Mardi 21 novembre 2023

« Ils ne voient qu’une chose : nous sommes venus et nous avons volé leur pays. Pourquoi l’accepteraient-ils ? »
David Ben Gourion en 1956 en parlant des arabes, propos reproduit par Nahum Goldmann dans « Le Paradoxe juif »

Depuis un mois, il y a un grand effort de la part des médias pour rappeler ce que la situation au Moyen-Orient doit à l’Histoire et notamment à l’histoire du sionisme.

Le sionisme, c’est-à-dire créer un État pour les juifs, est une réponse à l’antisémitisme millénaire

La prise de conscience a d’abord lieu dans la Russie tsariste, dans les années 1880.

L’assassinat d’Alexandre II, le 13 mars 1881, déclenche, en effet, une vague de pogroms jusqu’à l’été 1884.

Les massacres et les pillages, encouragés par l’autocratie d’Alexandre III, rappellent brutalement aux Juifs qu’ils ne sont que tolérés en Russie.

Dès lors, beaucoup d’entre eux choisiront la rupture avec la Russie – rupture « mentale » par l’engagement dans les mouvements révolutionnaires, rupture « physique » par l’émigration.

La masse des expatriés (600 000 sur plus de cinq millions de Juifs russes entre 1881 et 1903) s’installera aux États-Unis. Mais une partie d’entre eux optera pour une solution radicale : l’installation en Erefz Israël (la Terre d’Israël), où ils édifieront des villages qui formeront la base d’une société juive autonome.

Cette émigration vers la Palestine qui est une province, administrée depuis 1517, par l’Empire ottoman portera pour nom « Aliya »

Un mouvement sera créé en Russie par un médecin d’Odessa Léo Pinsker (1821-1891) : « Les Amants de Sion »

C’est dans ce cadre que va germer l’idée que la survie des Juifs nécessite la reconstitution d’une patrie en Palestine

David Ben Gourion, premier Premier ministre de l’État d’Israël, l’homme qui a proclamé la création de l’Etat d’Israël est né le 16 octobre 1886, en Pologne, dans la partie qui était alors intégrée dans l’Empire russe.

Son père était professeur d’hébreu et membre des Amants de Sion

David Ben Gourion émigrera en 1906, dans ce que les historiens appelleront la deuxième Aliya.

Mais la formidable dynamique du « sionisme » sera surtout l’œuvre de Theodor Herzl (1860-1904), fils de négociants hongrois aisés, devenu journaliste à Vienne.

Il sera le vrai fondateur du mouvement sioniste au « congrès de Bâle en 1897 » et l’auteur de « Der Judenstaat » (L’État des Juifs) en 1896 dans lequel il explique comment il pense possible, avec l’appui de la communauté internationale, d’obtenir une souveraineté sur un territoire déterminé.

Il y aura des discussions sur ce territoire, on parle de l’Argentine, ou encore de l’Ouganda, mais le terme utilisé de « Sion » qui est le nom biblique d’une colline de Jérusalem, laissait quand même prévoir que le territoire espéré était celui qui naguère, au début de l’ère chrétienne, avait pour nom Judée, Galilée et Samarie.

Mais il faudra encore la première guerre mondiale et l’intervention pertinente de Chaim Weizman, inventeur de l’explosif Acetone, pour que l’Empire Britannique accepte l’idée d’«un foyer national juif en Palestine » dans la « Déclaration Balfour ».

Cet épisode historique, je l’ai déjà raconté dans le mot du jour du < 17 mars 2015>

Chaim Weizman sera Président de l’Organisation Sioniste Mondiale, par deux fois, de 1920 à 1931, puis de 1935 à 1946, avant de devenir le premier président de l’État d’Israël entre 1949 et 1952.

Et puis il faudra la seconde guerre mondiale, la Shoah, la création de l’ONU, le plan de partage de la Palestine voté à l’ONU le 29 novembre 1947 entre un État juif et un État arabe et enfin la déclaration d’indépendance de l’État d’Israël, le 14 mai 1948, dernier jour du mandat britannique sur la Palestine dans le hall du Musée d’art de Tel Aviv par David Ben Gourion.

L’État arabe n’a pas été créé jusqu’à présent.

En 1948, la Palestine comptait 2/3 d’arabes musulmans et chrétiens et 1/3 de juifs.

Nahum Goldmann était aussi né dans l’Empire russe, le 10 juillet 1895 en Biélorussie, il est mort en 1982. Il était également dirigeant du mouvement sioniste.

Il a écrit en 1976, un livre « Le Paradoxe juif », sous-titré « Conversations en français avec Léon Abramowicz »

Lors de la Seconde Guerre mondiale, Nahum Goldmann s’établit aux États-Unis et participa activement aux négociations en faveur de la création de l’État d’Israël.

En 1948, il est l’un des leaders de la Confédération sioniste et à partir de 1956, son président ; il est également ensuite président du Congrès juif mondial.

Il eut un rôle primordial dans les négociations de l’accord de réparations avec l’Allemagne

Il était un ami intime de David Ben Gourion, même si leurs relations furent parfois tumultueuses.

Il écrit :

« Nous nous sommes souvent affrontés, tant en public, qu’en privé, mais, en dépit de nos différents, surtout en ce qui concernait la politique arabe, nous étions fort liés et chez David Ben Gourion, j’ai toujours admiré l’homme d’État. »
Le Paradoxe juif page 115

Il en fait un portrait élogieux mais sans concession :

« Il fut non seulement un grand homme d’Etat, mais aussi un diplomate et un politicien très habile, très rusé, en vérité l’un des meilleurs que je n’aie jamais connus. Une promesse de lui ne valait rien du tout. Il n’hésitait pas à promettre une chose et ensuite à faire le contraire. Il était tout à fait dénué de scrupules. Il n’a jamais poursuivi d’autres but que de réaliser l’idéal sioniste et d’assouvir son immense ambition. […]
J’ai connu beaucoup d’hommes d’État, mais presque aucun n’ayant son sens historique. Il était persuadé que chaque mot qu’il prononçait l’était pour l’éternité. »
Le Paradoxe juif Page 116

En résumé, ils étaient d’accord sur tout, sauf sur la politique Arabe.

Ben Gourion ne voulait pas lui confier les négociations avec les Arabes. Après avoir encensé tous ses talents, notamment de diplomate, Ben Gourion a posé ce jugement :

« Tu as donc le droit de te demander pourquoi je ne te charge pas du problème qui décidera de l’avenir de l’État d’Israël : la paix avec les Arabes. Je vais t’en expliquer les raisons…
[Dans tes missions précédentes avec les hommes politiques américains, avec Adenauer] A ces hommes tu as parlé d’égal à égal car vous partagez les mêmes qualités. Mais avec les Arabes, qui sont des barbares, tous tes dons n’ont aucune valeur. Ni ta culture, ni ton charme, ni ton art de la persuasion n’auraient d’effet sur eux. Eux ne comprennent que la manière forte, et la main de fer, c’est moi, pas toi. Voilà l’explication. »
Le Paradoxe juif pages 118 et 119.

Alors que Nahum Goldmann était persuadé que : « sans un accord avec les Arabes, Israël ne connaîtrait pas d’avenir à long terme. » Le Paradoxe juif page 121

Et Nahum Goldmann va révéler un échange qu’il aura dans l’intimité de la cuisine de l’habitation de David Ben Gourion. Je cite l’intégralité de ce passage avec son introduction :

« En effet, il m’est souvent apparu que chez les hommes d’État, le caractère l’emporte sur l’intelligence.
Nombre d’entre eux comprennent avec leur cerveau ce qu’il convient de faire, mais leur caractère leur interdit de le réaliser.
Ce comportement est typique de Ben Gourion : je vais en donner un exemple que je n’oublierai jamais.
Un jour, ou plutôt une nuit de 1956, je suis resté chez lui jusqu’à trois heures du matin. Nos véritables conversations se déroulaient souvent dans la cuisine et, comme à l’accoutumée il voulait que sa femme Paula allât dormir. Comme elle insistait pour rester, Ben Gourion me disait : « Nahum, tu es le seul qu’elle respecte. SI je lui demande, elle n’ira pas dormir, mais, si toi tu l’en pries, elle acceptera. » Je disais donc à Paula : «  Fais moi plaisir, va te coucher », puis Ben Gourion préparait du café et des sandwiches.
Cette nuit-là, une belle nuit d’été, nous eûmes une conversation à cœur ouvert sur le problème arabe.

« Je ne comprends pas ton optimisme », me déclara Ben Gourion.
« Pourquoi les Arabes feraient-ils la paix ? Si j’étais, moi, un leader arabe, jamais je ne signerais avec Israël. C’est normal : nous avons pris leur pays.
Certes, Dieu nous l’a promis, mais en quoi cela peut-il les intéresser ? Notre Dieu n’est pas le leur.
Nous sommes originaires d’Israël, c’est vrai, mais il y a de cela deux mille ans : en quoi cela les concerne-t-il ?
Il y a eu l’antisémitisme, les nazis, Hitler, Auschwitz, mais était-ce leur faute ?
Ils ne voient qu’une chose : nous sommes venus et nous avons volé leur pays. Pourquoi l’accepteraient-ils ?
Ils oublieront peut-être dans une ou deux générations, mais, pour l’instant, il n’y a aucune chance.
Alors, c’est simple : nous devons rester forts, avoir une armée puissante.
Toute la politique est là. Autrement, les Arabes nous détruiront. »
J’étais bouleversé par ce pessimisme, mais il poursuivit :
« J’aurai bientôt soixante-dix ans. Eh bien, Nahum, me demanderais-tu si je mourrai et si je serai enterré dans un État juif que je te répondrais oui : dans dix ans, dans quinze ans, je crois qu’il y aura encore un État juif.
Mais si tu me demandes si mon fils Amos, qui aura cinquante ans à la fin de l’année, a des chances de mourir et d’être enterré dans un État juif, je te répondrais : cinquante pour cent. »
Mais enfin, l’interrompis-je, comment peux-tu dormir avec l’idée d’une telle perspective tout en étant Premier ministre d’Israël ?
« Qui te dit que je dors ? » répondit-il simplement. »
Le Paradoxe juif pages 121 et 122

Nous sommes 67 ans après cet échange de 1956.

Le pessimisme de Ben Gourion a été démenti, Israël est toujours puissant, l’État a une armée redoutable et dispose d’une modernité technologique à la pointe.

Mais il n’a pas résolu le problème Arabe. 3 générations après, les palestiniens n’ont pas oublié.

Nahum Goldmann écrit :

« Les Arabes ont, eux, la même mémoire historique que les Juifs. La race sémite est très entêtée et n’oublie rien.
Lors d’un grand meeting à Sydney, en Australie, j’ai dit que le malheur d’Israël était d’avoir pour adversaires les Arabes et non plus les Anglais. En effet, les Anglais ont le génie de l’oubli ; en l’espace d’une génération, ils ont perdu le plus grand empire du monde et, malgré cela, ils sont très heureux : le plus grand souci populaire fut longtemps de savoir qui épousera la princesse… Imaginez-vous les Juifs dans cette situation ? Il y a deux mille ans, le temple de Jérusalem fut détruit et, chaque année, pour commémorer cette destruction, nous observons un jour de jeûne. Si nous avions perdu un empire équivalant à celui des Anglais, nous devrions jeûner deux fois par semaine pendant vingt siècles !
Et les Arabes sont comme nous. C’est une idée tout à fait naïve de croire qu’ils finiront par oublier notre présence en Palestine, qu’ils se feront une raison ».
Le Paradoxe juif page 241

Bien sûr cela n’excuse en rien les actes inhumains que les membres du Hamas ont commis le 7 octobre.

Cela explique cependant pourquoi les peuples arabes ne condamnent pas le Hamas, même s’ils n’approuvent pas leur barbarie.

Ils ont toujours en mémoire ce que Ben Gourion reconnaissait en toute lucidité « nous avons pris leur pays » et « les nazis, Hitler, Auschwitz » n’étaient pas la faute des arabes.

Et il n’y a toujours pas d’État Palestinien !

Et la colonisation en Cisjordanie rend cette perspective quasi impossible.

Je n’ai pas de solution miracle à proposer, mais il me semble que cet éclairage est nécessaire pour comprendre ce qui se passe.

Le Hamas est une organisation islamiste, nihiliste en ce sens que ce qui lui importe n’est pas le bien être du peuple palestinien sur cette terre, mais l’installation d’un régime islamiste, sur ce territoire, pour la vie après la mort.

La colère et la haine des israéliens contre le Hamas est compréhensible.

Mais éradiquer le Hamas ne suffira pas, si toutefois Israël y parvient.

Et si cette éradication se fait au prix de la destruction de toute possibilité de vie à Gaza, et au prix d’un nombre de plus en plus grand de victimes innocentes, la haine ne fera que s’exaspérer.

Nahum Goldmann développe dans son livre cette vision certes utopique :

« Si j’avais rencontré Nasser, j’aurais aimé lui dire ceci « Vous autres Arabes êtes un peuple très généreux. Votre rencontre avec les Juifs au cours de l’histoire a été meilleure que la nôtre avec les chrétiens. Vous nous avez persécutés, mais nous avons également connu des périodes de coopération merveilleuse : en Espagne, à Bagdad, en Algérie… Alors restez généreux. Notre peuple est malheureux. J’admets que la Palestine vous appartenait d’après les lois internationales. Mais nous avons tant souffert depuis deux mille ans, nous avons perdu un tiers de notre population parce que nous n’avions pas de territoire. Alors cédez-nous au moins un pour cent du vôtre et garantissez notre existence. Soyez avec l’Amérique, la Russie et la France l’un des garants de la survie d’Israël. »
Je suis persuadé qu’un tel discours aurait eu une grande influence psychologique sur les Arabes, en leur donnant un sentiment de fierté, voire d’égalité. J’en ai d’ailleurs parlé avec quelques leaders arabes qui étaient fascinés par cette idée ; hélas ! il ne semble pas qu’Israël choisisse cette voie-là. »

Le Paradoxe juif page 106

<1777>

Vendredi 17 novembre 2023

« C’était un temps déraisonnable. On avait mis les morts à table […] Moi si j’y tenais mal mon rôle. C’était de n’y comprendre rien. »
Louis Aragon, « Le roman inachevé »

« Le roman inachevé » est une des plus grandes œuvres de Louis Aragon (1897-1982).

C’est une des six œuvres que j’ai eu la chance d’étudier lors de mon passage inabouti en classe préparatoire scientifique dans les années 1976 à 1979.

On décrit cet ouvrage sous la forme « d’une autobiographie poétique ».

Aragon parle de son passé et en fait un recueil de poésie.

Le livre est divisé en trois parties et chaque partie comprend des thèmes.

Le dernier thème de la 1ère partie a pour titre : « La guerre et ce qui s’en suivit »

La guerre dont il s’agit est celle de 1914-1918.

Il est mobilisé en 1917 et rejoint le front au printemps 1918 comme médecin auxiliaire.

La page Wikipedia qui lui est consacrée rapporte :

« Sur le front, il fait l’expérience des chairs blessées, de la violence extrême de la Première Guerre mondiale, d’une horreur dont on ne revient jamais tout à fait mais qui réapparaîtra constamment dans son œuvre et qui est à l’origine de son engagement futur pour la paix. Il reçoit la croix de guerre et reste mobilisé jusqu’en juin 1919 en Rhénanie occupée, épisode qui lui inspirera le célèbre poème «  Bierstube Magie allemande. » »

En réalité, les poèmes ne portent pas de titre et on les nomme par leur premier vers, ainsi de celui-ci dont je cite la première strophe :

« Bierstube Magie allemande
Et douces comme un lait d’amandes
Mina Linda lèvres gourmandes
Qui tant souhaitent d’être crues
A fredonner tout bas s’obstinent
L’air Ach du lieber Augustin
Qu’un passant siffle dans la rue

Léo Ferré fera de ce poème une chanson qu’il nommera : « Est-ce ainsi que les hommes vivent »

Car il ajoutera un refrain de deux vers qui sont dans la quatrième strophe :

« Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent »

Mais la chanson de Léo Ferré débute à la cinquième strophe :

« Tout est affaire de décors
Changer de lit changer de corps
À quoi bon puisque c’est encore
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m’éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j’ai cru trouver un pays »

La septième strophe du poème et troisième de la chanson est la suivante :

« C’était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d’épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j’y tenais mal mon rôle
C’était de n’y comprendre rien »

C’est Pierre Servent, spécialiste des questions de défense, pendant 20 ans professeur de stratégie d’influence à l’Ecole de guerre; qui pour dire que nous ne pouvons pas être certain que des décisions raisonnables vont être prises dans le conflit à Gaza, a rappelé ces vers d’Aragon « C’était un temps déraisonnable. On avait mis les morts à table ».

