Vendredi 20 janvier 2017

Vendredi 20 janvier 2017
«Finalement !»
Premier mot du pape François en s’approchant de Kirill Patriarche de l’église Orthodoxe
Nos médias parlent abondamment des dissensions et des conflits à l’intérieur de l’Islam entre les sunnites et les chiites.
Mais on parle peu du grand schisme chrétien entre les Catholiques et les Orthodoxes qui date de 1054. Le 16 juillet 1054, le légat du Pape chef de l’Église de Rome dépose sur le maître-autel de Sainte-Sophie de Constantinople une bulle excommuniant le Patriarche de l’Eglise orthodoxe Michel Cérulaire, excommunication qui fut suivie de celle des responsables catholiques par le patriarche.
Depuis cette date (962 ans) le Pape et le Patriarche ne se sont jamais rencontrés avant le 12 février 2016 à l’aéroport de La Havane, à Cuba. La photo montre l’accolade que se donne ces deux responsables religieux.
« Finalement ». C’est le premier mot qu’a prononcé avec douceur le pape François en échangeant une longue et chaleureuse accolade avec le patriarche de Moscou, Kirill.
Par la suite le Pape a dit : « Nous sommes frères ». Il a quand même fallu près de mille ans pour que cette « évidence ? » puisse être exprimée.
Plusieurs articles ont relaté cette rencontre historique :
Cette série de photos a commencé par une photo montrant les dégâts de la guerre, elle finit par une photo de réconciliation d’un conflit de mille ans.
Nous avons besoin d’espoir et de croire en l’avenir. Tout ce qui peut nourrir cette espérance doit être savouré avec délectation.
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Jeudi 19 janvier 2017

https://ssl.gstatic.com/ui/v1/icons/mail/images/cleardot.gifJeudi 19 janvier 2017
« Homo sapiens d’hier et d’aujourd’hui : Solar Impulse survole les pyramides »
Une photo qui confronte le XXIème siècle et l’homo sapiens d’il y a 4500 années
Solar Impulse est cet avion solaire réalisé à l’initiative des Suisses Bertrand Piccard et André Borschberg, à l’École polytechnique fédérale de Lausanne.
Cet avion vole de nuit comme de jour, sans carburant ni émission polluante pendant le vol, un avion monoplace à moteurs électriques alimentés uniquement par l’énergie solaire, jusqu’à effectuer un tour du monde.  Sur leur site, il est indiqué qu’ils ont pu voler 40 000 km uniquement avec l’énergie solaire recueillie et stockée.
Ainsi le 23 juin 2016 : au terme d’un périple de 6 272 kilomètres au-dessus de l’océan Atlantique, l’avion Solar Impulse 2 a atterri jeudi 23 juin à Séville, dans le sud de l’Espagne.
Et puis du 11 au 13 juillet, André Borschberg vole de Séville au Caire, en survolant les Pyramides avant d’atterrir.
Cette photo montre la rencontre du génie humain du XXIème siècle qui survole le produit du génie humain d’il y a plus de 4 500 ans.
N’est-ce pas une raison d’émerveillement et aussi d’espoir ?
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Lundi 16 janvier 2017

Lundi 16 janvier 2017
«Alep»
Une photo de l’année 2016
Le mot du jour avait déjà plusieurs fois pour objet une photo.
Cette semaine je vous propose 5 photos prises en 2016.
La première concerne la ville d’Alep, des hommes marchent dans une rue jonchée de débris qu’on a cependant dégagé vers les côtés pour essayer de continuer à vivre. ​Des câbles pendent, les bâtiments sont en ruines, probablement qu’au moment de leurs destructions des enfants, des femmes et des hommes sont morts
J’ai eu l’idée de faire une thématique sur des photos de 2016 en écoutant cette émission :https://www.franceculture.fr/emissions/linvite-des-matins/iconographie-de-lannee-2016
Le titre de l’émission était : « Iconographie de l’année 2016 », l’émission a ciblé deux photos que nous verrons demain et après-demain.
J’ai aussi été inspiré par deux articles :
Il faut cependant rappeler que la violence a reculé dans le monde par rapport aux siècles précédents et que la probabilité qu’un terrien meurt de mort violente aujourd’hui par rapport aux précédentes périodes historiques a diminué de manière considérable. Mais aujourd’hui grâce aux outils de communication, ces drames se sont rapprochés de nous.
Pour finir je vous oriente vers cette chronique sur la chute d’Alep de Nicole Ferroni et où dans sa conclusion très émue elle partageait une réflexion de son père :  « Autrefois, les hommes se mangeaient et on appelait cela du cannibalisme, eh bien, un jour, peut-être que la guerre sera si loin derrière l’humanité, qu’on pourra dire que les hommes se tuaient et qu’ils appelaient cela la guerre. »
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https://ssl.gstatic.com/ui/v1/icons/mail/images/cleardot.gif

