Lundi 28 février 2022

« Je crois à la victoire finale des démocraties, mais à une condition c’est qu’elles le veuillent ! »
Raymond Aron cité par Nicolas Baverez

C’est incroyable et terrifiant !

Vous passez par l’Allemagne notamment par Dresde, puis vous traversez la Pologne en passant par Varsovie et vous vous trouvez sur la frontière est de l’Union européenne.

Et là se trouve un État démocratique, un peuple citoyen qui choisit librement son président et ses députés.

Bref, un pays qui nous ressemble.

Ce pays est sous les bombes, les missiles de l’armée de son voisin qui n’est pas une démocratie, tout au plus une démocrature, c’est-à-dire une dictature qui se donne l’apparence d’une démocratie.

L’Ukraine est sous les bombes et menacée par une armée d’hommes capables de tout, déguisés en civil ou en soldat ukrainien. Cette armée est accompagnée d’une milice tchétchène, c’est-à-dire des nervis qui ont prêté allégeance à Poutine quand il a détruit leur pays et rasé Grozny leur capitale., parce qu’ils préféraient être dans le camp du fort et du vainqueur. Pour lui être agréable, ils ont accepté de faire toutes les basses besognes, trop vil pour un soldat russe.

En parallèle, circule parmi eux une liste de 100 ukrainiens dont il faut se débarrasser, parmi eux bien sûr le président Volodymyr Zelensky.

Il faut s’en débarrasser, afin qu’il soit plus simple de transformer le régime de l’Ukraine, en démocrature.

Parce que c’est le premier crime de l’Ukraine ! Ce pays aux marches de l’empire russe, démontre qu’un État proche dans la culture, la religion, l’histoire du peuple russe est capable de désigner ses dirigeants après des élections libres, élections qui peuvent même renvoyer le président sortant.

Il y a bien un second crime : ce pays veut être indépendant, choisir librement ses alliances et ne pas se soumettre à son irascible et surarmé voisin, puissance impériale de toujours dont il connaît historiquement le joug et la cruauté (cf. Holodomor).

Et nous assistons à cela, nous laissons faire !

Un tyran qui utilise sa force supérieure et ses forces du mal (milice tchétchène) pour écraser et massacrer des gens qui nous ressemblent, qui sont nos amis.

Il en est même dans nos rangs qui ont, depuis des années, encensé le criminel de guerre qui se terre dans son palais du Kremlin.

Jean François Kahn, dans un article publié le 26 février : <Poutine centre de la présidentielle> dresse ce constat accablant :

« C’est un fait : celles et ceux qui, en France, ne cachaient pas une certaine proximité idéologique ou géopolitique avec Vladimir Poutine et avaient, en conséquence, tendance, au début de la crise ukrainienne, à manifester beaucoup de compréhension à l’égard de la position russe, représentaient 45 % des intentions de vote à l’élection présidentielle. C’est Emmanuel Macron, et non le nouveau tsar de Moscou, qui était alors l’objet de leur vindicte (et encore samedi, en plein assaut sur Kiev, sur les sites des médias conservateurs, la majorité des réactions étaient beaucoup plus anti-Macron qu’anti-Poutine).

Selon Marine Le Pen, la présidence française était totalement dépendante des exigences américaines ; selon Jean-Luc Mélenchon, Macron agissait en petit télégraphiste de l’Otan ; selon Éric Zemmour, quand le président tenta de négocier avec un maître du Kremlin, plus fort que lui, il se comportait comme un petit garçon ridicule (et samedi, Mélenchon reprenait à son compte les mêmes termes). Aucun des trois ne croyait à une invasion militaire de l’Ukraine et tous criaient à la désinformation et à l’enfumage.

Alors, depuis que Poutine a violé les frontières de la souveraineté ukrainienne, ils ont concédé que ce n’était pas bien. Jean-Luc Mélenchon a même condamné fermement. Mais pour très rapidement crier à la folie de la course aux armements des allemands.

Parce que l’Allemagne a dû reconnaître que « Le sous-investissement chronique de la Bundeswehr la rend peu opérationnelle» et a donc décidé d’augmenter le budget de la défense à 2% du budget. L’armée française est un peu mieux dotée, mais selon un rapport du Sénat elle ne pourrait opposer qu’un nombre dérisoire de bataillons opérationnels en face de l’armée russe.

C’est ce qu’on apprend et bien d’autres choses dans l’émission « C Politique de France 5 » : <Partie 1> <Partie 2>

Parce que si nous n’intervenons pas, alors que c’est moralement inacceptable, nous avons une raison officielle : l’Ukraine ne fait pas partie de l’OTAN et donc nous ne pouvons pas appliquer l’article 5. CQFD.