Il était l’invité, ce jeudi 16 novembre de la matinale de France Inter : <Quelle est la stratégie militaire d’Israël ?>

Il n’était pas raisonnable que Poutine attaque l’Ukraine, il l’a fait pourtant.

Il était raisonnable cependant pour l’Azerbaïdjan de s’emparer du Haut Karabakh car les Azéris savaient que personne ne réagirait et c’est ce qui s’est passé.

Dans la guerre de Gaza, il y a beaucoup de choses déraisonnables et d’autres qui pourraient encore arriver.

En tout cas, « on a mis les morts à table », expression que je comprends comme le fait que ces guerres font de plus en plus de morts et qu’ils s’invitent à notre table par les informations et le sinistre décompte des victimes de chaque camp.

Ce que nous disons, en France, sur ce conflit n’a aucun effet sur ce qui se passe là bas.

Mais en France aussi est venu un temps déraisonnable.

Les actes antisémites ont explosé, nos concitoyens juifs ont peur.

Mais Jean-Luc Melenchon n’a pas voulu aller à la marche contre l’antisémitisme. Le 7 novembre à 8:12 PM il a tweeté :

« Dimanche manif de « l’arc républicain » du RN à la macronie de Braun-Pivet. Et sous prétexte d’antisémitisme, ramène Israël-Palestine sans demander le cessez-le-feu. Les amis du soutien inconditionnel au massacre ont leur rendez-vous. »

Selon la déraison de cet homme, il n’est pas possible de séparer de manière étanche les actes antisémites en France et la guerre d’Israël contre le Hamas

Et donc selon cette logique, les français juifs sont tous responsables de la politique que mène le gouvernement d’Israël. Sinon, s’ils ne sont pas responsables, il n’est pas admissible qu’il fasse l’objet de menace, insulte ou agression. Et donc s’ils ne sont pas responsables, il est normal de défiler contre l’antisémitisme.

Le Président de la République a également refusé de défiler.

En 1990, le Président d’alors, François Mitterrand avait défilé.

Il est vrai qu’au moment de cette manifestation, il était clair dans l’esprit de tous que les coupables des profanations du cimetière juif de Carpentras étaient d’extrême droite. Ce qui s’est avéré faux après enquête.

Les actes antisémites, contre lesquels il s’agissait de défiler sont majoritairement commis par des personnes qui sont révoltées par le destin du peuple palestinien. Beaucoup sont d’origine musulmane.

Il y a donc une lutte noble contre l’antisémitisme, celle qui vient de l’extrême droite.

Et une autre qui l’est moins, celle de l’antisémitisme qui ne vient pas d’extrême droite.

Le président a expliqué qu’il ne voulait pas fracturer la société française, puis il a dit explicitement

« Protéger les Français de confession juive, ce n’est pas mettre au pilori les Français de confession musulmane. »

J’exprime la croyance que la majorité de la communauté musulmane n’est pas antisémite et n’approuve pas les actes commis en France et encore une fois ne juge pas responsable chaque juif de France de ce qui se passe au Proche Orient.

Il était donc possible et bienvenue, pour une large majorité des musulmans et le Président de la République, de s’associer à cette marche.

Pour ma part, il m’apparaissait très important de participer à la déclinaison lyonnaise, Place Bellecour, de la marche de Paris.

Cela ne dit rien de mon opinion sur ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie.

Mais je dis non à l’antisémitisme. L’antisémitisme est mon ennemi et je trouve très important en tant que non juif de prendre ma part dans sa dénonciation.

Et je voudrais encore répliquer à certains réticents que dans une guerre on choisit son ennemi, pas ses amis. Lors de la dernière guerre mondiale, le camp allié a choisi son ennemi : Hitler, il n’a pas choisi Staline comme un ami, mais simplement il a fait le constat que dans le combat contre Hitler, ils étaient dans le même camp.

Nous vivons un temps déraisonnable il n’est plus possible d’entendre les arguments de celles et de ceux qui ne partagent pas exactement les mêmes indignations et les mêmes croyances.

On n’exprime pas un désaccord, on ne discute plus du tout, on ne lit plus, on n’écoute plus celle ou celui que l’on a classé dans l’autre camp ou même pas suffisamment dans son camp.

Les pro-israéliens ne peuvent-ils pas entendre qu’il s’est passé des évènements, des actes avant le 7 octobre qui ont eu pour conséquence une explosion de haine du côté palestinien ?

Les pro-palestiniens ne peuvent-ils pas admettre qu’un acte de résistance aurait du se limiter à attaquer les postes de l’armée israélienne et non pas de s’attaquer à des civils, aux kibboutz , à une manifestation musicale et en plus commettre des actes d’une abomination absolue ?

Parmi les victimes, il y avait en outre, notamment dans les kibboutz, des hommes et des femmes qui avaient consacré leur vie pour donner une chance à la paix.

Vivian Silver était l’une d’entre elles. On n’a identifié son corps qu’il y a deux jours. Elle a été tuée le 7 octobre dans le kibboutz Be’eri où elle résidait. Elle était membre de l’ONG Women Wage Peace (WWP) qui regroupe des femmes de tous horizons – juives, chrétiennes, musulmanes, religieuses, athées, orthodoxes, libérales, de droite, de gauche pour œuvrer pour la paix. Elle organisait depuis des années le transfert de Gazaouis ne pouvant être soignés dans l’enclave palestinienne vers des hôpitaux israéliens.

Il existe bien entendu des hommes et des femmes de lumière dans le camp palestinien.

Écoutez, cette infirmière américaine, Emily Callahan, qui a passé près d’un mois dans l’enclave palestinienne pour Médecins sans frontières, raconter son expérience avec des soignants palestiniens extraordinaire d’humanité et de dévouement aux autres.

Les pro-israéliens peuvent-ils entendre que le comportement des colons en Cisjordanie est non seulement inacceptable à l’égard des palestiniens, mais ne peut qu’attiser davantage la haine et surtout rend la paix impossible. Paix qui est la seule solution possible pour que l’État juif puisse vivre en sécurité ?

D’ailleurs Netanyahu ne veut pas de la paix. La paix l’obligerait à discuter des colonies en Cisjordanie et à les démanteler pour la plus grande part.

Jean-Louis Bourlanges dans le « Nouvel Esprit Public » du 5 novembre expliquait :

« Avant le 7 octobre, la seule stratégie M. Netanyahou ait envisagé à propos du problème palestinien, c’était de le régler par le vide : « Il y a des gens à Gaza qui devraient plutôt être chez le maréchal Sissi. Et il y a des gens en Cisjordanie qui devraient plutôt être chez le roi Abdallah II. » […]

Son choix fondamental, et fondamentalement pervers, a consisté à accepter la confrontation générale. Bien sûr, il n’avait pas imaginé les évènements du 7 octobre, mais comment pouvait-il espérer qu’une organisation aussi démente que le Hamas se contenterait d’encaisser l’argent du Qatar sans préparer quelque chose, alors qu’on sait que ces gens sont habités par des passions destructrices et nihilistes, et qu’ils veulent la mort d’Israël ? M. Netanyahou n’a cessé de jeter de l’huile sur le feu : provocations répétées dans les lieux saints, extensions très violentes des colonies, accompagnée d’une quasi élévation des colons de Cisjordanie au rang de garde nationale … Imaginait-il vraiment que tout cela ne produirait aucun effet ?

C’était la « théorie du mur », selon laquelle Israël était parfaitement capable de vivre en parfaite inimitié avec son entourage proche : peu importe l’hostilité de l’environnement, tant que le « mur » est assez haut et épais. Israël a des alliés, de l’argent, la meilleure armée du monde, le dôme de fer, bref il s’est cru à l’abri. »

Le Hamas ne veut pas davantage la paix que Netanyahou. Négocier la paix signifierait accepter l’existence de l’État d’Israël, ce qui est incompatible avec leur volonté de créer un état islamique sur l’ensemble du territoire.

Et les pro-palestiniens peuvent-ils entendre que le malheur actuel des gazaouis est en grande partie dû à la stratégie et aux actes du Hamas. D’abord en raison de la barbarie démesurée du 7 octobre qui entraîne cette réplique d’une violence inouïe de Tsahal. Ensuite parce qu’ils se protègent derrière les civils de Gaza et que si eux se réfugient dans les tunnels souterrains pour résister aux bombardements, ils laissent les civils recevoir toutes les bombes sans protection ? Le Hamas est d’un cynisme absolu et n’en a que faire des femmes, des enfants et des hommes qui meurent à Gaza. Son objectif n’est pas le bonheur sur terre et chaque victime supplémentaire constitue un carburant supplémentaire pour la haine et le rejet d’Israël que poursuit le Hamas.

Et on pourrait continuer à interpeller les uns et les autres dans leur déraison.

Et on continue à « mettre les morts à table ».

Alors que la seule solution, bien sûr très compliquée, mais c’est la seule qui est viable à terme, c’est de mettre des vivants à la table, des vivants capable de négocier, d’écouter l’autre et de faire des pas vers l’autre. Et aussi remettre au centre de ce conflit la raison du différent qui est territorial. Enfin, en écarter autant que possible le caractère religieux qui est une impasse parce qu’elle écarte le compromis au dépens d’un absolutisme délétère.

<1776>

Vendredi 3 novembre 2023

« Que nous soyons Israéliens ou Palestiniens, Libanais, Syriens, juifs ou musulmans, chrétiens ou athées, Français ou Américains, nous ne nous méfierons jamais assez du recours au « nous contre eux », qui signe fatalement le début de l’obscurantisme et de la cécité. »
Dominique Eddé

Écrire sur ce conflit qui met face à face, deux peuples pour une même terre, présente le risque de se fâcher avec beaucoup de monde. D’abord avec les personnes convaincues de chacun des deux camps qui trouveront toujours qu’on ne compatit pas assez avec les souffrances du camp défendu et qu’on est aveugle sur la culpabilité du camp d’en face. Mais on peut aussi se fâcher avec les personnes neutres qui considèrent que dans ce domaine la seule position digne est de se taire.

Je n’ai pas de solution bien sûr et je suis rempli de doutes.

Mais il me semble que seuls les mots, même maladroits, sont en mesure de surpasser la violence et de maîtriser la sidération et le désarroi.

L’histoire ne commence pas le 7 octobre 2023 et il faut se pencher aussi sur ce qui s’est passé avant.

Mais le 7 octobre constitue une rupture que l’écrivaine libanaise Dominique Eddé décrit ainsi dans une Tribune du Monde du <31 octobre 2023>

« Le carnage barbare du Hamas, le 7 octobre, n’a pas fait que des milliers de morts et de blessés civils israéliens, il a jeté une bombe dans les esprits et dans les cœurs, il a arrêté la pensée. Il a autorisé le déchaînement des passions contre les raisons et les preuves de l’histoire. Ce déchaînement peut se comprendre là où manquent les moyens de savoir, d’un côté comme de l’autre. Là où la douleur est écrasante. Il est inacceptable chez les puissants : là où se déclarent les guerres, là où se décident les chances de la paix. »

Par cet acte « horrible » le Hamas a tendu un piège à Israël, piège qu’Israël a énormément de difficultés à contourner.

Il était inimaginable et inacceptable qu’Israël ne réagisse pas et ne s’attaque durement au Hamas.

Le blocus et les bombardements massifs sur une population civile qui est prisonnière, dans ce bout de territoire surpeuplé, sont en train de renverser dans l’esprit de beaucoup, notamment dans les populations musulmanes et aussi des populations non occidentales, le poids de l’inhumanité du côté de l’armée israélienne.

En outre, des exactions et des crimes commis par des colons juifs en Cisjordanie contre la population arabe ont conduit, même les États-Unis, à réagir par la voie du porte-parole du département d’État, Matthew Miller en dénonçant <des attaques> :

« Incroyablement déstabilisatrices et contre-productives pour la sécurité à long terme d’Israël, en plus d’être, bien sûr, extrêmement préjudiciables aux Palestiniens vivant en Cisjordanie »

Ceci a fait exploser un antisémitisme latent dans le monde entier et en France aussi.

Longtemps, l’antisémitisme était analysé comme l’apanage de l’extrême droite maurassienne. Beaucoup de gens de gauche ont eu du mal à accepter l’idée qu’il y avait aussi en France un antisémitisme musulman.

Parce qu’on peut se trouver être très critique avec les décisions, les actions du gouvernement d’Israël, mais pourquoi faire porter la responsabilité et commettre des actes contre les juifs en France ou ailleurs ?

Seul l’antisémitisme peut l’expliquer sans le justifier.

Ismaël Saidi est musulman, il est comédien et metteur en scène de la pièce « Djihad ». Il a commis un article : « En tant que musulman, je refuse de me voiler la face sur la nature de l’antisémitisme en France » dans lequel il écrit :

« « Il ne faut pas être juif » : c’est l’unique « raison » que l’on peut trouver aux crimes commis ce 7 octobre 2023, du moins, je n’en vois pas d’autre car aucune cause, aussi légitime soit-elle, même aussi noble que celle de la création d’un état pour le peuple palestinien en souffrance depuis si longtemps, ne justifie un massacre. […]

Mais si, pour une fois, au lieu d’inviter un rabbin et un imam sur tous les plateaux en leur demandant de nous montrer à quel point les religions ne sont qu’amour et paix (les millions de morts à travers les siècles, victimes de guerres de religions, de croisades, de pogroms, d’esclavage apprécieront…), on se posait la bonne question.

Si pour une fois, au lieu de mettre la poussière sous le tapis jusqu’au prochain attentat, nous arrêtions de nous voiler la face.

Je vais donc lancer un pavé dans la mare : pourquoi lorsque des atrocités sont commises à des milliers de kilomètres de chez nous, faut-il protéger la communauté juive de France ?

Pourquoi est-ce que l’on trouve cela normal ?

Pourquoi est-ce qu’un Français juif doit craindre de sortir avec une kippa ou la moindre preuve d’appartenance à sa communauté de croyance ?

Pourquoi des maisons où se trouvent des mézouzas sont visées ? Pourquoi des familles changent leur nom sur les applications de livraison pour éviter de se faire agresser si elles sont reconnues comme juives ? De quoi les Français juifs sont-ils coupables ?

Si le Moyen-Orient s’enflamme, pourquoi nos compatriotes juifs doivent-ils en souffrir ?

La réponse qui me vient à l’esprit est qu’il y a une idéologie en France qui a décidé de faire des juifs ses ennemis.

Comme l’avait fait le nazisme, par le passé, il y a une idéologie qui veut « se faire du juif ».

Je le dis parce que je ne la connais que trop bien.

Des années à être abreuvé d’images, de discours sur « nos frères palestiniens » très vite devenus « nos frères en islam » tués par les « juifs » – et pas par les Israéliens car dans le monde arabo-musulman, c’est le mot « juif » qui est utilisé et à dessein.

Les terroristes n’ont-ils pas appelé leur famille, hurlant de joie, leur expliquant qu’ils ont tué « des juifs ».

Ainsi le glissement sémantique a eu lieu depuis bien longtemps : ce n’est pas Palestinien contre Israélien, mais musulman contre juif.

Il n’est donc pas étonnant, quand on comprend cela, que dans le pays où se trouve la plus grande communauté musulmane d’Europe et la plus grande communauté juive d’Europe, la situation devienne explosive.

Et là où beaucoup d’entre nous pensent que c’est le conflit israélo-palestinien qui est la matrice de l’antisémitisme en France, je répondrai : changez de paradigme de lecture, retournez l’image d’Épinal et vous comprendrez: c’est l’antisémitisme que l’on retrouve dans une idéologie meurtrière, cancer de l’islam, qui est devenu, aujourd’hui, la matrice du conflit israélo-palestinien. »

Dans sa tribune au Monde Dominique Eddé ajoute :

« Que nous soyons Israéliens ou Palestiniens, Libanais, Syriens, juifs ou musulmans, chrétiens ou athées, Français ou Américains, nous ne nous méfierons jamais assez du recours au « nous contre eux », qui signe fatalement le début de l’obscurantisme et de la cécité.

