Jeudi 27 avril 2017

« Retour à Forbach »
Régis Sauder
Je suis né à Forbach en 1958, j’habitais la ville voisine de Stiring-Wendel. Mais que ce soit le lycée Jean Moulin où j’ai étudié, le conservatoire de musique où mon père enseignait le violon, les librairies que je fréquentais, les cinémas, tous ces équipements se trouvaient dans la ville centre de l’agglomération : Forbach.
Retour à Forbach est un documentaire de Régis Sauder, un forbachois qui montre cette ville aujourd’hui, en laissant parler les habitants de toute origine et expliquer ce qui s’est passé dans cette ville depuis les années 1980.
Ce lundi, après les élections présidentielles, j’ai lu quelques journaux, mais surtout, surtout je suis allé voir ce documentaire qui est sorti en salle le 19 avril 2017.
La Croix écrit : «  Le retour vers les origines figure souvent parmi les aventures les plus périlleuses d’une vie d’homme. Celui de Régis Sauder vers la ville mosellane de son enfance ne fait pas exception à la règle, quant au remuement intérieur qu’il occasionne. Retour à Forbach, le documentaire qui résulte de ce périple aux mille embûches, n’en est que plus fort, impressionnant dans ce qu’il laisse percer de l’admirable éthique de son auteur. »
Les Inrocks parle de la «La désagrégation d’une ville lorraine scrutée par un œil rigoureux. »
A Forbach, Marine Le Pen a atteint 29,65% des voix du vote de dimanche.
Et dans la ville voisine où j’ai passé mon enfance, Stiring-Wendel, encore plus désespérée que la ville centre, la représentante de la France du mur pointe à 37,30%.
Dans mon enfance, les Houillères du Bassin de Lorraine ou HBL régnaient sans partage sur cette agglomération de 80 000 habitants dans laquelle toutes les communes étaient accolées les unes aux autres.
Les mines de charbon étaient la mono industrie, on y travaillait ou on travaillait en sous traitance pour les HBL ou encore on travaillait pour vendre des services ou des biens pour ceux qui y travaillaient.
Tout était pris en charge par les HBL qui avaient leur propre hôpital, leur sécurité sociale spécifique. Les ouvriers étaient logés gratuitement dans des maisons appartenant aux HBL.
La vie culturelle, sportive étaient financées par les HBL.
Et puis, les mines ont fermé et l’économie locale s’est effondrée sur elle même. De nombreux  retraités, avec des revenus honorables mais plus de perspectives pour les jeunes générations.
Ma terre natale a toujours été terre d’immigration, immigration italienne, immigration polonaise. Si mon ascendance paternelle est ancrée dans ce lieu de l’est de la Moselle, ma mère est née polonaise et a accédé à la nationalité française par le mariage. Son père polonais  était d’abord venu travailler en Allemagne dans la Ruhr, à Essen où est née ma maman. Puis des recruteurs venant de Lorraine l’ont convaincu de venir travailler en France, de s’installer à Stiring Wendel en bas de la Rue Croix dans des maisons spécialement construites pour accueillir l’immigration polonaise. 400 m plus haut se trouvait la maison familiale de mon père. Et après les épreuves de la guerre mon père lorrain de souche donc français a épousée l’immigrée polonaise.
A la fin de la période des mines, une immigration maghrébine a aussi été appelée pour venir travailler dans les mines et les métiers autour de la mine. Et les choses se passaient relativement bien.
Mais lorsque l’économie locale s’est effondrée, la cohabitation est devenue plus compliquée.
Le documentaire le montre remarquablement avec des personnages truculents comme la femme qui tient le café du marché, lumineuse comme cette femme qui travaille dans les oeuvres sociales et aussi ces personnes émouvantes d’origine maghrébine qui racontent la difficulté d’aujourd’hui. L’un dit : « Avant quand j’avais besoin d’aide je demandais à mon voisin qui était d’une origine différente de la mienne. Mais aujourd’hui cela ne fonctionne plus alors je vais à la mosquée et c’est là que je trouve de l’aide »
Et puis cet ouvrier qui explique qu’il a un emploi salarié et qu’il a un prêt sur 15 ans pour sa maison, alors selon ses propos : « il courbe l’échine. Quand il esquisse une révolte, son patron lui dit : tu peux partir il y en a 15 qui attendent ». La fierté s’est envolée.
Et je me souviens de mes cousins qui travaillaient au fond de la mine. Travail dur, éprouvant pour la santé mais lorsqu’ils parlaient de leur métier, leurs yeux brillaient de fierté. Ils arrachaient la pierre de la terre pour chauffer les maisons, pour faire tourner les usines. Il y avait l’évidence immédiate de l’utilité de leurs efforts.
La fierté d’hier heurte la résignation d’aujourd’hui.
Le centre ville de Forbach est déserté, un grand nombre de commerces sont fermés. Des panneaux « à louer » sont collés, mais personne n’est dupe ces commerces n’ouvriront plus.
Et les communautés s’observent, probablement avec un peu de peur et en soupçonnant vaguement que c’est l’autre qui est responsable de ce gâchis.
Et les mines qui ont fermé continuent cependant à hanter la région : les nombreuses galeries creusées dans le sous sol entraînent des dégâts miniers et fissurent les maisons nécessitant soit de lourds travaux soit de quitter ces maisons.
Heureusement qu’à 10km se dresse Sarrebruck, la capitale de la Sarre le plus petit des länder de l’opulente Allemagne.
Bien sûr, ce document qui parle de la terre où je suis né me touche particulièrement. Mais je crois que chacun pourra y trouver un début de réponse à cette question mais pourquoi le Front national recueille t’il tant de voix ?
Le documentaire annonce qu’une librairie va rouvrir au centre ville. C’est une note d’espoir.

