Mardi 16 septembre 2014

Mardi 16 septembre 2014
« Tout seul on va plus vite.
Ensemble on va plus loin »
Proverbe africain

Je vais encore parler de quelque chose que je ne connais pas et que je n’ai pas vu. Alors, je vais essayer de le faire bien.

J’écoutais, hier, pendant la pause méridienne le journal de 13h de France Inter.

A la fin, il a été question de la biennale de la danse de Lyon.

Dimanche a eu lieu le grand défilé (le 10ème) dans les rues de Lyon, plus grande parade chorégraphiée d’Europe et 300 000 spectateurs.

Une vidéo montre et évènement <Le défilé de la biennale de la danse 2014>

La biennale c’est 45 spectacles et cette année il y a une ouverture sur le monde du cirque incarnée par la compagnie XY.

Et pour décrire le spectacle de cette compagnie, la journaliste de France Inter a eu ces mots :

« Tout commence par un combat de corps au sol,
puis bien vite les artistes prennent de la hauteur,
des tours humaines s’érigent
2,3 ou 4 corps empilés les uns sur les autres,
sans aucun dispositif de sécurité.

Le spectateur retient son souffle,
puis les corps prennent leur envol
et virevoltent à 2, 4, 8 mètres de hauteur.
Les jeunes filles se transforment en anges,
Propulsées par des hommes puissants.
Leur bras font office de tremplin.
Le tout avec une facilité déconcertante [..]

Dans les différents tableaux se mêlent rire et poésie.
L’objectif est bien de transmettre des émotions au public.»

Puis Peggy, membre de la Compagnie, s’exprime :

« Les gens étaient beaucoup plus émus par ce que ça impliquait de faire des portés, de la solidarité entre les gens sur le plateau que des prouesses techniques elles-mêmes »

Et c’est alors qu’elle a énoncé ce proverbe africain :

«Tout seul on va plus vite. Ensemble on va plus loin.»

Je l’ai trouvé beau dans le contexte dans lequel il était révélé et profond dans la sagesse qu’il dévoile.

Peggy a ajouté :

Je crois qu’il y a quelque chose comme ça chez nous»

Le spectacle s’appelle il n’est pas encore minuit….

Le site de cette compagnie <La compagnie XY>

Il n’y a pas encore de vidéo sur ce spectacle, mais voici un petit extrait d’un spectacle précédent <Le grand C>

Que l’art vous garde votre joie.