Or l’emploi de ces trois mots enregistre à l’heure qu’il est des records terrifiants, d’un bord à l’autre de la planète. Et il se répand à une vitesse si foudroyante qu’il emporte les têtes, comme un ouragan des maisons. […]

Pour assurer son existence dans la durée, Israël doit renoncer à l’anéantissement de Gaza et à l’annexion de la Cisjordanie. Son avenir ne peut pas lui être assuré par l’expulsion, l’extermination, la conquête du peu de territoire qui reste. Il ne peut l’être que par un changement radical de politique. Un renoncement à la logique de l’affirmation de soi par la supériorité militaire et la négation de l’autre. Alors, les esprits ignorants ou bornés du monde arabo-musulman prendront mieux la mesure de ce temps de l’horreur absolue que fut la Shoah. Il sera enfin enseigné et transmis aux nouvelles générations. Nous apprendrons, de part et d’autre, que pas une histoire ne commence avec soi.

On ne détruira pas les islamistes radicaux à coups de déclarations de guerre, on les affaiblira en leur ôtant, une par une, leurs raisons d’exister et d’instrumentaliser l’islam. Ce sera long ? Oui. Mais qu’on nous dise, quel autre moyen a-t-on d’éteindre un incendie sans frontières ?

C’est en retirant ses « prétextes » à la mauvaise foi générale qu’on fera peut-être advenir la paix à laquelle aspire désespérément le plus grand nombre. Les psychothérapeutes savent ce que les politiciens s’abstiennent de prendre en compte : formuler la souffrance de l’autre, son humiliation, l’aider à dire son cri, sa rage, sa haine, c’est les désamorcer. C’est d’un combat contre la haine qu’il s’agit désormais. Il engage chacun de nous, si l’on veut donner une chance aux prochaines générations.

Que les dirigeants israéliens et leurs soutiens aveugles renoncent à leur domination brutale, satisfaite et sans partage de ce lieu explosif qu’est la « Terre sainte ». Que les Arabes, les musulmans, les défaits de l’histoire n’oublient pas qu’en versant dans l’antisémitisme ils se salissent, ils tombent dans un mal qui n’est pas le leur, ils se retournent contre eux-mêmes. Qu’ils s’élèvent, bien sûr, contre le massacre en masse qui est en cours, mais qu’ils ne privent pas les familles israéliennes endeuillées de leur compassion, qu’ils ne confondent pas leur révolte avec le fantasme de la disparition d’Israël.

N’oublions pas, nous autres Arabes, que nous avons massivement contribué à notre malheur. N’oublions pas qu’en matière d’horreur nous avons enregistré sur nos sols, depuis 1975, une série abominable de massacres. Du Liban à la Syrie, à l’Irak, nos prisonniers ont été enfermés dans des conditions atroces. Des femmes, des hommes ont été torturés, sans que nous sachions les défendre. Nos mémoires, nos cerveaux, nos âmes ont été torturés. Nos cultures. Notre histoire millénaire. Aucun de ces pays n’est parvenu à résister aux manipulations internes et externes, à la pression infernale des grandes puissances, à la sinistre alliance de la corruption, du mépris des pauvres et de la plus abusive des virilités.

Nous ne pouvons plus relever la tête à coups de slogans et de doléances exclusivement dirigés contre Israël. L’avenir ne consiste pas à revendiquer ce que l’on a perdu, mais à examiner ce qui reste à sauver. Israël existe. De ce qui fut un mal pour beaucoup d’entre nous peut sortir un bien pour tous.

Un chantier gigantesque

Ne ratons pas ce terrible et dernier rendez-vous. Souvenons-nous que la vie, la mort, le jour, la nuit, la douleur, l’orphelin, la terre et la paix se disent pareil en arabe et en hébreu. Il est temps pour chacun de nous de faire un immense effort si nous ne voulons pas que la barbarie triomphe à nos portes, pire : à l’intérieur de chacun de nous. »

J’avais déjà fait appel à Dominique Eddé lors d’un mot du jour précédent, c’était une lettre ouverte à Alain Finkielkraut : «Le monde est comme un masque qui danse : pour bien le voir, il ne faut pas rester au même endroit.»

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Lundi 30 octobre 2023

« Du coup, c’est compliqué … »
Essai de synthétiser la situation en langue moderne

Il y a deux mois j’ai trouvé une publication sur Facebook qui m’a amusé et que j’ai partagé.

Et je dois dire que depuis j’écoute la radio, les émissions trouvées sur Internet, mes échanges avec autrui, jusqu’aux conversations dans la rue ou les transports commun, j’arrive à cette conclusion qu’en effet l’expression « du coup » est devenu extraordinairement fréquente.

Ce dimanche matin j’ai entendu le député LFI Eric Coquerel sur France Info. Dans un discours uniquement tourné vers la responsabilité de l’Etat d’Israël, il a reconnu dans une proposition subordonnée qu’il y avait crime de guerre de la part du Hamas. Plus loin il a dit qu’Israël commettait aussi des crimes de guerre.

Un instant…

Ce qui s’est passé le 7 octobre, c’est le plus grand massacre de juifs, depuis la Shoah, avec des actes d’une barbarie écœurante.

Le Hamas est une organisation islamique, totalitaire, d’extrême droite. Je ne peux même pas comprendre qu’un homme de gauche puisse trouver le début du commencement d’une connivence avec une organisation qui est si loin de ses valeurs déclarées.

La vie des palestiniens et leur aspiration légitime à un État sont très loin de leur priorité qui est l’islamisation de la société palestinienne et de l’Oumma c’est-à-dire de la communauté de l’ensemble des musulmans du monde, puis de l’expansion de cette communauté dans la logique de l’idéologie des frères musulmans.

Je suis atterré que Mediapart, auquel j’étais abonné longtemps et qui sur certains dossiers a fait un travail remarquable et utile soit tombé avec son fondateur Edwy Plenel dans un islamo gauchiste niant l’idéologie et les objectifs de certaines organisations qu’ils défendent. Ce fut encore le cas lors de cette émission <Guerre au Proche-Orient : les dérives du débat français> dans laquelle après avoir une fois de plus dénigré le travail de Florence Bergeaud-Blackler a nié l’évidence du caractère totalitaire du Hamas, sa volonté d’éradiquer la présence juive au moyen orient et son ambition générale concernant l’Oumma, ainsi que les forces à l’œuvre en Occident et en France suivant les mêmes objectifs.

Je reconnais cependant que la présence et les interventions de Latifa Oulkhouir et de Hanna Assouline, déjà évoquée lors du mot du jour du lundi 23 octobre, étaient de qualité et donnaient des éclairages intéressants.

Et puis, il y a aussi l’Iran à la manœuvre.

Et je ne me lasserai pas de répéter ce moment de révélation rationnelle et laïque, lorsqu’en 1979, j’ai entendu une jeune iranienne appeler « la Ligne Ouverte », émission de Gonzague Saint Bris, pour crier sa colère que la gauche occidentale, dont je faisais partie, trouvait génial que Khomeini puisse renverser la dictature honnie du Shah d’Iran.

J’ai raconté cet épisode et aussi la manière dont la gauche et les humanistes iraniens ont été dupés puis persécutés par les monstres qui ont pris le pouvoir en 1979, en Iran : « Vous ne pouvez pas comprendre»

Les frères musulmans, le Hamas, les salafistes et autres font partie de cette même idéologie régressive, totalitaire, expansionniste et absolument opposée à notre manière de vivre, à notre liberté, à nos valeurs.

Alors « du coup c’est compliqué », parce qu’en face du Hamas, du côté des pro-israéliens, il y a aussi une vision unilatérale, violente, exclusive qui s’exprime.

Je pourrais aussi multiplier les exemples j’en prendrai deux.

Le premier est celui du discours télévisé du mercredi 25 octobre du premier ministre qu’Israël s’est donné :

« Ils sont le peuple des ténèbres, et la lumière triomphe des ténèbres. »

Benjamin Nétanyahou promet ensuite de « réaliser la prophétie d’Isaïe » avant de citer une partie du texte. « Il n’y aura plus de voleurs dans vos frontières et vos portes seront glorieuses. ».

Le verset 18 du chapitre 60 du livre d’Isaïe qui est un livre prophétique dit exactement.

« On n’entendra plus parler de violence en ton pays, de ravages ni de ruine en ton territoire, et tu appelleras tes murs ‘Salut’, et tes portes ‘Gloire’».

Il y a d’un côté « le camp du bien » et de l’autre « le camp du mal » et on fait appel à la religion pour éradiquer le mal. Le discours a comme fondement le fait que la force (avec l’aide de Dieu ?) permettra d’obtenir la paix et la fin de la violence.

« Du coup s’est compliqué » et la paix me semble alors très éloignée.

L’autre exemple est celui du député Habib Meyer, lors du discours de Jean-Louis Bourlanges, objet du mot du jour de vendredi dernier.

Lorsque Jean-Louis Bourlanges parle des colonies israéliennes en Cisjordanie, ce député réplique :

« La Judée ne sera jamais une colonie ! »

Faut-il une explication de texte ?

Le député utilise le terme de Judée, terme Biblique utilisé il y a 2000 ans à l’époque du Christ, jusqu’au moment où les romains et Titus ont combattu et chassé les juifs de ces terres parce qu’ils s’étaient révoltés contre l’empire romain.

Et puis il dit : « ce n’est pas une colonie ».

Dès lors, il rejette l’acte de l’ONU de 1947 qui avait autorisé la création en Palestine d’un « État juif » et d’un « État arabe ».

Il se place sur un autre registre, exactement parallèle à celui des islamistes.

Pour les islamistes, cette terre est musulmane selon la volonté de Dieu. Aucun humain et pas davantage l’ONU ne peut en disposer.

Pour les messianistes juifs et comme l’exprime Habib Meyer, cette terre, la Judée est la terre promise par Dieu à son peuple élu. La décision de l’ONU est une simple anecdote ne révélant qu’une partie de la vérité sur cette terre : Elle est aux juifs, il n’y a pas lieu d’en discuter avec les palestiniens ou d’autres humains.

Tant qu’il y a des combats politiques et territoriaux, des compromis sont possibles.

Mais si on jette sur la situation une vision religieuse, nous sommes dans l’absolu, il n’y a pas de compromis possible.

Il n’y a que la violence qui est bien sûr « l’expression de la volonté divine » qui peut être mise en œuvre.

Et c’est ce que fait Israël en bombardant de manière massive, cette prison à ciel ouvert qu’est Gaza. Les chiffres annoncés par le Hamas sont sujets à caution, mais il est certain que des milliers d’enfants, de femmes et d’hommes sont tués ou blessés grièvement avec peu de possibilité d’être soignés. A cela s’ajoute le blocus qui les prive d’eau, de nourriture, d’électricité. C’est un enfer. Des israéliens tombés dans une faille empathique absolue, disent : c’est la faute du Hamas. Peut être, mais ce sont les avions, les missiles et les armes israéliennes qui donnent la mort à beaucoup d’innocents. D’autres israéliens répondent mais eux aussi nous envoient des roquettes et des projectiles pour nous tuer.  Oui, ils répliquent dans ce cas.

Nous sommes dans une tragédie dans laquelle des enfants, des femmes et des hommes souffrent et meurent, pris dans l’engrenage des haines qui se nourrissent  les unes des autres, sans que notre humanité ne soit en mesure de les freiner.

Manon Quérouil-Bruneel, Grande-reporter Paris Match, témoigne dans l’émission du 26 octobre 2023 <C ce soir : La bataille de l’émotion> :

« On est arrivé à un degré de haine des deux côtés qui est terrifiant.

Je suis allé du côté de la Cisjordanie, avec des images du 7 octobre. Il y avait une impossibilité de reconnaître les crimes contre les civils qui avaient été commis par le Hamas.
Même des personnes de l’intelligentsia palestinienne, solidement structurées, remettent en cause ces images.
Parce que, pour eux, c’est un mouvement de libération et qu’il n’aurait pas pu commettre de telles atrocités.
Et côté israélien le choc devant la barbarie est tel que la parole de paix est inaudible.
On n’arrive plus à faire ce travail de compassion, au sens propre, c’est à dire souffrir avec l’autre. »

Ce défaut de capacité de comprendre ou simplement d’entendre la souffrance de l’autre est prégnant non seulement pour les deux peuples qui s’affrontent, mais même pour celles et ceux qui ont pris fait et cause pour l’un des camps.

Il n’y a que de l’empathie pour celles et ceux que l’on défend

Nous sommes dans une rupture d’humanité.

J’ai quand même trouvé ce beau dialogue entre la Rabin Delphine Horvilleur et Kamel Daoud écrivain et journaliste franco-algérien dans « l’Obs » : « Nous devons réaffirmer notre humanité »

Delphine Horvilleur dit au début de l’entretien :

« D’abord, je m’étais dit que j’arrêterais les entretiens. Et puis quand on m’a proposé de dialoguer avec toi, Kamel, j’ai senti combien j’avais besoin de le faire, presque dans un souci de santé mentale. Depuis quelques jours, j’oscille entre une très profonde tristesse, un sentiment de dévastation, et une colère, une rage particulière et un désespoir que je ne connaissais pas en moi qui me suis toujours perçue comme une optimiste. Je suis en manque d’un dialogue humain sensé, empathique, au milieu de cette déferlante de haine et de rage. Je suis en réalité très blessée de trouver si difficilement des interlocuteurs. J’avoue, j’attendais les paroles d’intellectuels musulmans avec qui je dialogue habituellement. Il y en a eu quelques-unes, si essentielles, mais si rares. Quelque chose m’échappe dans ce silence qui me terrasse. J’ai le sentiment d’une immense solitude. »

Et Kamel Daoud répond :

J’aime écouter Delphine. Et je ressens aussi le besoin de dialoguer pour réaffirmer quelque chose de banal qui est l’humanité, face à cette déferlante d’inhumanité qui s’est infiltrée en chacun, dans chaque camp, dans chaque famille. Mais j’ai aussi une colère, elle n’est pas de même valeur que la tienne, je n’ai pas été attaqué comme les Israéliens dans leur maison, j’ai connu autrefois ce genre d’attaque en tant qu’Algérien durant la guerre civile quand les islamistes décapitaient, massacraient et violaient, mais c’est autre chose. Je suis en colère parce que je suis musulman de culture et que dans ma géographie on me refuse le droit à l’expression et à la nuance, parce qu’on voudrait me forcer à une unanimité monstrueuse qui n’est pas la mienne. Je ressens également cette solitude profonde, incomparable avec celle de ceux qui ont perdu des vies, parce que j’ai pris la parole pour dire qu’une cause doit garder sa supériorité morale, qu’elle s’effondre si elle choisit la barbarie et trouve des gens qui la justifient. »

Pourquoi est-il si compliqué de trouver de la compassion pour l’Autre ?