Lundi 11 Janvier 2016

« DEMAIN »
Film de Cyril Dion et Mélanie Laurent

La nouvelle année c’est le moment de fermer la porte à l’ancien et de penser à demain.

Alors je voudrais partager avec vous «Demain» qui est un film documentaire que je suis allé voir lors de mon abstinence épistolaire.

Beaucoup d’informations et de constats nous conduisent à nous inquiéter pour le demain que nous aurons à vivre ou que nous laisserons à nos enfants. Mais le film «Demain» apporte beaucoup d’optimisme. C’est un demain positif car Cyril Dion, Mélanie Laurent et quelques amis sont allés chercher dans le monde et même en France des expériences qui existent déjà et qui constituent une part de la solution aux défis que nous avons à affronter : diminuer notre empreinte carbone et notre dépendance aux énergies fossiles; être en mesure de nourrir de plus en plus d’habitants sur la planète bleue, surmonter l’impasse économique dans laquelle nous nous enfonçons et où la richesse produite est accaparée par une caste de plus en plus étroite.

Le film s’ouvre sur les conclusions d’une étude de la NASA publiée dans la revue Nature et annonçant un effondrement probable de notre civilisation dans les 40 années à venir. Les savants de Stanford qui ont piloté cette étude sont d’ailleurs interviewés au début du film.

Le film est ensuite divisé en 5 chapitres qui abordent les défis, les dysfonctionnements actuels et les pistes d’ores et déjà trouvées :

Le chapitre 1 concerne l’alimentation et tend à démontrer qu’il est possible de produire plus de nourriture, sans engrais ni pesticides, avec peu de mécanisation et en réparant la nature plutôt qu’en la détruisant. Nous voyons comment nos villes peuvent réintégrer l’agriculture et nos campagnes se repeupler. On voit ainsi l’expérience de la ville de Détroit qui est passée de 2000 000 d’habitants à 700 000 habitants lors de la crise de l’industrie automobile et où, dans un premier temps pour survivre, les habitants qui sont restés ont développé le concept de l’agriculture dans la ville. Cette expérience a débouché sur une nouvelle manière de vivre la ville et son approvisionnement avec 1600 fermes urbaines. Le film présente aussi des expériences en Angleterre en particulier la ville de Todmorden près de Manchester (14 000 ha) dont les habitants sont en train de reconstruire leur autonomie alimentaire (objectif 2018).