Jeudi 12 janvier 2017

Jeudi 12 janvier 2017
« Non, les hommes n’ont pas toujours fait la guerre »
Marylène Patou-Mathis
Lors de l’émission <du grain à moudre : pourquoi n’aimons-nous pas la paix ? >  qui ont servi directement à inspirer les deux premiers mots du jour de la semaine et indirectement celui d’hier, Hervé Gardette, le journaliste responsable de l’émission a diffusé un enregistrement d’une émission ancienne où la préhistorienne Marylène Patou-Mathis intervenait pour révéler les découvertes récentes des scientifiques sur la préhistoire concernant l’entraide et l’empathie qui existait à l’intérieur des groupes humains. Elle cite l’exemple d’un squelette dont les anthropologues ont pu déterminer qu’il s’agissait d’un homme qui était né, privé d’un bras et qui est mort vers la cinquantaine, ce qui était extrêmement âgé à cette période. Ils ont donc pu en conclure que cet homme handicapé (trouvé en Irak, vers – 45000) a pu bénéficier de l’entraide du groupe dans lequel il était né. Sinon il n’aurait pas pu vivre si longtemps. [à partir de 33:50 de cette émission]
Marylène Patou-Mathis a publié en 2013, un livre chez Odile Jacob : <Préhistoire de la violence et de la guerre> où elle tente de répondre à cette question : l’Homme a-t-il toujours été violent ?
L’exergue de ce mot du jour est le titre d’un article qu’elle a consacré à ce sujet : « Non, les hommes n’ont pas toujours fait la guerre »
Dans ce long article que je vous invite à lire, Marylène Patou-Mathis écrit notamment :
« L’image de l’homme préhistorique violent et guerrier résulte d’une construction savante élaborée par les anthropologues évolutionnistes et les préhistoriens du XIXe siècle et du début du XXe siècle. Elle a été gravée dans les esprits à la faveur du présupposé selon lequel l’humanité aurait connu une évolution progressive et unilinéaire. Dès la reconnaissance des hommes préhistoriques, en 1863, on a rapproché leur physique et leurs comportements de ceux des grands singes, gorilles et chimpanzés. Pour certains savants, cet « homme tertiaire » représentait le chaînon manquant entre la « race d’homme inférieur » et le singe. Puis la théorie dite « des migrations », apparue dans les années 1880, a soutenu que la succession des cultures préhistoriques résultait du remplacement de populations installées sur un territoire par d’autres ; elle a enraciné la conviction que la guerre de conquête avait toujours existé. […]
Aujourd’hui, l’hypothèse selon laquelle l’homme, parce que prédateur, descendrait de « singes tueurs » est abandonnée, de même que celle de la « horde primitive » proposée par Sigmund Freud en 1912. Défenseur de la théorie de Jean-Baptiste de Lamarck sur l’hérédité des caractères acquis, le père de la psychanalyse soutenait que, en des temps très anciens, les humains étaient organisés en une horde primitive dominée par un grand mâle tyrannique. Celui-ci s’octroyait toutes les femmes, obligeant les fils à s’en procurer à l’extérieur par le rapt. Puis, un jour, « les frères chassés se sont réunis, ont tué et mangé le père, ce qui a mis fin à l’existence de la horde paternelle », écrit-il dans Totem et Tabou, en 1912. Freud développe également les notions de « primitif intérieur » et de « pulsion sauvage » ; les conflits internes représenteraient l’équivalent de luttes extérieures qui n’auraient jamais cessé.
[…] En outre, de nombreux travaux, tant en sociologie ou en neurosciences qu’en préhistoire, mettent en évidence le fait que l’être humain serait naturellement empathique. C’est l’empathie, voire l’altruisme, qui aurait été le catalyseur de l’humanisation.
[…] D’après les vestiges archéologiques, on peut raisonnablement penser qu’il n’y a pas eu durant le paléolithique de guerre au sens strict, ce qui peut s’expliquer par plusieurs facteurs. Une faible démographie, d’abord : en Europe, on estime à quelques milliers d’individus la population durant le paléolithique supérieur. Les communautés étant dispersées sur de vastes territoires, la probabilité qu’elles se soient affrontées est faible, d’autant qu’une bonne entente entre ces petits groupes d’au maximum cinquante personnes était indispensable pour assurer la reproduction.
[…] au cours du néolithique, le besoin de nouvelles terres à cultiver entraînera des conflits entre les premières communautés d’agropasteurs, et peut-être entre elles et les derniers chasseurs-cueilleurs, en particulier lors de l’arrivée en Europe de nouveaux migrants, entre 5 200 et 4 400 ans av. J.-C. (à Herxheim, en Allemagne, par exemple). Une crise profonde semble marquer cette période, comme en témoigne aussi le nombre plus élevé de cas de sacrifices humains et de cannibalisme.
[…]Ce n’est qu’au cours de la mutation socio-économique du néolithique qu’émergent en Europe les figures du chef et du guerrier, avec un traitement différencié des individus dans les sépultures et dans l’art. L’utilisation de l’arc se généralise ; pour certains préhistoriens, cette arme utilisée pour la chasse aurait joué un rôle dans l’augmentation des conflits, comme semblent l’attester les peintures rupestres du Levant espagnol.
Le développement de l’agriculture et de l’élevage est probablement à l’origine de la division sociale du travail et de l’apparition d’une élite, avec ses intérêts et ses rivalités.  »
J’en arrive à la conclusion :
«  la « sauvagerie » des préhistoriques ne serait qu’un mythe forgé au cours de la seconde moitié du XIXe siècle pour renforcer le concept de « civilisation » et le discours sur les progrès accomplis depuis les origines. A la vision misérabiliste des « aubes cruelles » succède aujourd’hui — en particulier avec le développement du relativisme culturel — celle, tout aussi mythique, d’un « âge d’or ». La réalité de la vie de nos ancêtres se situe probablement quelque part entre les deux. Comme le montrent les données archéologiques, la compassion et l’entraide, ainsi que la coopération et la solidarité, plus que la compétition et l’agressivité, ont probablement été des facteurs-clés dans la réussite évolutive de notre espèce. »
Je vous renvoie vers l’article complet : « Non, les hommes n’ont pas toujours fait la guerre »
J’avais déjà évoqué Marylène Patou-Mathis lors du mot du jour du 6 juin 2016, dans la série de mots consacrée au livre « Sapiens : Une brève histoire de l’humanité »
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Vendredi 23 décembre 2016

« Noël »
Fête chrétienne ou solaire ?

