Mercredi 9 septembre 2015

Mercredi 09/09/2015
«Comprendre le monde, c’est déjà le transformer !»

Marc Voinchet a quitté les matins de France Culture pour prendre la direction de France Musique.

Il a été remplacé par Guillaume Erner qui dans sa présentation a eu ces mots

«Voici le premier matin ensemble !

Cela compte un premier matin !

Une phrase s’est imposée pour définir les matins qui s’annoncent : comprendre le monde c’est déjà le transformer !

Il y a une foule d’individus qui pensent qu’il va de leur intérêt de maintenir la méconnaissance des choses : les dealers de temps de cerveau disponible, les poujadistes de tout pelage, ceux qui aimerait bien imposer la souveraineté du people sur celle du peuple.

En un mot tous ceux qui ont intérêt à la mésintelligence du monde.

C’est contre eux qu’il faut se réveiller pour interrompre le sommeil de l’intellect.

Tous les verbes qui nous arrachent à la nuit de la pensée : comprendre, expliquer, réfléchir sont des verbes militants.»

J’adhère à cette quête, tout en restant plus modeste : essayons de comprendre le monde…

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Jeudi 27 Août 2015

Jeudi 27 Août 2015
« La nature humaine est positivement étonnante »
Laurent Goffaux, médiateur belge entre les victimes et leur Agresseur

En ce qui concerne les choses de l’humanité, les belges ont souvent beaucoup d’avance sur les Français.

Une loi belge permet aux victimes de rencontrer leurs agresseurs dans un processus de résilience.

Je joins au présent message <un article> qui décrit ces rencontres et leurs effets je vous donne deux exemples :

Déborah 34 ans s’en prend à celui qui les a cambriolés :

« On travaille comme des damnés pour avoir ce qu’on a et vous, en 30 secondes, vous nous prenez tout ».

Elle raconte leur vie désormais sur le qui-vive, les réveils en sursaut la nuit. L’argent qu’il a fallu avancer pour réparer la porte du garage, la perte d’un DVD sur lequel son professeur de théâtre avait rassemblé cinq années de ses prestations sur scène.

« C’est comme si on avait pris une partie de ma vie, qu’on l’avait déchiré en petits morceaux et qu’on les avait mis à la poubelle. »

Car le Professeur est décédé et toute copie impossible.

Mais, le pire, ce sont les photos. Celle de sa petite fille d’un an stockées sur l’ordinateur depuis sa naissance et pas encore imprimée. Les seules qui existaient. Dans le box des accusés, Pascal 46 ans est sans réaction. Le juge ne parviendra pas à en tirer un mot. Et puis, des mois plus tard, Déborah et son mari reçoivent une lettre dans laquelle Pascal demande à les voir. Le courrier émanant du service Médiante, Habilité par le ministère de la Justice à organiser des rencontres entre auteurs et victimes d’infraction en présence de médiateurs.

[…] en fait, depuis l’audience, Pascal est rongé par les remords. Il est revenu furieux dans sa cellule.

Sa longue expérience de cambrioleurs lui a pourtant rendu familière les salles de tribunal, mais ce jour-là, pour la première fois, il s’est trouvé face à des parties civiles et a mesuré les dégâts causés. Il rumine pendant trois jours, son regard s’attarde sur les photos de ses trois enfants affichées au mur, il mesure qu’elle perte représenterait la disparition de ces clichés et ce que Déborah peut ressentir : « cela m’a anéanti. »

Après la rencontre, Déborah a expliqué : « nous voulions comprendre et nous sommes sortis rassurés. Nous avons eu en face de nous un être humain. Il peut changer et s’en sortir. »

Pascal, quant à lui, décrit l’une des plus belles rencontres de son existence :

« Ils m’ont apporté la paix, ils m’ont donné une nouvelle vie. »

La Belgique est le seul pays au monde, à avoir institué, en 2005, la possibilité, pour les justiciables victimes d’un délit ou d’un crime, d’en rencontrer l’auteur.

Le mot du jour est le propos d’un médiateur de ce type dans une rencontre très surprenante :

En août 2012, la femme la plus honnie de Belgique, Michelle Martin, l’ex épouse de Marc Dutroux, bénéficie d’une liberté conditionnelle qui soulève l’indignation.

