Dans ce temps particulier que nos sociétés traversent dans le monde entier, la solidarité s’exprime, le dévouement des soignants et d’autres travailleurs dont on comprend aujourd’hui l’importance. Même si ce sont souvent des personnes que le monde de l’économie ne met pas en avant : les éboueurs, les caissières des supermarchés, les routiers qui véhiculent les denrées indispensables ou encore tous ceux et beaucoup plus celles qui nettoient les lieux de travail, les hôpitaux, les Ehpad.
Il y aussi beaucoup de critiques et même d’expression de haine.
Certains ont l’air de savoir exactement ce qu’il aurait fallu faire et qui sont les responsables de tous nos malheurs.
Et pourtant, ne faudrait-il pas davantage d’humilité ?
Beaucoup d’exemples pourraient être donné, mais je n’en donnerai qu’un celui de Christophe Prudhomme, représentant CGT des urgentistes qui tient désormais des propos très virulents contre le gouvernement, son manque d’anticipation, ses décisions en retard etc.
Ces propos qu’il tient à la fin du mois de mars sont incroyables quand on les rapproche des propos de ce même professionnel au début du même mois de mars. Sur le plateau de LCI il accusait alors le gouvernement de surréagir et considérait ce virus comme peu dangereux.
Vous trouverez tous les éléments dans cet article avec notamment les deux interventions incompatibles de la même personne à 3 semaines d’intervalle.
Evidemment, nous manquons de masques !
Mais pourrions-nous nous souvenir que lors de l’épisode de la grippe H1N1, la ministre de la santé d’alors, Roselyne Bachelot avait anticipé et fait acheter des centaines de millions de masques ?
Cette épidémie-là ne s’était pas déployée, alors on l’a critiqué méchamment d’avoir dilapidé l’argent public.
J’aimerais qu’on rappelle les propos d’alors des spécialistes qui aujourd’hui trouvent anormal qu’on ne dispose pas d’un milliard de masques.
C’est <La revanche de Roselyne Bachelot>, elle qui dit aujourd’hui :
« Il suffirait de relire mon audition après la grippe A, je n’ai qu’une théorie : en matière de gestion d’épidémie, l’armement maximum doit être fait. Nous avions un stock près d’un milliard de masques chirurgicaux et de 700 millions de masques FFP2. J’ai été moquée pour cela, tournée en dérision, mais quand on veut armer un pays contre une épidémie, c’est ce qu’il faut ! »
Elle n’appartient pas à la majorité présidentielle, mais son expérience lui fait tenir des propos très mesurés :
« Je pensais qu’on me rendrait justice après ma mort. J’ai dû attendre dix ans. Gérer une crise sanitaire, c’est conduire une Ferrari sur une route verglacée. C’est très compliqué !
Olivier Véran est un bon ministre qui gère ça bien. Le chef de l’État prend les décisions appropriées. Le problème avec les masques ne vient pas d’eux. De toute façon, l’heure n’est pas aux polémiques, il faut respecter le confinement, rester chez soi. Faire preuve d’obéissance civile. Il n’y a que cela à faire. »
Je ne résiste pas au partage d’une petite vidéo d’une intervention de Barack Obama Le 29 octobre 2019 à Chicago dans le cadre du troisième sommet annuel de la fondation de Michelle et Barack Obama.
Il s’adresse aux jeunes et notamment aux jeunes sur les campus universitaires américains et particulièrement à ceux qui préconisent le « woke » expression américaine que je tenterai d’expliquer plus loin.
Barack Obama a dit :
« Cette idée de la pureté, de ne jamais faire de compromis, d’être toujours concerné par les questions sociales etc.
Vous devriez passer rapidement à autre chose.
Le monde est chaotique.
Il y a des ambiguïtés.
Les gens qui font de très belles choses ont des défauts.
Les personnes avec lesquelles vous vous disputez, aiment peut être leurs enfants et ont des points communs avec vous.
Je pense qu’il y a un danger chez les jeunes, particulièrement sur les campus universitaires.
Ma fille Malia et moi, nous en parlons.
J’ai parfois l’impression qu’aujourd’hui, chez certains jeunes, et ça s’est accéléré avec les réseaux sociaux, qu’il y a parfois ce sentiment que pour faire changer les choses, il faut être le plus critique possible envers les autres, et que cela suffit.
Par exemple, si je tweete ou si je mets un hashtag sur ce que vous avez mal fait ou sur le mauvais verbe que vous avez employé et après cela je peux me détendre et être plutôt fier de moi, genre : « T’as vu comme j’ai été concerné par les questions sociales ? Je t’ai bien affiché !
Puis j’allume ma télévision et je regarde mon émission, je regarde [ma série]. Ce n’est pas de l’activisme, ça !
Ça ne fait pas changer les choses.
Si la seule chose que vous faites, c’est critiquer, vous n’irez probablement pas bien loin. C’est trop facile. »
Barack Obama essaye donc de convaincre les jeunes qui se retrouvent sous l’expression», typiquement américaine « woke » qui signifie « éveillé ». Cette expression a été reprise par tout un nombre de représentants de minorités qui se jugent victimes de discriminations et développent une vigilance exacerbée contre la moindre trace de racisme ou de discrimination qu’ils pensent découvrir. Dans cette tendance un auteur blanc ne peut plus écrire sur le racisme à l’égard des noirs, parce qu’il n’est pas noir lui-même. Cet <article de la revue des deux mondes> explique cette dichotomie entre les adeptes de la pureté et ceux de l’universalisme.
Caroline Fourest a décrit cette dérive dans son livre <Génération offensée>
Mais je crois que ce discours de Barack Obama peut s’adresser à un plus grand nombre, notamment à tous ceux qui n’ont que la critique dans la bouche et sur leur clavier, qui pensent toujours que le problème vient d’ailleurs.
Que s’il y a un problème, c’est qu’une question technique n’a pas été bien analysée et que quelqu’un quelque part a « merdé ».
Les problèmes que nous avons à affronter ne sont pas toujours aussi simples.
Une grande part des difficultés ne se trouvent pas à l’extérieur de nous, mais dans nos impatiences, nos contradictions, nos désirs et notre adhésion à l’individualisme et au consumérisme.
Critiquer ne suffit pas, il faut aussi proposer.
Proposer des solutions qui peuvent être mises en œuvre, non de simples utopies dont on n’a pas le moindre commencement de début d’organisation viable à proposer à la dimension d’un État, sans parler de la dimension du monde.
Et quand on propose une solution, il faut en comprendre et décrire les conséquences pour notre quotidien, nos désirs et ceux des autres.
Il y a des ambigüités dit Obama.
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