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Lundi 15 septembre 2014

Lundi 15 septembre 2014
« Aujourd’hui quand on parle de rente, on parle de rente de monopole.
Moi aussi j’aimerai payer les taxis moins chers.
[Mais la vraie rente, c’est la rente du capital] »
Thomas Piketty
Je reviens souvent à ce mot de Camus « Mal nommer les choses, c’est ajouter du malheur au monde. » (mot du jour du 22 août 2013).
C’est ce que rappelle Thomas Piketty lors de sa leçon inaugurale aux rencontres de Pétrarque de Montpellier coproduit par France Culture et Le Monde (vous trouverez en fin de message le lien).
Je suis certain que peu d’entre vous ont eu le courage de lire les mille pages du « Capital du XXIème siècle » de Piketty.
Mais nous avons la chance que Piketty expose régulièrement des synthèses de ses travaux dans différents interviews et colloques.
Ce qu’il fait aussi lors de cette leçon inaugurale.
Lors de cette intervention il a ajouté un éclairage sur un élément de langage pour montrer combien aujourd’hui la parole est détournée pour que nous regardions ailleurs qu’à l’endroit où se situe le problème.
Cela fera encore penser à un autre mot du jour : c’était le 5ème celui du 18 octobre 2012 : « Il est nécessaire de mettre fin aux petits privilèges d’un grand nombre pour pouvoir préserver les grands privilèges d’un tout petit nombre ! » Emmanuel Todd
Qu’est-ce que Piketty a démontré par son étude ? C’est tout simplement que de tout temps le rendement du Capital a toujours été supérieur à la croissance.
Autrement dit les revenus du capital sont toujours supérieurs aux revenus du travail.
Il y a eu une parenthèse qui nous a fait penser que les choses allaient évoluer.
En effet, dans la première partie du 20ème siècle, les destructions de capital des deux guerres et la crise de 1930, ainsi que la croissance exceptionnelle des trente glorieuses ont donné un sérieux coup de pouce aux revenus du travail.
Piketty évoque également la peur que le communisme, implanté dans une partie du monde, a déclenchée auprès des capitalistes, les conduisant à faire des concessions aux salariés.
La rente : c’est la rente du capital. C’est ce phénomène qui entraîne la continuité et l’augmentation des inégalités. Lorsqu’en outre la dévolution successorale se fait vers peu d’héritiers, parce que les parents ont peu d’enfants, l’inégalité va encore augmenter d’une génération à l’autre. Aujourd’hui, selon les études de Piketty nous sommes revenus aux mêmes tendances que celles qui existaient avant la première guerre mondiale.
Et dans le cadre de sa leçon inaugurale il rappelle notamment que le banquier de Goldman Sachs qui est aujourd’hui le patron de la BCE, Mario Draghi a fait aussi cet abus de langage quand on lui a demandé ce qu’il convenait de faire pour améliorer la situation en Europe.  Et le banquier de répondre  » il faut s’attaquer à la rente », en parlant de la rente des monopoles ou des professions réglementées.
Encore tout récemment, Jean Marc Daniel, professeur d’économie à l’ESCP-Europe-Paris et chargé de cours à l’Ecole des Mines de Paris vient de publier un livre  » L’Etat de connivence : en finir avec les rentes » ou dans lequel il célèbre la concurrence économique en temps de crise. Il veut donc en finir avec certains monopoles et de professions réglementés. (Il était l’invité des matins de France Culture du 11/09/2014)
Piketty ne dit pas qu’il ne faut pas ouvrir les professions réglementées ou optimiser la concurrence. Ce qu’il dit c’est que la première raison des inégalités est la rente capitalistique.
Parler de rente dans ces situations de monopoles industrielles ou de professions protégées est un abus de langage qui détourne l’attention des vrais rentiers, notamment ceux qui détiennent la dette des Etats qu’on demande aux contribuables de rembourser ou qui alimentent la spéculation pour augmenter encore leur rendement.
Cela dure 59 minutes, c’est moins long que mille pages : <Les rencontres de Pétrarque Leçon inaugurale de Thomas Piketty>

Vendredi 12 septembre 2014

« Pour que les hommes se reconnaissent et se garantissent mutuellement des droits, ils faut qu’ils s’aiment et que pour une raison quelconque ils tiennent les uns aux autres et à une même société dont ils fassent partie. »
Emile Durkheim, de la division du travail social (écrit en 1893)

Émile Durkheim (1858-1917) est un des fondateurs et des plus brillants maître de la sociologie.

Je crois qu’il dit quelque chose de fondamental : pour que l’Etat providence puisse pleinement se déployer il faut qu’il existe ce que Durkheim dit.

Cette constatation a été rappelée dans la conclusion du livre publié en 2014 aux éditions de la Découverte sous la direction de François Dubet : « Inégalités et justice sociale »

François Dubet, sociologue moderne, directeur d’études à l’EHESS était l’invité de l’émission de France Culture La Grande Table du 30/06/2014 qui avait pour thème : « Est ce que toutes les inégalités se valent. »

François Dubet insiste beaucoup sur le fait que la seule dénonciation globale des inégalités sociales ne suffit pas, car toutes les inégalités ne se « valent » pas : certaines sont visibles, d’autres moins, certaines sont perçues comme injustes, d’autres non. Il faut donc pouvoir décrire et mesurer les inégalités sociales, mais aussi savoir ce que nous en faisons et comment elles affectent plus ou moins profondément la vie et l’action des individus.