Jean Denis le jeune père d’une des petites victimes, interpelle dans la presse celle qui pour lui est pire que Dutroux :

« Maintenant que vous n’êtes plus sous l’influence de votre ex-mari, allez-vous dire réellement ce qui s’est passé ? Madame, j’ai besoin de savoir pour continuer à vivre. Pourquoi ne pas avoir nourri les petites alors que Dutroux vous avez laissé de l’argent pour se faire ? Et surtout, c’est un père qui vous le demande : comment se comportait ma fille Julie ? Je n’ai pas envie de vous supplier comme les petites ont dû le faire. Ce n’est pas possible que vous restiez enfermée dans votre silence. Ou alors vous n’êtes pas un être humain. »

Madame Martin a répondu. La rencontre a duré quatre heures. Deux ans plus tard, Laurent Goffaux, un des deux médiateurs qui a officié durant cet incroyable face-à-face fait ce commentaire :

« La nature humaine et positivement étonnante. »

Il n’en dira pas plus, secret professionnel !

Le titre de l’article est « Je n’ai plus envie de me venger. »

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Jeudi 16 avril 2015

Jeudi 16 avril 2015
« La culture du bien-être nous rend insensibles aux cris d’autrui [et] aboutit à une globalisation de l’indifférence. »
Pape François
Le Monde du 15 avril 2015 annonce que « 400 migrants auraient disparu dans le naufrage d’une embarcation de fortune, dimanche 12 avril, aux dires des 150 survivants, débarqués mardi matin en Italie et interrogés par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’ONG Save the Children. Sur l’échelle de l’horreur, cet accident se situerait donc au-dessus des 366 noyés de Lampedusa, [d’octobre 2013] qui était à ce jour la plus grande tragédie de la Méditerranée en ce début de XXIe siècle.
Depuis ce week-end, et l’amélioration des conditions météorologiques, les passages entre la Libye ou la Tunisie et les côtes italiennes se multiplient. Le week-end a été très chargé, puisque les garde-côtes italiens auraient porté secours à 42 bateaux chargés au total de plus de 6 500 migrants dimanche et lundi. Lundi, ils annonçaient avoir sauvé 144 personnes et récupéré neuf corps après le naufrage de l’une des embarcations. Les informations sont encore insuffisantes pour comprendre si ces neuf corps sont une partie des 400 noyés ou sont issus d’un autre accident. […] Si le naufrage de ce week-end se confirme, ce sont 900 personnes qui auront péri sur cette route la plus meurtrière du monde en deux mois et demi, selon les comptages de l’OIM. A la même époque en 2014, 47 migrants y avaient perdu la vie. La fin de l’opération « Mare Nostrum » – un vaste programme de sauvetage pris en charge par les Italiens – et son remplacement par une patrouille de surveillance européenne des frontières, qui n’a pas mission première de sauver mais de surveiller, expliquent en partie cette hécatombe.»
Depuis l’an 2000, plus de 22.000 migrants ont perdu leur vie en Méditerranée.
La Méditerranée est devenue «la route la plus mortelle du monde» en 2014, avec au moins 3.419 migrants qui ont perdu la vie en tentant de la traverser en quête d’un avenir meilleur, a annoncé mercredi l’agence des Nations Unies en charge des réfugiés. En 2014, ce sont plus de 207 000 migrants qui ont tenté de traverser la Méditerranée, un chiffre presque trois fois plus élevé que le précédent record de 2011 lorsque 70 000 migrants avaient fui leur pays lors du printemps arabe.
Le pape François qui a du mal avec <la liberté sexuelle> et aussi avec <la liberté d’expression>, trouve les mots qui touchent quand il s’agit de parler de la misère et de l’attitude de nos pays riches devant la pression des opprimés et des pauvres qui sont prêts à mourir pour débarquer sur nos côtes européennes.
Il était allé en juillet 2013 à Lampedusa et avait tenu ce discours : «  La culture du bien-être nous rend insensibles aux cris d’autrui [et] aboutit à une globalisation de l’indifférence. […] Nos frères et sœurs cherchaient à sortir de situations difficiles pour trouver un endroit meilleur pour eux et leur famille mais ils ont trouvé la mort […] Qui est responsable du sang de ces frères et sœurs ? […] nous avons perdu le sens de la responsabilité fraternelle. »
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Mercredi 9 juillet 2014

« Pour la jeunesse et la paix »
Latifa Ibn Ziaten

Latifa Ibn Ziaten est la mère d’Imad, le premier soldat tué à Toulouse en mars 2012, l’une des sept victimes de Mohamed Merah.

