Mardi 19 septembre 2017

« J’ai vécu d’art, j’ai vécu d’amour »
Puccini, Tosca, Vissi d’arte

J’ai fini le mot du jour d’hier, consacré à l’artiste Maria Callas, par son interprétation de la Tosca.

Aujourd’hui pour parler de la femme, de sa vie de femme je trouve pertinent d’utiliser, comme exergue, les premiers mots de ce qu’on appelle la prière de la Tosca, dont vous trouverez le texte intégral derrière <ce lien>.

Maria Callas est née le 2 décembre 1923 à New York sous le nom de Sophia Cecelia Kalos alors que sont père avait pour nom patronymique Kaloyeropoulos. Wikipedia écrit :

« On ignore la date exacte à laquelle le nom de Callas remplaça Kalos, qui lui-même avait remplacé Kaloyeropoulos, ni même s’il l’a réellement remplacé »

L’enfance de Maria Callas se passa dans une famille désunie dont le père fut d’abord absent puis séparé de sa mère.

Les relations de Maria Callas avec sa mère furent conflictuelles. Sa mère est décrite comme une personne au proie à des crises d’hystérie ou de dépression et d’un caractère irascible. L’attitude volage et peu responsable du père explique certainement en partie cette situation.

Maria Callas a toujours déclaré qu’elle avait le sentiment que sa mère lui préférait sa sœur Jackie.

En 1957, au cours d’un entretien télévisé, elle confia :

« À l’âge auquel les enfants devraient être heureux, je n’ai pas eu cette chance. J’aurais souhaité l’avoir. ».

Wikipedia cite Time Magazine en 1956 :

« Ma sœur était mince, belle et attirante si bien que ma mère l’a toujours préférée à moi. J’étais un vilain petit canard, grosse, maladroite et mal-aimée. Il est cruel pour un enfant de ressentir qu’il est laid et non désiré… Je ne lui pardonnerai jamais de m’avoir volé mon enfance. Pendant toutes les années où j’aurais dû jouer et grandir, je chantais ou gagnais de l’argent. J’avais toutes les bontés pour elle et tout ce qu’elle me rendait était du mal… »

Dans son ouvrage « Maria Callas », Jacques Lorcey rapporte ces propos de Maria Callas, à propos de ses débuts de cours de chant :

« J’ai chanté parce qu’on m’a fait chanter ! Je n’en avais pas spécialement envie… »

Les musicologues Roland Mancini, John Ardoin et Arianna Stassinopoulos expriment la conviction que sans la détermination de sa mère, il n’y aurait probablement pas eu de Maria Callas.

Dans l’émission de la télévision française citée hier, Maria Callas exprimait cet éthique de sa part de faire bien ce qu’elle devait faire. Elle s’est donc appliquée à bien apprendre à chanter.

Ainsi, elle eut une enfance où manquait un père et la tendresse maternelle.

Comment expliquer autrement que par la recherche d’un père son mariage en 1949 avec le terne Giovanni Battista Meneghini, un industriel italien mélomane, qui non seulement était de vingt-huit ans son aîné, mais avait à cette date plus du double de son âge. D’ailleurs il semble bien que très rapidement Meneghini s’occupa surtout de gérer la carrière de son épouse plutôt que de jouer un rôle de compagnon et d’époux.

La rencontre en 1959 avec Aristote Onassis, grec comme elle, flamboyant et séducteur, fut un vrai bouleversement dans sa vie de femme.

M’intéresser à cette relation m’a conduit à examiner de plus près cet homme extravagant qui s’appelait Aristote et avait pour père Socrate Onassis et comme oncle Homère Onassis. Il appela son fils Alexandre. Seule sa fille eut un prénom qui ne revendiquait pas de glorieux ancêtres grecs : Christina.

Sa relation avec Maria Callas fut celle à la fois du séducteur, puis d’un persécuteur et disons d’un malotru pour finalement toujours revenir chercher l’affection et le soutien de Maria Callas.

Sa rencontre et le début de cette relation amoureuse eu pour conséquence de l’éloigner de la scène. Entre 1959 et 1965, elle n’apparaît que dans quelques rares productions à Paris, Londres et New York. Elle s’installe à Paris, donne de rares récitals et essaye de se convertir dans l’enseignement.

D’ailleurs, Onassis ne faisait pas partie de ses admirateurs fervents car il n’aimait pas particulièrement l’opéra.

Gala ne fait pas partie de mes lectures habituelles, mais j’ai trouvé cet article qui, écrit bien sûr dans le style de Gala, me semble assez proche de ce que j’ai lu dans des ouvrages plus sérieux sur Maria Callas.