Et il pose les questions suivantes :

« Que nous font les inégalités dans notre expérience de vie ? Comment se crée une économie morale autour des inégalités ? Comment les inégalités produisent de l’action ? »

Et il finit par un constat :

« Pour vouloir l’égalité des autres, il faut s’en sentir responsable car la seule dénonciation des inégalités ne suffit pas à vouloir leur égalité. »

La conclusion de l’ouvrage qu’il a dirigé a pour titre, « le chainon manquant : la solidarité ».

L’état providence et la formidable redistribution qu’elle sous-tend oblige la solidarité entre l’ensemble des humains qui y participe.

Et Dubet rappelle alors cette réflexion, constatation du grand sociologue Durkheim.

Force est de constater que les grandes avancées sociales et de redistribution se sont déployées dans les Etats européens au sortie des deux guerres mondiales où l’appartenance à une même société faisait très largement consensus.

L’esprit de solidarité s’est largement émoussé et Durkheim nous donne la clé.

Les ultras riches mais aussi les élites mondialisées ainsi que les fragments de la population qui se sont réfugiés, pour de multiples raisons, dans l’identité communautaire ne tiennent plus à la même société qui trace les frontières de la redistribution. Et bien sûr nous qui n’appartenons à aucun de ces groupes, avons aussi de plus en plus de mal à aimer les populations de ces groupes et de considérer que nous faisons partie d’une même société.

Et si nous ne faisons plus partie de la même société, comment se reconnaître mutuellement des droits et une solidarité du niveau auquel est parvenu notre système social ?

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Jeudi 11 septembre 2014

Jeudi 11 septembre 2014
« Le placement d’idées »
Idée de publicitaire
Vous connaissiez le placement de produits ou de marque, vous allez adorer le placement d’idées.
Qu’est-ce que c’est ce truc ?
C’est le Magazine M du Monde qui nous l’apprend. Je joins l’article en pièce jointe et ci-dessous je vous en donne des extraits.
L’expression n’apparaît nulle part. A peine est-elle mentionnée dans les statuts de quelques agences de communication spécialisées. Jamais elle ne figure officiellement sur leurs sites. Et pourtant, depuis quelques années, la pratique s’est immiscée sur nos écrans, petits et grands[…]
Ce n’est pas une bouteille d’alcool, ni une montre qu’une entreprise veut vendre au téléspectateur. Mais une idée, une cause ou un concept, qu’une corporation, une institution, une association ou une région veut faire passer dans un film ou une fiction télévisée. […]
Lorsque James Bond prend le volant d’une Aston Martin, on sait que la marque a payé cette apparition au prix fort. Depuis 2010, le placement de produits, qui n’était autorisé qu’au cinéma, est devenu légal dans les fictions télé et les clips musicaux. A condition d’en informer le téléspectateur avec un pictogramme (la lettre P dans un cercle blanc) en début de programme.
En revanche, lorsque l’AFPA (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) est mise à l’honneur dans le dernier film d’Anne Le Ny « On a failli être amies », sorti en juin, on ne sait pas que l’organisme a déboursé autour de 25 000 euros pour que Marithé (interprétée par Karin Viard) soit une formatrice de l’AFPA. […]
Dans l’épisode intitulé « Les Braves » de la série  « Joséphine ange gardien », sur TF1, consacré à un joueur de rugby, le grand public a pu croire que le choix de ce sport était celui de la production. En réalité, la Fédération française de rugby (FFR) a répondu la première à une sorte d’appel d’offres lancé auprès de multiples fédérations sportives. « C’était une occasion inespérée d’occuper le devant de la scène dans une fiction qui jouit de taux d’audience record », se félicite encore Alain Doucet, le secrétaire général de la FFR. Lorsque la production l’a appelé, il n’avait jamais entendu parler de placement d’idées. Il a vite été convaincu. […]
Les notaires de France, souhaitant dépoussiérer leur image provinciale d’exécuteurs testamentaires, se sont offerts, quant à eux, un lifting à moindres frais dans le film Arrête de pleurer Pénélope, de Corinne Puget et Juliette Arnaud, en 2012. Loin du petit bonhomme grisâtre et voûté, le notaire – une jeune femme – y officie dans des bureaux rutilants, sous le jour plus flatteur d’un conseiller en gestion de patrimoine et en placements, à mi-chemin entre l’avocat et le banquier.
Faire passer un message – tarifé – à l’insu du téléspectateur… Le procédé est interdit par une directive européenne et une loi en vigueur depuis 2010. Qui n’en définit toutefois pas les contours exacts. « C’est plus grave que le placement de produits, car c’est plus subtil et rien n’avertit le public », souligne Christine Kelly, du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Pourtant, le CSA n’a jamais été saisi.
[…]
L’armée de terre elle aussi se serait bien vue dans un épisode de « Plus belle la vie ». « Elle voulait qu’on intègre un discours très pro-armée en faisant dire à un personnage que s’enrôler offrait une occasion unique de voyager, de rencontrer des gens… », se souvient cet ancien de la production de la série. L’armée, premier voyagiste de France ? La production a refusé. Elle pouvait se le permettre…
Voilà voilà
Tant qu’il vous restera du temps de cerveau disponible (*), les publicitaires continuerons à essayer de l’occuper à leur profit ou au profit de leurs clients.
(*) Tout le monde ne comprend peut-être pas cette allusion fréquente que je fais « au temps de cerveau disponible »
C’est une expression qui avait été utilisée par l’ancien PDG de la chaîne privée TF1 :  Patrick Le Lay. Il avait  livré sa conception de la télévision dans un ouvrage intitulé « Les dirigeants face au changement » (Editions du Huitième jour). Interrogé parmi d’autres patrons, il a déclaré :
« Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective business, soyons réaliste : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider, Coca-Cola par exemple, à vendre son produit ». Avant de poursuivre son explication : « Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible ». 

