Mercredi 17 janvier 2018

« Toujours pas de mot du jour aujourd’hui, mais vous pouvez en lire 1000 déjà écrits Exemple : Ne renoncez à rien ! surtout pas aux amis, surtout pas à la vie.»
L’après mille 3

Les mille mots du jour écrits depuis octobre 2012 sont répertoriés (exergue et auteur) sur cette page : <Liste des mots>

Parmi ces mille, je voudrai revenir sur celui du 23 novembre 2015, il portait le numéro 601.

Le 13 novembre 2015, de terribles actes terroristes commis par des fous de Dieu se réclamant de l’Islam ont tué 130 personnes et ont en blessé 413 (dont 99 grièvements). Des français et des étrangers présents à Paris, dans la salle de spectacle du Bataclan ou assis à des terrasses de café ou se trouvant au stade de France ont été la cible des obscurantistes qui veulent lutter contre la musique, la joie de vivre, la mixité, la liberté de penser, de croire ou non.

Le vendredi 20 novembre 2015, une semaine plus tard, à 8:58, sur France Inter, à la fin du 7-9, Patrick Cohen donne la parole à François Morel, sous les regards pleins d’émotions de Bernard Pivot, Pierre Arditi et Jérôme Garcin.

La musique de la romance sans parole opus 67 N° 4, appelée « la fileuse », de Mendelssohn démarre.

Et François Morel se lance dans une harangue, prononcée d’une seule traite, presque sans reprendre son souffle :

«Ne renoncez à rien !

Surtout pas au théâtre, aux terrasses de café, à la musique, à l’amitié, au vin rouge, aux feuilles de menthe et aux citrons verts dans les mojitos, aux promenades dans Paris, aux boutiques, aux illuminations de Noël, aux marronniers du boulevard Arago, aux librairies, aux cinémas, aux gâteaux d’anniversaire.

Ne renoncez à rien !

Surtout pas au Chablis, surtout pas au Reuilly, surtout pas à l’esprit. Ne renoncez à rien ! Ni aux ponts de Paris, ni à la Tour Eiffel, ni Place de la République à la statue de Marianne […].

Ne renoncez à rien !

Surtout pas à Paris, surtout pas aux titis, surtout pas à Bercy.

Ne renoncez à rien !

Ni à Gavroche, ni à Voltaire, ni à Rousseau, ni aux oiseaux, ni aux ruisseaux, ni à Nanterre, ni à Hugo.

Ne renoncez à rien !

Ni aux soleils couchants, ni aux collines désertes, ni aux forêts profondes, ni aux chansons de Barbara, ni à la foule des grands jours, ni à l’affluence des jours de fête, au Baiser de l’Hôtel de Ville, aux étreintes sous les portes cochères, ni aux enfants qui jouent sur les trottoirs, ni aux cyclistes, ni aux cavistes, ni aux pianistes.

Ne renoncez à rien !

Surtout pas aux envies, surtout pas aux lubies, surtout pas aux folies, ni aux masques, ni aux plumes, ni aux frasques, ni aux prunes, ni aux fiasques, ni aux brunes, ni aux écrivains, ni aux éclats de voix, ni aux éclats de rires, ni aux engueulades, ni aux files d’attente, ni aux salles clairsemées, ni aux filles dévêtues, ni aux garçons poilus, ni à la révolte, ni à la joie d’être ensemble, ni au bonheur de partager, au plaisir d’aimer, ni à la légèreté, ni à l’insouciance, ni à la jeunesse, ni à la liberté.

Ne renoncez à rien ! Ne renoncez à rien ! Ne renoncez à rien ! Ne renoncez à rien !
Surtout pas à Paris, surtout pas aux amis, surtout pas à la vie.»

Dans ce cas lire est bien mais écouter François Morel est encore mieux : http://www.franceinter.fr/emission-le-billet-de-francois-morel-ne-renoncer-a-rien

Si vous voulez retrouver le mot du jour initial : le mot du jour du 23 novembre 2015


<Article sans numéro>

Mardi 16 janvier 2018

« Encore pas de mot du jour aujourd’hui, mais vous pouvez en lire 1000 déjà écrits
Exemple : Je me suis concentré sur la vie, sur continuer à croitre, à grandir »
L’après mille 2

Les mille mots du jour écrits depuis octobre 2012 sont répertoriés (exergue et auteur) sur cette page : <Liste des mots>

Je vous invite à dérouler rapidement cette page et de vous arrêter sur un ou deux mots qui vous interpellent et de cliquer sur la date de ce mot. Ce qui vous renverra vers l’article.

Et n’hésitez pas à laisser un commentaire pour approfondir, nuancer, critiquer bref enrichir l’article.

Aujourd’hui cependant je souhaite rappeler le mot du jour du 7 mai 2014 , il portait le numéro 282.

J’avais entendu une émission sur France Inter qui avait invité un homme Damien Echols.

