– il se mesure de manière objective
– il permet de séparer la vie professionnelle de la vie personnelle.
– le limiter, c’est protéger la santé.»
Il semblerait que la grande question du moment en France est celle «du carcan des 35 heures».
Je veux bien comprendre qu’il y a de ci de là des problèmes d’organisation.
Mais enfin, les réflexions de Daniel Cohen et d’autres montrent à l’évidence que nous avons un problème général d’emploi correctement rémunéré pour tous, dans tous les pays développés.
Alors il existe des pays, peut-être ont-ils raison, qui préfèrent des jobs très mal payés (Allemagne, USA, GB) que pas de job du tout et des allocations chômages coûteuses (France).
Mais s’il n’y a pas assez d’emplois pour tout le monde, j’ai du mal à comprendre que la solution est de faire travailler davantage celles et ceux qui ont déjà un emploi.
Mais ce n’est pas de cet aspect de la durée du travail que je souhaite vous entretenir aujourd’hui mais de la référence même au temps de travail comme mesure du travail.
Parce que la tentation, « la modernité » conduit toujours davantage à considérer que le temps de travail constitue une mesure archaïque du travail. C’est particulièrement vrai dans le monde numérique.
On est passé d’une économie de «main d’œuvre» à une économie de «cerveau d’œuvre» et le cerveau n’arrête pas de réfléchir. On réfléchit tout le temps.
Par quoi veut-on alors le remplacer ?
Certains parlent de «charge de travail» à laquelle l’employé doit faire face.
Plus généralisé est le management par objectif qui permet aussi de s’émanciper largement du temps de travail. Au début, cette convention « Tu as un objectif à atteindre, mais tu t’organises comme tu l’entends » constitue un hymne à la liberté, à l’ingéniosité et peut être même à la capacité de travailler moins si on « se débrouille très bien ». Et puis un objectif, en principe c’est objectif et rationnel.
Mais vous comprendrez bien que la quantification de l’objectif, comme la charge de travail, peut constituer un piège qui pour celui qui s’astreint ou même est contraint, sous peine de perdre son emploi, d’atteindre son objectif, peut dégénérer dans une explosion perverse de la durée consacrée au travail.
Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense invité à l’émission du grain à moudre du 15/09/2015 rappelle qu’en réalité seul le temps de travail, la durée qu’on consacre au travail constitue une mesure objective.
Il explique :
« Il faut être très vigilant quand on entend dire que demain le temps de travail ne sera plus la mesure du travail. Le temps de travail est protecteur à plusieurs titres :
D’abord il se mesure de manière objective
La charge de travail qu’on veut parfois substituer au temps de travail est très subjective
Ensuite le temps de travail permet de séparer la vie professionnelle de la vie personnelle.
Et enfin limiter le temps de travail c’est protéger la santé.»
C’est pourquoi la durée de travail reste un critère déterminant.
L’émission était consacrée à un rapport sur le droit du travail du DRH d’Orange à Myriam El Khomri consacré aux impacts du numérique sur la vie au travail.
Parmi les propositions, une redéfinition du salariat et une réflexion sur le temps de travail.
[…] Elles sont censées alimenter le projet de loi que la ministre du Travail présentera, au plus tôt, d’ici la fin de l’année.
Est-il nécessaire de légiférer sur le sujet ?
Ce qui est sûr, c’est que l’arrivée du numérique a profondément modifié notre rapport au travail. Au sein de l’entreprise en brouillant la frontière entre vie professionnelle et vie privée, au point de remettre en cause la notion –centrale- de temps de travail. Mais aussi en dehors, en favorisant l’émergence de nouveaux entrepreneurs, des travailleurs indépendants, plus autonomes mais aussi plus précaires puisque n’étant pas sécurisé par un contrat. Comment accompagner ces bouleversements sans renier les fondements du droit du travail ?
Sur ces sujets, Mediapart a déniché une intervention du PDG d’Air France qui se lance dans des réflexions «très libres et très ouvertes».
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