Mercredi 10 septembre 2014

Mercredi 10 septembre 2014
« Le vent se lève!… Il faut tenter de vivre ! »
Paul Valéry
Ce vers de Paul Valéry est-il particulièrement approprié à notre temps ?
Mais surtout  « Le vent se lève » est le dernier film et restera le dernier film  de cet immense maître du cinéma d’animation Hayao Miyazaki qui a décidé de se retirer à 72 ans.
Le film est une biographie d’un ingénieur en aéronautique, librement inspirée de la vie de Jirō Horikoshi, le concepteur des chasseurs bombardiers japonais Mitsubishi A6M, appelés « Chasseurs Zéro ».
Il est sorti en France début  2014 et son titre fait référence à un poème de Paul Valéry le « cimetière marin ».
En pratique il s’agit de la fin ce très long poème :
« Le vent se lève!… Il faut tenter de vivre !
L’air immense ouvre et referme mon livre,
La vague en poudre ose jaillir des rocs!
Envolez-vous, pages tout éblouies !
Rompez, vagues! Rompez d’eaux réjouies
Ce toit tranquille où picoraient des focs ! »
Pour l’intégralité du poème : http://www.leventseleve.fr/poeme.htm
Des années 1920 à la Seconde Guerre mondiale, Jiro, le jeune héros de ce grand tableau soigneusement peint à la main, ne pense qu’à voler, voler et encore voler. Comme il a la vue basse, le métier de pilote lui est interdit. Il sera ingénieur aéronautique, inventeur des redoutables avions Zéro. Des idéaux d’un garçonnet à la construction d’une célèbre machine de mort — le chasseur-bombardier des kamikazes et de Pearl Harbor —, le réalisateur fouille, encore et toujours, une autre de ses fameuses obsessions : la guerre, qui transforme et pervertit les rêves.
Ce film peut surprendre tous ceux qui étaient habitués au monde fantastique, merveilleux et onirique des précédents films (Le Château dans le ciel, Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro et Le Château ambulant entre autre), mais il faut changer le regard pour cet ultime geste artistique du maître. Je pense qu’il s’agit d’un chef d’œuvre de subtilité et d’humanité.
Dans ce film se trouve aussi une très belle définition de l’ingénieur : « C’est celui qui permet que vos rêves se réalisent »
Que l’Art vous conserve votre joie et votre profondeur.