« D. H. La lucidité vient du mot lumière, mais c’est l’éloge de l’obscurité qui prime aujourd’hui. Tu parlais de malentendu, ça m’a fait penser au non-entendu. Après le 7 octobre, ce qui m’a paru le plus fou, c’est que je n’ai pas trouvé de voix palestinienne en France pour dénoncer le Hamas. En fait, et pardon pour ma naïveté, ça me paraissait facile à faire. Cela fait des années que je m’emploie à dénoncer le gouvernement de Netanyahou, l’horreur de l’occupation, la dérive de la société, son hubris, etc., et j’ai été sidérée de ne pas trouver de voix palestinienne en France pour dire « notre cause est juste, les Palestiniens ont le droit d’avoir une terre, mais pas par ces moyens-là ». Même pour Leïla Shahid [ancienne déléguée générale de l’Autorité palestinienne en France, NDLR], dénoncer le terrorisme du Hamas était impossible. Jusqu’à aujourd’hui, je ne m’en relève pas. Ce silence ne trouve pas de place dans mon schéma mental. »

« K. D. Malheureusement, ça ne m’étonne pas, j’ai toujours connu ce « on » et ce « off » dans le discours des intellectuels du Sud. Mais ce qui me frappe, c’est qu’en Algérie ou en Égypte, et dans bien d’autres pays, nous connaissons les méthodes des islamistes, et leur but. […] On le sait que le but des islamistes n’a jamais été de fonder un État palestinien ; le but des islamistes, c’est de précipiter la fin du monde, ils veulent un messianisme qui a abouti, c’est une vision judéophobe dont la finalité est la disparition du peuple juif. Et le Palestinien, dans cette mythologie, est un destin des plus tragiques. Il lui est dit que la fin du monde adviendra le jour où tous les Juifs seront tués et le Palestinien libéré. Mais quelle arnaque ! On lui promet à la fois un pays et la mort, on lui dit « tu vivras libre, mais un instant », au prix de ta disparition et de celle du monde entier. Et le fait que les élites laïques ont opté, dans leur majorité, pour une mécanique de l’affect et de la vengeance, de la douleur et de la frustration, pour soutenir ce rêve, qui est un cauchemar, en oubliant le rêve porté par Arafat – avec certes les errements de son époque –, que des intellectuels succombent à cette illusion en se disant que c’est un moyen, peut-être pourri, d’aboutir à quelque chose, ce basculement vers le rêve de fin du monde en soi comme étant la seule solution possible, est désarmant. »

Et je citerai encore ces deux propos de Kamel Daoud de ce long entretien qu’il est bon de lire :

«  Je suis pour un État palestinien et je crois que l’existence d’un tel État est nécessaire non seulement pour les Palestiniens mais aussi pour ma propre liberté dans mon propre pays, parce que ce problème hypothèque tous nos projets de démocratisation. Mais je ne peux pas adhérer à un projet d’extermination qui refuse l’humanité à chacun. S’il s’agit d’une cause de colonisation et de décolonisation, là je suis solidaire. S’il s’agit d’une cause raciale, arabe, ou confessionnelle, musulmane, je ne peux pas l’être. Ce ne serait pas rendre justice à cette cause et à la volonté de ce peuple d’avoir une terre et une histoire. Ce 7 octobre est une véritable défaite, parce que ce qu’il disait, c’est « on veut la terre pour les Palestiniens avec la noyade pour les Israéliens ».

Et

« Et il y a un autre drame, c’est l’hydre dont parlait Delphine : la guerre fabrique le tueur de demain. C’est le cycle dans lequel nous sommes tous entraînés et ce pour quoi il faut impérativement revoir ce problème à partir de deux grands enjeux. D’une part, l’enjeu de l’humanité de chacun : le droit d’humanité pour l’Israélien et le Juif, pour l’Arabe et le Palestinien. Et d’autre part, l’enjeu démocratique, car plus la Palestine rétrécit, plus le califat imaginaire s’étend. Je demande à Israël comme en Palestine, de faire la paix pour pouvoir me libérer. Tous les propalestiniens, loin de là, ne sont pas d’accord avec ça ! »

Pour conclure le journaliste de « L’Obs » rappelle à Delphine Horvilleur le sermon qu’elle a prononcé le 24 septembre à l’occasion de la fête juive de Kippour

«  Je ne le regrette pas, mais il me fait trembler. Je voulais en effet faire une mise en garde, à partir de nos textes, contre l’hubris de la souveraineté. La Bible, et en particulier le Deutéronome, dit aux Hébreux qui vont entrer sur la Terre promise : « Il arrivera un jour où vous serez souverains sur cette terre, et vous serez menacés par votre puissance parce que vous n’aurez plus conscience de votre vulnérabilité. Vous allez tellement croire à cette puissance qu’elle risque d’être pour vous assassine. »

Et Delphine Horvilleur finit par :

« Dans l’une de ses chansons, Leonard Cohen, qui était présent sur les champs de bataille durant la guerre de Kippour, écrit : « Il y a une brisure dans chaque chose, mais c’est là que la lumière se faufile. » Je veux me raccrocher à cela. »

Cette phrase « There is a crack, a crack in everything, That’s how the light gets in » se trouve dans la chanson « Anthem » de Leonard Cohen

« Ah les guerres elles
Recommenceront
La colombe sacrée
Sera attrapée de nouveau
Pour être achetée et vendue
Et achetée encore
La colombe n’est jamais libre.
Sonnez les cloches qui peuvent encore sonner

Oubliez vos offrandes parfaites.
Il y a une fissure en toute chose.
C’est ainsi qu’entre la lumière. »

Extrait d’Anthem

Du coup, si on laisse parler l’humanisme, qu’on revient à la politique et qu’on limite la religion à s’occuper du spirituel et de l’âme, on pourra peut-être trouver la voie du compromis qui est la seule permettant d’aller vers la Paix.

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Vendredi 27 octobre 2023

« Partout, les forces attachées à la modération, à la coopération et à la paix ont été battues en brèche. »
Jean-Louis Bourlanges, le 23 octobre, à l’Assemblée Nationale

Hier j’ai partagé un cri de colère.

Non ! ce que le Hamas a fait n’est pas un acte de résistance !

C’est un crime contre l’humanité. Ce que ces croyants ont perpétré au nom d’Allah, ne peut s’inscrire dans les valeurs de l’humanité.

Il faut aimer la mort, comme nous aimons la vie pour agir ainsi.

Il faut croire aveuglément à un récit et dénier à celles et ceux qui n’y croient pas, jusque qu’à la dernière parcelle d’humanité.

Non, on ne peut pas considérer que ce qui s’est passé à partir de 7 octobre est une simple riposte entre deux belligérants.

Les crimes du Hamas sont au-delà de ce que nous pouvions imaginer, horreur et atrocité.

Je ne suis plus croyant dans une des religions du Livre. Mais pour les croyants, il y a cette malédiction que je crois légitime pour chacun des assassins du Hamas et de ceux qui les ont envoyés :

« Quand on le jugera, qu’il soit déclaré coupable, Et que sa prière passe pour un péché ! »
Psaume 107 verset 7 dans la traduction de Louis Segond.

Que leurs prières soient péchés !

Il fallait que cette abomination soit dénoncée.

Et le 23 octobre, un vieil homme de 77 ans, est monté, tout essoufflé, à la tribune de l’Assemblée Nationale, au Palais Bourbon.

Il avait du mal à retrouver son souffle. Il finira épuisé, au bord du malaise.

Mais lorsqu’il a vraiment débuté son discours, la magie du verbe et la lucidité de la politique, se sont emparées de ce corps fragile.

Un discours exceptionnel de Jean-Louis Bourlanges, président de la Commission des affaires étrangères et député Modem. Un discours comme il y en eut jadis à la tribune de cette Assemblée, loin des interventions querelleuses et électoralistes qui sont désormais le lot quotidien de la chambre basse de notre parlement.

Il a aussi commencé à poser, ce qui doit être dit :

« Le 7 octobre dernier, cette interminable tragédie a pris un cours décisivement nouveau et d’une gravité exceptionnelle : Israël s’est trouvé confronté à une agression paramilitaire de première grandeur, menée par un Hamas résolu à piétiner tous les principes, toutes les règles, tous les usages régissant les relations entre les peuples, que ceux-ci soient en guerre ou en paix. Si les mots ont un sens, il est clair que l’agression conduite par le Hamas est à la fois terroriste, constitutive d’un crime de guerre généralisé et adossée à un discours à caractère génocidaire assumé. Le Hamas met en scène les pires violences sur les populations dans le seul but d’effrayer et d’intimider : c’est du terrorisme. Le Hamas ne fait la guerre qu’aux civils, c’est la définition même et dans son extension maximale du crime de guerre ! Les fidèles du Hamas n’hésitent pas à appeler non pas uniquement à la disparition de l’État d’Israël, mais à l’élimination des Juifs en tant que Juifs ! C’est l’expression même d’une volonté de génocide porteuse d’un crime contre l’humanité.»

Mais il avait introduit ce propos par un rappel historique essentiel qui fait le constat que la situation conflictuelle au Proche-Orient depuis soixante-quinze ans provient de l’absence d’un État palestinien aux côtés de l’État israélien :

« Le 29 novembre 1947, L’Assemblée générale des Nations unies décidait, par trente-trois voix contre treize, la création de l’État d’Israël tout en prenant soin de proposer l’institution parallèle d’un État palestinien qui, à la suite de la guerre qui a accueilli la décision onusienne, n’a jamais pu voir le jour. De ce vote solennel qui engage la communauté internationale date à la fois le droit imprescriptible du peuple juif à vivre dans un État libre et souverain, et le lancinant problème posé par l’émergence indéfiniment différée de son jumeau palestinien. Israël était né, Ismaël restait dans les limbes ; la tragédie prenait ses marques au cœur d’un Moyen-Orient par ailleurs déchiré par la guerre froide. »

Pour ceux qui manquent de références bibliques, il faut savoir que selon ce récit Ismaël est le fils d’Abraham qui serait le père de tout le peuple Arabe ainsi que de la lignée menant au prophète de l’islam Mahomet. Le second fils d’Abraham sera Isaac qui lui même sera le père de Jacob qui prendra le nom d’Israël et sera l’ancêtre du peuple juif. Ces personnages apparaissent dans les livres de Moïse des juifs et dans le Coran des musulmans. Les croyants de ces deux religions croient à ce récit.

Et puis prenant de la hauteur, Jean-Louis Bourlanges s’est interrogé sur la sécurité à long terme d’Israël :

« Et c’est de la réponse à cette question que doivent dépendre nos réactions à court et à moyen terme, comme celles de l’État hébreu.

Comment un État de 20 770 kilomètres carrés, peuplé de moins de sept millions de Juifs, fer de lance d’une communauté humaine de près de treize millions de personnes, pourrait-il espérer vivre durablement en paix et en sécurité au milieu d’un environnement par hypothèse hostile de plus d’un milliard et demi de musulmans ? »

Et il répond que les murs, les équipements militaires les plus sophistiqués sont une mauvaise réponse :

« Même l’arme nucléaire dont dispose Israël n’est pas de nature à assurer la survie d’un État concentrant toute sa population sur un espace aussi restreint. »

Et puis, il y eut ce développement remarquable de clarté et de lucidité en comparant l’attitude du premier ministre actuel de l’Etat d’Israel avec ses prédécesseurs :

« Face à cette terrible situation, il faut analyser sans œillères ni préjugés ce qui s’est modifié ces dernières années sur la scène moyen-orientale. Comme l’a très justement dit monseigneur Vesco, archevêque d’Alger : « La violence barbare du Hamas est sans excuse mais elle n’est pas sans cause. »

Avant la prise de pouvoir de M. Netanyahou, les grands dirigeants historiques d’Israël, quelle qu’ait été leur sensibilité politique, ont eu une conscience aiguë de cette vulnérabilité après que la guerre du Kippour l’eut rendue manifeste.

Yitzhak Rabin, qui avait vu au plus près le péril de la patrie, a défendu, avec une force de conviction et une volonté politique sans pareille, l’idée qu’il n’y aurait ni paix ni sérénité pour Israël si les Palestiniens ne se voyaient pas reconnaître, eux aussi, un État libre et souverain.

Menahem Begin, venu pourtant de la droite de la droite, a assumé courageusement à Camp David, le choix de la paix avec le principal ennemi d’Israël, l’Égypte post-nassérienne.

Ariel Sharon, qui avait pris la mesure de l’impuissance de la force dans le cadre de l’intervention controversée qu’il avait conduite au Liban, avait, à la veille de l’accident de santé qui devait le terrasser, décidé d’amener son pays à renoncer ses ambitions coloniales en Cisjordanie.

Ces hommes avaient pressenti et pleinement reconnu, pour Yitzhak Rabin du moins, qu’Israël ne trouverait la paix qu’à la condition d’établir avec les États arabes qui l’entouraient, mais aussi avec les hommes et les femmes de Palestine, une relation équilibrée qui supposerait le respect mutuel et le partage des bénéfices de la paix.

La rupture introduite ces dernières années dans la politique israélienne par les gouvernements successifs de M. Netanyahou n’est certainement pas la cause unique de la situation nouvelle, mais elle y a puissamment contribué. »

Jean-Louis Bourlanges dit tout le mal qu’il pense de M. Netanyahou sur le plan militaire mais aussi politique :

« L’essentiel est toutefois d’ordre politique. M. Netanyahou a semblé imaginer que l’établissement de relations apaisées et coopératives avec les voisins arabes d’Israël, ce qui était en soi une excellente ambition et se révélera demain fort utile à la quête nécessaire de l’apaisement, pouvait avoir ce pouvoir indirect, mais précieux à ses yeux, de dispenser Israël de rechercher avec les Palestiniens un accord équilibré et respectueux de leurs attentes et de leurs aspirations profondes.

Bien plus, les accords d’Abraham ayant permis aux États arabes d’abandonner les Palestiniens à leur triste sort, le Gouvernement israélien s’est estimé libre d’engager sans risque une relance rampante mais brutale et déterminée de sa politique de colonisation en Cisjordanie. »

Bien sûr, Israël n’est pas le seul responsable :

« Il serait injuste d’attribuer à l’État hébreu le monopole de la nouvelle brutalisation du monde d’où l’horreur du 7 octobre est sortie. Partout, les forces attachées à la modération, à la coopération et à la paix ont été battues en brèche.
Que les Palestiniens aient eu la tentation croissante et suicidaire de se réfugier dans une sorte de nihilisme politique ne peut, hélas, pas nous surprendre.

Une population sans avenir, donc sans espoir, pouvait-elle être tentée par des partis modérés qui n’avaient rien à lui offrir ? »

Il pointe aussi la responsabilité des Etats-Unis, notamment de Trump et ajoute :

« Comment, dans ces conditions, ne pas voir que ce sont aujourd’hui les héritiers idéologiques des assassins d’Anouar el-Sadate et d’Yitzhak Rabin qui tiennent ensemble la plume de la tragédie qui s’écrit sous nos yeux ?  »

J’avais déjà expliqué dans le mot du jour de lundi, le soutien de l’actuel Ministre de la Sécurité nationale du gouvernement israélien : Itamar Ben Gvir à l’assassin de Rabin, sans oublier que Netanyahou intervenait dans des meetings où une partie des participants appelait à tuer Rabin.

Sadate a été tué par le Jihad islamique égyptien qui est une organisation armée issue des frères musulmans exactement comme le Hamas.

La fin du discours consistera à essayer de trouver le juste niveau de la riposte en épargnant les vies innocentes :

« Dans l’immédiat, il faut impérativement veiller à ce qu’une contre-attaque légitime, dès lors qu’elle vise exclusivement à détruire les moyens militaires de l’agresseur, évite les deux écueils majeurs que chacun a clairement identifiés.
D’abord le risque d’une escalade incontrôlée pouvant conduire à un embrasement général. Derrière le Hamas, il y a le Hezbollah ; derrière le Hezbollah, il y a l’Iran ; derrière l’Iran, il y a la Russie et la Chine. […]

Le deuxième risque majeur est celui d’un anéantissement massif de populations civiles utilisées par les uns comme des boucliers humains et par les autres comme l’exutoire d’une tentation de vengeance,…

…pour reprendre l’expression préoccupante du Premier ministre israélien. »

Et puis il envisage une solution à plus long terme qui ne peut que prendre en compte pleinement le besoin de justice pour la population palestinienne au terme d’une nouveau processus de dialogue basé sur la paix, le besoin de sécurité d’Israël et des concessions réciproques :

« Reste à construire un avenir de paix. La tâche est redoutable en raison du mur de détresse et de haine qui sépare aujourd’hui Israéliens et Palestiniens. Aujourd’hui, il est à la fois trop tard et trop tôt pour instituer deux États en terre de Palestine.

Il est en revanche temps – et même grand temps – de commencer à réaliser les conditions qui rendront possible, le moment venu, cette double création. La première de ces conditions, c’est qu’Israël fasse cesser sa politique de colonisation et reconnaisse enfin que la solution du problème palestinien ne saurait passer par l’exportation, en Égypte, des Palestiniens de l’Ouest et, en Jordanie, des Palestiniens de l’Est.

La seconde de ces conditions consiste à recréer, notamment avec l’appui des États modérés du pacte d’Abraham, une autorité palestinienne active, respectée et capable de prendre à Gaza le relais d’un Hamas en cendres et de négocier un statut respectueux des droits palestiniens. Au-delà du Moyen-Orient, les bonnes volontés existent, comme celle du Brésil, dont la France a eu raison de soutenir le projet de résolution à l’ONU. Il nous appartient de nous associer à leurs efforts.  »

Il en appelle aussi à l’Union européenne dont l’expérience est celle de la réconciliation franco-allemande et qui doit convaincre « Palestiniens et Israéliens de la pertinence de son logiciel de réconciliation. »

Je n’ai pas cité tout le discours mais la plus grande partie.