Le solstice d’hiver est ce jour de l’année solaire pendant lequel la nuit est la plus longue.

Depuis 2006, le jour du solstice d’hiver a été désignée comme la journée mondiale de l’orgasme.

Le solstice d’hiver est tombé cette année, ce mercredi, le 21 décembre 2016. Il tombe, depuis la mise en place du calendrier Grégorien, à la fin du XVIème siècle, le plus souvent le 21 ou le 22 décembre.

Il est tombé un 23 décembre en 1903 et il faudra attendre le début du XXIVe siècle pour le voir se produire de nouveau à cette date. Il tombera un 20 décembre  à la fin du XXIe siècle.

Sous l’empire romain, le calendrier julien permettait que le solstice d’hiver tombe le 25 décembre.

L’empereur Aurélien (270-275), au milieu des divinités multiples qu’honorait le peuple romain, a assuré une place particulière à une divinité solaire : <Sol Invictus> (latin pour « Soleil invaincu »).

Il proclame « le Soleil invaincu » patron principal de l’Empire romain et fait du 25 décembre, le jour du solstice d’hiver donc, une fête officielle appelée le « jour de naissance du Soleil » (du latin dies natalis solis invicti). Cette fête vient alors se placer au lendemain de la fin des Saturnales, une période de fête ancienne et la plus importante de Rome.

Plus anciennement le 25 décembre correspondait aussi au jour de naissance de la divinité solaire Mithra

La christianisation de l’empire romain va annexer cette fête.

Et pour ce faire, on décidera que la naissance de Jésus de Nazareth remplacera la naissance du soleil et on appellera cette fête « Noël » (du latin natalis).

La première mention de cette célébration chrétienne à la date du 25 décembre a lieu à Rome en 336.

Il se passera la même évolution chez d’autres peuples. Ainsi, les peuples germaniques connaissaient aussi une fête du solstice d’hiver : <Yule> .

Suivant la même logique de syncrétisme que pour les Saturnales et le Dies Natalis Solis Invicti, Yule a été associée aux fêtes de Noël dans les pays nordiques depuis la christianisation de ces peuples.

Wikipedia nous apprend que dans la mythologie nordique, Yule est le moment de l’année où Heimdall (dieu nordique de son trône situé au pôle Nord) […] revient visiter ses enfants avec d’autres divinités.

Ils visitent ainsi chaque foyer pour récompenser ceux qui ont bien agi durant l’année, et laissent un présent dans leur chaussette.

Ceux ayant mal agi voyaient à l’aube leur chaussette emplie de cendres.

Yule est aussi une fête où les gens de leur côté, et les dieux du leur, se rencontrent pour partager un repas, raconter des histoires, festoyer et chanter.

Si vous continuez à lire Wikipedia, dans son article Yule, vous comprendrez que les 4 bougies rouges que les allemands allument, au fur à mesure des 4 semaines de l’Avent, constitue aussi une tradition pré-christique où ce rituel célébrait la renaissance de la lumière.

Je ne vous décris pas ce que Noël est devenu à notre époque vous le savez aussi bien que moi.

Noël avec Nouvel An constituent les fêtes de fin d’année où toute le monde prend congé, se retrouve en famille et fait la fête.

Il est donc pertinent de suspendre le mot du jour et comme je trouve efficient de commencer l’année par une semaine de congé, le prochain mot du jour sera envoyé le lundi 9 janvier.