Mardi 9 septembre 2014

Mardi 9 septembre 2014
« C’est juste pas de chance
d’être une femme
dans la plupart des pays du Monde »
Annick Cojean

Annick Cojean, est l’une des grandes plumes du journal Le Monde. Elle a reçu le Prix Albert Londres en 1996, dirige la collection Duels sur France 5.

Elle a signé récemment « Les proies » un livre sur le système d’enlèvement et de viols systématiques mis en place sous le général Kadhafi. Le sous-titre est : « Les proies dans le harem de Kadhafi » (aux éditions Grasset).

Elle a signé aussi une enquête très forte sur le viol comme arme de guerre en Syrie.

Elle était l’invité de l’émission « Ils changent le monde » de Caroline Fourest : <Ils changent le monde Annick Cojean>

Et c’est dans cette émission qu’elle a eu cette phrase que j’ai choisie comme mot du jour.

Kadhafi avait organisé un véritable harem dans son palais. Quand il allait visiter une école, le geste de caresser la tête d’une jeune élève indiquait à ses sbires qu’il fallait l’enlever pour son harem.

Kadhafi avait une autre pratique : la sodomisation de ses généraux pour les humilier et les soumettre totalement.

Annick Cojean explique que ce n’est tout simplement pas possible de regretter un tel monstre.

Elle raconte dans son livre le sort que Khadafi réservait à des fillettes de quatorze ou quinze ans dans les lupanars personnels qu’il avait organisés jusque dans l’enceinte de l’université de Tripoli, comme dans son QG de Bab el Azizia : il les faisait enlever, par dizaines, par centaines, les violait et les droguait, avec la brutalité d’un soudard fou. Et il les faisait ensuite assister à ses ébats avec des hommes. Puis il se servait du sang de la défloration pour des pratiques de magie noire. Des membres mâles de son gouvernement, avec lesquels il forniquait aussi, en faisaient autant avec les filles mises à leur disposition.

Sans l’audace et l’obstination d’Annick Cojean, ces faits n’auraient sans doute jamais été portés à la connaissance du public. En effet, « le sujet est tabou, » Les femmes violées ne peuvent pas le revendiquer. C’est un crime parfait, les victimes sont enfermées dans leurs silences. Elles risquent de mourir par un crime d’honneur dans ces sociétés et si elles ne sont pas tuées elles seront ostracisées par leur famille.

Une loi a été réalisée en Libye pour reconnaître les femmes violées comme des victimes. On en a peu parlé en France. Il y a quand même des choses positives en Libye.

Une autre émission de « Ils changent le monde » raconte cette évolution en Libye par la suite d’un combat d’une autre femme : Céline Bardet, qui enquête sur le terrain sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, après avoir été juriste au Tribunal Pénal international de la Haye : <Ils changent le monde : Céline Bardet>

Annick Cojean a raconté aussi ce qu’elle avait vu en Syrie et a eu cette réflexion plus générale sur la condition des femmes dans un trop grand nombre de pays où elles sont opprimées, brutalisées, humiliées, reléguées, exploitées. Elles n’ont même pas le droit de se plaindre quand on commet un crime comme le viol à leur égard, le résultat de leur plainte rendrait leur vie encore plus insoutenable.

La violence, sous toutes ses formes, faite aux femmes dans le monde, à travers les siècles et jusqu’à aujourd’hui est immense, ignoble et encore largement inavouée ou refoulée.

<Dans un rapport tout récent, L’UNICEF estime qu’une petite fille sur dix est victime d’abus sexuels dans le monde>

Le mot du jour d’Annick Cojean est terrible, parce qu’il se lit au présent.

Que le Ciel vous tienne en éveil et que le féminin qui est en vous, femme ou homme, vous permette de voir, de comprendre et de faire votre part, comme le colibri, dans l’évolution nécessaire de notre humanité.