Si vous voulez voir intégralement, en vidéo, ce moment de haute politique : <Débat du 23 octobre 2023>. Cela commence à 1:05 :00

Vous pouvez aussi avoir, grâce au journal officiel (cela me rappelle mes études de Droit lorsque j’allais régulièrement lire le JO pour prendre connaissance des débats parlementaires.), la retranscription textuelle intégrale du discours de M Bourlanges ainsi que les interpellations agacées et négatives de M Meyer Habib, député républicain, proche du Likoud et ami revendiqué de Benyamin Netanyahou

Le lien se trouve derrière ce lien :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/comptes-rendus/seance/session-ordinaire-de-2023-2024/seance-du-lundi-23-octobre-2023

Ce texte permet d’ailleurs de revenir à la vidéo et au moment précis de l’intervention transcrite.

Je n’ai pas grand-chose à ajouter à ce discours équilibré, profond, inscrit dans l’Histoire et qui tente de tracer un objectif pour l’avenir. Le chemin pour y arriver reste compliqué.

Les extrémistes des deux côtés voudraient que l’autre peuple dégage et soit chassé de cette terre. Cela est inadmissible et ne pourrait que conduire à d’autres crimes inouïs.

Il reste à trouver la voie qui permette de faire vivre ces deux peuples dans la Palestine de l’Empire Ottoman puis du mandat britannique, dans la paix, la justice et l’équilibre.

<1772>

Jeudi 26 octobre 2023

« Ce qu’il y a de bien avec les Juifs, c’est que même lorsqu’ils sont innocents, ils sont coupables. »
Alexandra Laignel-Lavastine

Aujourd’hui je partage, une lettre, un cri de colère.

Je n’y ajoute rien, aucun commentaire.

Je vous invite à lire cette tribune, à la recevoir, à l’accueillir.

Après l’avoir lu, vous pouvez évidemment donner libre cours à votre analyse, à vos critiques, à vos désaccords.

Elle exprime un point de vue fort, que certainement beaucoup de membres de la communauté juive, notamment française, ressentent.

C’est une lettre ouverte au Président de la République par une intellectuelle : Alexandra Laignel-Lavastine

Alexandra Laignel-Lavastine est une philosophe, historienne des idées, essayiste, journaliste née à Paris le 17 octobre 1966.

Elle a écrit de nombreux articles dans Le Monde et aussi à Libération, Le Monde des débats, Philosophie Magazine.

C’est une spécialiste du totalitarisme et de l’histoire intellectuelle et politique des pays de l’ex-Europe de l’Est au XXe siècle, elle a aussi beaucoup étudié la Shoah.

Elle s’est notamment intéressée à la shoah en Roumanie : « Grand entretien. Alexandra Laignel-Lavastine autour de «Cartea neagra – Le livre noir de la destruction des juifs de Roumanie 1940-1944»

En 2017, elle a écrit un livre ayant pour titre : « Pour quoi serions-nous encore prêts à mourir ? »

Elle s’est aussi intéressé à la montée de l’islamisme en France « Face à l’islamisme, certains intellectuels « progressistes » sont dangereux »

Cette lettre a été publiée sur ce site <Tribune Juive>

24 octobre 2023
Lettre ouverte au Président Emmanuel Macron à l’occasion de son arrivée en Israël.
Par Alexandra Laignel-Lavastine


Monsieur le Président de la République,

Il semblerait donc que nous vous attendons aujourd’hui en Israël, où je me trouvais quand les barbares du Hamas ont attaqué et massacré ce samedi 7 octobre, et où il va de soi que je me trouve toujours. D’abord, parce qu’on ne déserte pas par temps de guerre. Ensuite, parce qu’il faudrait avoir l’estomac bien accroché pour rentrer dans le pays que vous présidez, où l’esprit public et la classe politico-médiatique — aux habituelles exceptions près depuis vingt ans — a atteint, depuis quinze jours, un degré d’avilissement encore jamais vu. Je suis française en effet, pas même franco-israélienne, enfin pas encore, de ces intellectuels « néo-réactionnaires » qui s’épuisent à alerter depuis des années, de livre en livre, d’article en article, de lettre ouverte en lettre ouverte, en vain. Nous prêchons tous dans le désert.

Nous espérions vous voir ici un peu plus tôt, question d’honneur en la circonstance, « en même temps » que d’autres chefs d’État. Mais nous subissions un déluge de missiles, qui auraient déjà fait des milliers de morts en Israël si les autorités s’y comportaient comme le Hamas : interdire aux civils de s’abriter dans les abris-bunkers, en l’occurrence cinq étages de tunnels et de cité souterraine sous Gaza.

Et les missiles, M. le président, vous n’avez peut-être pas l’habitude. C’est dire si la prudence s’imposait, comme elle continue de s’imposer dans l’Hexagone face à nos islamistes locaux et autres idiots utiles du Hamas, qui sévissent en toute liberté et devant lesquels nous nous couchons depuis les massacres de Mohamed Merah en 2012, avec une lâcheté et une complaisance collectives qui n’ont d’égale que notre obstination dans l’art criminogène de se crever les yeux, y compris face à l’explosion de l’antisémitisme, toujours un symptôme indiquant que l’ensemble du corps social est malade.

Nous allons payer extrêmement cher cette indignité, les réjouissances ayant déjà commencé, vous entrouvrez peut-être un œil. Israël aussi s’était endormi, avec le résultat que l’on sait. Les massacres des kibboutz seront pour demain en France, dans nos foyers lunaires. Les même pathétiques rodomontades à chaque fois : on allait avoir « un avant et un après », après Merah, après Charlie, après le Bataclan, après Nice, après Samuel Paty, etc. etc. Or, non seulement nous n’avançons pas, mais nous régressons après chaque tuerie. Elles ne se cumulent pas, elles s’annulent.
On nous a expliqué que vous attendiez le cadre d’un « agenda utile » avant de nous faire grâce de votre personne sur place : des négociations de paix avec le Hamas, ou peut-être avec le Hezbollah ou les deux?

Au point où nous en sommes… Car nous sommes en juin 1940.
Un « agenda utile » ? Une formule qui inspire trois attitudes possibles : le fou rire (un peu nerveux par ici ces temps-ci) pour les plus conscients du désastre français, la perplexité pour les plus aveugles et la fascination pour tous : comment peut-on être aussi décalé ? Je tiens toutefois à vous rassurer si d’aventure vous changiez d’avis : on vous accueille par politesse, ici presque personne ne vous connaît et la France ne représente plus rien, devenue une minuscule province à peine capable d’aligner 15 000 soldats opérationnels, dont mon propre fils a longtemps fait partie dans une unité parachutiste (une précision au cas où l’on me donnerait des leçons). Vu d’Israël, où l’on vient de mobiliser près de 400 000 combattants, une farce.

Comment résumer ce en quoi s’illustre notre beau pays depuis le 7 octobre ? On ne sait trop par quoi commencer. D’abord, il y eut les cinq minutes d’émotion rituelle inspirées par un carnage à grande échelle, le plus abject depuis la Shoah : 1 400 victimes en un jour. Une petite cinquantaine, voire moins, nous expliquaient encore doctement certains journaux hexagonaux plusieurs jours après, l’AFP à l’appui… L’émotion : il est vrai que des bébés décapités, des femmes enceintes éventrées, des enfants et des jeunes filles violées et égorgés, des familles brûlées vives ou déchiquetées à la grenade, des êtres démembrés ou découpés à la tronçonneuse (oui, ils avaient aussi des tronçonneuses), des gosses survivants cachés et silencieux sous le corps de leurs parents et j’en passe, cela n’arrive pas non plus tous les jours.

Mais c’était tout de même bien embêtant. D’abord, ces habitants des kibboutz du sud, tous de gauche, étaient aussi en première ligne depuis longtemps pour inviter les Gazaouis à travailler avec eux dans les champs — ils croyaient en la paix. Or ce sont pour partie ces travailleurs et ces gentils voisins, en plus des terroristes infiltrés, qui les ont trucidés.

Comme pendant la Shoah : le rôle central joué par les voisins, qui se transforment en bêtes sauvages du jour au lendemain.
Grâce à eux, ce 7 octobre, les terroristes disposaient des plans très détaillées de ces kibboutz pastoraux où ils étaient bienvenus.

Très embêtant aussi, l’héroïsme de tous, de tous ces « sionistes ». Des civils, des jeunes ou des pères de famille qui sont immédiatement sortis de chez eux, avec ou sans armes, pour défendre les villages et sauver des jeunes gens qui dansaient à la Rave Party. L’héroïsme absolu des soldats et des policiers, de garçons et de filles en tout petit nombre, présents ou arrivés spontanément sur place quand ils ont commencé à comprendre, appelés au téléphone par les suppliciés tapis dans les bunkers, se battant pendant plus de vingt heures d’affilée parfois, avec un simple pistolet, contre des hordes de monstres surarmées.
Des héros n’hésitant pas à se sacrifier et à sauter eux-mêmes sur les grenades (les terroristes en avaient deux mille) pour protéger les familles ou leurs camarades. Un héroïsme dont, en France, on n’a plus idée. Les mots manquent, oui, pour décrire l’horreur. Les représentations mentales nous manquent désormais aussi, en France, pour appréhender ce courage.

On a donc vu sur « Cnews » Frédéric Taddéï s’empresser d’inviter la sociologue Laetitia Bucaille sur son plateau, « professeure » à l’INALCO et membre de l’Institut universitaire de France (IUF), un lieu d’excellence intellectuelle, pour nous expliquer que nous ne disposions d' »aucune preuve de ce qu’il s’était passé » le 7 octobre… L’animateur en question, venu de « Russia Today », la télévision de M. Poutine, jubilait, cela va de soi, sans la reprendre. Tout comme il jubilait déjà après Charlie sur « France 3 » en invitant Emmanuel Todd qui nous expliquait alors que les frères Kouachi étaient en fait des victimes (de la France catholique rance et discriminante), si bien que les victimes étaient les vrais bourreaux, nous avions mal vu (j’étais ce jour-là sur le plateau, invitée en néo-réac de service pour feindre la discussion « équilibrée »).

Frédéric Taddeï a-t-il été viré depuis ce scandaleux « dialogue » avec Madame Bucaille ? Non. Un ou plusieurs chroniqueurs de la chaîne, des esprits à l’endroit et courageux, pour mettre leur démission dans la balance ? Personne. Et Madame Bucaille, virée de sa fac ? Le minimum syndical. Non plus. La direction de l’INALCO ? Elle est « outrée » et ne bougera pas une oreille.

En Suisse, au même moment, un autre « professeur » s’est distingué par un propos négationniste similaire. Viré sur le champ et sans préavis. Nos amis helvétiques sont plus vigoureux.

À propos des universités, l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), notamment (où j’ai enseigné jadis) s’est, elle aussi, illustrée au lendemain du carnage par un communiqué émanant d’un syndicat étudiant pour pratiquer le même type de discours : nous avions affaire à « une forme de résistance à l’occupation sioniste » (Gaza n’est plus occupée depuis 2005, sinon par une dictature totalitaire). Le poisson pourrit toujours par la tête. Et il se décompose depuis longtemps, nos facultés et nos Grandes écoles s’étant islamo-wokisées en diable dans une quasi indifférence, les lanceurs d’alerte n’étant pas plus entendus sur ce point que sur d’autres.

Mieux, « France-Culture » s’est empressée de réinviter la sociologue de l’INALCO dès le lendemain, à ses « Matins », pour derechef éclairer l’opinion publique. Il fallait le faire ! Et sur quoi portent cette semaine « Les Chemins de la philosophie » sur cette même station ? Sur la « compromission » des grands intellectuels roumains des années 30 avec le fascisme et les pogroms (j’ai écrit aussi quelques livres là-dessus). Une voix pour oser faire remarquer au micro qu’on assistait à la même compromission en France depuis dix jours ? Non, bien sûr. Business as usual.

En fin de semaine, on évoquera dans cette émission le courage des dissidents d’Europe de l’Est, de Vaclav Havel et de Jan Patocka. Comme si de rien n’était, comme si, eux, auraient laissé passer pareille ignominie.

Le bal des faux-cul. Je ne généralise pas, je ne parle pas des admirables exceptions, là encore, une miraculeuse poignée dans la veulerie ambiante, à l’instar des rebelles de l’An 40 : les Georges Bensoussan, les Abnousse Shilmani et quelques autres intellectuels et journalistes, des guerriers du verbe et de la plume qui, comme après « l’étrange défaite » que nous sommes en train de revivre en live, sauvent l’honneur. Force est néanmoins de constater leur rareté.

Phase II, il y eut heureusement cette roquette, tombée sur un hôpital de Gaza et ses quelque « 500 victimes », soi-disant tirée par les méchants, donc les sionistes. Une bénédiction. Ouf ! En fait, un missile lancé par le Hamas et retombé sur le parking pour un bilan revu à quelques dizaines de morts. On l’a su très rapidement. Mais c’était trop beau, il fallait s’engouffrer dans la brèche toutes affaires cessantes.

Même vous, M. le président, avez commis la lourde faute de twitter bien vite. Et voilà la plupart des médias français reprenant aussitôt la propagande de l’organisation terroriste massacreuse, car on a toujours tendance à croire ce que l’on a envie de croire. Or, c’était irrésistible !

Puis le démenti est arrivé, preuves formelles à l’appui. Subitement, la roquette du Hamas n’a plus intéressé grand-monde, pas plus que les 450 autres ayant loupé leur cible depuis le 7 octobre pour atterrir sur la bande de Gaza et ses civils. Il en va ainsi, du reste, lors de toutes les attaques du Hamas depuis de nombreuses années, un classique, comme à l’été 14, mais l’ignorance est crasse car elle souhaite le rester.

Ce qu’il y a de bien avec les Juifs, c’est que même lorsqu’ils sont innocents, ils sont coupables. Jouissance, donc, avec cette roquette inopinée : les Juifs, pardon les sionistes, coupables de « génocide »(LCI) et de « crime contre l’humanité »… On a choisi les mots. Soulagement ! On a même vu Pierre Moscovici, ancien ministre et actuel président de la Cour des comptes, se précipiter à l’antenne de « i24News » pour expliquer qu’il faudrait nommer « une commission d’enquête indépendante ». Un esprit très mal tourné pourrait songer à la fable de La Fontaine, « Le chat, la belette et le petit lapin », « sa majesté fourrée », « un saint homme de chat, expert sur tous les cas ». Son père, le psychosociologue Serge Moscovici (dont j’ai publié chez Grasset les mémoires posthumes en 2019, Mon Après-guerre à Paris), un Grand, a survécu au pogrom de Bucarest de janvier 1941, qu’il décrit de façon stupéfiante dans ce livre. La fillette alors massacrée avec d’autres aux abattoirs de la ville par les fascistes de la Garde de fer, suspendue à un croc de boucher, portait autour du coup un écriteau : « Viande cascher », une image qui avait horrifié le monde entier… Nous n’en sommes donc plus là.

En si bon chemin, Qui a-t-on invité, cette même semaine, à « Sud-Radio » ? Jean-Jacques Bourdin a réfléchi et il a opté pour la député Danièle Obono, bien connue pour sa clairvoyance face à l’islamisme. Rien de plus urgent que de l’entendre, sachant d’avance ce qu’elle allait dire. Le Hamas, une organisation qui « résiste » au crime d’occupation, etc. « Apologie du terrorisme », a dégainé à juste titre votre ministre de l’Intérieur en saisissant le procureur. Résultat ? Elle vient d’être élue pour siéger, à partir du 6 novembre, à la Cour de justice…

À propos de ministère de l’Intérieur, qu’attend d’ailleurs votre ministre, M. le Président de la République, pour enfin autoriser — et même obliger — ses policiers à porter leur arme de service pendant leur congé, au-delà du trajet entre leur domicile et leur caserne ou leur commissariat, comme le veut jusqu’à présent la règle (un sketch) ? Le b-a ba d’un maillage plus serré du territoire s’agissant de mieux protéger leurs concitoyens, par exemple quand nos forces de l’ordre sont au cinéma en famille, dînent dans une pizzeria ou se promènent au jardin d’acclimatation avec leurs enfants, dans l’hypothèse où des énergumènes issus de nos quartiers émotifs se mettraient à mitrailler dans le tas. Vous avez peut-être fini par le comprendre, cette éventualité n’est plus à exclure.