La raison moins officielle et qu’on ose avouer c’est que l’adversaire, non le vrai mot dans cette situation est « ennemi » est une puissance nucléaire. Ce ne serait pas prudent d’entrer en conflit avec lui, surtout qu’il est imprévisible.

Mais la raison objective, c’est que nous n’avons pas du tout les moyens d’aider militairement les ukrainiens, nous ne sommes pas prêts, nous avons désarmé, massivement. Sans les États-Unis nous ne sommes rien militairement, des nains.

Après les deux terribles guerres mondiales, nous avons cru à un monde de paix, de commerce et de droits.

Et nous avons créé une entité riche, prospère et en paix : L’Union européenne.

Dans l’émission C Politique, un intervenant rappelle cependant que cette prospérité n’a été rendue possible qu’à l’abri du bouclier américain.

D’ailleurs les présidents américains, avant Trump, Obama, Busch et Clinton ont répété que les européens ne faisaient pas le job.

Un autre intervenant a décrit l’Union européenne se vivant comme n’ayant plus aucun ennemi. Et Jean Quatremer a eu cette formule :

« L’Europe n’avait pas d’ennemis que des amis potentiels »

Certains analystes ont décrit cette situation par cette autre formule :

« Les européens se comportent comme des herbivores dans un monde de carnivores ! »

Parce que pendant ce temps, la Russie, la Chine, l’Inde et d’autres ont augmenté de manière massive leurs dépenses militaires.

Bien sûr qu’il faut réarmer, sinon nous serons avalés.

Le courageux et lucide président ukrainien Volodymyr Zelensky a interpellé l’Europe :

« Comment allez-vous vous-mêmes vous défendre si vous êtes si lent à aider l’Ukraine ? »

C’est un changement de monde pour nous comme le dit Nicolas Baverez, le spécialiste de Raymond Aron, dans l’émission de ce dimanche du <Nouvel Esprit Public>

Cette situation rappelle la fin des années 30 : une démocrature et un homme fort qui suit son plan avec un récit de l’encerclement de la Russie par l’Otan et du génocide des russes dans le Donbass par des ukrainiens.

En face, il y a le déni. Le déni de la violence de Poutine, de sa haine de l’Occident et de sa volonté d’asservir.

Le déni qui a conduit à la construction de la dépendance de l’Allemagne au gaz russe sous le prétexte de la transition énergétique verte. Et en sus, la commission européenne est arrivée à faire du prix du gaz russe le prix directeur de l’énergie dans l’Union.

Et puis comme le rappelle le journaliste Emmanuel Berreta, le déni de tous ces hommes politiques issus de l’Union européenne qui ont, par faiblesse pour l’argent, accepté de devenir des agents d’influence de ce régime aux valeurs si éloignées des nôtres :

« La Russie a aussi déployé son entregent à l’ouest dans une entreprise de capture des élites, à commencer par Gerhard Schröder, l’ancien chancelier allemand devenu le « Monsieur North Stream 2 » de Vladimir Poutine, son ami. Jeudi, Christian Kern, l’ancien chancelier social-démocrate autrichien, a fait savoir qu’il démissionnait pour sa part du conseil de surveillance de la société nationale ferroviaire russe. L’Italien Matteo Renzi (qui siégeait chez Delimobil, un service d’autopartage en Russie) et l’ancien Premier ministre finlandais Esko Aho (qui siégeait au sein de la plus grande banque russe, la Sberbank) ont également démissionné. François Fillon a lui aussi renoncé, vendredi, à ses mandats d’administrateur indépendant de sociétés pétrolières russes. »

Force est de reconnaître que l’essentiel de ces hommes sont issus des Gauches européennes.

Nicolas Baverez a ajouté :

« Le défi que lance Vladimir Poutine, est une menace mortelle pour l’Europe. Soit on réagit, soit on mobilise et on change de mode de pensée et d’action, soit la démocrature russe va liquider la liberté politique en Europe. Il faut réarmer. Ce n’est pas seulement un réarmement militaire mais aussi un réarmement politique et idéologique. Il faut rétablir une dissuasion efficace vis-à-vis de Moscou. […] Je rappellerai une phrase de Raymond Aron : « Je crois à la victoire finale des démocraties, mais à une condition c’est qu’elles le veuillent » »
Nicolas Baverez dans l’émission le Nouvel Esprit Public de Philippe Meyer (vers 10 min environ)

Il faut réarmer si nous voulons rester libre.

Bien entendu si le budget de la défense augmente, d’autres devront baisser

Il faut savoir payer le prix de la Liberté.

Liberté que vont perdre les ukrainiens dans les prochaines heures, les prochains jours.

Mais voulons nous rester libre ? demandait Raymond Aron

Ou la douce somnolence de notre confort étouffe t’elle le désir de la liberté et considère t’elle que le prix à payer est trop cher ?

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