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Vendredi 16 décembre 2016

Vendredi 16 décembre 2016
«On ne lui a même pas accordé un nom sur une tombe dans le cimetière de La Havane.
Il est gommé de l’Histoire. Oublié, jeté dans la fosse commune. Comme les hérétiques du Moyen Âge. […]
Aujourd’hui, je clame son nom, pour que jamais on ne l’oublie : Tony de la Guardia, mon père bien-aimé.»
Ileana de la Guardia
Pour Fidel Castro aussi je vais « tourner autour du pot ». Je ne vais pas le faire par une discussion conceptuelle ou morale.
Je vais rester à hauteur d’homme, de la douleur et de la souffrance du témoignage :
« Le 25 novembre dernier, Fidel Castro est mort à l’âge avancé de 90 ans. Tony de la Guardia, l’un de ses principaux lieutenants, lui, n’a pas eu la chance de connaître ses petits-enfants : un matin de juin 1989, il a été fait fusiller par Castro. Sa fille, Ileana, a fui son pays et s’est exilée en France. […]
C’est l’aube à Paris, ce 26 novembre, le soleil est à peine levé. Dans mon sommeil profond, j’entends comme dans un rêve un téléphone sonner. Je ne veux pas décrocher, c’est mon mari que le fait. Sa voix me dit :  « Il est mort, il est mort, réveille-toi !  Fidel est mort ! »
Je réponds : « « Encore lui… Il va encore me sortir de mon sommeil. »
Comme il y a 27 ans, quand on m’a annoncé l’arrestation de mon père. Un quart de siècle, déjà. Et pourtant, ce coup de téléphone me poursuit comme un fantôme. Non, je ne veux pas, il n’a pas le droit.
Quelques heures plus tard, je sors de mon lit et vois de ma fenêtre, à l’horizon, la tour Eiffel, mon symbole de liberté, de « ma » liberté. Tous les mauvais souvenirs reviennent alors. Celui de mon père, surtout, et des quelques autres, qui ont payé de leurs vies l’aveuglement d’un tyran. Cette fois, il est vraiment mort ? Aucun doute. Je suis soulagée, comme libérée d’une ombre maléfique.
Le « monstre » est mort dans son lit, sans être inquiété pour tous ses crimes. Les funérailles sont déjà bouclées. Rien ne sera laissé au hasard. Personne n’ira cracher sur ses cendres. Et pourtant.
Mon père, Tony de la Guardia, lui est parti un petit matin du 13 juin 1989. Il n’a pas eu la chance de vivre vieux, ni de connaître ses petits-enfants. Il était un des hommes de confiance du tyran. Il avait servi Castro pour des missions difficiles, militaires et parfois secrètes. Il lui avait tout donné.
Ce jour-là, la police l’a arrêté. Un mois plus tard, au terme d’un procès stalinien, Castro l’a fait fusiller, sans pitié. Il n’avait pourtant ni trahi, ni triché, ni volé. Il avait seulement exécuté les ordres de son chef : trouver des devises étrangères pour sauver Cuba du naufrage.
Ce jour-là, le monde s’est effondré autour de moi. J’étais une jeune femme non politisée, persuadée que Fidel qu’on surnommait entre jeunes le « Cangrejo », (« le crabe »), parce qu’il reculait toujours le « moment des élections libres ». En même temps que mon père, il a fait fusiller Arnaldo Ochoa, le grand général de l’armée cubaine en Afrique, le Lion de l’Ethiopie comme l’appelaient les Africains, adoré par les Cubains. Un grand héros. Il a fait aussi condamner mon oncle Patricio, frère jumeau de mon père, à 30 ans de prison. Il est aujourd’hui en résidence surveillée. À Cuba, on dit en résidence « pyjama »…
Tous ces hommes étaient soupçonnés d’avoir un faible pour la perestroïka de Gorbatchev. Castro n’avait strictement aucune preuve, seulement des doutes. Mais il devait faire un exemple. Empêcher la vague de s’étendre. Être impitoyable. Exercer la terreur pour perpétuer son règne. Toujours.
Je ne peux pas m’empêcher d’être heureuse. À Paris, je pense à toutes ces familles cubaines qui ont vécu des tragédies similaires à la mienne. Elles aussi pleurent leurs morts en silence, la peur au ventre, avec l’espoir que peut-être, un jour, elles auront le droit de revenir chez elles. »
Malgré ces souvenirs terribles, je sors me promener dans Paris. La ville qui m’a ouvert les bras. Je me rends compte de la chance que j’ai. Je suis arrivée en France en 1991, au pays de Voltaire, le chantre de la liberté d’expression. Voltaire, l’ennemi éternel des tyrans, que je chéris chaque jour, car je connais le prix de la liberté.
Curieusement, je suis heureuse, même si, par principe, on ne doit pas se réjouir de la mort d’un être humain, même le pire des criminels. Je sais, je ne dois pas sauter de joie. Mais je ne peux pas m’en empêcher. Car, au-delà des funérailles qui se veulent grandioses et dociles, comme dans tous les régimes communistes, c’est le bourreau que je vois. L’homme de fer, implacable, prêt à sacrifier ses plus proches collaborateurs pour protéger son système.
Et son pouvoir. Comment ne pas revoir mon père, pris au piège des mensonges du dictateur. Pour se débarrasser de lui, et de quelques autres, Castro lui a vendu une fable perverse et criminelle. Pour le bien du pays, de la Révolution, il lui a demandé de s’accuser de fautes qu’il n’a pas commises. Un classique, me direz-vous dans les régimes staliniens, où les enfants dénoncent leurs propres parents.
À l’époque, Castro est soupçonné par la CIA de prêter ses aéroports aux narcotrafiquants colombiens comme zones de transit. Au prix fort. La Centrale a des preuves irréfutables, photos et témoignages de mafieux du cartel de Medellin.
Comment se sortir du piège ? En faisant porter le chapeau à quelques officiers supérieurs suspectés de sympathies gorbatchéviennes. Mon père, comme les autres, persuadé que le grand Fidel lui demande un service et le fera libérer à la fin du procès, accepte cette mascarade.
Le procès fut un simulacre, un cauchemar. À la fin des audiences, à notre grande surprise, le « monstre » les a fait fusiller comme de vulgaires traîtres. Je vis avec cette image d’horreur depuis 27 ans. Je revois le sourire de mon père, épuisé par son incarcération. Son dernier regard, plein de tendresse. On ne lui a même pas accordé un nom sur une tombe dans le cimetière de La Havane. Il est gommé de l’Histoire. Oublié, jeté dans la fosse commune. Comme les hérétiques du Moyen Âge. Et je n’ai pas le droit d’aller sur place me recueillir devant sa dépouille.
Aujourd’hui, je clame son nom, pour que jamais on ne l’oublie : Tony de la Guardia, mon père bien-aimé. Que ma voix traverse l’Atlantique, jusqu’au Malecon, le boulevard du bord de l’océan, à La Havane, là où les rêves se perdent dans l’horizon. »
Vous trouverez l’intégralité de l’article derrière ce lien :