Il avait été accusé par erreur du meurtre de trois enfants aux Etats-Unis, alors qu’il avait 18 ans.

Il avait été condamné à mort et avait passé 18 ans dans le couloir de la mort.

Les faits remontaient à 1993 : Trois enfants de huit ans avaient été retrouvés sauvagement assassinés à West Memphis, dans l’Etat de l’Arkansas. Très vite, trois jeunes marginaux sont soupçonnés : Jessie Misskelley Jr, Jason Baldwin et Damien Echols.

Au terme d’un procès arbitraire qui accumule faux témoignages et preuves falsifiées, ces trois jeunes sont lourdement condamnés : Misskelley et Baldwin à la prison à perpétuité, Echols à la peine capitale.

Finalement, en 2011, à la faveur d’une longue campagne de soutien (des personnalités comme Johnny Depp y ont participé), la justice accepte de rouvrir le dossier et examine de nouvelles preuves scientifiques. Les trois hommes obtiennent leur libération mais ne sont pas totalement innocentés. Ils restent coupables aux yeux de la justice.

Pour être libéré, il fallait qu’ils ne puissent attaquer l’Etat qui les avait condamné parce que sinon il pouvait réclamer 60 000 000 de dollars de dommages-intérêts. Alors ils ont dû conclure un accord avec la justice qui acceptait de les libérer mais sans reconnaître leur innocence. S’ils avaient voulu faire reconnaître leur innocence ils auraient dû se lancer dans une longue procédure contre l’Etat et continuer à rester en prison pendant ce temps.

Damien Echols a raconté son cauchemar dans un livre, « La vie après la mort » (éditions Ring), traduit en français.

La journaliste avait posé cette question :

« Quand on est condamné à mort, est ce qu’on vit chaque jour comme le dernier ? »

Et Damien Echols avait répondu :

« Je me suis concentré sur la vie, sur continuer à croitre, à grandir, intellectuellement, émotionnellement, spirituellement, j’ai essayé de continuer à aller de l’avant, là où je pouvais. »

Qu’un homme injustement condamné, risquant l’exécution capitale, puisse exprimer une telle force positive et humaniste me semble admirable.

Depuis j’ai trouvé un autre entretien, vidéo cette fois, sur TV5MONDE où Damien Echols s’entretient avec Patrick Simonin

Si vous voulez retrouver le mot du jour initial : le mot du jour du 7 mai 2014


<Article sans numéro>

Lundi 15 janvier 2018

« Pas de mot du jour aujourd’hui, mais vous pouvez en lire 1000 déjà écrits »
L’après mille 1

Les mille mots du jour écrits depuis octobre 2012 sont répertoriés (exergue et auteur) sur cette page : <Liste des mots>

Je vous invite à dérouler rapidement cette page et de vous arrêter sur un ou deux mots qui vous interpellent et de cliquer sur la date de ce mot. Ce qui vous renverra vers l’article.

Et n’hésitez pas à laisser un commentaire pour approfondir, nuancer, critiquer bref enrichir l’article.

Merci par avance.

<Article sans numéro>


Vendredi 12 janvier 2018

« Von Herzen – möge es wieder zu Herzen gehen
Venue du cœur puisse t’elle retrouver le chemin du cœur »
Ludwig van Beethoven, phrase mise en exergue de sa « Missa Solemnis »

A plusieurs reprises des collègues et amis, que j’avais connus lors de mon passage dans l’administration centrale de la direction générale des impôts à Bercy entre 1987 et 2002, m’ont écrit pour exprimer un avis positif sur la qualité globale des mots du jour. Mais ils ajoutaient immédiatement une nuance en la justifiant par la crainte que « je prenne la grosse tête ».

Il me semble que cette crainte est injustifiée : tous mes butinages, mes lectures, mes découvertes que je tente de présenter et d’expliquer ne me montre qu’une chose : l’incommensurabilité de mon ignorance à laquelle j’ajouterai la vanité d’essayer de comprendre la complexité du monde et de l’humain. Ce constat ne peut que me pousser à une très grande humilité.

J’aime pourtant l’image que donne Michel Serres pour définir le verbe vieillir : monter un escalier chaque jour pour aller vers un plus d’intelligence, de sagesse, de simplicité et de modération.

Un des mots du jour le plus porteur de sens pour moi est celui qu’a écrit Rachid Benzine : « Le contraire de la connaissance, ce n’est pas l’ignorance mais les certitudes

Je n’aime plus beaucoup mon métier. Je suppose n’être pas seul dans ce cas. J’essaye pourtant de l’accomplir au mieux par devoir et par éthique. Il puise beaucoup de mon énergie et me donne assez peu en retour. Je suis injuste, il me donne un revenu confortable qui me permet de vivre matériellement sans peur du lendemain et m’autorise ainsi à être libre, libre de m’intéresser à bien des choses qui dépassent les contingences matérielles.

Mais du point de vue intellectuel le métier que j’exerce occupe ma journée mais ne la remplit pas.