Le mot du jour est le nom de l’association qu’elle a créée et dont le nom complet est « l’association Imad Ibn Ziaten pour la jeunesse et la paix »

« J’ai découvert cette femme lumineuse par l’émission de France Inter – ils changent le monde – du 30 juin »

Je dois même dire que j’ai été submergé par l’émotion, d’entendre cette femme simple, musulmane voilée, parler avec une langue limitée mais avec une intelligence du cœur incroyable de l’éducation, de la république, de la paix entre les religions, du respect que mérite chacun. J’ai été impressionné par sa dignité et son humanité.

Dans cette émission elle raconte d’abord le début de l’histoire pour elle : Un coup de fil en Turquie, où elle séjourne en vacances avec son mari, Ahmed, cheminot à la retraite, leur apprend la mort d’Imad, abattu d’une balle dans la tête, près d’un gymnase. Le couple arrive à l’aube à Toulouse. Latifa veut voir son fils à la morgue.

Mais la police l’en empêche et la soumet toute la journée à un interrogatoire d’où il ressort que la police soupçonne son fils d’être mêlé à de sombres trafics et d’avoir été victime d’un règlement de compte.

«Un policier m’a dit : « Madame, vous ne connaissez pas toute la vie de votre fils. » Parce qu’il s’appelait Imad et qu’il était arabe, la police a pensé qu’il était délinquant, s’indigne-t-elle. Mes enfants, je les ai les élevés dans le respect de l’autre, de la République. A la fin de l’interrogatoire, il est trop tard, la morgue est fermée et Latifa ne peut plus voir son fils.

Et elle raconte aussi comment, après la mort de son fils, elle a pris un taxi pour retourner à Toulouse dans le quartier des Izards, où a grandi l’assassin de son fils. Elle a approché des jeunes en train de fumer un joint, leur a demandé qui était Mohamed Merah : «Vous le connaissez pas, madame ? C’est un martyr, un héros !». Cette réponse l’a tuée «une seconde fois», dit-elle.

Mais elle, la musulmane voilée, va faire face, elle va leur dire qui elle est et ces jeunes d’abord méfiant, vont être ébranlés puis vont s’excuser et écouter cette femme leur dire qu’ils sont dans l’erreur et que l’Islam ne leur dit pas d’être violent, de faire du mal.

Puis elle créée l’association, pour faire de la pédagogie aller à la rencontre des parents et des enfants en train de se perdre. Elle sillonne les collèges, les lycées, les prisons, à la rencontre des jeunes.

«Si je peux éviter qu’une mère souffre comme je souffre, dit-elle, si je peux éviter un autre Merah, c’est un bon combat.»

Marie Huret écrit dans Marianne :

« On se dit qu’elle n’était pas préparée à ça, Latifa, la jeune Marocaine de Tétouan arrivée à 18 ans en France pour rejoindre son homme. C’est mal la connaître. Elle s’est toujours battue, a appris le français au centre social, pris le bus, fait du Solex. «Il fallait que je trouve ma liberté», dit-elle. Ses enfants grandissent dans une cité, des tours de 10 étages à Sotteville-lès-Rouen. Le couple achète un pavillon, ici, pas au Maroc. Chez les Ibn Ziaten, on ne dort pas jusqu’à midi, on range sa chambre, on partage le ménage, on fait ses devoirs. Mais on dialogue, on choisit son sport, ses petits amis, ses études. Ses cinq enfants ont reçu une double culture, tous ont un métier, standardiste, prof de sport, chargé de com… Imad était le second. «Mon fils, il faisait mieux les gâteaux que moi, confie Latifa. L’éducation, c’est la base. Ce n’est pas à l’école d’éduquer nos enfants. Le repas se prend en famille. « L’école, ça va ? Les devoirs, ça va ? » C’est ça, le dialogue. J’ai cadré mes enfants, quand j’ai senti qu’ils étaient capables, je les ai laissés trouver leur chemin.»

