Jeudi 27 Août 2015

Jeudi 27 Août 2015
« La nature humaine est positivement étonnante »
Laurent Goffaux, médiateur belge entre les victimes et leur Agresseur

En ce qui concerne les choses de l’humanité, les belges ont souvent beaucoup d’avance sur les Français.

Une loi belge permet aux victimes de rencontrer leurs agresseurs dans un processus de résilience.

Je joins au présent message <un article> qui décrit ces rencontres et leurs effets je vous donne deux exemples :

Déborah 34 ans s’en prend à celui qui les a cambriolés :

« On travaille comme des damnés pour avoir ce qu’on a et vous, en 30 secondes, vous nous prenez tout ».

Elle raconte leur vie désormais sur le qui-vive, les réveils en sursaut la nuit. L’argent qu’il a fallu avancer pour réparer la porte du garage, la perte d’un DVD sur lequel son professeur de théâtre avait rassemblé cinq années de ses prestations sur scène.

« C’est comme si on avait pris une partie de ma vie, qu’on l’avait déchiré en petits morceaux et qu’on les avait mis à la poubelle. »

Car le Professeur est décédé et toute copie impossible.

Mais, le pire, ce sont les photos. Celle de sa petite fille d’un an stockées sur l’ordinateur depuis sa naissance et pas encore imprimée. Les seules qui existaient. Dans le box des accusés, Pascal 46 ans est sans réaction. Le juge ne parviendra pas à en tirer un mot. Et puis, des mois plus tard, Déborah et son mari reçoivent une lettre dans laquelle Pascal demande à les voir. Le courrier émanant du service Médiante, Habilité par le ministère de la Justice à organiser des rencontres entre auteurs et victimes d’infraction en présence de médiateurs.

[…] en fait, depuis l’audience, Pascal est rongé par les remords. Il est revenu furieux dans sa cellule.

Sa longue expérience de cambrioleurs lui a pourtant rendu familière les salles de tribunal, mais ce jour-là, pour la première fois, il s’est trouvé face à des parties civiles et a mesuré les dégâts causés. Il rumine pendant trois jours, son regard s’attarde sur les photos de ses trois enfants affichées au mur, il mesure qu’elle perte représenterait la disparition de ces clichés et ce que Déborah peut ressentir : « cela m’a anéanti. »

Après la rencontre, Déborah a expliqué : « nous voulions comprendre et nous sommes sortis rassurés. Nous avons eu en face de nous un être humain. Il peut changer et s’en sortir. »

Pascal, quant à lui, décrit l’une des plus belles rencontres de son existence :

« Ils m’ont apporté la paix, ils m’ont donné une nouvelle vie. »

La Belgique est le seul pays au monde, à avoir institué, en 2005, la possibilité, pour les justiciables victimes d’un délit ou d’un crime, d’en rencontrer l’auteur.

Le mot du jour est le propos d’un médiateur de ce type dans une rencontre très surprenante :

En août 2012, la femme la plus honnie de Belgique, Michelle Martin, l’ex épouse de Marc Dutroux, bénéficie d’une liberté conditionnelle qui soulève l’indignation.

Jean Denis le jeune père d’une des petites victimes, interpelle dans la presse celle qui pour lui est pire que Dutroux :

« Maintenant que vous n’êtes plus sous l’influence de votre ex-mari, allez-vous dire réellement ce qui s’est passé ? Madame, j’ai besoin de savoir pour continuer à vivre. Pourquoi ne pas avoir nourri les petites alors que Dutroux vous avez laissé de l’argent pour se faire ? Et surtout, c’est un père qui vous le demande : comment se comportait ma fille Julie ? Je n’ai pas envie de vous supplier comme les petites ont dû le faire. Ce n’est pas possible que vous restiez enfermée dans votre silence. Ou alors vous n’êtes pas un être humain. »

Madame Martin a répondu. La rencontre a duré quatre heures. Deux ans plus tard, Laurent Goffaux, un des deux médiateurs qui a officié durant cet incroyable face-à-face fait ce commentaire :

« La nature humaine et positivement étonnante. »

Il n’en dira pas plus, secret professionnel !

Le titre de l’article est « Je n’ai plus envie de me venger. »

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