<Fidel castro a fait fusiller mon père sa mort ne m’attriste pas il restera un-bourreau>

Que dire ?
Fidel Castro a certes mené des combats justes et eu des dénonciations judicieuses.
Mais son histoire rappelle surtout que le pouvoir corrompt et que le pouvoir absolu corrompt absolument.
Seuls les contre-pouvoirs institutionnalisés, ces instances qui arrêtent, critiquent et contrôlent le pouvoir permettent d’éviter ces dérives.
Antonio de la Guardia et sa fille Ileana
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Photo plus récente d’Ileana de la Guardia

Jeudi 15 décembre 2016

Jeudi 15 décembre 2016
«Puisque vous allez revoir Kennedy, soyez un messager de paix. »
Fidel Castro
à Jean Daniel qui était venu le rencontrer avec un message de John F Kennedy après la crise des missiles
Je ne sais pas si vous connaissez cet épisode raconté par le fondateur du nouvel Obs, Jean Daniel qui en 1963 avait rencontré John F Kennedy puis était allé voir Fidel Castro qui l’ a bien accueilli et exprimait des sentiments très bienveillants à l’égard de ce président américain. Peut être que la situation entre Cuba et les Etats-Unis aurait pu évoluer dans le bon sens dès 1963, mais Pendant le séjour de Jean Daniel à Cuba, Kennedy fut assassiné à Dallas.
« Un mois après avoir été invité par J. F. Kennedy à la Maison-Blanche, Jean Daniel se rend à Cuba, et rencontre Fidel Castro. […] Fidel se révélant inaccessible, et malgré la tristesse de nos nouveaux amis, nous décidâmes de quitter La Havane. Nous devions prendre l’avion pour Mexico le lendemain. Raoul Castro et Armando Hart, deux des plus importants personnages du régime, m’avaient écouté. Je me dis que, après tout, le message dont je me croyais porteur devait laisser Fidel indifférent.
Il était 22 heures. Nous étions occupés à faire nos bagages. Le concierge me téléphona du ton le plus naturel pour m’informer que le Premier ministre m’attendait à la réception. Je pris l’ascenseur où n’étaient marqués que quatorze étages alors que l’hôtel en avait quinze : le chiffre treize était interdit à La Havane, qui était, avant la révolution, et plus que Las Vegas, le rendez-vous de tous les joueurs du monde.
Je n’eus pas à sortir de l’ascenseur. Fidel me dit : ‘Remontons. Pour parler, nous serons mieux dans votre chambre’.  Fidel, le commandant Valejo, son aide de camp, le romancier-interprète Juan Arcocha, Marc Riboud, Michèle et moi devions rester dans cette chambre de 10 heures du soir à 4 heures du matin.
Au début, Fidel m’a écouté – je veux dire a écouté Kennedy – avec un intérêt dévorant : frisant sa barbe, enfonçant et redressant son béret noir, ajustant sa vareuse de guérillero, jetant mille lumières pétillantes depuis les cavernes profondes de ses yeux.
Un moment, nous avons touché au mimodrame. Je jouais ce partenaire avec lequel il avait une envie aussi violente de s’empoigner que de discuter. Je devenais cet ennemi intime, ce Kennedy dont Khrouchtchev pourtant venait de lui dire que ‘c’était un capitaliste avec qui on pouvait parler’. Si pressé qu’il fût de me répondre, Castro s’imposa de me laisser aller jusqu’au bout en me faisant préciser souvent trois fois une expression, une attitude, une intention. Juan Arcocha traduisait en virtuose.
Sur quel ton Kennedy m’avait-il parlé du colonialisme de Batista et de ses alliés américains ? Quelle expression exacte avait-il employée lorsqu’il avait d’une coexistence possible avec des collectivismes comme ceux de Yougoslavie et de Guinée? Est-ce qu’il m’avait donné, à moi, Jean Daniel, une impression de sincérité? Etc.
A la fin de cette nuit extraordinaire, Fidel m’a dit : « ‘Puisque vous allez revoir Kennedy, soyez un messager de paix. Je ne veux rien, je n’attends rien. Mais dans ce que vous m’avez rapporté il y a des éléments positifs. »
Nous sommes enfin sortis de l’hôtel. Je dis « enfin » non pour moi – j’aurais encore pu écouter longtemps Castro -, mais pour Juan Arcocha épuisé, pour le commandant Valejo qui n’osait pas s’endormir tout à fait, et Marc Riboud qui avait depuis longtemps cessé de prendre toutes les photos possibles.»
Et Jean Daniel et ses amis vont encore rester à Cuba sur l’invitation de Fidel Castro et ils seront ensemble quand ils apprendront l’assassinat de Kennedy. Et Jean Daniel rapporte encore deux propos de Fidel Castro :
« Il faut que naisse aux Etats-Unis un homme capable de comprendre la réalité explosive de l’Amérique latine et de s’y adapter. Cet homme, ce pourrait être encore Kennedy. Il a encore toutes les chances de devenir, aux yeux de l’histoire, le plus grand président des Etats-Unis. Oui ! supérieur à Lincoln ! Moi, je le crois responsable du pire dans le passé mais je crois aussi qu’il a compris pas mal de choses et puis, en fin de compte, je suis persuadé qu’il faut souhaiter sa réélection. »
Et puis après sa mort, il s’indigne devant certains reportages des médias occidentaux et dit :
« Est-ce que vous êtes comme ça en Europe ? Pour nous, les Latins d’Amérique, la mort, c’est quelque chose de sacré. C’est non seulement la fin des hostilités mais aussi celle des injures, cela impose la dignité, vous savez ce que c’est que la dignité ? Il y a des voyous qui deviennent des seigneurs devant la mort !
A propos, cela me fait penser à quelque chose, quand vous écrirez tout ce que je vous ai dit contre Kennedy, ne citez pas son nom, parlez de la politique du gouvernement des Etats-Unis. »
Jean Daniel,
« Le Temps qui reste »
Gallimard, 1984
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Mercredi 14 décembre 2016