Ma quête de mots du jour la remplit.

Depuis que jeune, il m’arrivait de comprendre les mathématiques un peu plus vite que certains camarades, j’ai appris que dans l’acte d’explication celui qui en profitait le plus était celui qui expliquait. Confucius aurait dit : «Ce qu’on me dit je l’oublie, ce que je vois je m’en souviens, ce que je fais je le sais.»

Lire, écouter, regarder permet d’approcher une connaissance, mais ce qui permet de l’approfondir est l’acte de vouloir l’expliquer donc écrire. Car écrire demande d’interroger, de poser questions, d’éclairer des points obscurs ou d’avouer qu’on ne comprend pas. Mais s’avouer à soi-même qu’on ne comprend pas accroit paradoxalement la connaissance contrairement aux certitudes pour revenir à cette lumineuse phrase de Rachid Benzine.

Récemment j’ai entendu Hubert Reeves développer le raisonnement suivant : Nous pouvons rationnellement penser qu’un chat comprend moins de choses qu’un humain et qu’il existe donc une limite à sa compréhension. Cet exemple doit nous pousser, nous autres humains de l’espèce homo sapiens, d’admettre qu’il existe des choses que nous ne pouvons pas comprendre et que notre intelligence connaît des limites.

L’homme augmenté cher aux transhumanistes, s’il existe un jour, aura aussi ses limites, peut-être pas les mêmes.

Mais il fallait trouver un exergue à ce 1000ème mot du jour.

Dans notre vie nous rencontrons des personnes, des lieux, des œuvres de l’esprit et aussi des mots.

Parfois, on se souvient de la première rencontre avec un mot. C’est le cas pour moi avec le mot « exergue » qui rappelons le, signifie selon Le Larousse : « Inscription placée en tête d’un ouvrage » mais le CNRS dans son outil lexical en ligne donne une définition plus précise : « Formule, pensée, citation placée en tête d’un écrit pour en résumer le sens, l’esprit, la portée, ou inscription placée sur un objet quelconque à titre de devise ou de légende ».

Ma première rencontre avec ce mot a eu lieu lors de la lecture d’un livret d’un coffret microsillon et je peux encore citer de mémoire cette rencontre qui a eu lieu il y a environ 45 ans :

« Venue du cœur, puisse t’elle retrouver le chemin du cœur » c’est l’exergue que Ludwig van Beethoven a mis en marge de sa partition de sa Missa Solemnis dont il disait qu’elle était son œuvre la plus accomplie.

Sur internet, j’ai d’ailleurs pu trouver une reproduction de la page de la partition annotée de la main de Beethoven. En haut de la page, comme il s’agit du Kyrie, c’est le tout début de la partition. Sur cette reproduction, j’ai réécrit en rouge lisible en renvoyant vers l’écriture de Beethoven.

C’est donc un juste retour des choses que de mettre en exergue, la phrase qui m’a appris ce qu’était un exergue.

Mais il y a une deuxième raison.

J’ai placé ce millième mot du jour dans l’univers de la pensée complexe, de l’effort de comprendre, du travail de l’intelligence et de l’approfondissement.

Or, si en effet, la Missa Solemnis est une des œuvres les plus achevées de Beethoven et de la musique occidentale, c’est une œuvre difficile d’accès.

Si vous avez du mal avec la musique classique, ce n’est certainement avec la Missa Solemnis qu’il faut commencer.

Commencez avec les quatre saisons de Vivaldi qui est un authentique chef d’œuvre, la flute enchantée de Mozart, le concerto de violon de Beethoven, pas avec la Missa Solemnis.

La Missa Solemnis est exigeante, il faut être prêt à affronter la complexité et l’âpreté de son écriture pour en tirer la beauté immatérielle et extatique qu’elle révèle.

Et il y a une troisième raison.

Un des mots du jour récent nous apprenait que nous possédions en réalité trois cerveaux : l’organe qui porte ce nom, les intestins et le cœur.

J’écrivais que pour le cœur, la question restait ouverte. Mais acceptons cette hypothèse que nous agissons aussi par ce que le cœur nous ordonne.

Notre intuition, notre expérience nous pousse à croire que le cœur l’emporte parfois sur la raison.

Alors dans un monde où l’intelligence artificielle a vocation à devenir de plus en plus omniscient, certains prédisent même qu’elle va supplanter l’intelligence humaine, nous gardons, nous autre homo sapiens non augmenté, ce privilège sur la machine de savoir penser avec le cœur.

Je pense qu’il n’est pas difficile de trouver dans les 999 mots du jour précédents, un certain nombre qui sont le fruit de l’intelligence du cœur.

Et je crois plus généralement que quasi dans chacun d’entre eux, il y a une part plus ou moins importante de l’intelligence du cœur.

C’est pourquoi, écrire pour ce millième mot du jour : « Venu du cœur, puisse t’il retrouver le chemin du cœur » me semble une expression adaptée à cette circonstance.