Même chose pour nos militaires, en particulier nos officiers, et cela dépend du ministère de la Défense. Mais à sa tête, et à un quart d’heure avant une possible troisième guerre mondiale, celui-ci paraît tout aussi à l’Ouest.

Vous n’en êtes pas moins, M. le président, le Chef des Armées. Vous pourriez avoir votre mot à dire. C’est ainsi qu’en Israël, une nation de soldats, des dizaines de morts sont évités chaque année. Cela ne requiert aucun moyen, juste un brin de jugeote et une circulaire. J’ai soufflé en direct cette suggestion à des camarades qui se trouvaient sur le plateau de « Cnews » lors de l’intervention de M. Darmanin il y a quelques jours, par portables interposés. La question ne fut pas posée et elle ne le sera sans doute pas. Je la formule depuis 2015, en vain naturellement. Nous restons à des années lumières du réel.

Sans jamais nous lasser, hier soir, dimanche, nous avons remis cela à la télévision. Quelle autre « personnalité » encore sur un plateau ? Le député Alexis Corbières, encore un convive de marque, pour nous servir ses habituelles circonvolutions. Mais il y a toujours un autre invité en face pour accepter de « débattre » avec lui, en l’occurrence Alain Bauer, il est vrai très agacé.

Si tout le monde refusait (mon cas depuis 2015), on n’inviterait plus M. Corbières car il n’aurait plus de vis-à-vis. Mais comment résister à une invitation télévisuelle ? Convoquer le député France Insoumise était sans doute d’autant plus pressant que sa fille de 21 ans, une islamiste radicalisée, dont la maman est Raquel Garrido, autre tête pensante du parti de M. Mélenchon, venait de twitter : « Alors g ptet pas d’âme, mais ils me font pas du tt de peine, je les trouve mm plutôt chiants, surtt les gosses », allusions aux otages du Hamas détenus à Gaza, dont on n’ose imaginer le calvaire. Abject. Les parents ne sont certes pas responsables des déraillements de leurs enfants majeurs. Mais enfin…

La rue ? On a des manifestations monstres, dites « pro-palestiniennes », en vérité « pro-Hamas », ce qui n’échappe à personne, mais qu’il ne conviendrait pas d’interdire. Encore et toujours le choix des mots car appeler un chat un chat, nous n’en sommes plus capables. Sur une pancarte brandie par une jeune fille, parmi mille autres, Place de la République, oui, de la République, on avait il y a trois jours : « Vous avez pleurés 40 faux bébés israéliens. Où êtes-vous pour les 1000 enfants palestiniens tués ? » Cette demoiselle fâchée avec l’orthographe (on se demande comment, du reste, l’Education nationale se portant si bien) doit ignorer que les enfants en question servent au Hamas de boucliers humains, l’organisation « caritative de résistance » déployant tous les moyens possibles pour empêcher les malheureux d’évacuer vers le sud (en plus de leur interdire l’accès aux tunnels protecteurs pendant les bombardements).

Car plus il y a de « martyrs », plus le sang coule, plus le Hamas, dont on sait l’importance qu’il attache à la vie humaine, peut compter d’idiots utiles en France, en Europe et dans le monde, toujours au rendez-vous. C’est tout bon. Et que voit-on fleurir après les massacres du 7 octobre si on va faire ses emplettes au Printemps, à Paris, ces jours-ci ? Une belle affiche, où on lit ceci : « La torture des enfants palestiniens par Israël et l’occupation sioniste ». On se frotte les yeux. À ce seuil d’affaissement national, on pourrait être tenté de rendre les armes.

Je m’arrête ici, la liste serait trop longue. En deux semaines, la France, la vôtre, M. le Président, celle que vous allez représenter demain en Israël, s’est surpassée. Je n’aimerais pas être à votre place. [….]

En France, il n’est plus question que de l’aide humanitaire à Gaza et des bombardements de l’armée israélienne, un pays dont on se demande comment il ose se défendre. Et tenir à ce point à éviter d’autres carnages, au Sud comme au Nord, s’il laissait la menace prospérer comme on sait si bien le faire dans le pays qui vous a élu à la tête de l’Etat à force de regarder ailleurs. On me rapporte toutefois de source bien informée qu’on commence à observer une certaine fébrilité au sein de notre classe politique. Un avant et un après ? Pour l’heure, nous en sommes très loin, mais on aimerait malgré tout croire en un miracle. »

<1771>

Lundi 23 octobre 2023

« Si la haine répond à la haine, comment la haine finira-t-elle ? »
Bouddha

Une actualité violente chasse l’autre :

On ne parle presque plus de la guerre que la Russie mène à l’Ukraine et plus du tout de l’épuration ethnique au Haut Karabakh.

On parle des crimes abjects et inimaginables que les terroristes du Hamas ont perpétré pendant leur attaque contre Israël du 7 octobre.

Avant de parler des bombardements de l’armée israélienne sur la prison à ciel ouvert de Gaza, je voudrais quand même renvoyer vers un article qui raconte le 7 octobre : « On n’avait pas vu de telles images depuis le régime nazi »

Alors, bien sûr on peut passer son chemin, se protéger de l’horreur, ne pas sombrer avec la folie meurtrière des hommes.

Mais si on veut essayer de comprendre, comprendre la sidération de la communauté juive mondiale, le désir de vengeance, la haine, il n’est pas possible de passer son chemin.

Cet article relate ce que les soldats de la base de Shura, dans le centre d’Israël, transformée en morgue géante et en service d’identification des corps ont vu et vécu.

« Depuis le carnage du 7 octobre, [ l’article est du 20 octobre ] cette morgue géante aménagée sur la base du rabbinat militaire a reçu plus de 1300 cadavres, souvent méconnaissables. Ces derniers jours, l’armée en a ouvert les portes à la presse afin de faire connaître l’ampleur des sévices infligés aux victimes. « Parce que vous êtes journalistes, prévient le colonel Weissberg, vous savez qu’en temps de guerre chaque camp s’efforce d’imposer sa vérité aux dépens de l’adversaire. Mais dans ces circonstances exceptionnelles, vous avez le devoir de me croire. De toute façon, toutes les horreurs dont nous allons vous parler ont été filmées par les terroristes puis diffusées sur les réseaux sociaux. Et je peux vous assurer qu’on n’avait pas vu de telles images depuis le régime nazi. »

Les corps sont méconnaissables, mutilés montrant une ampleur de sévices infligés aux victimes défiant absolument notre humanité.

« Depuis quelques années, on s’entraînait en prévision d’une tuerie de masse en se disant qu’on devrait ce jour-là être capables d’accueillir des dizaines de dépouilles à la fois, sourit tristement Shery, une volontaire qui a rejoint l’unité pour s’occuper spécifiquement des femmes soldats. Mais jamais on n’aurait imaginé être confrontés à une telle abomination.»

L’article donne des éléments concrets de cette inhumanité.

Je n’en ferai pas la liste, le podium de l’horreur n’a pas de sens.

Mais je m’arrêterai sur l’un de ces crimes contre l’humanité, je cite le colonel Weissberg :

« Que dire lorsque vous découvrez le corps d’une femme enceinte tuée par un terroriste qui lui a ouvert le ventre, puis en a extrait le fœtus avant de leur couper la tête à tous les deux ? ».

Oui que dire ?

Le criminel veut éradiquer toute vie, la vie juive, jusqu’à sa racine.

Et ce crime a été commis au nom d’Allah.

Au début, le conflit de la Palestine était un conflit territorial, certes les uns étaient de confession juive et les autres de confession musulmane, mais aussi chrétienne, mais la religion n’était pas prégnante dans cette opposition.

Elle l’est devenue, c’est ce qu’écrit Sylvain Cypel dans l’hebdomadaire « Le Un » : « Le conflit a basculé de national à religieux »

Le Hamas veut créer un état islamique et se bat au nom de son Dieu qui lui a donné cette terre selon sa croyance. Et du côté israélien, il y a aussi des combattants de la Foi qui affirment que ce n’est pas la décision de l’ONU qui leur a donné cette terre, mais leur Dieu qui justifie leur présence sur la terre promise. La Cisjordanie, dans leur bouche, devient la Judée Samarie, appellation biblique.

On disait parfois que la musique adoucit les mœurs, ce qui selon mon expérience n’est que partiellement exact pour les interprètes.

Mais notre expérience collective montre que la religion n’adoucit pas non plus les mœurs. Elle parvient à compliquer encore davantage des situations qui le sont déjà, et dans le cas qui nous occupe parvient à déchainer encore davantage la violence.

Et maintenant Israël réagit et bombarde la bande de Gaza.

Les 2,3 millions d’habitants ne sont pas le Hamas, mais le Hamas est parmi eux.

Ces habitants sont enfermés dans cette bande, ils ne peuvent pas la quitter, Israël et l’Egypte les en empêchent.

C’est dans ce numéro du « Un » qu’est reproduit la phrase du Bouddha mise en exergue :

« Si la haine répond à la haine, comment la haine finira-t-elle ?»

J’ai été bouleversé par cette <Video> mise en ligne par une journaliste indépendante israélienne : Or-ly Barlev 

Elle a filmé ce témoignage d’une résidente survivante du kibboutz Be’éri, âgée de 19 ans, qui au delà de son désarroi et de sa douleur parvient à se hisser au-delà de la vengeance et s’en prend à Benyamin Netanyahou qu’elle appelle Bibi :

« Il a décidé de nous jeter le dôme de fer, plutôt que d’arriver à une solution politique »

Il y avait un processus de paix.

Benyamin Netanyahou n’en voulait pas.

Sur le site de Radio France, le journaliste Charles Enderlin rappelle en 2020:

« Vous savez, Benyamin Netanyahou, l’actuel Premier ministre de l’État d’Israël, était à la tête des manifestations place de Sion à Jérusalem, où la foule hurlait « À mort. Rabin, par le feu, par le sang, nous expulserons Rabin ». »

Et en face, le Hamas faisait des attentats contre les israéliens pour saboter le processus. Charles Enderlin écrit :

« Dès le début du processus d’Oslo, les extrémistes des deux camps se sont mis à l’œuvre. Le Hamas a décidé de tout faire pour empêcher la création d’un État palestinien au côté de l’État d’Israël car pour les islamistes radicaux, il n’est pas question de permettre un État juif en terre d’islam. Et pour les nationalistes messianiques juifs, il n’est pas question de permettre une Palestine libre et indépendante en terre d’Israël. Au début de l’année 1994, quelques mois après la signature des accords d’Oslo, un terroriste juif a massacré 29 Palestiniens en prière dans le caveau des Patriarches à Hébron. Cela a donné le prétexte aux islamistes de Gaza pour lancer des campagnes d’attentats suicides qui, bien entendu, ont contribué à la détérioration de l’image du processus de paix dans le public israélien. L’insécurité a commencé à régner dans les rues israéliennes. »

Aujourd’hui Netanyahou est à la tête d’Israël et le Hamas gouverne Gaza.

Rabin lui disait :

« Je continue le processus de paix comme s’il n’y avait pas d’attentats, et je lutte contre les attentats comme s’il n’y avait pas de processus de paix »

Personne ne sait si Rabin aurait pu mener le processus de Paix à son terme. Mais il en avait la volonté car il savait que l’avenir d’Israël en dépendait.

Aujourd’hui ce sont ses ennemis et les supporters de son assassin qui sont au pouvoir.

Yitzhak Rabin a été assassiné, le 4 novembre 1995 au soir, de deux balles tirées à bout portant dans le dos par un messianique exalté juif.

<Cet Article> raconte que Itamar Ben Gvir a demandé en 2007 la libération de l’assassin de Rabin : Yigal Amir.

Itamar Ben Gvir est l’actuel Ministre de la Sécurité nationale du gouvernement israélien.

Il exposait jusqu’en 2020 dans son salon une photo de Baruch Goldstein, l’auteur du massacre d’Hébron cité par Charles Enderlin. Il a déclaré l’avoir retirée en janvier 2020 après s’être aperçu que cela pouvait lui nuire politiquement. Il continue toutefois de revendiquer son admiration pour le terroriste. C’est ce que vous pourrez lire dans cet article de <Times Of Israel>

Ce que le Hamas a fait le 7 octobre constitue un paroxysme de haine.

Mais la haine ne peut pas vaincre la haine, elle ne peut que l’exacerber.

En France, il existe un mouvement de femmes : « Les guerrières de la paix » fondé en mars 2022 qui rassemblent des femmes musulmanes et juives convaincues que seules la Paix et la prise en compte de l’autre constitue une issue à toute cette haine.

Les deux co-presidentes sont Fatima Bousso et Hanna Assouline.

Cette dernière avait été invitée par Karim Rissouli dans son émission « En société » sur France 5 du dimanche 22 octobre 2023.

Hanna Assouline qui dit (reproduit sur cette page de Radio France) :

« Il faut savoir nommer les choses. Nommer l’horreur des massacres perpétués par le Hamas, celle des civils qui meurent sous les bombardements israéliens. [mais] il est important de réaliser que parler d’une souffrance n’en invisibilise pas une autre. »

Vous trouverez derrière ce lien <Guerrière de la Paix> un documentaire de 50 minutes sur ces militantes de l’espoir en Palestine et en Israël.

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Jeudi 20 mai 2021

« Les violentes émeutes de ces derniers jours indiquent qu’Israël se trouve à la croisée des chemins »
Eva Illouz

La terre sacrée des trois monothéismes, s’est à nouveau embrasée.

Comment parler de ce sujet sans tomber dans le simplisme ?

Pour les uns toute la faute est du côté des israéliens qui par leur politique de colonisation des terres que le plan de partage de 1948 donnait aux palestiniens rendent impossible toute paix qui permettrait la coexistence apaisée de deux Etats.

Pour les autres toute la faute est du côté des palestiniens qui ne parviennent pas à faire émerger des gouvernants crédibles capable de négocier et s’engager pour trouver la voie d’une négociation raisonnable avec Israël.

Pour renforcer l’argumentaire du premier camp, on parle du blocus qu’Israël impose aux territoires palestiniens, l’usage massive de la force asymétrique pour répliquer à toute attaque palestinienne ainsi que la politique de domination et donc d’humiliation du peuple palestinien, moins bien organisé, moins bien structuré, nettement moins bien armé.

Mais le second camp pourra répliquer en fustigeant l’attitude, les méthodes et l’idéologie du Hamas, ainsi que la corruption du Fatah.

A ce moment de l’affrontement, nous sommes en plus en présence d’une double impasse de gouvernement. Au bout de deux ans et quatre élections (9 avril et 17 septembre 2019, 2 mars 2020, 23 mars 2021) Israël n’est toujours pas en mesure de désigner un premier ministre et un gouvernement capables de gouverner le pays dans la durée et la stabilité. Pendant ce temps, Benyamin Netanyahou reste au pouvoir et expédie les affaires courantes. Et quand les affaires courantes sont une guerre contre le Hamas, cela lui est plutôt favorable.

En face, le président de l’autorité palestinienne Mahmoud Abbas a reporté sine die les élections législatives qui aurait dû se tenir en 2021. Le précédent parlement avait été élu en 2006 !

Lui-même a été élu en 2005 et reste dans sa fonction sans une nouvelle légitimation par les urnes.

Écrire sur ce sujet est périlleux.

On peut, je pense légitimement, avoir un surplus de compassion pour la plus grande partie du peuple palestinien qui vivent dans des conditions d’enfermement et d’insécurité terribles. Et qui en plus, ont des dirigeants médiocres et corrompus.

Mais on ne peut pas ne pas avoir de compassion pour le peuple israélien qui lui aussi est touché par les actions meurtrières du Hamas qui dans sa tentative actuelle ne cherche pas le bien du peuple palestinien mais plutôt de gagner la bataille de l’image contre le Fatah, en voulant montrer que c’est lui qui défend avec le plus d’ardeur la cause palestinienne.

Je me suis abonné il y a quelques mois à une revue en ligne qui s’appelle « AOC » pour Analyse, Opinion, Critique. Chaque jour, un article dans chacune de ces rubriques est publié.

Et pour éclairer le sujet que j’ai abordé aujourd’hui je voudrais partager l’opinion de la sociologue Eva Illouz publié le 19 mai : « Israël-Palestine : la guerre silencieuse »

Eva Illouz possède la double nationalité franco israélienne. Elle est née le 30 avril 1961 à Fès au Maroc. Elle est directrice d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS).