Mercredi 14 décembre 2016
«Imaginez ce que serait la situation aux États-Unis si, dans la foulée de son indépendance, une superpuissance avait infligé pareil traitement : jamais des institutions démocratiques n’auraient pu y prospérer. »
Noam Chomsky à propos de la mort de Fidel Castro et de la politique des Etats-Unis à l’égard de cette île.
Mon complice de toujours Albert m’a lancé un défi que je résumerai ainsi « Tu ne seras pas cap de consacrer un mot du jour positif à Fidel Castro parce que ce n’est pas politiquement correct ! »
Mais si je suis capable de dire que Fidel Castro a libéré Cuba de la dictature mafieuse de Battista et que par la suite les Etats-Unis ont eu un comportement indigne avec ce petit pays ce qui a poussé le régime castriste vers l’Union soviétique , alors qu’à l’origine Castro n’était pas communiste. Que l’éducation et le système de santé mis en place à Cuba étaient remarquables.
Les Etats-Unis est un pays plein de contradictions il y a des Donald Trump dont les différentes désignations aux postes clés de son administration n’annoncent rien de bon, mais il y a aussi des hommes comme Noam Chomsky, un des plus brillants intellectuels du monde, le New York Times a émis cette hypothèse : « Peut-être l’intellectuel vivant le plus important…
Linguiste, philosophe, professeur au prestigieux Massachusetts Institute of Technology Et Noam Chomsky a rendu cet hommage à Fidel Castro :
« Les réactions à la mort de Fidel Castro diffèrent selon  l’endroit du monde où vous vous trouvez. Par exemple, en Haïti ou en Afrique du Sud, c’était une figure très respectée, une icône, et sa disparition a suscité une grande émotion.  Aux États-Unis, l’ambiance générale a été résumée par le premier titre du « New York Times », lequel indiquait en substance : « Le dictateur cubain est mort ». Par curiosité, j’ai jeté un oeil aux archives de ce journal pour voir combien de fois ils avaient qualifié le roi d’Arabie saoudite de « dictateur ». Sans surprise, il n’y avait aucune occurrence…
Il y a également un silence absolu sur le rôle joué par les États-Unis à Cuba, la manière dont Washington a œuvré pour nuire aux velléités d’indépendance de l’île et à son développement, dès la révolution survenue en janvier 1959. L’administration Eisenhower a tenté de renverser Castro, puis, sous celle de Kennedy, il y a eu l’invasion manquée de la baie des Cochons, suivie d’une campagne terroriste majeure. Des centaines, voire des milliers de personnes ont été assassinées avec la complicité de l’administration américaine et une guerre économique d’une sauvagerie extrême a été déclarée contre le régime de Fidel.
Imaginez ce que serait la situation aux États-Unis si, dans la foulée de son indépendance, une superpuissance avait infligé pareil traitement : jamais des institutions démocratiques n’auraient pu y prospérer. Tout cela a été omis lors de l’annonce de la mort de Fidel Castro.
Autres omissions : pourquoi une personnalité aussi respectée que Nelson Mandela, à peine libérée de prison, a-t-elle rendu hommage à Fidel Castro en le remerciant de son aide pour la libération de son pays du joug de l’apartheid ?
Pourquoi La Havane a-t-elle envoyé tant de médecins au chevet d’Haïti après le séisme de 2010 ?
Le rayonnement et l’activisme international de cette petite île ont été stupéfiants, notamment lorsque l’Afrique du Sud a envahi l’Angola avec le soutien des États-Unis. Les soldats cubains y ont combattu les troupes de Pretoria quand les États-Unis faisaient partie des derniers pays au monde à soutenir l’apartheid. […] Il faut également noter que le système de santé à Cuba s’est imposé comme l’un des plus efficaces de la planète, bien supérieur, par exemple, à celui que nous avons aux États-Unis.
Et concernant les violations des droits de l’homme, ce qui s’y est produit de pire ces quinze dernières années a eu lieu à Guantanamo, dans la partie de l’île occupée par l’armée américaine, qui y a torturé des centaines de personnes dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme ».
Vous trouverez les éléments de cet article derrière ce lien : https://www.les-crises.fr/ce-qui-a-ete-omis-a-la-mort-de-fidel-castro-par-noam-chomsky/
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Jeudi 1 décembre 2016

« La symphonie Pathétique »
Piotr Ilitch Tchaïkovski

La symphonie Pathétique est la sixième et dernière symphonie de Tchaïkovski. Léonard Slatkin et l’Orchestre National de Lyon ont interprété toutes les symphonies du compositeur russe et ont terminé samedi 26 novembre par une interprétation exceptionnelle et bouleversante de la symphonie pathétique.

Mais l’objet de ce mot du jour n’est pas principalement la musique.

