevait les relations entre enfants et adultes.
Un jour j’ai montré le journal que l’école en bateau produisait, à un ami qui ne connaissait personne de cette aventure.
Au bout de 2 minutes, cet ami m’a regardé et m’a dit : « Mais enfin, ce que tu me montres là, c’est un paradis de pédophile ».
Je l’ai su, mais je ne l’ai pas cru.
Et parce que je ne l’ai pas cru, je ne l’ai pas su.
Tout cela doit rendre très humble.
Nous apprenons rarement de l’expérience des autres.
Mais la vie n’est finalement rien d’autre que d’essayer, chaque jour, de devenir moins stupide et moins naïf.
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Mardi 08 janvier 2013

Mardi 08 janvier 2013
« Dans le monde actuel, nous investissons cinq fois plus d’argent dans des médicaments pour la virilité masculine et le silicone pour les seins des femmes, que pour la guérison de la maladie d’Alzheimer.
Dans quelques années, nous aurons des vieilles avec des gros seins et des vieux à la verge dure mais aucun d’eux ne se rappellera à quoi ça sert ». »
Sophia Aram
L’humour est comme un dessin, il permet de dire, en peu de temps, beaucoup plus qu’un long discours.
Depuis quelques temps j’ai découvert Sophia Aram qui intervient sur France Inter à 8 h 55, 2 fois par semaine le Mardi et le Mercredi
Ici elle dit quelque chose sur les priorités médicales du monde tel qu’il est, non tel qu’on le rêve.
Sophia ARAM, France Inter, 04/09/2012.