J’avais écrit un mot du jour qui avait fait réagir : « L’homme médiocre parle des personnes, l’homme moyen parle des faits, l’homme de culture parle des idées ». Mais j’avais reconnu les limites et l’incomplétude de cette affirmation lors du mot du jour hommage à Barbara : en écrivant : Barbara me rappelle que j’ai oublié le plus l’important : « L’homme de cœur et en l’occurrence la femme de cœur parle de la vie et de l’amour. »

 

Il est d’usage quand je parle d’une œuvre musicale de donner des liens ou des indications discographiques. Si je ne le fais pas, je suis d’ailleurs rappelé à l’ordre pour que je m’exécute.

Peut-être que le meilleur moyen d’entrer dans cette œuvre se trouve dans l’Agnus Dei dont Beethoven a confié l’introduction à la voix de basse dans une atmosphère de grande profondeur. Vous trouverez <ICI> cette partie de la messe chantée par Gérald Finley, en 2012, au Concertgebouw d’Amsterdam sous la direction inspirée de Nikolaus Harnoncourt.

Pour une interprétation complète de l’œuvre, vous trouverez <ICI> dans un autre haut lieu de la musique classique européenne, à Dresde, avec l’orchestre de la Staatskapelle de Dresde une interprétation dirigée par Christian Thielemann.

Si votre curiosité vous pousse plus loin, je peux vous donner la version audio qui depuis sa sortie fait l’unanimité :

La version d’Otto Klemperer enregistrée en 1966


Mais j’ai un faible pour une version plus récente de Philippe Herreweghe paru en 2012


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<1000>

Jeudi 11 janvier 2018

« Les trois filtres de Socrate »
Attribué à Socrate ou à la sagesse Soufi

On trouve sur internet et dans beaucoup de livres cette histoire :

Un homme vient voir Socrate et veut impatiemment lui rapporter une nouvelle sur un de ses amis. Alors Socrate, l’interrompt et lui demande s’il a passé cette information par les trois filtres. Dans d’autres versions il est question de tamis ou de passoires en lieu et place de filtres.

Et Socrate énumère ces trois filtres :

1° Le filtre de vérité : As-tu vérifié cette information ? Es-tu certain que ce que tu vas me dire est vrai ?

2° Le filtre de l’intentionnalité : Est-ce que ce qui te pousse à me le dire est une intention bienveillante ou non ?

3° Le filtre de la nécessité ou de l’utilité : Ai je besoin de savoir cette information, est-elle utile pour moi ?

Souvent, pour le second filtre, les récits parlent du filtre de la bonté : Ce que tu veux m’apprendre sur mon ami, est-ce quelque chose de bon ?

Cette version me semble stupide. Si vous avez un ami en qui vous avez toute confiance et qu’un tiers vient vous apporter une information qui passe par les deux autres filtres, c’est-à-dire qu’elle est vraie et qu’elle m’est utile, il peut s’agir d’une information qui n’est pas « bonne » au sens qu’elle décrit cet ami sous un jour qui ne lui est pas favorable. Mais si elle m’apporte un élément qui va me conduire à interroger ma confiance envers mon ami, elle m’est éminemment utile.

Donc le second filtre est bien celui de la bienveillance de l’intentionnalité et non celui du regard candide qui ne voit que ce qui est bon.

Une connaissance d’Annie m’a parlé un jour de ces trois filtres comme ayant pour origine la sagesse soufie.

Vérification faite, aucun écrit de Platon relatant les paroles de Socrate n’évoque cette histoire et cet enseignement du philosophe. Je n’ai pas poussé très loin la vérification concernant l’origine soufie de cet enseignement.

Me voilà bien embarrassé puisque je me trouve confronté à un acte contradictoire ou paradoxal :

D’une part je prétends que pour donner une information il faut d’abord s’assurer qu’elle est vraie et ensuite j’annonce que l’information concernant les trois filtres de Socrate n’est pas vérifiée puisqu’on ne trouve pas trace d’une source fiable qui permettrait d’affirmer que Socrate a bien tenu ces propos.

Sur le fond, ce conseil est pourtant très pertinent et cela devient une facilité de langage de parler des « trois filtres attribués à Socrate ».

Et il apparaît, dans ce monde où règne les « fake news » de non seulement examiner avec circonspection les informations qui nous sont apportées, mais aussi de ne pas les colporter plus loin.

J’ai trouvé sur le site du journal des Echos, un article intéressant dont le titre est : « Comment les trois filtres de Socrate peuvent-ils nous aider à traiter l’information ? »

L’auteur développe les idées suivantes :

« La société de l’information est aussi la société de la désinformation. Dans nos vies professionnelles et personnelles avec les NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication), nous croulons sous l’information. Cela a notamment deux conséquences :

Paradoxalement, la surinformation, conduit à la sous-information, car nous n’avons pas la possibilité de tout traiter et nous laissons nécessairement filer des informations utiles, importantes parfois vitales. En fait, la surabondance informationnelle constitue un risque majeur, trop d’informations tuent l’information.