Ce que l’on sait et qui est certain, c’est que cette œuvre a été créée à Saint Pétersbourg, sous la direction du compositeur, le 28 octobre 1893 et que Piotr Ilitch Tchaïkovski est mort en pleine gloire le 6 novembre 1893, 9 jours après, à l’âge de 53 ans.

Ce qui n’est pas établi formellement mais très probable c’est qu’il soit mort du choléra, comme sa mère, alors qu’une épidémie s’était répandue dans la ville, ce que tout le monde savait.

Ce qui est aussi très documenté aujourd’hui mais a été caché longtemps c’est l’homosexualité de Tchaïkovski ainsi que son mal être et sa difficulté de vivre ses pulsions dans une société qui rejetait cette tendance sexuelle et la considérait comme une perversion insupportable.

La suite de cette histoire est plus trouble, mais la grande écrivaine russe Nina Berberova a, dans sa biographie du compositeur, développé une thèse qui se racontait de bouche à oreilles, comme un secret inavouable.

Selon Wikipedia, cette théorie fut aussi présentée par la musicologue russe Alexandra Orlova en 1979 après son émigration aux États-Unis, sur les bases de révélations qui lui furent faites en 1966 par Alexander Voitov, élève et historien du Collège impérial de la Jurisprudence de Saint-Pétersbourg.

 

Tchaïkovski aurait contracté le choléra en buvant en pleine conscience un verre d’eau de la Neva non stérilisée. Ce serait donc un suicide.

Cette théorie raconte l’histoire suivante : Tchaïkovski a eu une relation homosexuelle avec un jeune officier Victor Stenbock-Fermor qui était d’une famille princière liée au Tsar de Russie. L’oncle de cet officier, le prince Stenbock-Fermor, maréchal du palais a dénoncé le compositeur par une lettre au procureur.

Le scandale allait éclater, le plus grand compositeur russe vivant allait être arrêté et jugé pour cette dépravation extrême : l’homosexualité. Des amis de Tchaïkovski et des hauts dignitaires du Palais pour éviter ce scandale qui aurait touché un homme célèbre mais aussi toute la Russie ont alors trouvé la solution de réunir secrètement «un tribunal d’honneur» constitué d’anciens étudiants du Collège impérial de la Jurisprudence de Saint-Pétersbourg » pour juger Tchaïkovski. Ce tribunal aurait condamné le compositeur à se suicider.

Dans Wikipedia on lit :

« Après sa mort, il bénéficie de funérailles nationales à la cathédrale Notre-Dame de Kazan auxquelles assistent près de 8 000 personnes. Le cercueil de Tchaïkovski est porté par des proches, dont le prince Alexandre d’Oldenbourg (1844-1932), cousin de l’empereur, les frais des funérailles étant couverts par la Maison de Sa Majesté impériale. Le chœur de la cathédrale et le chœur de l’Opéra impérial russe accompagnent la cérémonie, en présence de son ami le grand-duc Constantin de Russie qui écrit le lendemain dans son Journal que « les murs de la cathédrale n’étaient pas suffisants pour contenir ceux qui voulaient prier pour le repos de l’âme de Piotr Ilitch ».

Cette histoire rappelle celle d’Alan Turing, le génial scientifique qui s’est suicidé en mangeant une pomme empoisonnée et qui avait fait l’objet du mot du jour du 31/12/2013.

En ce moment, au Maroc <Deux adolescentes sont jugées pour homosexualité parce qu’elles ont échangé un baiser>, elles risquent 3 ans de prison. Peine légère si on la compare à d’autres sanctions appliquées dans des pays théocratiques islamiques.

En France, des maires se sont opposés à l’affichage d’une campagne de prévention contre le sida, parce que les affiches montraient, de manière pudique, des homosexuels qui était la cible visée par cette campagne.

Depuis Tchaïkovski, la lutte contre la discrimination homophobe a certes progressé, parfois on a cependant le sentiment d’une régression dans notre pays, dans d’autres pays tout reste à faire.

Pour revenir à la symphonie Pathétique, Ken Russell a réalisé, en 1969, un film <The Music Lovers>, dont le titre français est «la symphonie pathétique» qui évoquait de manière explicite l’homosexualité de Tchaïkovski.

<Vous trouverez ici une belle interprétation de cette symphonie> par le grand chef russe Evgeny Svetlanov.

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Mardi 29 novembre 2016

Mardi 29 novembre 2016
« Mettre définitivement l’homme à l’abri du besoin, en finir avec la souffrance et les angoisses du lendemain »
Ambroise Croizat, ministre du Travail de 1945 à 1947

C’est encore un film récent <La Sociale> de Gilles Perret qui est à l’origine de ce mot du jour qui concerne la mise en place de la Sécurité Sociale au lendemain de la guerre.

Ce sont les ordonnances du 4 octobre 1945 qui ont constitué la naissance juridique de cette magnifique institution.

TELERAMA rappelle que l’on attribue toujours cette création à Pierre Laroque, haut fonctionnaire, le « père » officiel de la Sécu et qu’on laisse dans l’ombre, Ambroise Croizat, l’homme politique qui fut le ministre du Travail du général de Gaulle, certains prétendent que c’est en raison de son appartenance au Parti communiste. C’est aussi TELERAMA qui donne cette phrase d’Ambroise Croizat que j’ai utilisée comme exergue de ce mot du jour.

Comme les choses ne sont jamais simples et évidentes, il faut savoir que Pierre Laroque était aussi Haut fonctionnaire du Régime de Vichy.

