Lundi 7 décembre 2015

Lundi 7 décembre 2015
«La sécession de populations entières avec le système politique de gouvernement du pays.»
Axel Kahn
Introduction que doivent ignorer les nombreux destinataires pressés
Aujourd’hui je suis en congé d’abord parce qu’il était prévu que nous nous trouvions en pleine fête des Lumières à Lyon, ensuite parce que j’avais un de ces rendez-vous désormais habituel pour moi avec un disciple d’Esculape. Je n’avais pas prévu de suspendre le mot du jour car je disposais de quelques réserves que je pouvais partager avec vous. Mais à la réflexion, il m’a paru ce matin qu’il n’y en avait aucun qui correspondait au temps du jour. Et rien de ce que j’avais entendu hier soir, ni ce matin ne me paraissait de nature à éclairer ce qui doit être la préoccupation du plus grand nombre. Je me suis donc abstenu. Mais je suis désormais à la mi-journée en mesure de vous proposer deux réflexions.
Le résultat d’hier ne saurait constituer une surprise. Toute personne rationnelle s’attendait à une consolidation des résultats de ce Parti qui n’a pas de solutions pour la France mais dont les dénonciations du système politique largement inefficace pour agir sur les choses qui comptent pour les gens, de la corruption de quelques-uns, de la connivence et de l’entre soi du plus grand nombre, rencontre la peur, les angoisses et les exaspérations d’une grande partie de la population française.
50% de la population ne se sent pas concerné par les élections et ne viennent même plus voter. Et parmi les 50% qui viennent il y a maintenant 3 pôles : le pôle le plus important celui de l’exaspération et de la dénonciation, les pôles de la droite et de la gauche qui ont l’habitude de gouverner. L’extrême gauche et les écologistes sont marginalisés alors que les problèmes sociaux et environnementaux n’ont jamais été plus prégnants.
Il utilise le terme de sécession. Car oui la France est divisée en deux plutôt qu’en 3 comme dit précédemment.
Il ne s’agit plus d’une division entre la gauche et la droite, entre les partisans de l’Etat et ceux du libéralisme.
Non. La France est divisée entre ceux qui sont inclus dans le système qui habitent les métropoles, disposent de diplômes et des clefs leur permettant de s’en sortir, d’avoir des espoirs raisonnables pour leurs enfants, et la disponibilité ainsi que l’éloignement suffisant avec les problèmes pour développer une pensée ouverte et positive au monde et ceux qui sont exclus ou craignent à courte échéance d’être exclus.
Et sur ce point j’ai trouvé une autre tribune dont je partage la plus grande part : <Contre le FN construire plutôt que dénoncer> :
« L’édito « anti-FN » du directeur du Monde, publié à la veille des élections régionales, est affligeant. Au bout de 30 ans, ils arrivent encore à croire que les éditoriaux critiquant le FN vont faire reculer ce parti. Juste à pleurer de voir tant d’aveuglement, à moins que ça ne soit du cynisme, pour obliger par la peur, à faire voter pour les partis dits « de gouvernement ».
Si le FN monte aux élections, c’est pour des raisons bien connues de qui veut bien regarder. Il est le symptôme d’un malaise profond de la France, d’une certaine France qui se sent exclue et méprisée, pour qui l’action publique, depuis 30 ans, n’a été qu’une série de déceptions. On leur a tout promis, droite comme gauche, et ils n’ont vu qu’une dégradation de leur situation. En prime, ils se font traiter de cons par des gens qui vivent dans une tour d’ivoire, bien à l’abri dans une forteresse dont les autres sont exclus.
Le FN monte parce que la France est un pays barricadé, qui précarise une partie de sa population (qui en finit par voter FN), pour sécuriser une petite minorité (celle qui lit Le Monde). Il suffit de voir la difficulté qu’il peut y avoir pour certains à avoir un travail, un logement, même simplement accès à internet ou aux services publics. Quand vous habitez au fin fond de la Picardie, que vous êtes au chômage (et sans espoir de sortir des petits boulots), que le bureau de poste de la commune d’à côté vient de fermer, que votre débit internet est encore de 512K, quel effet peut avoir l’édito du monde, qui vous explique que le programme du FN est une imposture ? Déjà pour commencer, vous ne lisez pas le Monde. Vous ne lisez pas plus les programmes de partis politiques, quels qu’ils soient. Pour ce qu’ils valent, ce n’est pas plus mal, car si le programme du FN est mauvais, il a le mérite d’exister. J’aimerais bien lire le programme du PS, enfin, le vrai, celui qu’ils appliquent, pas celui qui était sur leur tract au moment des élections (rappelez-vous : « le changement, c’est maintenant »).
La question du FN n’est donc pas une histoire de programme politique qu’il faudrait démonter de manière systématique et rationnelle. C’est d’abord l’histoire d’une fracture sociale (encore un vieux slogan non suivi d’effets) et d’un immobilisme des élites, qui s’est doublé, ces derniers temps, de la révélation de leur incompétence totale. Il a suffi d’une crise liée à des attentats pour que le décor s’écroule et qu’on s’aperçoive que ces élus pontifiants ne maitrisent plus rien. La seule ressource de François Hollande pour répondre à la menace terroriste est de donner les pleins pouvoirs à la Police, au mépris total des Libertés publiques.
Depuis le 13 novembre, et la manière dont se comportent nos élus, j’en viens à comprendre le vote FN. Je n’en suis pas encore là (et il en faudra vraiment beaucoup pour que j’y arrive) mais je partage désormais la colère que les électeurs cherchent à exprimer en votant pour le FN. Je comprends que pour certains, le vote FN est un crève-cœur, mais cela leur apparait comme la seule porte de sortie, faute d’alternative.
Cette alternative, il faut la bâtir et la colère peut être un moteur. Il y a beaucoup de boulot en perspective. Certains vont se précipiter sur la première solution qui vient à l’esprit : monter un parti politique et présenter des candidats aux élections. C’est la dernière étape du processus, si rien n’a marché avant.
Il faut commencer par bâtir un programme. C’est un boulot énorme de se poser, de dire ce que l’on veut, de le formaliser. Cela peut être des mesures très précises, mais aussi des lignes directrices ou de grandes aspirations. Il faut aussi le diffuser et le faire partager. Il est donc nécessaire de « rencontrer un public » et cela n’est possible que si le programme répond aux aspirations et attentes d’une génération. Ce n’est pas possible de le faire dans les éditoriaux de grands journaux parisiens ou depuis les plateaux de télévision. Non seulement ils sont squattés par la vieille génération, mais surtout, ils ne sont que des moyens de diffusion. Quand on n’a rien à dire, comme une bonne partie de notre classe politique l’illustre, passer en boucle à la télévision ne sert pas à grand-chose. Les outils, notamment numériques, existent, mais cela demande aussi une structuration, qui pour le moment, fait défaut. Si des structures existent, aucune ne s’est vraiment donné comme objectif de porter un projet politique. »
Un projet politique comme aurait dit Mendés France, une stratégie non pas électorale mais pour le monde demain crédible et compatible avec les intérêts du plus grand nombre et encore plus compliqué, compatible avec les contraintes de notre terre.