Pour les informations que nous captons, nous ne les traitons pas toujours avec suffisamment de rigueur et prenons pour argent comptant des informations non vérifiées, non analysées qualitativement… C’est sur ce deuxième aspect qualitatif que les filtres de Socrate interviennent.

Le filtre de la vérité […] On comprend aisément les risques liés à cette dérive informationnelle quand il faut prendre par exemple une décision d’investissement, de choix stratégique, ou tout simplement apporter une réponse. S’assurer de la véracité, de la fiabilité de l’information reste bien un impératif fondamental. Des questions basiques doivent être utilisées. Qui dit quoi ? Qu’est-ce qui est précisément dit, écrit, rapporté… ? D’où tient-on cette information ? Quelle est la source de cette information ? Quelle est la fiabilité de cette source ? Par quels canaux différents cette information est-elle passée ?… […]

Le filtre de l’intentionnalité […] nombre d’informations sont loin d’être neutres. Ce n’est pas forcément un hasard si une information sort à un moment donné, qu’elle soit vraie ou fausse. La récente campagne présidentielle est venue nous le rappeler avec force. Nous parlerons d’intentionnalité (plutôt que de bonté) de celui ou de ceux qui véhiculent l’information. Derrière la dimension informative apparente, l’information est aussi là pour convaincre, faire adhérer, choquer, faire agir… Elle peut donc se faire propagande, endoctrinement, manipulation, écran de fumée, dérivation… Il est donc essentiel, là aussi, de poser un certain nombre de questions. Pourquoi me communique-t-on cette information ? Pourquoi cette information sort-elle maintenant ? Qui la communique avec quelles intentions possibles ? Que vise cette information en termes d’action, de réactions… ?

Le filtre de l’utilité […] Sous réserve de la fiabilité de l’information et du décryptage de l’intentionnalité, il faut effectivement s’interroger sur l’utilité, la valeur ajoutée de cette information. À quoi cette information peut-elle nous servir ? Que nous apprend-elle que nous ne savions pas ? Que va-t-elle nous permettre de dire et/ou de faire que nous n’aurions pas fait sans elle ? Que va-t-elle nous éviter de faire que nous aurions fait ? Si nous n’en tenons pas compte quelles seront les conséquences ?… »

En conclusion, je pense que ces trois filtres attribués à Socrate sont surtout utiles pour nous quand nous voulons diffuser une nouvelle et donner une information à quelqu’un.

Albert Camus aurait dit « «  Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde »

Mais après vérification ce n’est pas ce qu’il a écrit. Dans un essai de 1944, paru dans Poésie 44, (Sur une philosophie de l’expression), Albert Camus a écrit : «  Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde. »

Je suis persuadé que transmettre des informations dont on ne sait pas si elles sont exactes à quelqu’un qui n’en a pas l’utilité, c’est ajouter au malheur de ce monde.

<999>


Mercredi 10 janvier 2018

« Les trois utopies humaines à l’œuvre aujourd’hui : La religion, l’écologie et le transhumanisme »
Réflexions personnelles après l’écoute de deux émissions de radio

Yuval Noah Harari, Régis Debray et bien d’autres nous rappellent l’importance des utopies dans les sociétés humaines.

Si on observe le monde, on constate qu’il y a essentiellement trois utopies à l’œuvre aujourd’hui :

  • La première est la plus ancienne, elle fait appel à la spiritualité, à Dieu pour espérer d’une manière ou d’une autre un monde meilleur.
  • La seconde est celle qui dresse le constat que l’évolution de notre société basée sur la croissance et le consumérisme amène à une impasse. Elle considère que la terre est pour nous le seul horizon et que pour sauver l’humanité il faut rendre l’homme compatible avec la nature.
  • La troisième ne nie pas les problèmes qui se posent aux humains mais elle prédit que les humains disposent des ressources techniques et intellectuelles pour surmonter les difficultés.

Toute classification est toujours réductrice, mais elle permet d’esquisser une réflexion. Dans chacune de ces catégories, il existe des nuances, des courants différents mais il existe quand même une homogénéité de comportement et de discours pour chacune d’entre elles.

Pour simplifier nous pourrions nommer la première Religion ; la seconde Ecologie et la troisième Transhumanisme.

Il y a certainement de nombreuses personnes qui ne se raccrochent à aucune de ces utopies et cherchent simplement à vivre au jour le jour ou même à s’amuser pour ne pas penser à toutes ces choses. L’Histoire nous apprend cependant que ce ne sont pas ces gens-là qui font l’histoire, mais bien celles et ceux qui s’inscrivent dans les utopies.