Il était entré dans le cabinet du ministre René Belin dans le premier gouvernement du régime de Vichy, et a participé à la rédaction de la loi du 16 août 1940 sur la réorganisation économique et a suivi le dossier des assurances.

Avec Alexandre Parodi, qui fut par la suite le premier ministre du travail du gouvernement provisoire de De Gaulle, précédant immédiatement à ce poste Ambroise Croizat, Pierre Laroque rédige un projet de « réforme des législations sur les Assurances sociales, les Allocations familiales et les congés payés ». De ce projet aboutira l’allocation aux vieux travailleurs salariés qui instaure en France le régime de retraite par répartition, formant ainsi la base de ce que sera la Sécurité Sociale. Bref la sécurité sociale eut des prémices sous le Régime de Vichy et les hommes qui ont travaillé sur ce projet étaient les mêmes que ceux qui allaient le faire avec De Gaulle.

Il faut noter cependant que Pierre Laroque fut Révoqué en octobre 1940 pour des origines juives et qu’il participa à Lyon à l’organisation de résistance « Combat » et rejoignis Londres en avril 1943.

Parodi fut également résistant. Ce n’était pas deux collaborateurs, mais c’est le Régime de Vichy, si on veut respecter l’Histoire qui commença cette aventure.

Contrairement aux Ministres d’aujourd’hui, Ambroize Croizat avait un métier en dehors de la politique. Il travaille en usine dès l’âge de 13 ans lorsque son père est appelé sous les drapeaux en 1914. Apprenti métallurgiste, il suit en même temps des cours du soir et devient ouvrier ajusteur-outilleur dans la région lyonnaise. Il est mort à 50 ans d’un cancer du poumon.

Pour en dire un peu plus je voudrai revenir à une histoire que l’on attribue à Raymond Lulle philosophe, poète, théologien, apologiste chrétien et romancier majorquin (1232-1315).

« C’est l’histoire de 3 tailleurs de pierre. Ils sont côte à côte, et font exactement les mêmes gestes techniques. Mais le premier semble épuisé et triste. Je lui demande :
– Que faites-vous ?
Il me répond énervé : – ben ! Vous l’voyez bien !  Je taille une pierre !

Je regarde le deuxième, qui semble moins malheureux et moins épuisé que le premier. Je lui demande :
– Que faites-vous ?
Il me répond gentiment : – ben ! Vous l’voyez bien ! Je construis un mur !

Alors je regarde le troisième, qui lui, paraît très joyeux et lumineux. Il siffle en réalisant son ouvrage. Je lui demande :
– Que faites-vous ?
Alors il me répond avec passion : – ben ! Vous l’voyez bien ! Je construis une cathédrale ! »

C’est une histoire du moyen-âge, où on construisait des cathédrales en pierre pour la religion.

AU XXème siècle on a construit des cathédrales non matérielles mais sociales pour L’Humanité, comme la Sécurité Sociale, pour « en finir avec la souffrance et les angoisses du lendemain » selon les mots d’Ambroize Croizat.

Une partie des français a désigné François Fillon comme candidat à la Présidence de la République. Il est possible qu’il devienne Président. Constatons que lui contrairement à Ambroise Croizat n’a jamais eu un emploi autre que Politique. Il est devenu député à l’âge de 27 ans en 1981 et avant il était assistant parlementaire de Joël Le Theule.

Concernant la santé, il a un projet : « Offrir la meilleure couverture santé possible à tous nos concitoyens en redéfinissant les rôles respectifs de l’assurance maladie et de l’assurance privée : focaliser l’assurance publique universelle notamment sur les affections graves ou de longue durée, le panier de soin « solidaire », et l’assurance privée sur le reste, le panier de soin « individuel ». Les moins favorisés ne pouvant accéder à l’assurance privée bénéficieront d’un régime spécial de couverture accrue. Les patients seront responsabilisés par l’introduction d’une franchise maladie universelle dans la limite d’un seuil et d’un plafond

Je ne veux pas déformer, donc je cite intégralement et si vous voulez vérifier c’est après ce lien : https://www.fillon2017.fr/participez/sante/propositions-pour-les-patients/

En bon chrétien, les pauvres ont droit à la charité : « Les moins favorisés  bénéficieront d’un régime spécial de couverture accrue.»

Mais pour les autres il y aura les affections graves prises en charge par la Sécurité Sociale publique et le reste par les assurances privées que vous paierez selon vos choix pertinents, vos moyens et votre tendance plus ou moins affirmée à la prudence par rapport à votre santé et votre volonté de sacrifier d’autres consommations à celle-ci.

Les États-Unis  montrent, en grandeur réelle, ce que ce type de système produit : Une médecine de très haute qualité certes, mais une offre de soins très chers et une inégalité extrême par rapport à la santé, qu’Obama a tenté de réduire un peu.

C’est très simple à comprendre. C’est aussi évident qu’une équation mathématique.

Quand l’offre de soins est publique, l’objectif est de soigner le mieux possible au coût le moins élevé pour la collectivité.

Quand l’offre de soins est privée, l’objectif est de soigner le mieux possible en obtenant le meilleur profit pour la société privée qui assure le soin.

Je ne dis pas que le premier système ne peut pas être amélioré notamment en obtenant un coût moins élevé, mais je dis que le second système est tendanciellement plus onéreux pour la collectivité.

Quand on commence à s’attaquer aux cathédrales d’une civilisation, on peut penser que son déclin est proche.

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