Elle enseigne aussi la sociologie à l’Université hébraïque de Jérusalem. Elle a écrit plusieurs livres de sociologie qui ont eu du succès. Je possède dans ma bibliothèque, un livre qu’il me reste à lire : « Happycratie »

Elle pose d’abord la question juste des faits : Peut-on expliquer comment la violence actuelle a commencé ?

Elle a cette formule piquante «

« Lorsque deux camps sont engagés dans un conflit qui dure depuis aussi longtemps que le conflit israélo-palestinien, chacun de deux côtés est devenu expert dans l’art d’accuser l’autre « d’avoir commencé ». »

C’est un peu comme de tous jeunes enfants : « c’est lui qui a commencé »

Certains voudraient faire commencer l’histoire dans les époques mythologique quand le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob a donné l’ordre à Moïse de conduire les Hébreux, hors d’Egypte dans ce pays qu’il lui a donné.

Ce récit est écrit dans les livres saints de la religion juive. Rien de ce récit n’a pu être confirmé par les archéologues et les Historiens.

D’autres veulent la faire commencer au moment de « La Nakba », « catastrophe » en arabe, qui désigne l’exil forcé de 700 000 Palestiniens lors de la création de l’Etat d’Israël en 1948. Car cette terre était occupée par des arabes musulmans et chrétiens qui étaient largement majoritaires avant que le mouvement sioniste envoie par vague successive des juifs s’installer en Palestine.

Pour ma part, je préfère me référer à la décision de l’ONU qui a créé l’État d’Israël mais qui parallèlement a créé l’État de Palestine. Que l’un existe, sans l’autre pose un sérieux problème.

Mais si on en revient à l’embrasement actuel, le début n’est pas évident :

« Nous pourrions commencer par la vidéo d’un adolescent arabe du quartier de Beit Hanina à Jérusalem-Est qui gifle, sans avoir été provoqué, un adolescent juif orthodoxe dans le tramway de Jérusalem. Cette vidéo, postée sur Tiktok, a suscité un tollé, alimentant la peur existentielle ressentie par beaucoup de Juifs israéliens mais aussi leur perception que « la haine des Arabes à leur égard sera éternelle ».

Cet incident aurait pu rester à sa mesure d’incident qui justifie une remontrance ou une sanction pour le gifleur. Il semble dérisoire de penser que cet incident est la cause de centaine de morts ?

« Mais nous pourrions aussi commencer l’histoire un peu plus tard, le jeudi 22 avril, lorsque des membres de l’organisation d’extrême droite Lehava ont traversé la ville de Jérusalem en scandant « mort aux Arabes ». »

Cette manifestation s’est déroulée en pleine période sacrée pour les musulmans du ramadan. Et c’est alors que la Police israélienne a eu cette initiative malheureuse, qu’Eva Illouz pointe aussi :

« Ou bien prendre comme point de départ la décision de la police de fermer avec des barrières la petite place située devant la porte de Damas pendant le mois sacré de Ramadan. Cette porte mène aux quartiers arabes exigus et surpeuplés de la Vieille Ville de Jérusalem, et ses abords constituent depuis longtemps déjà un lieu où se retrouvent les hommes, majoritairement jeunes [notamment les soirs de ramadan]. Cela a été vécu comme une humiliation de plus qui venait s’ajouter à la privation, au quotidien, des droits politiques des Arabes de Jérusalem – ils représentent 40 % de la population de la ville mais n’ont aucun droit politique »

Et la police israélienne ne s’est pas contenté de bloquer le passage des arabes de Jérusalem

« Puis, lorsque les Israéliens ont empêché, pendant le mois de Ramadan, des milliers de pèlerins de se rendre à la mosquée Al-Aqsa (le troisième lieu saint de l’islam), d’humiliation on est passé à profanation. À l’approche de la Journée de Jérusalem, qui célèbre la conquête de ville en 1967, et après une semaine de tension, la police a utilisé du gaz lacrymogène et des canons à eau sale (qui détrempent les gens et les rues d’une odeur nauséabonde insupportable) pour disperser et combattre les fidèles, blessant des centaines de personnes. »

Quand on profane le lieu sacré d’un peuple croyant, il faut s’attendre au pire.

Car ce qui est sacré autorise le sacrifice et conduit à punir ce qui est sacrilège. Or la profanation est un sacrilège pour ceux qui croient au sacré.

Et c’est ainsi que les arabes, citoyens israéliens ont commencé à se révolter.

Le Hamas a alors profité de cet instant de tension pour envoyer une pluie de roquettes vers les villes israéliennes, tout en se réfugiant dans des immeubles dans lesquels il utilise les populations civiles et les enfants comme bouclier humain. Son but premier étant de conforter sa position politique après la décision de reporter les élections prises par son ennemi intérieur : le président de l’autorité palestinienne.

L’armée israélienne a alors répliqué avec sa puissance habituelle et les effets collatéraux inévitables qui révoltent beaucoup de personnes dans le monde. Dans cette situation on en revient à la formule d’Annie Kriegel :

« Israël n’a qu’un ami, mais c’est le bon »

Mais c’est dans la seconde partie de son article que je trouve l’opinion d’Eva Illouz particulièrement intéressante :

« Cependant, la guerre contre Gaza (un événement) ne doit pas, en dépit de sa télégénie, détourner notre attention des processus plus silencieux et invisibles qui ont jalonné l’histoire d’Israël, je parle de la constante privation des liberté et souveraineté politique des Palestiniens de Cisjordanie, et, par conséquent, du sentiment d’aliénation des citoyens arabes dans une société qui n’a cessé, au mieux, d’exprimer une profonde ambivalence à l’égard de leur présence.

La guerre civile qui déchire Israël est bien plus inquiétante que la guerre militaire menée contre le Hamas, car elle met en évidence les contradictions internes qu’Israël n’a pas voulu et peut-être n’a pas pu surmonter. Cette guerre trouve sa source dans l’impossible modèle politique qu’Israël a tenté de promouvoir : une démocratie fondée sur l’exclusion durable des citoyens arabes de l’appareil d’État. [..]

Cette exclusion n’est pas simplement un effet involontaire de la situation militaire d’Israël. Non, elle a été entérinée par de nombreuses lois qui discriminent les citoyens juifs et arabes. C’est pourquoi le point d’entrée le plus pertinent pour comprendre la guerre civile actuelle réside dans la tentative continue des colons juifs d’expulser des familles palestiniennes du quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem-Est. »

Parce que parmi les évènements qui ont fait monter la tension il y avait la question de l’expulsion de familles palestiniennes de ce quartier arabe de Jérusalem par des colons. Je n’ai pas tout de suite compris de quoi il s’agissait. En 1948, dans le cadre de la création des deux États, des juifs avaient dû quitter ces immeubles qui se trouvaient dans la partie palestinienne. La Jordanie qui était alors l’État souverain sur ces lieux n’a pas trouvé utile de donner de titre de propriété aux palestiniens à qui ont avait donné ces biens immobiliers, contrairement à l’État d’Israël qui a tout de suite donné des titres aux juifs qui se sont emparés des biens arabes.

Cette situation révèle donc une asymétrie absolue, puisque des juifs pourraient retrouver la possession de leurs biens d’avant 1948, contrairement aux palestiniens pour lesquels l’État d’Israël refuse toute réciprocité.

Eva Illouz nous dit davantage de l’évolution interne des forces politiques et de la société israélienne :

« Le cynisme meurtrier du Hamas ne saurait être minoré. Mais en tant qu’Israélienne juive, il semble plus opportun que ma réflexion se porte sur les défaillances de mon propre groupe tout en restant consciente que l’autre camp n’est pas qu’une victime innocente et angélique (à quoi j’ajouterai que l’autocritique n’est pas l’un des points forts du camp arabe).

Le lecteur européen ignore que l’extrême droite israélienne à laquelle Netanyahu s’est allié est d’une nature différente des partis habituellement ainsi qualifiés en Europe. Itamar Ben Gvir, qui dirige le parti d’extrême droite Otzma Yehudit (Force juive), avait jusqu’à récemment dans sa maison un portrait de Baruch Goldstein. Baruch Goldstein était un médecin américain qui, alors qu’il vivait dans la colonie de Kiriat Arba (Hébron), a tué 29 musulmans pendant qu’ils priaient dans la grotte des patriarches. Ben-Gvir, quant à lui, est un avocat qui défend les terroristes juifs et les auteurs de crimes haineux. L’organisation Lehava, étroitement associé à ce parti, a pour mission d’empêcher les mariages interconfessionnels et le mélange des « races ».

[…] Lehava publie aussi les noms des Juifs (dans le but de leur faire honte) qui louent des appartements à des Arabes. Seule la culture du Sud profond américain du début du XXe siècle peut soutenir la comparaison avec une telle idéologie.

Netanyahu est devenu leur allié politique naturel, virant ainsi vers les formes les plus extrémistes du radicalisme de droite. Ces groupes attisent les flammes de la guerre civile en répandant le racisme au sein de la société israélienne au chant du slogan « mort aux Arabes ».

Selon Eva Illouz toute la société civile israélienne ne se trouve pas dans cette dérive mortifère :

«  Mordechai Cohen, le directeur du ministère de l’Intérieur, a publié sur sa page Facebook une vidéo rappelant au public israélien les longues et patientes années de travail que son ministère a consacrées à l’intégration des Arabes dans la société israélienne et à la création de liens profonds entre les deux populations.

Ce ne sont pas là les mots vides de sens d’un représentant de l’État. Et si ces liens sont peut-être loin d’être d’une égalité totale, ils n’en demeurent pas moins réels et puissants, et ils suggèrent qu’Israël est, à bien des égards, exemplaire en matière de fraternité entre Juifs et Arabes, une fraternité curieusement étrangère à bien d’autres pays, notamment à des nations comme la France. Les Arabes sont en effet aujourd’hui beaucoup plus intégrés à la société israélienne qu’ils ne l’étaient il y a cinquante ans (si l’on se fonde sur le nombre d’Arabes qui font des études supérieures et travaillent dans les institutions publiques, les universités et les hôpitaux).

Cette fraternité n’a fait que se renforcer avec la crise du Covid-19, durant laquelle les équipes de santé juives et arabes ont travaillé côte à côte, sans relâche, pour sauver le pays.  »

Elle rapporte l’influence néfaste de l’idéologie des colons.

« Cette coexistence est vouée à l’échec dès lors qu’elle se trouve sapée par le racisme qu’encourage activement le mélange de religion et d’ultranationalisme qui définit désormais l’idéologie des colons, laquelle se répand peu à peu dans la société israélienne. »

Et voici sa conclusion qui me semble pleine de sens :

« Les violentes émeutes de ces derniers jours indiquent qu’Israël se trouve à la croisée des chemins. Le pays doit impérativement modifier sa politique eu égard à la question palestinienne et adopter les normes internationales en matière de droits humains dans les territoires, sinon il sera obligé de durcir non seulement sa culture militaire en matière de contrôle mais aussi sa suspension des droits civiques, et l’étendre à l’intérieur de la Ligne verte. Cette dernière option ne sera pas viable. Les Arabes israéliens doivent devenir des citoyens israéliens à part entière, et cela n’est possible que si leurs frères palestiniens se voient accorder la souveraineté politique.

Israël a essayé de construire un État démocratique et juif, mais sa judéité a été détournée par l’orthodoxie religieuse et l’ultranationalisme, tous deux incompatibles avec la démocratie. Ces factions extrémistes ont placé judéité et démocratie sur des voies incompatibles – des voies aux logiques morales et politiques incommensurables qui les mènent droit à la collision. Dans le contexte d’un pays engagé dans des confrontations militaires incessantes, le puissant courant universaliste du judaïsme est passé à la trappe.

Israël peut être un exemple comme nul autre pour le monde, non seulement pour ce qui est de l’égalité formelle entre Juifs et Arabes mais aussi des liens de fraternité humaine qu’ils peuvent tisser. Ces deux peuples se ressemblent étrangement et partagent beaucoup de choses en commun. Cette fraternité n’est pas un luxe ni un souhait naïf. Elle est la condition même de la poursuite de l’existence pacifique et prospère d’Israël lui-même. »

J’ai trouvé aussi très intéressante la première partie de l’émission du « nouvel esprit public » consacré à ce sujet <Jérusalem : un déjà-vu sanglant>

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Vendredi 1er mars 2019

« Le sionisme apparaît parce qu’il y a l’antisémitisme »
Alain Dieckhoff

Tout le monde l’a compris, et le plus grand nombre est d’accord l’«antisémitisme» est inacceptable, indéfendable, condamnable.

Mais l’«antisionisme» serait acceptable pour certains, alors que d’autres voudraient l’assimiler à de l’antisémitisme.

Il semblerait que dans l’esprit de certains l’«antisionisme» constitue simplement un synonyme de « critique du gouvernement de l’État d’Israël » pour d’autres, plus radicaux « une critique de l’État d’Israël » et dans son stade ultime « la remise en cause de l’existence de l’État d’Israël ».

Mais sait-on bien de quoi on parle ? Parce que pour adhérer à l’antisionisme, il faut comprendre et savoir ce qu’est le « sionisme ».

Albert Camus a écrit : «Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde.»

Dans sionisme, la racine est « Sion »

Et « Sion » est le nom d’une colline de Jérusalem. C’est aussi le symbole de Jérusalem; le symbole du pays des Hébreux, ou du peuple lui-même. Dans le livre d’Isaïe le peuple Hébreux est nommé : « la fille de Sion ».

Mais quand on parle de « sionisme » on parle d’un concept qui a émergé dans la communauté juive ashkénaze, c’est-à-dire les juifs d’Europe.

Il y eut un premier mouvement qui est né en Russie « Les amants de Sion ». Il est fondé en Russie en 1881 par un médecin d’Odessa, Léon Pinsker et Moïse Lilienblum, à la suite de pogroms antisémites en Russie qui découragent la volonté d’assimilation des juifs et engendrent la naissance d’un mouvement populaire, organisé autour de l’idée du « retour vers Sion ». Le Conseil Odessa, créé par les amants de Sion est dissout en 1919 par les Bolchéviques.

Léon Pinsker (1821-1891) développait l’idée de créer un État indépendant pour protéger les juifs, mais pas forcément en Palestine, il envisageait une autre option en Amérique du Nord.

Des projets et idées similaires avaient précédemment déjà été évoqués à titre individuel, par d’autres personnalités juives mais les Amants de Sion sont par contre le premier mouvement populaire de grande envergure à développer l’idée de créer un territoire spécifique pour les juifs, territoire qui ne serait pas forcément un État mais pourrait être une province autonome avec de large prérogative à l’intérieur d’un État.

Au sens stricto le mot « sionisme » semble être apparu pour la première fois en Allemagne. En Allemagne le terme est « Zionismus » et il est utilisé le 16 mai 1890, sous la plume d’un publiciste juif de langue allemande, Nathan Birnbaum (1864-1937). En 1893, Nathan Birnbaum signe un article intitulé « Les principes du sionisme ». Max Bodenheimer publie un texte qui s’ouvre sur ces mots : « Sionistes de tous les pays, unissez-vous ! ».

Mais pour l’Histoire, le « sionisme » c’est Theodor Herzl.

Pour être plus savant je vous donne un lien vers une vidéo dans laquelle : <12 mars 2018, la journaliste Valérie Perez reçoit Denis Charbit> pour parler de Theodor Herzl. Denis Charbit est universitaire à l’Open University de Tel-Aviv et a écrit un livre « Retour à Altneuland: la traversée des utopies sionistes »

Et une émission plus récente de France Culture, le 21 février 2019 : « Antisionisme de quoi parle t’on ». Guillaume Erner avait invité Alain Dieckhoff, directeur de recherche au CNRS.

La première émission parle essentiellement d’Histoire, du sionisme et de Theodor Herzl, la seconde parle d’actualité et d’antisionisme.

Et dans cette seconde émission, Alain Diechkoff dit une chose évidente :

« Le sionisme apparaît parce qu’il y a l’antisémitisme »

C’est cela, la triste réalité historique.

C’est à cause de ces terribles pogroms en Russie et dans les pays slaves qu’a émergé l’idée de la nécessité d’un État protecteur des juifs.

Dans les États de l’Europe de l’ouest, la grande masse des élites juives étaient pour l’assimilation au sein des nations chrétiennes. D’ailleurs dans l’essor de la pensée des lumières beaucoup pensaient qu’à terme les sociétés sortiraient des religions.