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Lundi 8 septembre 2014

Lundi 8 septembre 2014
« L’architecture ne construit pas des bâtiments, elle construit des situations
L’architecture ne met pas en place des formes, elle met en place des scénarios »
Teddy Cruz
Je me hasarde dans des terrains inconnus, mais cette définition de l’architecture par un architecte américain né au Guatemala m’a interpellé.
Cette phrase a été rapportée par Marie-Hélène Contal, architecte, directrice adjointe de l’Institut Français d’Architecture et Commissaire de l’exposition « Réenchanter le monde », présentée actuellement (jusqu’au 6 octobre) à la Cité de l’Architecture & du patrimoine, dans l’émission de France Culture :La grande table : « Habiter demain « 
Dans cette émission qui incitait vivement à aller voir l’exposition « Réenchanter le monde », présentée jusqu’au 6 octobre  à la Cité de l’Architecture & du patrimoine, au Palais de Chaillot, les intervenants ont beaucoup parlé d’expériences du SUD.
Parce que dans le Sud le problème est avant tout démographique. Dans un mouvement inexorable d’urbanisation et de pression démographique, les mégapoles explosent dans les pays du Sud. Dans ces mégapoles 70% de la ville sont des bidonvilles ou du moins de l’habitat qui n’a pas été créé par un architecte traditionnel.
Dans ces conditions il n’est pas question de détruire et de reconstruire tout dans un geste architecturale de démiurge.  Dans cette émission les intervenants ont dit que les villes fordistes étaient obsolètes.
L’architecte devient curateur, médiateur, ce n’est plus un auteur.
Si vous êtes parisien ou vous passez à Paris vous pouvez aller voir cette exposition : Réenchanter le monde, Architecture, ville, transitions, mercredi 21 mai 2014 – lundi 06 octobre 2014
http://www.citechaillot.fr/fr/expositions/expositions_temporaires/25473-reenchanter_le_monde.html
Et j’ai trouvé aussi une présentation de Teddy Cruz : http://www.lecourrierdelarchitecte.com/article_1903
J’ai le sentiment que ces architectes font partie de ces gens qui changent le monde ou le font évoluer vers du mieux.

Vendredi 5 septembre 2014

Vendredi 5 septembre 2014
« Je veux te voir à fond. »
Une jeune fille anonyme du métro de Lyon
Il faut d’abord faire un peu de sociologie du métro lyonnais, notamment pour ceux qui sont habitués au métro parisien.
Dans le métro lyonnais, on se regarde et même on se sourit. Dans le métro lyonnais on se parle et même on écoute les gens parler.
Donc Annie et moi étions dans le métro lyonnais et nous avons vu et entendu une jeune fille parler avec une amie qui visiblement venait d’arriver à Lyon.
Elle a expliqué notamment qu’elle ne pouvait pas répondre à telle autre sollicitation d’une autre copine parce qu’elle devait voir son amie à fond et qu’elle n’avait donc que peu de temps pour les autres.
Cette expression m’a beaucoup interpellé.
D’abord par le nouveau langage des jeunes : « Je te vois ou je veux te voir à fond » constitue probablement une nouvelle expression, en tout cas je ne l’avais jamais entendue.
Ensuite par ce qu’elle signifie et cela je le comprends.
La rencontre réussie avec un ami nécessite une parfaite disponibilité, c’est ainsi que je la conçois.
Elle peut être rare, probablement doit-elle être rare, mais quand elle se réalise il faut la vivre à fond, comme le disait cette jeune fille si sympathique.
Les sollicitations multiples et la dispersion sont le lot commun de beaucoup.
Cette jeune fille anonyme du métro lyonnais a ainsi exprimé par des mots d’aujourd’hui ce que l’expérience m’a appris.

