Jeudi 10 décembre 2015

Jeudi 10 décembre 2015
«  Nous n’aurions pas pu nous imaginer en 1918, en 1933, ni même en 1945, que la majeure partie de l’Europe jouirait des droits de l’homme et de la paix.
Travaillons et luttons pour que cette Union européenne historique puisse sortir de cette période de faiblesse actuelle, plus stable et plus confiante en ses propres capacités ! »
Helmuth Schmidt

L’actualité se bouscule ces derniers temps à un tel point qu’il reste peu d’espace pour s’arrêter et se pencher sur des moments hors du temps.

Il y a quelques semaines Helmut Schmidt est mort à 96 ans.

Il était né en 1918 et il est décédé le 10 novembre 2015.

Il fut un grand chancelier d’Allemagne et participa énormément à la construction européenne, grâce à une remarquable entente avec Giscard d’Estaing.

Dans plusieurs des mots du jour, de manière explicite ou implicite, j’oppose l’homme d’État qui pense aux générations futures et l’homme politique qui pense aux élections futures.

Ici nous avons un homme d’Etat qui possède la compréhension de l’Histoire et qui réfléchit à l’action dans ce cadre.

Il a prononcé fin 2011, au congrès du SPD, à 93 ans, en chaise roulante, un discours exceptionnel que celles et ceux qui comprennent l’allemand trouveront  <ICI>.

Pour ma part je l’ai découvert presque immédiatement après qu’il eut été prononcé et je souhaitais en faire un mot du jour. Mais il fallait traduire ce discours qui dure plus d’une heure, traduction que je n’ai pas trouvée alors.

Il était au-dessus de mes forces et disponibilités actuelles de la réaliser moi-même.

Mais après son décès, des traductions sont apparues, vous trouverez en <ICI le discours d’Helmut Schmidt traduit> l’une d’entre elles.

Je vous conseille de lire ce discours dans son intégralité et dans la force de l’argumentation intégrale sans passer par les quelques extraits que je vous propose ci-après pour convaincre celles et ceux qui ne le seraient pas spontanément de l’intérêt de lire un tel acte d’intelligence où il décrit la position de l’Allemagne au centre de l’Europe, des conséquences de cette géographie, de la responsabilité allemande et du manque de clairvoyance des politiciens actuels sur les déséquilibres qui avantagent à court terme l’Allemagne mais ne saurait être de bon augure pour l’avenir.

«  […] Vue d’Europe centrale, l’histoire de l’Europe peut s’interpréter comme une succession quasiment interminable de conflits entre la périphérie et le centre et entre le centre et la périphérie.

Le centre de l’Europe ayant toujours été le champ de bataille prépondérant. Lorsque les dirigeants ou les peuples du centre de l’Europe s’affaiblissaient, leurs voisins de la périphérie se jetaient sur le centre affaibli. La guerre de 30 ans, entre 1618 et 1648, qui s’est déroulée essentiellement sur le sol allemand, s’est soldée par un bilan sans équivalent, tant en termes de destruction matérielle qu’en nombre de pertes humaines. A l’époque, l’Allemagne n’était qu’un terme géographique, les pays germanophones étaient mal délimités. Arrivèrent ensuite les Français, d’abord sous Louis XIV et une seconde fois sous Napoléon. Les Suédois ne sont pas revenus une seconde fois ; mais les Anglais sont venus à plusieurs reprises, tout comme les russes, la dernière fois en date ayant été sous Staline.

Mais lorsque les dynasties ou les États du centre de l’Europe étaient forts, ou lorsqu’ils pensaient l’être, ils se jetaient à leur tour sur la périphérie. Ce fut déjà le cas pour les croisades, qui étaient des campagnes de conquêtes, pas uniquement en direction de l’Asie Mineure et de Jérusalem, mais aussi en direction de la Prusse orientale et des trois pays baltes actuels. A l’époque des temps modernes, cela fut le cas lors de la guerre contre Napoléon et des trois guerres qui ont éclaté sous Bismarck, en 1864, 1866, 1870/71.

Il en fut de même lors de la seconde guerre de trente ans, de 1914 à 1945, mais aussi tout particulièrement lorsqu’Hitler entreprit des avancées jusqu’au Cap Nord, dans le Caucase, en Crète, jusqu’au sud de la France et même jusqu’à Tobrouk, ville située à proximité de la frontière entre la Lybie et l’Égypte. La catastrophe européenne provoquée par l’Allemagne englobe le massacre des juifs européens et la destruction de l’état national allemand.