La religion est la plus ancienne de ces utopies. Nous avons du mal, en tant que français qui voyons nos églises vides et qui vivons au quotidien la sortie de la religion, à prendre cette utopie au sérieux. Je veux dire d’estimer que la religion pourra avoir une importance stratégique pour l’avenir de l’humanité. Mais nous sommes probablement assez différents du reste du monde et même des Etats-Unis où la religion reste extrêmement prégnante. Savez vous que le Vice Président des Etats-Unis Mike Pence est un créationniste, il est certain que la création de la terre a été faite comme cela a été décrit dans la bible.

Et lorsqu’un journaliste essaye de savoir ce qu’il pense de la théorie de l’évolution de Darwin, il répond :

« ça, je ne peux pas le dire. Je le Lui [Dieu] demanderai. Mais je crois en cette vérité fondamentale [de la création divine] ».

Il est vice-président des Etats-Unis !

Vous pouvez aussi vous intéresser à un autre membre du gouvernement des Etats-Unis : Ben Carson. Je ne prends qu’un de ces propos qui avait été rapporté par le Washington Post :

« En 1998, il considère, en se référant à la Bible que les pyramides d’Egypte n’ont pas été construites pour abriter les pharaons défunts mais que Joseph (de l’ancien Testament) les a bâties pour stocker du grain »

Vous trouverez aussi dans cet article des Echos des témoignages qui montrent l’influence des évangélistes auprès des Républicains et de Donald Trump, et notamment sur la décision de transférer l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem.

Parmi ces évangélistes, il en est un certain nombre qui sont millénaristes. C’est-à-dire qu’ils attendent la fin du monde et le retour du Christ. Et que dans cette perspective, accélérer la fin des temps est une solution envisageable. L’Église adventiste du septième jour fait partie de cette mouvance, or Ben Carson, cité précédemment, appartient à cette église.

J’aurais pu parler des fondamentalistes dans d’autres religions. Mais j’ai trouvé plus pertinent de mettre en avant des chrétiens dans le pays le plus riche et le plus développé de la planète. Parce que ces gens sont puissants, il y en a beaucoup qui sont riches et globalement ils ont une grande influence aux Etats-Unis.

Ces gens croient que de toute façon tout est entre les mains de Dieu, même l’apocalypse et qu’il suffit de prier pour que finalement tout se passe bien pour les croyants. Si vous avez lu les mots du jour consacrés à Luther, vous comprendrez certainement un peu mieux ces croyances.

Cette utopie peut-elle l’emporter ?

A priori non. Mais qui sait, si l’Humanité est confrontée à d’immenses problèmes écologiques dont on ne voit pas d’issue. La pensée magique peut redevenir une option pour des désespérés.

 

La seconde qu’on appellera, par facilité, utopie écologique mais qui peut mieux se définir comme la tentative de rendre compatible la vie des humains avec la nature terrestre et les ressources de notre planète. Elle n’a pas pour l’instant la puissance de la première. Cette utopie est probablement la plus raisonnable et c’est cela peut être sa faiblesse. Elle part du constat simple qu’il n’est pas possible de croitre à l’infini dans un monde fini. Elle ne croit pas à la toute-puissance de la technique humaine pour trouver des solutions à tous les problèmes qui se posent à nous. Elle ne croit pas non plus que nous pourrons nous échapper de notre vaisseau terrestre pour pouvoir continuer à vivre avec la même soif de consommation et nos besoins énergétiques sur d’autres planètes de l’univers.

Cette utopie entrainerait l’humanité vers des ruptures de comportement auxquelles aujourd’hui il ne semble pas que la plus grande part des humains soit prête. Il existe, de plus en plus nombreuses, des initiatives encourageantes. Le film « Demain » en a montré certains. Mais pour entraîner la masse est-ce suffisant ?

 

Car il y a la troisième qu’il est commode de nommer le transhumanisme. Cette utopie croit à la toute-puissance de la technique. Et si l’intelligence humaine est manifestement insuffisante, il suffit de faire appel à l’intelligence artificielle.

Si dans l’utopie écologique il s’agit de rendre l’homme compatible avec la nature, ici il s’agit, ici, de rendre l’homme compatible avec l’intelligence artificielle. Et elle promet tant de choses, une meilleure santé, la diminution du risque. Il faudra que je revienne sur ce que la Chine réalise dans le domaine de la reconnaissance faciale, le big data et la notation généralisée des citoyens. Je pourrais appeler ce futur mot du jour « l’œil de Pékin ». Cet univers de contrôle généralisé permet de vivre en bien meilleure sécurité puisque cette technique a pour ambition la prédiction des crimes et donc de les éviter. Et puis avant d’entreprendre une quelconque relation économique, sentimentale ou de travail avec quelqu’un vous pourrez d’abord consulter la base de données des chinois pour connaître la note qui lui est attribuée. C’est cela la diminution du risque !

Mais pour l’instant les plus grandes évolutions se trouvent en Californie.

