Avouons que nous avons tous, d’abord un peu honteux, regarder des séries américaines. Et même nous y avons pris goût.
Nous n’osions le dire mais cela nous plaisait.
Maintenant nous pouvons nous rassurer.
De grands esprits, des philosophes, des universitaires et même des critiques de cinéma du Cahier des Cinémas, nous expliquent qu’il s’est passé un « truc » aux Etats Unis où est né un nouvel espace créatif qui est devenu un phénomène artistique de premier plan, un art majeur.
Si nous aimions, c’est parce que ce sont de vrais œuvres d’art dont certaines même sont géniales.
Il y a maintenant sans cesse des classements pour savoir quelle est la série la plus remarquable :
- « Mad men »,
- « Breaking Bad »,
- « Game of Thrones »,
- « True Detective »,
- « The Wire », et bien d’autres.
Brett Martin dans son ouvrage <Des hommes tourmentés> raconte cette histoire et parle de l’âge d’or des séries américaines, pour être plus précis, il parle du 3ème âge d’or.
Il était l’invité de Nicolas Demorand <Hommage aux antihéros des séries américaines avec Brett Martin>
Il raconte cette révolution de la télévision américaine.
Avant les années 2000, la télévision était le cimetière des ambitions artistiques.
C’était un désert de platitude où régnait la publicité où il ne fallait pas froisser les annonceurs, les grandes marques étaient très conservatrices. Il fallait des héros positifs, des intrigues claires, avec des bons et des méchants et où à fin le bon devait toujours gagner.
C’est surtout une chaine de télévision Home Box-Office (ou HBO), chaîne de télévision payante qui va balayer tout cela.
C’était une chaine d’abonné sans publicité.
Cette chaîne a eu des patrons intelligents, intuitifs et téméraires pour croire et avoir foi en des artistes.
« Ce fut la source magique, faire confiance aux auteurs. » dit Brett Martin
Cela commence par « Les Soprano », histoire d’un mafieux violent mais dépressif et qui a des problèmes avec ses enfants adolescents.
Ils vont récupérer des cinéastes maudits, des scénaristes qui trainaient dans le milieu de la télévision sans jamais avoir eu la chance de se faire connaître et c’est avec eux qu’ils vont créer cet âge d’or.
Ces hommes tourmentés (les antis héros des séries) sont des hommes fragiles entre leur désir de faire le bien et leur tendance à faire le mal et un mal absolu.
Ces séries sont ouvertes et l’intrigue est inventée d’un épisode à l’autre.
Les personnages deviennent très complexes, le spectateur va suivre leurs évolutions pendant des dizaines d’heures et pas seulement 2 heures comme au cinéma.
Et pour que cela captive il faut de véritables auteurs comme David Simon (The Wire) ou Matthew Weiner (Mad Men).
On apprend qu’il a fallu sept ans à Matthew Weiner pour trouver un diffuseur à Mad Men.
Télérama décrit cette évolution :
« Une rage d’écrire autre chose, d’envoyer balader les codes et les bienséances, de rendre sa noblesse à un genre qui plante ses racines chez Dickens et Dumas, dans le feuilleton littéraire du XIXe siècle. Une envie, un besoin, qui renversera les logiques économiques classiques pour pousser HBO, FX, AMC et d’autres chaînes câblées américaines à développer des séries d’auteurs, à fouiller sans retenue la psyché humaine et les entrailles de la société contemporaine. »
Même les matins de France Culture s’y sont mis : <De Dallas à True detective la révolution des séries>.
Et les séries ont leur festival dont c’est la 6ème saison du 17 au 26 avril, donc en ce moment : < https://series-mania.fr/ > au Forum des images qui se trouve Forum des Halles.
Souvent dans l’Histoire, quand tant d’intellectuels émérites commencent à s’intéresser à un phénomène c’est qu’il touche à sa fin …
Mais Brett Martin pense que ce n’est pas encore la fin de l’âge d’or.
<481>