Auparavant, les Polonais, les États baltes, les Tchèques, les Slovaques, les Autrichiens, les Hongrois, les Slovènes et les Croates, partageaient le destin des Allemands, souffrant depuis des siècles de leur position géopolitique centrale sur ce petit continent européen. Ou, pourrait-on dire : Nous, les Allemands, avons maintes fois fait souffrir d’autres peuples de par notre position de puissance centrale. […]

Il me semble primordial, pour nous Allemands, que quasiment tous les voisins de l’Allemagne, ainsi que tous les Juifs du monde, se souviennent de l’Holocauste et des infamies commises à l’époque de l’occupation allemande dans les pays de la périphérie. Nous, Allemands, ne sommes pas assez conscients du fait qu’il règne, chez presque tous nos voisins, et sans doute pour plusieurs générations encore, un sentiment latent de méfiance à l’égard des Allemands. Les générations nées après la guerre doivent elles aussi vivre avec ce fardeau historique. Et les générations actuelles ne doivent pas oublier que c’est cette méfiance à l’égard du futur développement de l’Allemagne qui a mené, en 1950, aux débuts de l’intégration européenne.

En 1946, le discours de Churchill prononcé à Zurich et invitant les Français à se réconcilier avec les Allemands et à constituer ensemble les États-Unis d’Europe, était motivé par deux raisons : premièrement, une défense commune contre l’Union soviétique jugée menaçante et, deuxièmement, l’intégration de l’Allemagne dans un réseau occidental plus vaste. Car Churchill prévoyait le renforcement de l’Allemagne. […]

Je me permets d’ouvrir ici une petite parenthèse personnelle. J’ai écouté le discours de Jean Monnet à l’occasion de son comité « Pour les États-Unis d’Europe ». C’était en 1955. Je considère Jean Monnet comme l’un des Français les plus visionnaires qu’il m’ait été donné de rencontrer, en particulier en termes d’intégration, par son concept d’une approche progressive de l’intégration européenne. Depuis ce jour, je suis devenu et je suis resté partisan de l’intégration européenne, par conscience de l’intérêt stratégique de l’Allemagne et non par idéalisme, un partisan de l’intégration de l’Allemagne. […]

Si, aujourd’hui, en 2011, l’on observe l’Allemagne depuis l’extérieur, avec les yeux de nos voisins proches et plus éloignés, on constate que l’Allemagne suscite, depuis une dizaine d’années, un certain malaise, et depuis peu, une inquiétude politique. Au cours des dernières années, des doutes importants sont apparus s’agissant de la continuité de la politique allemande. La confiance en la fiabilité de la politique allemande a été atteinte.

Ces doutes et ces inquiétudes sont également à mettre sur le compte des erreurs de politique étrangères de nos politiciens et gouvernements allemands. Ils reposent, d’autre part, sur la surprenante force économique de l’Allemagne réunifiée. A compter des années 1970, l’économie du pays, qui était encore divisée, s’est développée pour devenir l’une des plus fortes d’Europe. C’est l’une des économies les plus solides au monde sur le plan technologique, financier et social. Notre puissance économique et notre paix sociale toute aussi stable ont toutefois suscité des jalousies, d’autant plus que notre taux de chômage et notre taux d’endettement se situent dans la fourchette normale au niveau international.

Mais nous ne sommes pas suffisamment conscients du fait que notre économie, intégrée dans le Marché commun et mondialisée, est dépendante de la conjoncture mondiale. Il faut donc s’attendre à ce que les exportations allemandes n’augmentent pas particulièrement au cours de l’année à venir.

Cela a simultanément engendré une tendance désastreuse : des excédents à la fois énormes et durables de notre balance commerciale et de notre balance des opérations courantes. Depuis des années, ces excédents représentent 5% de notre produit national brut. Ils sont aussi importants que les excédents de la Chine. Nous avons tendance à l’oublier, car les excédents s’expriment non plus en DM mais en Euros. Il est toutefois temps que nos politiciens prennent conscience de la situation.

Car tous nos excédents sont en réalité les déficits des autres. Nos créances sont leurs dettes. Il s’agit d’une fâcheuse atteinte à l’idéal légitime que, jadis, nous prônions : « l’équilibre des échanges extérieurs ». Cette atteinte ne peut qu’inquiéter nos partenaires. Et lorsque s’élèvent des voix étrangères, souvent américaines mais aussi d’autres pays, pour demander à l’Allemagne de jouer un rôle moteur en Europe, de nouvelles craintes s’éveillent chez nos voisins. Et ce n’est pas sans rappeler de mauvais souvenirs. […]