Elon Musk, né en 1971, PDG de la société Tesla et maintenant de Space X. Il réalise des prodiges et pense que l’homme et l’intelligence artificielle sont en capacité de réaliser des performances que nous ne pensons pas possible aujourd’hui. Il est tout à fait d’accord avec les écologistes : la terre ne pourra bientôt plus supporter l’empreinte humaine sur ses ressources. Lui ne croit pas que l’humanité est prête à des ruptures de comportement. Il est même probable, que pour sa part il ne le souhaite pas. Donc lui envisage très sérieusement de créer les instruments, les vaisseaux et l’infrastructure permettant aux humains, à quelques humains seraient plus juste, de quitter la planète pour coloniser d’autres endroits de l’espace. Dans sa réflexion actuelle il pense possible de créer des conditions de vie sur mars.

Je ne sais pas jusqu’où ira cette utopie, mais pour les prémices elle est en marche et même dans un rythme soutenu. L’outil de contrôle général de la population chinoise a des probabilités fortes d’être mis en œuvre et assez rapidement. L’intelligence artificielle est dans une phase exponentielle de développement, le domaine de la santé et toute l’activité humaine vont être bouleversés.

Ces réflexions m’ont été inspirées par de nombreuses lectures, mais particulièrement par deux émissions :

  • La première mettait face à face Laurent Alexandre et le mathématicien Olivier Rey. Laurent Alexandre qui a écrit « La guerre des intelligences » et dont j’avais évoqué une présentation au Sénat sur l’intelligence artificielle est ambigüe. Dès qu’il s’exprime on le sent enthousiasmé par les perspectives que révèlent l’intelligence artificielle. Mais dès qu’on le contredit qu’on le pousse dans ses retranchements, il prétend qu’il n’aime pas du tout ces évolutions et qu’il s’en méfie beaucoup. La position mathématicien Olivier Rey, auteur notamment de «Quand le monde s’est fait nombre» est plus claire, il est très méfiant. Cette confrontation est très féconde. Voici cette émission : <Répliques du 23/12/2017>.
  • La seconde avait pour sujet l’exploitation spatiale, sa privatisation, le concept du « new space ». Il était question de l’accélération technique, de la rencontre entre le spatial, le numérique et l’intelligence artificielle et aussi d’Elon Musk. Voici cette émission <Affaires étrangères du 30/12/2017>

Et puis si vous voulez en savoir davantage sur l’évolution de la Chine, vous pouvez utilement lire cet article : <le big data pour noter les citoyens>

<998>

Mardi 9 janvier 2018

« Pour la première fois de l’histoire de l’aviation : le transport aérien commercial de passagers n’enregistre aucun décès à bord des avions de plus de 20 sièges en 2017. »
Aviation Safety Network, agence qui recense les accidents d’avion

Vous savez qu’il faut se méfier des chiffres, les interroger et surtout se demander s’il s’agit d’un chiffre dur ou d’un chiffre mou comme je l’avais développé lors du mot « des chiffres et des hommes ».

Cette fois nous sommes dans un chiffre dur, qui a du sens, qui est indiscutable et qui est positif.

C’est un chiffre révélé par Aviation Safety Network, l’année  2017 a été la plus sûre pour le transport aérien depuis 1946 et l’établissement de statistiques sur les accidents d’avions.

Un article du Point du 1er janvier 2018 détaille un peu cette statistique.

Quatre milliards de passagers ont voyagé en 2017.

Si des blessés sont à déplorer lors d’une centaine d’accidents en 2017, le transport aérien commercial de passagers n’enregistre aucun décès l’année passée à bord des avions de plus de vingt sièges. Une première dans l’histoire de l’aviation. […] Le premier accident avec des morts impliquant des avions assurant le transport de passagers à titre commercial et payant s’était produit le 7 avril 1922 avec la collision en vol de deux appareils assurant des liaisons entre Londres et Paris.

Depuis, la sécurité du transport aérien n’a cessé de progresser. En 2016, les statistiques montraient déjà qu’aucun accident n’avait touché les passagers des compagnies occidentales. Ce qui met en valeur l’efficacité des mesures de sécurité des vols concernant la formation des équipages, la maintenance et les opérations aériennes mises en place notamment par la Federal Aviation Administration (agence fédérale américaine) et l’Agence européenne de la sécurité aérienne.

[…] La moyenne annuelle de ces dix dernières années est de 32 accidents avec 676 morts, faisant du transport aérien le moyen de déplacement le plus sûr. Quatre milliards de passagers ont pris l’avion l’an dernier, et ce chiffre devrait doubler d’ici à 2036. En 2017, les accidents mortels ne concernent que des vols cargo ou des avions de moins de vingt sièges, comme hier encore avec le crash d’un hydravion en Australie et aussi d’un vol touristique au Costa Rica.

Comme commentaires de cet article on peut lire :

« Ne parlez pas de malheur !

Ce n’était pas la peine de communiquer sur ce statistique.
Vous allez nous porter la poisse pour les mois à venir.  »

Ou encore

« Stupidité de journaliste
Pourquoi annoncer une telle chose, vous voulez porter la guigne et nous annoncer un crash demain ?  »

Que dire de tels propos ?