Theodor Herzl étaient dans cette logique. Il n’a d’ailleurs pas fait circoncire son fils et Denis Charbit nous apprend qu’il avait eu l’idée de demander au Pape de venir dans une grande cérémonie, convertir, en une fois, des milliers de juifs qui acceptaient de quitter leur religion pour rentrer dans la religion dominante.

Theodor Herzl est né dans l’empire austro hongrois en 1860, dans le quartier juif de Budapest, capitale du Royaume de Hongrie. Wikipedia explique que cette ville abrite une population juive nombreuse, qui représente 20 % de ses habitants, aussi certains nommaient-ils la ville « Judapest ».

Theodor Herzl vit dans une famille bourgeoise germanophone. Son père, issu de l’immigration de la partie orientale de l’empire austro-hongrois, est déjà un partisan de l’assimilation des Juifs au sein de leurs terres d’accueil.

Après des études de Droit, Herzl essaye de devenir dramaturge et commence par écrire des pièces de théâtre, mais pour assurer un salaire régulier il devient journaliste à Vienne.

Il devient par la suite correspondant du journal Die Neue Freie Presse à Paris.

Et Wikipedia nous rapporte qu’en faisant le compte-rendu pour son journal d’une pièce d’Alexandre Dumas fils, « La Femme de Claude », où un certain Daniel encourageait les Juifs à revenir à la terre de leurs ancêtres, il écrit :

« Le bon Juif Daniel veut retrouver sa patrie perdue et réunir à nouveau ses frères dispersés. Mais sincèrement un tel Juif doit savoir qu’il ne rendrait guère service aux siens en leur rendant leur patrie historique. Et si un jour les Juifs y retournaient, ils s’apercevraient dès le lendemain qu’ils n’ont pas grand’chose à mettre en commun. Ils sont enracinés depuis de longs siècles en des patries nouvelles, dénationalisés, différenciés, et le peu de ressemblance qui les distingue encore ne tient qu’à l’oppression que partout ils ont dû subir. »

Pas la moindre de trace de sionisme.

Mais il va aussi couvrir l’affaire Dreyfus.

Lors de cette affaire, dans les articles qu’il écrit il considère comme acquis que le capitaine Dreyfus est coupable de trahison. Un de ses articles commencent par cette phrase : « Mais pourquoi a-t-il trahi ? »

Ce n’est donc pas l’histoire d’une injustice qu’il raconte.

Mais ce qui va le marquer, c’est la réaction d’une foule française qui va crier de manière haineuse « Morts aux juifs ». Non pas mort au capitaine Dreyfus, qui nous le savons aujourd’hui était innocent ce que ne savait pas Herzl à ce moment.

Mais, mort à tous les juifs !

La France était censée être immunisée contre l’antisémitisme. C’était le pays qui, le premier au monde, avait donné une totale égalité civique aux Juifs, en 1791. C’était aussi le pays qui avait donné la nationalité française aux Juifs indigènes d’Algérie en 1871 (décret Crémieux). Elle représentait la modernité occidentale en marche vers plus d’égalité. Que ce pays précisément soit secoué d’une telle haine des juifs, l’ébranle au plus profond de lui-même.

Les juifs seront-ils toujours rejetés ? Toujours haïs ?

Parallèlement, dans son pays l’empereur François-Joseph dans un objectif de démocratisation mesurée décide de permettre des élections locales libres. C’est-à-dire il permet aux habitants de son empire d’élire des bourgmestres de ville. Et la population de Vienne, va librement élire un maire professant essentiellement une idéologie antisémite. C’est un autre coup dur : quand on donne la parole au peuple, il réagit comme antisémite. François Joseph écartera cet élu.

Mais Hertzl va désormais consacrer les 9 années qui lui restent à vivre, il mourra à 44 ans en 1904, à œuvrer à la création d’un État pour les juifs, car il ne croit plus en l’assimilation.

Il pense que si tous les juifs se retrouvent dans un État et quittent les États chrétiens européens, l’antisémitisme disparaîtra. Nous savons depuis que c’est faux, il arrive même que des États sans juifs soient antisémites.

Il semble cependant que si c’est le récit le plus usité, alimenté par Herzl lui-même qui dit que c’est l’affaire Dreyfus qui l’a converti au sionisme, la réalité est peut-être un peu différente. L’affaire Dreyfus a été certainement un « coup de tonnerre » pour Théodore Herzl. Cependant, Claude Klein, dans son ouvrage intitulé Essai sur le sionisme, estime que « la réalité est évidemment bien loin de cette fiction ». Selon ce dernier, la question juive et l’antisémitisme n’ont jamais cessé de hanter Théodore Herzl. Mais c’est bien l’antisémitisme qui a fait le sionisme.

Profondément marqué par la culture européenne il veut créer un État de culture européenne, un État avec tous les bons éléments des États européens mais sans les tares de l’Europe, sans ses déficiences.

Il ne croît pas que dans cet État on puisse parler hébreu, autrement que lors des cérémonies religieuses. Il dit :

« On ne peut même pas acheter un billet de train en hébreux ».

En 1896, il écrit un livre dans lequel il esquisse ce que pourrait être l’Etat juif : « Der Judenstaat. »

Et, en 1897, Herzl réunit à Bâle, avec l’aide de Max Nordau, le premier congrès sioniste. Les assises de l’Organisation sioniste mondiale sont établies et il la présidera jusqu’à sa mort, en 1904.

Il dira : « Ce jour-là j’ai créé l’État des juifs »

Dans son journal au lendemain du congrès de Bâle.

« Aujourd’hui quand je parle d’un État juif on rit de moi, dans 50 ans on me trouvera tout à fait sérieux »

50 ans après, le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations unies vote la création d’un État juif.

Et quand Ben Gourion proclame la naissance de l’État d’Israël, il le fait sous un immense portrait de Theodor Hertzl.


Hertzl a écrit deux livres, le premier « L’État des juifs » déjà cité et un second qui était un roman de fiction qu’il a appelé : « Altneuland » qu’on peut traduire en français par : Le Pays ancien-nouveau

En exergue de ce roman il a écrit :

« Si vous le voulez, ce ne sera pas un rêve »

Nahum Sokolow (1859-1936) qui fut un de ses successeurs à la tête de l’Organisation Sioniste Mondiale, traduisit ce livre en hébreu sous le titre de « Tel Aviv » (Le Mont du Printemps).

Et quand les juifs de Palestine construisirent la première grande ville d’implantation, ils lui donnèrent le nom de « Tel Aviv »

C’est l’antisémitisme européen qui a conduit à l’émergence du sionisme.

Mais Theodor Hertzl qui voulait : « Pour un peuple sans terre, une terre sans peuple » a conduit à créer un État juif sur une terre qui avait déjà un peuple.

Pourtant d’autres solutions avaient été évoquées :

Celle qui avait été le plus loin est le « Plan Ouganda » :

1903 fut l’année des terribles pogroms de Kichinev. Ceux-ci seront suivis par une série d’autres pogroms jusqu’en 1906. L’émotion dans le monde occidental était grande, tant les pogroms ont été sanglants. Cette émotion est une des raisons pour lesquelles le gouvernement britannique, en particulier Joseph Chamberlain, secrétaire aux colonies propose en 1903 à Theodor Herzl de donner à l’Organisation Sioniste Mondial une partie de l’Ouganda de l’époque (dans l’actuel Kenya), pour y créer un « Foyer national juif ».

Hostile à l’abandon de la Palestine, le sixième congrès sioniste de 1903 se divisa fortement. Une commission est cependant envoyée sur place.

Mais, en 1905, le septième congrès sioniste se tint à Bâle. Il y fut décidé de repousser définitivement la proposition de l’Ouganda, ainsi que toute alternative à la Palestine.

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lundi 19 octobre 2015

«Quand Israël naît […] en 1948, […] Pour le monde Arabe, c’est le dernier phénomène colonial de l’histoire européenne qui est anachronique. Pour les Israéliens, c’est avec quelque retard, le dernier phénomène national de l’histoire européenne du 19ème siècle.[…] Et en fait ce conflit de calendrier n’a jamais été surmonté.»
Dominique Moïsi

La violence n’a jamais cessé sur la terre de Palestine et d’Israël, mais <Une nouvelle étape a été franchie et on parle désormais d’une intifada des couteaux>

Samedi <Les Echos> comptaient 41 palestiniens et 7 israéliens tués en deux semaines.

Et hier dimanche, un attentat s’est produit à la gare des autobus de Beer Sheva, dans le sud d’Israël. Deux Palestiniens ont tiré dans la foule et poignardé plusieurs personnes, avant que les forces de sécurité ne répliquent.

Et en France, nous se sommes informés qu’en partie des faits de violence qui se déroulent sur ces lieux.

Avant ces faits, le conflit israélo palestinien était sorti des radars, on ne parlait plus que de la Syrie, de l’Irak et même du Yemen mais plus de la Palestine. Obama dans son discours à l’ONU, il y a quelques jours, n’a pas eu un mot pour la Palestine. Mahmoud Abbas a dit cette même tribune de l’ONU que les accords d’Oslo étaient enterrés et qu’il faudrait peut-être dissoudre l’Autorité Palestinienne.

Comment mieux dire qu’il n’y croit plus.

Depuis l’assassinat de Rabin, il n’y a plus d’homme d’Etat capable du côté israélien de mener son peuple à la paix et il faut bien le reconnaître il n’y a pas non plus d’homme d’Etat de ce niveau du côté palestinien.

Il y a quelques jours j’avais emprunté un mot du jour à une parole de Dominique Moïsi sur la guerre en Syrie et je fais à nouveau appel à lui aujourd’hui.

Il a, en effet, été l’invité de l’émission de Nicolas Demorand du 14 octobre 2015 :

Israël-Palestine : Vers une troisième Intifada ? avec Dominique Moïsi 14 octobre 2015 Entretien avec Nicolas Demorand

Dominique Moïsi est juif, il a cru en l’Etat d’Israël et il a cru en la paix. Et aujourd’hui au bout des désillusions il se pose des questions existentielles et analyse les regards croisés et hostiles de ces deux peuples à l’aune de l’Histoire.

Dans le début l’émission, il fait d’abord parler son émotion et son désespoir en parlant de «la chronique d’une catastrophe annoncée»

Et il ajoute :

«Je ne suis pas surpris. On s’attendait à une telle explosion. Personne ne s’intéresse plus au problème israélo-palestinien. Les jeunes palestiniens en particulier ceux de Jérusalem ne croient plus à la politique, ni au Hamas, ni à l’autorité palestinienne. C’est une manière à eux de se rappeler à l’actualité. Il y a eu des événements qui ont attisé le ressentiment d’abord le bébé de 19 mois brûlé vif dans sa maison enflammée par des colons israéliens. Ses deux parents sont morts aussi. Et puis il y a ces rumeurs sur le changement de statut du Dôme du rocher, de la mosquée Al Aqsar. Cela ramène le conflit à un niveau qu’on avait oublié et qui le rend encore plus impossible à régler : c’est un conflit religieux.»

Demorand lui dit alors :  «Je vous sens accablé»

Moisi :

« Oui ! Oui ! Il y a quelque chose de désespérant pour quelqu’un qui comme moi a cru profondément aux accords d’Oslo.

J’ai un souvenir : J’ai passé une nuit à boire du champagne avec le poète palestinien Mahmoud Darwich. Nous nous sommes embrassés. Nous avons cru qu’entre juifs et palestiniens, le problème pouvait être dépassé.

Et là…

Est-ce que nous avons rêvé ? Depuis le début ? Depuis l’assassinat d’Yitzhak Rabin ? Est-ce que nous avons continué à rêver en pensant que la communauté internationale et les Etats-Unis allaient imposer une solution ?

Aujourd’hui, il y a un sentiment de vide absolu. Il n’y a pas de petite lumière au fond du tunnel.

Il n’y a pas de pression qui va venir de l’extérieur.

Chacun est laissé, seul :

– face à sa peur du changement, sa volonté de préserver à tout prix le statu quo du côté israélien;

– face à son absence totale d’espoir du côté palestinien.»

Et il décrit « Une glaciation longue entre les deux parties, avec des murs des check points partout transformant Jérusalem en Berlin de la guerre froide.» Cela lui semble l’hypothèse la plus vraisemblable.

Il envisage ensuite le conflit du point de vue des Arabes et les solutions qui ont été envisagées :

« Une grande partie des palestiniens et des arabes rêvent que le problème israélien va disparaître. Qu’en gros les israéliens sont en Palestine, comme les Français étaient en Algérie et qu’à un moment donné, ils se retireront. Dans une partie du discours arabe : Ce sont les croisés du Royaume de Jérusalem ils vont partir et le sable du désert recouvrira leurs constructions arrogantes et intolérantes.

Mais ce n’est pas la réalité et le rapport des forces sur le plan militaire joue toujours majoritairement en faveur des israéliens.

Plus personne ne croit à la solution des deux Etats qui étaient la seule légitime et qui faisait sens.

Un Etat binational semble aussi totalement hors de portée étant donné les haines actuelles.

Certains imaginent une 3ème solution d’une confédération avec un 3ème acteur qui est la Jordanie. Cette confédération pourrait se réunir sur l’Economie. Mais cette solution ne semble pas non plus viable dans le contexte actuel.»

Il n’existe donc pas de solution aux yeux de Moisi.

Et c’est alors qu’il plonge dans le cœur du problème et dévoile une question existentielle. Voici la suite de ce dialogue entre Nicolas Demorand (ND) et Dominique Moïsi (DM)

« DM – Pas de solutions, c’est un échec absolu et qui bien entendu vous amène à vous poser des questions fondamentales, existentielles.

ND – Lesquelles ?

DM – Et si c’était une fausse bonne idée que d’avoir créé l’état d’Israël, dès le départ ?

ND – Vous dîtes cela vous ?

DM – Je dis qu’en réalité, c’est une question que les historiens se poseront. Parce qu’il y a un conflit de calendrier fondamental.

Quand Israël naît sur les fonts baptismaux de la communauté internationale en 1948, c’est au moment où commence le grand mouvement de décolonisation dans le monde. Pour le monde Arabe, c’est le dernier phénomène colonial de l’histoire européenne qui est anachronique.

Pour les Israéliens, c’est avec quelque retard, le dernier phénomène national de l’histoire européenne du 19ème siècle. Les Allemands ont un état, les Italiens ont un état.

Pourquoi pas les juifs ?

Et en fait ce conflit de calendrier n’a jamais été surmonté.

Dès le début, une immense majorité des arabes n’accepte pas que l’Europe paye ses péchés sur le dos des Palestiniens.

Et une grande partie des Israéliens a du mal à intégrer le fait qu’en réalité, il y a les Palestiniens sur ces territoires. (…) »

En 1950, Einstein publia la déclaration suivante sur la question du sionisme. Ce discours avait été initialement prononcé devant la National Labor Committee for Palestine (Commission national de travail pour la Palestine), à New York, le 17 avril 1938, mais Einstein l’avait ressortie en 1950, après la création de l’État d’Israël :

« Je verrais bien davantage un arrangement raisonnable avec les Arabes, sur base d’une coexistence pacifique, que la création d’un État juif. En dehors des considérations pratiques, ma connaissance de la nature essentielle du judaïsme résiste à l’idée d’un État juif avec des frontières, une armée et un projet de pouvoir temporel, aussi modeste soit-il. J’appréhende les dégâts internes que pourra provoquer le judaïsme – particulièrement à partir du développement d’un nationalisme étroit dans nos propres rangs et contre lequel il nous a déjà fallu nous battre sans État juif. »

Je finirais par Arun Gandhi, petit fils du Mahatma Gandhi qui vient de publier un livre «Mon Grand Père était Gandhi» et il dit :  «Pour obtenir la paix, le pardon reste incontournable. Si nous ne pardonnons pas, nous ne grandirons pas».

Mais le pardon semble si loin.

Même si je comprends la peur et l’angoisse des juifs israéliens devant cette situation, il n’est pas possible de ne pas répéter que s’il faut être deux pour faire la paix, la plus grande part de la responsabilité est du côté d’Israël notamment par sa politique de colonisation insensée et intolérante qui rend impossible les deux États, seule solution légitime dit Moïsi.

L’existence de l’État d’Israël peut-elle rester légitime, en l’absence de son alter ego Palestinien ?

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