Ce journal rapporte notamment un échange entre l’immense artiste et le milliardaire. Onassis s’offrit une île grecque Skorpios, ile sur laquelle il est d’ailleurs enterré ainsi que son fils. Un jour, alors qu’elle lui faisait remarquer qu’il dépensait beaucoup trop pour son île, il se mit en rage. :

«N’oublie jamais que tout ce qui touche à mon plaisir et à mes distractions doit être prêt à l’emploi. C’est la même chose avec mes maîtresses. Je m’assure qu’elles sont rodées avant de les prendre.

– Je ne comprends pas? Que veux-tu dire?

– Exactement ce que j’ai dit.»

Encore un de ces mâles malveillants qui ne peut que nous rendre, nous autres hommes, peu fier d’appartenir à notre genre.

Et puis il y eut la trahison finale, car Maria Callas dans son échelle des valeurs voulaient épouser l’homme qu’elle aimait. Toujours dans l’émission de la télévision française citée hier, Maria Callas exprimait sa vision du monde :

«Dans notre société, les hommes sont polygames, pas les femmes !»

Bien qu’elle fusse rebelle et eut du caractère, elle accepta cependant cette relation déséquilibrée avec un mâle alpha de l’espèce homo sapiens. C’est ainsi selon ce qu’elle rapporta par la suite, elle apprit le futur mariage sur l’île de Skorpios de son homme aimé avec Jackie Kennedy par les journaux, comme le reste du monde.

Cependant le mariage d’Aristote Onassis avec Jackie Kennedy tourna rapidement au désastre. Et très vite, Onassis repris contact avec Maria Callas. L’ancienne secrétaire privée de l’armateur et le journaliste américain Nicholas Gage racontent qu’ils continueront de se voir jusqu’à la fin, au 36 de l’avenue Georges-Mandel à Paris.

Aristote lui confia ses déboires sentimentaux et aussi ses déboires financiers. On a beau être un mâle dominateur on a quand même besoin d’une femme de confiance pour être écouté et consolé.

Toutefois, Maria Callas montra quand même du caractère semble t’il et même du mauvais car lors de ses dernières années de leur vie, si leurs relations furent continues, elles furent orageuses ;

Jacque Lorcey dans son livre Maria Callas, écrit par exemple page 340 :

« Elle refuse de lui ouvrir. Sans se soucier des voisins, Aristote crie pendant de longs moments. :

  • Si tu n’ouvres pas, je fais défoncer la porte par ma rolls !
  • Si tu entres, je te jette par la fenêtre ! Espèce de petit marchand qui se prend pour Jupiter !… »

Mais ce fut bien Maria Callas qui fut sa dernière visite à l’hôpital de Neuilly, le 15 mars 1975, jour de son décès.

Après cette mort elle dit :

« J’ai perdu tout ce qui me rattachait à la vie »

La diva se retira de plus en plus du monde dans son appartement parisien. La mort d’Onassis en 1975 achève de la murer dans sa solitude. Épuisée moralement et physiquement, prenant alternativement des barbituriques pour dormir et des excitants dans la journée, elle meurt le 16 septembre 1977, à l’âge de 53 ans.

La cérémonie funèbre a lieu, le 20 septembre 1977. Maria Callas est incinérée au cimetière du Père-Lachaise où une plaque lui rend hommage.

Après le vol de l’urne funéraire, retrouvée quelques semaines plus tard, ses cendres (ou ce que l’on pense être comme telles) seront dispersées en mer Egée, au large des côtes grecques, selon son vœu.

La Bible de l’opéra comme l’avait baptisée Leonard Bernstein ne survécut donc que deux ans à cet homme auquel elle sera resté attacher jusqu’au bout.

L’amour est aveugle. Maria Callas fut aussi tragédienne dans sa vie privée.

Mais il me semble qu’il y avait là une sorte de soumission de la femme, un peu comme Anne Pingeot à l’égard de François Mitterrand qui comme je l’ai rapporté dans le mot du jour du 27/10/2016 a dit finalement : «En même temps, ce côté de soumission a fait en sorte que j’ai accepté l’inacceptable. »

Accepter l’inacceptable ! Accepter même quand la femme est une des plus grandes artistes que la terre ait porté et qu’elle le savait et qu’en face il n’y avait qu’un marchand, un homme d’affaires cynique dont la seule réussite fut l’argent et dont la trace dans l’Histoire reste médiocre surtout comparé à Maria Callas.

Je finirai par la sagesse de Cocteau :
«Surtout, surtout… sois indulgent,
Hésite sur le seuil du blâme.
On ne sait jamais les raisons
Ni l’enveloppe intérieure de l’âme,
Ni ce qu’il y a dans les maisons,
Sous les toits, entre les gens. »

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