« Un autre article, dans l’Express qui lui est consacrée se finit par cette réflexion : «A 52 ans, Latifa qui cherchait « un peu de lumière » a trouvé sa voie: tenter d’oublier ses souffrances, les cantines et le musée de Rouen pour prôner la réconciliation universelle. Avec juste cette hantise: « Qu’on se serve de ma douleur comme un label et que je finisse par faire commerce avec ma souffrance ». Lucide jusqu’au bout.

Le monde reste beau, tant qu’il existera des femmes comme Latifa Ibn Ziaten

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Mercredi 08/01/2014

« Que gagnons-nous, quand nous perdons ? »
Michel Serres

Pour continuer cette belle semaine de la pensée positive, je vous propose cette question posée par le texte de Michel Serres lors d’une conférence qu’il a tenu en 2007, lors d’une conférence sur les nouvelles technologies : révolution culturelle et cognitive.

Lors de cette conférence il analyse la révolution numérique et montre que nous perdons peu à peu notre mémoire qui est externalisée dans la mémoire informatique.

Pour analyser ce phénomène il montre les grandes évolutions de l’humanité :

1° Le passage du stade oral au stade de l’écriture

2° Le passage de l’écriture à l’imprimerie

3° et aujourd’hui le passage du livre au monde numérique

Chaque fois des humains et parmi les plus grands (Socrate pensait que passer de l’oral à l’écrit était une catastrophe) ont pensé qu’ils perdaient quelque chose d’essentiel.

Mais Michel Serres renverse cette question et se demande si nous avons perdu quelque chose, n’avons-nous pas gagné quelque chose?

Penser à ce qu’on gagne lorsqu’on perd, n’est-ce pas le summum de la pensée positive ?

Je vous en propose un extrait ci-dessous, pour vous permettre de percevoir la profondeur de cette question :

«Cette perte de la mémoire n’a rien à voir avec la catastrophe de la Renaissance où l’invention de l’imprimerie a totalement fait perdre la mémoire à ses contemporains. Nous en avons des preuves manifestes dans le texte de Montaigne où il affirme qu’il préfère « une tête bien faite à une tête bien pleine ». Il veut simplement dire qu’un historien de cette époque qui veut travailler sur sa discipline est contraint de savoir par cœur la totalité de la bibliothèque puisque celle-ci n’est pas accessible ailleurs que dans quelques bibliothèques dans le monde. Avec l’arrivée de l’imprimerie, il suffit de connaître l’endroit où se trouve le livre. C’est une catastrophe pour la mémoire. Par conséquence, avec la mise à disposition aujourd’hui de la totalité de l’information sur la toile, nous n’avons plus besoin de mémoire et nous n’en avons d’ailleurs plus. Comment se fait-il qu’une faculté, dont on nous a dit qu’elle était essentielle au cerveau humain, a une histoire telle que nous pouvons en mesurer la disparition ?

Nous devons analyser le mot « perdre » pour essayer de comprendre ce que signifie cette perte de mémoire et pour réaliser ce que nous avons gagné.

Pour expliquer la différence entre perdre et gagner du point de vue cognitif, j’en appellerais volontiers à ce qu’un de mes vieux professeurs de préhistoire racontait sur ce que veut dire « perdre ». Il disait que nous étions des quadrupèdes avant qu’un événement, qui a duré des millénaires, ne fasse perdre la fonction de portage à nos membres antérieurs. Nous avons alors inventé la main et avons gagné un outil universel.

Dans le même temps, la bouche a complètement perdu sa fonction de préhension au profit de la main. La bouche est donc à son tour devenue un outil universel par le biais de la parole. Les fonctions données que nous avons perdues nous ont donc permis de gagner des outils universels […] Si nous avons perdu la mémoire, voyons ce que nous avons gagné.

