Ces derniers temps, grâce à François Sureau, je me suis inquiété sur l’état de nos libertés publiques en France.
Frédéric Says dans sa chronique du 8 octobre 2019 : <Données privées, libertés publiques> a donné un exemple d’initiative qui montre le caractère raisonnable de l’inquiétude, préalablement évoquée.
Lui-même citait ses sources : <Le site de Bloomberg, l’agence d’actualités financières>.
Le nom de l’application possède une consonance rassurante : « Alice aime ».
Derrière cet acronyme se cache une application de reconnaissance faciale.
Le site de Bloomberg annonce que de cette manière la France va devenir le premier pays européen à utiliser officiellement la reconnaissance faciale. Car cette application pour mobile conçue par le ministère de l’Intérieur, permet de s’identifier en se prenant en photo ou en vidéo, pour accéder aux services publics en ligne.
Frédéric Says précise :
« Le nom de cette application ? Alicem, acronyme pour « Authentification en ligne certifiée sur mobile ». Étonnamment, ces programmes jugés intrusifs portent toujours des noms doucereux, printaniers, féminins. « Alicem », cela rappelle délicieusement le prénom Alice et finit par la syllabe « aime ».
Il y a eu un précédent. C’était en 2008. Souvenez-vous d’« Edvige ». Une base de données qui fichait les individus potentiellement dangereux, mais aussi les préférences religieuses et sexuelles de responsables politiques, syndicaux, économiques. Michèle Alliot-Marie était alors ministre de l’Intérieur. Devant le tollé, elle avait dû reculer [extrait sonore].
Alicem, Edvige : comment nourrir le moindre soupçon envers de si jolis noms ? Certes, ce serait étonnant que ces programmes s’appellent « Terminator 3.0 » ou « GeorgeOrwell2019″…
Il ne s’agit pas ici de dire, bien sûr, que le gouvernement masque des intentions totalitaires. Le ministère de l’Intérieur rappelle d’ailleurs que cette application s’appuie le consentement de l’utilisateur. Il n’est pas question de reconnaissance faciale non consentie comme en Chine.
Aujourd’hui oui, mais demain ?
L’avancée technologique rend possibles le traitement de masse des données privées, et donc le rétrécissement massif des libertés publiques. »
Cette application devrait voir le jour en novembre.
La Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) joue une sorte de rôle de lanceur d’alerte et prétend que cette application serait en contradiction avec le droit européen, notamment parce qu’elle ne propose aucune alternative à la reconnaissance faciale pour se connecter à certains services.
Ce site spécialisé en informatique précise les réticences de la CNIL <ALICEM : la biométrie de l’identité numérique sur mobile fait tiquer la CNIL>
Si vous voulez en savoir davantage, « Sciences et Avenir » essaye de faire <le point sur Alicem, le système de reconnaissance faciale du ministère de l’Intérieur>
L’association <La Quadrature du Net> a déposé un recours contre Alicem devant le Conseil d’État.
Tout ceci est bien sûr mis en œuvre pour assurer une meilleure sécurité sur Internet, éviter le passage par un mot de passe qui selon tous les avis autorisés constitue une passoire en matière de sécurité.
Certains prétendent que cette évolution, « ce progrès » disent-ils, est inéluctable.
Il n’en reste pas moins que tout ce qui est techniquement possible n’est pas forcément souhaitable. Il faut au moins se poser la question…
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