Jeudi 4 septembre 2014

Jeudi 4 septembre 2014
« Nous vivons dans une société du temps libre »
Jean Viard
Nous sortons, la plupart d’entre nous, de la période de congé. Pour nous,  avoir du temps libre constitue une évidence. Grâce à Jean Viard nous pouvons mettre ce temps libre en perspective.
Jean Viard est un sociologue spécialiste des « temps sociaux » (les vacances, les 35 heures), la mobilité et le politique. Il était l’invité de France Inter le 15 août 2014 où il a abordé ces sujets : http://www.franceinter.fr/emission-le-79-jean-viard-on-travaille-10-de-la-vie
Nous apprenons ainsi qu’en 1914, il y a 100 ans, un homme vivait en moyenne 500.000 heures, il dormait 200 000 heures, il travaillait 200 000 heures et il lui restait 100 000 heures pour faire autre chose.  En 1914 il disposait donc de 20% de temps libre à occuper.
A cette époque, les activités religieuses occupaient encore une grande place dans ce temps disponible.
D’abord on a travaillé 12h par jour, le Décret du 9 septembre 1848 avait fixé la durée journalière maximum à douze heures.
La Loi du 30 septembre 1900, dite « loi Millerand », a limité la journée de travail à onze heures.
Puis une loi de 1919 a fixé la journée de travail à 8 heures et la semaine à 48h.
Il y a eu une même évolution pour le nombre de jours de travail dans la semaine. Le dimanche n’était pas férié jusqu’en 1906. Et c’est le Front Populaire qui a institué la semaine de 40 heures, donc 5 jours de 8 heures.
Et puis il y a eu les congés payés…
Aujourd’hui, nous vivons en moyenne 700 000 heures (80 ans) et nous travaillons (si nous avons un emploi) 63 000 heures.
On travaille donc à peu près 10% de notre vie. Les européens travaillent de 10 à 12%, les américains travaillent plutôt 16%.
Comme nous dormons, en outre, beaucoup moins, nous avons donc un énorme temps libre hors sommeil. Avec une moyenne de 8 heures de sommeil par jour, cela représente 240 000 heures.
Bref, en 100 ans nous sommes passés de 100 000 heures de temps libre hors sommeil à 400 000 heures, quatre fois plus. Et c’est donc l’essentiel du temps que nous passons sur terre, plus de 55% !
Toute la question qui va nous occuper alors, c’est comment occuper ce temps libre ?
Il y a la télé, internet, les jeux, les voyages, la lecture, la culture, le sport et peut être un peu de mobilisation de notre temps de cerveau disponible pour réfléchir à d’autres sujets que ceux du travail…
Jean Viard avait publié en 2002 un ouvrage : « La France des temps libres et des vacances » aux éditions de l’Aube.
Que le ciel vous tienne en joie et imaginez qu’en 1914, je n’aurai pas eu le temps d’écrire un mot du jour sauf si j’avais été rentier…
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Mercredi 3 septembre 2014

Mercredi 3 septembre 2014
« Elles changent le monde »
Caroline Fourest
Pendant la suspension du mot du jour, au mois d’août, les nouvelles du Monde n’ont pas évolué vers une tonalité plus paisible, plus réjouissante :

L’Ukraine a été envahie par la Russie ;

Le sinistre « Etat islamique » a augmenté son emprise en Irak et en Syrie et continue ses massacres odieux ;

Boko Aram continue à déstabiliser le Nigéria et les pays alentours ;

Gaza a continué son lot d’affrontements et de massacres ;

La propagation du virus Ebola s’étend ;

La situation économique française et européenne continue à se dégrader et contrairement à ce qu’affirme Montebourg l’économie du reste du monde ne va pas bien (Le Japon va plus mal : http://abonnes.lemonde.fr/japon/article/2014/08/29/les-japonais-consomment-toujours-moins_4478693_1492975.html, Le Brésil entre récession http://www.liberation.fr/economie/2014/08/29/le-bresil-en-recession-a-presque-un-mois-des-elections_1089657 etc…)

Robin Williams, le professeur génial et illuminé du cercle des poètes disparus, s’est suicidé, le regard hypnotisant de Lauren Bacall s’est définitivement éteint ;

et « last but not least », l’Unità, le journal fondé en 1924 par Antonio Gramsci, organe du parti communiste le plus intelligent de l’Europe occidentale est mort le 31 Juillet 2014.