Lorsque je repense à l’année 1945 ou à l’année 1933, je venais d’avoir 14 ans, les progrès réalisés jusqu’à présent me semblent presqu’incroyables. Les progrès accomplis par les Européens depuis le Plan Marshall en 1948, le Plan Schumann en 1950, grâce à Lech Walesa et Solidarnosc, grâce à Vaclav Havel et à la Charte 77, grâce à chaque Allemand à Leipzig et à Berlin Est depuis le Grand Tournant en 1989/91. Nous n’aurions pas pu nous imaginer en 1918, en 1933, ni même en 1945, que la majeure partie de l’Europe jouirait des droits de l’homme et de la paix. Travaillons et luttons pour que cette Union européenne historique puisse sortir de cette période de faiblesse actuelle, plus stable et plus confiante en ses propres capacités ! »

Un homme d’État, je vous dis. Mais il faut lire son discours dans son intégralité pour suivre le cheminement de sa pensée.

<614>

Mardi 6 octobre 2015

«La guerre en Syrie, depuis 3 ans, me rappelle la guerre en Espagne. Vous avez deux pays, la Russie et l’Iran qui savent qui est leur allié, qui savent qui est leur ennemi et qui ne connaissent aucune limite à leurs actions. Et en face, vous avez des pays occidentaux divisés et hésitants. C’est vraiment le parfum de la guerre d’Espagne.»
Dominique Moïsi, politologue et géopoliticien, conseiller de l’IFRI, ancien professeur à Harvard.

Les évènements en Syrie sont préoccupants.

Il y a même des prophètes de malheur qui pense possible que la 3ème guerre mondiale ait démarré avec l’intervention russe en Syrie et parallèlement des tensions de plus en plus fortes entre l’Arabie Saoudite et l’Iran.

Certains, dont Poutine, comparent la situation en Syrie à la 2ème guerre mondiale : DAESH c’est Hitler et Assad c’est Staline. Pour gagner contre DAESH, il faut s’allier à Bachar el Assad.

Dans cette situation, l’intervention de Dominique Moïsi au club de la presse d’Europe 1 m‘a semblé la plus éclairante.

D’abord comme référence historique, lui s’appuie sur la guerre d’Espagne. Ce qui n’est pas non plus très rassurant puisque tout cela a très mal fini.

Mais dans la guerre d’Espagne il y avait aux prises un bloc militaire fasciste et des républicains divisés. Le bloc militaire fasciste a bénéficié d’un appui militaire sans faille des nazis allemands et des fascistes italiens.

Les pays occidentaux, ennemis des fascistes ont soutenu mollement les républicains, parce qu’ils se méfiaient des communistes qui y jouaient un rôle important.

L’issue a été favorable au camp le mieux soutenu.

Force est de constater que dans l’affaire syrienne, la Russie, comme l’Iran sont très clairs : ils sont les alliés de Bachar el Assad et leurs ennemis sont les ennemis de Bachar el Assad.

L’Occident a pour ennemi DAESH mais ne trouve pas d’allié acceptable sur le terrain.

Il était question tout au début d’aider les démocrates. Moïsi dit :

« En Syrie, trouver des démocrates dans les groupes rebelles est un grand mot. Mais il existe des rebelles qui ne sont proche ni de l’Etat islamique, ni d’Al Qaïda »

Obama et Poutine se sont d’abord affrontés puis rencontrés à l’ONU.

Le fait qu’ils se parlent est positif. Même si certains prétendent que Poutine a berné Obama.

Les discours à l’ONU des deux protagonistes a montré non seulement des divergences de fond qui se synthétisent essentiellement dans le rejet ou l’alliance avec le tyran syrien, mais ont surtout montré la différence de stratégie.

Obama a fait un beau discours, ferme sur les principes et expliquant, grosso modo, ce que la morale devrait nous pousser à faire.

Poutine a réagi en chef de guerre. Il n’a pas changé de position depuis le début, il est allié du pouvoir syrien qui était en place avant les évènements et c’est avec ce pouvoir qu’il faut négocier.

Il propose son aide bienveillante aux européens qui doivent faire face à la crise des réfugiés et aux occidentaux en général pour lutter contre le terrorisme.

Bref le premier manie le concept, le second a ce que le grand penseur de la guerre « Clausewitz », considérait comme fondamental : un but de guerre clair et objectif : Aider Bachar El Assad à vaincre ses opposants et conserver ses positions stratégiques en Syrie.