En revenant sur l’histoire, nous pouvons nous apercevoir que c’est précisément parce que nous avons perdu la mémoire que nous avons pu inventer à la Renaissance les sciences physiques. La perte de mémoire nous a libérés de l’écrasante obligation de « se souvenir » et a permis aux neurones de se consacrer à des activités nouvelles.

Voilà la différence qui peut exister entre perdre et gagner : perdre dans le domaine du reconnaissable pour gagner dans l’ordre inventif, indéfini, c’est-à-dire dans l’ordre humain. Si j’ai défini « perdre » par rapport à « gagner », le verbe « perdre » prend un tout autre sens dans la langue française. […]

Chaque fois que nous inventons un outil, l’organisme perd les fonctions qu’il externalise dans l’outil. Pour inventer la roue par exemple, il suffit d’externaliser la rotation de nos articulations. […]

L’écriture et l’imprimerie étaient des mémoires et aujourd’hui vous disposez de mémoires supérieures à celles de vos prédécesseurs. En effet, nous avons perdu la mémoire subjectivement, mais elle s’est externalisée objectivement. […]

Le support écrit a transformé la civilisation de telle sorte que nous avons complètement oublié le stade oral. Le support imprimé a complètement changé la civilisation telle qu’elle était avant. Je crains fort que nous soyons à un changement de culture tel que notre manière de connaître et de savoir tout entière, donc le cognitif en général, est sur le point de changer. […] »

 

Et puis, il finit par une histoire qu’il cite souvent, celle de Saint Denis :

« Pour finir, je souhaiterais parler de toutes les facultés en général. Il était une fois une ville appelée Lutèce, au IIème siècle après Jésus-Christ. L’empereur romain d’alors décréta que les premiers chrétiens seraient persécutés, et exécutés, sur toute la surface de l’Empire. Or le christianisme apparaît à Lutèce dès le Ier siècle et, un soir, les premiers chrétiens, qui venaient d’élire un évêque du nom de Denis, se rassemblent dans une salle. Ils s’y barricadent dans le cas terrifiant où la légion romaine les interpellerait et les jetterait en prison. Alors qu’ils écoutent pieusement les entretiens de leur évêque Denis, le drame se produit. Les portes et les fenêtres volent en éclat, la légion romaine pénètre la salle et le centurion, qui est monté sur l’estrade, coupe le cou à l’évêque Denis dont la tête roule par terre. Stupéfaction, épouvante et angoisse, mais miracle. L’évêque Denis se penche, prend sa tête à deux mains et la présente à ses ouailles pendant que les légionnaires épouvantés s’enfuient devant ce que nous appelons depuis le miracle de Saint-Denis.

Voilà l’histoire par laquelle je voulais terminer. Lorsque, le matin, vous vous asseyez devant votre ordinateur, vous avez en face de vous votre tête, comme celle de Saint Denis. En effet, les facultés dont je viens de vous parler se trouvent dans votre tête : la mémoire, l’imagination, la raison, des milliers de logiciels pour accomplir des opérations que vous ne feriez pas sans votre tête. Or votre tête est objectivée ; vous avez perdu la tête.

Pour parodier le titre du roman de Musil, j’appellerais volontiers l’homme moderne « l’homme sans faculté ». Vous avez perdu ces facultés, mais elles se trouvent toutes devant vous. »

Pour en savoir davantage sur cette légende vous pouvez consulter <ce blog>

Et tenter d’être heureux comme le souhaitait John Lennon

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Mercredi 28 août 2013

« Je fais le rêve qu’un jour cette nation se lève et vive la vraie signification de sa croyance : nous tenons ces vérités comme évidentes que tous les hommes naissent égaux. Et si l’Amérique est une grande nation ceci doit se faire…»
Martin Luther King « I have a dream » 28 août 1963, il y a 50 ans.

Ce discours, prononcé le 28 août 1963, devant le Lincoln Memorial, à Washington D.C., est généralement considéré comme l’un des plus grands et des plus marquants du XXe siècle.