Ca plombe, n’est-il pas ?
J’ai trouvé un antidote.
Pendant ces congés j’ai écouté une émission créée par Caroline Fourest sur France Inter « Ils changent le monde » : http://www.franceinter.fr/emission-ils-changent-le-monde , d’où ce mot du jour.
Et cela fait du bien d’entendre ces femmes et ces hommes qui chacune et chacun apportent leur contribution à un mieux pour la communauté des humains.
Ainsi de Faouzia Charfi, scientifique tunisienne qui n’a qu’un moteur : la rationalité.
Physicienne de formation, elle a notamment publié « La Science voilée ». Un livre qui retrace les relations contrastées entre l’Islam et la Science. Ses travaux prolongent les écrits majeurs d’un autre intellectuel, aujourd’hui décédé, Mohamed Charfi. Son époux et sans doute l’un des plus grands ministres de l’éducation qu’ait connu la Tunisie. Elle-même, Faouzia Charfi, a occupé le poste de secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur dans le tout premier gouvernement de transition de l’après printemps démocratique, avant d’en démissionner. : http://www.franceinter.fr/emission-ils-changent-le-monde-faouzia-charfi-auteure-de-la-science-voilee
Et puis, Segenet Kelemu, née dans un village d’agriculteur d’Ethiopie qui était trop rebelle, trop « garçonne » pour suivre le destin des autres filles de son village : être mariée très jeune.
Alors elle a poursuivi des études, poussé un peu par son père tout de même. Elle est la première femme de sa région à avoir intégré l’Université d’Ethiopie. Pour y devenir une brillante chercheuse en biologie et phytopathologie. Une vocation née parmi les agriculteurs de son village, où elle a observé la nature avant de trouver, en laboratoire, de quoi améliorer la résistance des plantes fourragères. Celles qui servent à nourrir les animaux d’élevage. Ses travaux lui ont permis d’étudier et d’être récompensée aux États-Unis, en Colombie et même en Chine. Après avoir beaucoup voyagé, elle est de retour en Afrique, à Nairobi, au Kenya, où elle travaille désormais comme Directrice Générale du Centre International de Physiologie et d’Écologie des Insectes (ICIPE).
Sa devise est très belle :  « Fixez-vous des objectifs et n’y renoncez jamais. La science n’est pas réservée à quelques privilégiés, ni à des génies, ni à des fous ! Si j’ai réussi, vous réussirez !  »
Et aussi, plus connue, Esther Duflo. Economiste, née en France, elle enseigne à Cambridge, au MIT, où elle occupe une chaire d’économie et de développement.
Elle travaille surtout en réseau avec d’autres chercheurs. En 2010, elle a reçu la médaille John Bats Clark, que l’on dit être un préambule au Prix Nobel d’économie. L’année suivante, le magazine américain Time l’a classée parmi les personnalités les plus influentes au monde. Depuis, elle a intégré le comité pour le développement mondial chargé de conseiller le président des États-Unis, Barak Obama. http://www.franceinter.fr/emission-ils-changent-le-monde-esther-duflo-des-idees-simples-a-l-oreille-des-puissants
Et pour finir aujourd’hui, Delphine Horvilleur, l’une des deux seules femmes rabbins de France.
Elle fait partie du Mouvement Juif libéral de France et a écrit un livre : « En tenue d’Eve » aux éditions Grasset. Elle arriverait presque à me rendre la religion sympathique : http://www.franceinter.fr/emission-ils-changent-le-monde-delphine-horvilleur-la-nouvelle-generation-n-est-plus-surprise-de-voi
Faouzia Charfi
Segenet Kelemu
Esther Duflo
Delphine Horvilleur
Je reviendrai dans les prochains mots du jour vers quelques-unes de ces rencontres lumineuses qui m’ont particulièrement éblouies et me redonnent foi dans le présent et l’avenir.