Le chapitre 2 traite de la transition énergétique. Ainsi des villes et même des pays s’organisent pour se passer totalement de pétrole, de charbon et d’énergie nucléaire. Ainsi le film montre Copenhague qui vise à n’émettre plus aucun CO2 en 2025 et qui a construit un modèle d’urbanisme où 50% des habitants de la ville se déplacent en vélo et où ils habitent à moins de trois cent mètre d’un espace vert. En 2010, elle arrivait en première place des villes les plus résistantes au changement climatique, dans l’étude du chercheur américain, Boyd Cohen. À l’horizon 2025, 75% des tous les déplacements devront être effectués, à pied, en vélo, ou en transports publics.

Le chapitre 3 aborde la question de l’économie et nous apprenons l’existence de monnaies locales (complémentaires aux monnaies classiques) qui ont pour effet d’améliorer la circulation locale de l’argent et donc les circuits courts et l’économie locale. C’est d’abord, à ma grande surprise, La Suisse qui possède l’un des exemples les plus solides de monnaies complémentaires dans le monde et qui s’appelle WIR. Créé en 1934 par 16 entrepreneurs subissant de plein fouet la crise de 1929 et la frilosité des banques, elle propose un système de crédit mutuel, permettant aux entreprises de continuer à fonctionner même lorsque les crises paralysent le système bancaire et de réaliser leurs investissement à bien plus faible coût.

Aujourd’hui, 70 ans plus tard, elle est utilisée par une PME suisse sur cinq (75.000 membres). Une étude américaine qui a porté sur une quinzaine d’années démontre que cette monnaie contribue à la solidité de l’économie nationale. En effet, en cas de crise monétaire, les entreprises échangent davantage de WIR, échappant ainsi au phénomène d’assèchement du crédit. En revanche, quand l’économie va bien, les entreprises ont moins tendance à utiliser le WIR, et utilisent davantage le Franc Suisse. Le WIR montre donc, chiffres à l’appui, qu’une monnaie complémentaire peut non seulement se développer à grande échelle, mais que l’existence d’un véritable écosystème monétaire permettrait de mieux faire face aux aléas économiques et financiers. Mais de telles monnaies existent aussi aux Etats Unis et en Angleterre. Cette vision est complétée par les pratiques de l’économie circulaire : créer des chaînes de production sans déchets où le recyclage des matières est quasiment infini et où les déchets des uns deviennent les ressources des autres.

Le chapitre 4 donne des exemples d’éducation et d’enseignement innovants qui apprennent aux enfants à coopérer, à résoudre pacifiquement leurs conflits, à vivre harmonieusement avec eux-mêmes, les autres et la nature, à réapprendre des savoir-faire indispensables. C’est cette fois la Finlande qui démontre son excellence dans ce domaine.

Le chapitre 5 enfin parle du réenchantement de la démocratie par des initiatives qui impliquent vraiment les gens.

Je ne peux que vous inciter à aller voir ce beau film plein d’espoir et de pistes que chacun peut compléter par ses idées créatrices.

Gandhi disait :

« Soyez-vous même le changement que vous voudriez voir dans le monde »

En attendant il y a le site de crowfunding, c’est à dire de financement participatif qui a assuré une partie du budget du film qui présent cette belle réalisation et dont j’ai tiré une partie des précisions que je vous ai donné dans ce message : http://www.kisskissbankbank.com/demain-le-film

Et puis il y a le site spécifique au film qui est très riche d’enseignements : http://www.demain-lefilm.com/le-film

<Et ici la bande d’annonce du film>

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