Selon le député américain John Lewis, qui prit également la parole ce jour-là au nom du Comité de coordination des étudiants non violents : « En parlant comme il l’a fait, il a éduqué, il a inspiré, il a guidé non pas simplement les gens qui étaient là, mais les gens partout en Amérique ainsi que les générations à venir » (source Wikipedia)

Le journal <Les Echos> raconte les secrets de ce discours : « Ce 28 août 1963, en s’avançant face au public massé pour le plus grand rassemblement pour les droits civiques jamais organisé, Martin Luther King sait qu’il doit marquer les esprits. La veille, des heures durant et jusque tard dans la nuit, il préparera son discours avec l’aide de ses fidèles compagnons de lutte.

Pourtant, le lendemain, aucune mention du passage mythique « I have a dream » ne figure sur ses notes. Et pour cause, la veille, son chef de cabinet, Wyatt Tee Walker, lui avait dit de ne pas utiliser cette expression : « Elle est banale, c’est un cliché. Tu l’as déjà utilisée trop de fois ». Car contrairement à une idée reçue, si Martin Luther King a bien improvisé ce passage, il avait employé cette expression, et les développements associés, lors de précédentes prises de parole publiques.

Mais, ce jour-là, à la douzième minute de son intervention, quand Mahalia Jackson, la chanteuse et amie de Martin Luther King, située debout derrière lui, crie « Martin, raconte-leur l’histoire à propos de ce rêve », le discours bascule dans la légende.

Sur les images télévisées, on observe très distinctement le moment où il se détache de ses notes et où sa tête se relève en affirmant : « Je vous le dis ici et maintenant, mes amis, bien que, oui, bien que nous ayons à faire face à des difficultés aujourd’hui et demain je fais toujours ce rêve ». A partir de ce moment, il regarde l’audience droit dans les yeux et se concentre non sur un effort de lecture mais sur le message qu’il souhaite faire passer.

Au début de son intervention, grâce à une métaphore filée, il évoque ainsi l’image d’un chèque de banque que les Noirs américains sont venus demander à l’Etat américain, chèque sur lequel figure le droit inaliénable à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur. Cette proximité avec les besoins de l’audience fait écho à la vision et aux idéaux qu’il poursuit depuis son enfance. En partageant cette promesse de justice sociale, il appelle à changer le cours des choses et faire de ce rêve une réalité.

Sur la forme, le discours est aussi un chef-d’œuvre avec l’utilisation de procédés rhétoriques qui mettent parfaitement en valeur ses propos. Martin Luther King savait que la répétition, notamment via le procédé de l’anaphore qui consiste à répéter un ou plusieurs mots en début de phrase, permettait de marquer les esprits.

Ainsi, comme s’il récitait une poésie, il prononce huit fois de suite « I have a dream » ainsi que l’expression « Let freedom ring » (« Que la liberté retentisse », en français) à la fin de son discours. Provoquant le même effet qu’un refrain, ces mots rythment le discours et favorisent ainsi sa mémorisation. »

Vous pouvez retrouver le texte intégral de ce discours sur ce site : <Jeune Afrique>

« I have a dream » (extraits)

«Retournez dans le Mississippi, retournez en Alabama, retournez en Caroline du Sud, retournez en Georgie, retournez en Louisiane, retournez dans les taudis et les ghettos des villes du Nord, sachant que de quelque manière que ce soit cette situation peut et va changer. Ne croupissons pas dans la vallée du désespoir.

Je vous le dis ici et maintenant, mes amis, bien que, oui, bien que nous ayons à faire face à des difficultés aujourd’hui et demain je fais toujours ce rêve : c’est un rêve profondément ancré dans l’idéal américain.

Je fais le rêve qu’un jour cette nation se lève et vive la vraie signification de sa croyance : nous tenons ces vérités comme évidentes que tous les hommes naissent égaux.

Je rêve qu’un jour sur les collines rousses de Georgie les fils d’anciens esclaves et ceux d’anciens propriétaires d’esclaves pourront s’asseoir ensemble à la table de la fraternité.

Je rêve qu’un jour, même l’Etat du Mississippi, un Etat où brûlent les feux de l’injustice et de l’oppression, sera transformé en un oasis de liberté et de justice.