Que ces gens ne savent ce qu’est un chiffre dur ?

Qu’ils sont superstitieux et peu rationnels.

Et que même s’il y avait des morts, par malheur, dans des avions commerciaux en 2018, l’aviation commerciale reste le moyen de transport le plus sûr qui existe.

Et cela parce qu’il y a beaucoup de régulation, de règles et de contrôles de sécurité.

Cela pourrait donner des idées à d’autres domaines de l’économie…

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Lundi 8 janvier 2018

« Soyez heureux ! »
Le père d’Ivan Jablonka à ses enfants

C’est une tradition. Un acte incontournable : en début d’année, il faut souhaiter les vœux.

Mais que dire ?

Comment ne pas tomber dans l’ennui, la routine ?

Vendredi, 5 janvier à 7h50, j’écoutais France Inter et Ivan Jablonka était l’invité d’Ali Baddou pour présenter son dernier livre : « En camping car »

Dans ce livre, il raconte ses vacances familiales avec ses parents en combi Volkswagen :

« Sans doute le moment de mon enfance où j’ai été le plus heureux, le plus libre ».

Quelquefois bien sûr, il y avait des disputes entre les enfants, alors :

« Notre père nous engueulait en disant : Soyez heureux ! »

« Soyez heureux ! »

Présenté comme cela, cela semble un peu banal, presque niais. Mais pour comprendre la force de cette injonction paternelle il faut aller un peu plus loin. Ivan Jablonka, né en 1973, est un historien. Il est professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris-XIII-Nord. Il est aussi écrivain et il a eu le Prix Médicis en 2016 pour « Laëtitia ou la fin des hommes ».

Mais, c’est avant tout un historien, après des études en khâgne au lycée Henri-IV, il intègre l’École normale supérieure et est reçu à l’agrégation d’histoire en élève d’Alain Corbin, l’historien de toutes les sensibilités qui avait fait l’objet du mot du jour du 30 Juin 2016 pour son livre : « Histoire du silence »

En 2012, il avait écrit un livre sur sa famille : « histoire des grands parents que je n’ai pas eus ».

Télérama résume cette histoire :

« Matès Jablonka, son grand-père, né en 1909, habita dans le shtetl de Parczew. Une bourgade de Pologne où les Juifs, isolés par l’antisémitisme, vivent, travaillent, prient. […] Matès, artisan du cuir, homme joyeux et obstiné, cherche à s’échapper des superstitions religieuses comme des persécutions en devenant communiste. Militant clandestin, il fera de la prison. Sa femme, la belle Idesa, née en 1914, sera également militante. Chacun de leur côté, en 1937 et en 1938, ils gagnent la France, le pays de la liberté pour tant d’immigrés politiques. Mais là, ils seront vite les victimes d’une législation suspicieuse. Fichés comme étrangers illégaux, ils se réfugient entre Belleville et Ménilmontant, travaillent à domicile, esquivant les contrôles d’identité et bataillant pour nourrir leurs deux enfants.

A la déclaration de guerre, une nouvelle fois humilié par la hiérarchie militaire, Matès s’engagera dans la Légion étrangère. Puis, le 25 février 1943, Matès et Idesa seront pris lors d’une rafle, expédiés à Drancy par la police française et déportés à Auschwitz II-Birkenau. Ce sont des faits avérés. Mais les rapports de police sur papier carbone suffisent-ils à résumer la vie de Matès, 1,62 m, et d’Idesa, 1,56 m ? Quels sont les pensées et les espoirs d’Idesa quand elle gagne la France ? Matès reste-t-il communiste ? Impossible de le savoir. « Faire de l’histoire, c’est prêter l’oreille à la palpitation du silence », écrit Ivan Jablonka. C’est tisser la grande Histoire avec les histoires humaines, identifier tous les leviers qui infléchissent les itinéraires personnels. »

Les grands-parents Matés et Idesa, seront assassinés à Auschwitz. Leur fils, le père d’Ivan Jablonka, celui qui quelques années plus tard engueule ses enfants par ces mots : « Soyez heureux ! », a grandi dans les institutions réservées aux orphelins de la Shoah, dirigées par la Commission centrale de l’enfance, une organisation juive communiste.

Ivan Jablonka explique :

« Pour mes parents, le bonheur était une question de vie ou de mort […] Il fallait être heureux parce que nos ancêtres ne l’avaient pas été. […] ce bonheur qu’il n’ont pas eu, ils nous l’on donné, comme leur manière de résister, «un extraordinaire cadeau», poursuit l’écrivain, qui a raconté l’histoire de ses grands-parents juifs lors de la Seconde Guerre Mondiale. »

C’est donc à l’issue d’une histoire tragique et terrible que ce père a donné à ses enfants cette clé : « Soyez heureux ! »

Existe-il un vœu finalement plus exaltant pour l’année nouvelle ? : « Soyez heureux ! »

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