Je rêve que mes quatre petits-enfants vivront un jour dans une nation où ils ne seront pas jugés sur la couleur de leur peau, mais sur la valeur de leur caractère. Je fais aujourd’hui un rêve !

Je rêve qu’un jour, même en Alabama, avec ses abominables racistes, avec son gouverneur à la bouche pleine des mots  » opposition  » et  » annulation  » des lois fédérales, que là même en Alabama, un jour les petits garçons noirs et les petites filles blanches pourront se donner la main, comme frères et sœurs. Je fais aujourd’hui un rêve !

Je rêve qu’un jour toute la vallée sera relevée, toute colline et toute montagne seront rabaissées, les endroits escarpés seront aplanis et les chemins tortueux redressés, la gloire du Seigneur sera révélée à tout être fait de chair.

Telle est notre espérance. C’est la foi avec laquelle je retourne dans le Sud.

Avec cette foi, nous serons capables de distinguer dans la montagne du désespoir une pierre d’espérance. Avec cette foi, nous serons capables de transformer les discordes criardes de notre nation en une superbe symphonie de fraternité.

Avec cette foi, nous serons capables de travailler ensemble, de prier ensemble, de lutter ensemble, d’aller en prison ensemble, de défendre la cause de la liberté ensemble, en sachant qu’un jour, nous serons libres. Ce sera le jour où tous les enfants de Dieu pourront chanter ces paroles qui auront alors un nouveau sens :  » Mon pays, c’est toi, douce terre de liberté, c’est toi que je chante. Terre où sont morts mes pères, terre dont les pèlerins étaient fiers, que du flanc de chacune de tes montagnes, sonne la cloche de la liberté !  »

Et si l’Amérique est une grande nation ceci doit se faire….

Que la cloche de la liberté sonne du haut des merveilleuses collines du New Hampshire !
Que la cloche de la liberté sonne du haut des montagnes grandioses de l’Etat de New-York !
Que la cloche de la liberté sonne du haut des sommets des Alleghanys de Pennsylvanie !
Que la cloche de la liberté sonne du haut des cimes neigeuses des montagnes rocheuses du Colorado !
Que la cloche de la liberté sonne depuis les pentes harmonieuses de la Californie !

Mais cela ne suffit pas.

Que la cloche de la liberté sonne du haut du mont Stone de Georgie !
Que la cloche de la liberté sonne du haut du mont Lookout du Tennessee !
Que la cloche de la liberté sonne du haut de chaque colline et de chaque butte du Mississippi ! Du flanc de chaque montagne, que sonne le cloche de la liberté !

Quand nous permettrons à la cloche de la liberté de sonner dans chaque village, dans chaque hameau, dans chaque ville et dans chaque Etat, nous pourrons fêter le jour où tous les enfants de Dieu, les Noirs et les Blancs, les Juifs et les non-Juifs, les Protestants et les Catholiques, pourront se donner la main et chanter les paroles du vieux Negro Spiritual :  » Enfin libres, enfin libres, grâce en soit rendue au Dieu tout puissant, nous sommes enfin libres ! « . »

<Et voici la vidéo de ce discours mythique>

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Vendredi 08 février 2013

Vendredi 08 février 2013
« Tant qu’il y aura des fripons et des imbéciles, il y aura des religions. »
Voltaire

Ce brave Voltaire ajoutait quelques mots particulièrement peu sympathiques pour le christianisme.
Ce qui se passe actuellement en Tunisie déporte le sujet vers l’Islam. Mais finalement il y a probablement un problème inhérent à toutes les religions monothéistes.
En fait quand des gens prétendent qu’il n’y a qu’un Dieu puis très vite qu’il n’y a qu’une vérité, on va passer très vite à ce que nous appelons dans notre langage moderne « le totalitarisme ».
Tout le monde doit suivre le même chemin, avoir les mêmes comportements puisqu’il n’y a qu’une vérité. Nous autres qui avons été élevé ou au moins baigné dans des sociétés monothéistes, avons toujours appris qu’il s’agissait d’un grand progrès par rapport aux religions polythéistes ou animistes. Finalement en sommes-nous toujours aussi sûr ?
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