Il faut dire que l’Occident a des alliés sunnites déconcertants et encombrants : L’Arabie Saoudite a pour premier ennemi l’Iran et les chiites. Elle a incontestablement soutenu tous les mouvements sunnites fondamentalistes partout dans le monde et même chez nous. Elle a un problème parce que Al Qaida d’abord puis DAESH ont totalement échappé à son contrôle. Quoique désormais il se rapproche du front Al Nosra qui est une créature d’Al Qaida pour essayer de contenir la progression de DAESH. Mais à la fin des fins, l’Arabie Saoudite aura toujours beaucoup de mal à combattre ces extrémistes sunnites si cela avait pour conséquence de donner la victoire aux chiites, par exemple à Assad.

La Turquie, notre allié, pièce maitresse de l’OTAN, est tout aussi ambigüe. Lors du siège de Kobané, il a empêché des Kurdes non syrien, d’aller combattre avec les kurdes syriens contre DAESH. Maintenant il bombarde en Syrie, mais pas les fiefs de DAESH mais les positions kurdes, car son principal ennemi est le PKK, le parti des Kurdes qui pourrait, selon les craintes d’Erdogan, faire sécession de la Turquie. Or, les kurdes sont quasi les seules troupes au sol qui se battent contre DAESH et qui constituent des interlocuteurs sérieux des Etats-Unis et des occidentaux.

En face les chiites et la Russie sont unis et ont une stratégie claire et univoque.

En outre Obama va vers la fin de son mandat, il est attentif à la trace qu’il laissera dans l’Histoire. Ses mandats ont été ceux de la stratégie inverse de GW Busch, à savoir, retirer les troupes américaines des bourbiers créés par son prédécesseur. La dernière chose que veut Obama c’est avoir des soldats combattants au sol. D’ailleurs, il semble qu’en privé il déclare que Poutine dans son intervention en Syrie est en train de commettre la même erreur que GW Busch.

Il faut dire que la dernière fois que la Russie qui était alors l’URSS a fait ce type d’intervention c’était en Afghanistan et que cela s’est très mal terminé pour elle.

Toujours est-il que si Poutine va peut-être devant de grandes difficultés, on ne comprend toujours pas comment les Etats-Unis, la France et ses alliés vont intervenir de manière opérationnelle, c’est à dire en étant en mesure d’influer sur les évènements.

Je finirai par ce propos clairvoyant rappelé par Moïsi :

Raymond Aron avait expliqué en son temps :

«Dans une guerre, vous choisissez votre ennemi, mais pas vos alliés.»

<570>

Mercredi 18 septembre 2013

Mercredi 18 septembre 2013
«Le Droit ne fait pas Justice.»
François Sureau
Ce propos, qui me paraît plein de sens, a été tenu le 14/09/2013 dans l’émission « les Matins de France Culture » par François Sureau.
François Sureau est avocat, il s’occupe notamment des réfugiés politiques pour les défendre devant l’Administration et les Tribunaux français.
Mais avant, il a été maître de requêtes au Conseil d’Etat.
Il a alors vécu un épisode qui l’a marqué à jamais et avec lequel il doit vivre.
Nous étions au début des années 1980. Fraîchement sorti de l’ENA, le jeune juriste débarque au Palais-Royal, émerveillé de siéger au milieu des maîtres du droit qui ont enthousiasmé ses études.
Le bonheur se teintant toujours de désenchantement chez Sureau, il se voit affecté dans une obscure section, où il traite de démembrement rural et de l’indemnisation compliquée des rapatriés d’Algérie.
Puis avec enthousiasme, il accepte de rejoindre la commission qui statue sur le sort des demandeurs d’asile ayant essuyé un refus de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).
Et c’est là que sa vie va croiser celle de Javier Ibarrategui, militant basque exilé en France. Ce dernier demande l’asile politique à la France, car il se dit menacé de mort dans son pays.
Pour la justice française, l’affaire est délicate. Accéder à cette demande, c’est nier le retour de l’Espagne à la démocratie et à l’État de droit.
Javier Ibarrategui, dit à la commission « si vous me renvoyez en Espagne, je serai assassiné. »
Dans cette affaire, le Droit a été dit : la demande de Javier Ibarrategui a été refusée.
Il est donc retourné en Espagne et des groupes d’extrême droite, des anciens franquistes, l’ont assassiné.
C’était le Droit, ce n’était pas la Justice.
François Sureau a expliqué pendant l’émission :
« Ce que le Droit vise à faire, c’est à maintenir l’ordre public.
Réaliser ce compromis tout à fait étrange entre les demandes individuelles, l’Intérêt Général, les nécessités du Bien commun, s’incarnant dans des normes quelquefois contradictoires.
Le Droit, sert à éviter l’arbitraire
L’arbitraire public, Javier Ibarrategui a pu s’expliquer devant un juge, la décision a été prise dans le cadre d’une procédure documentée.
L’arbitraire privé comme interdire à une personne à se faire justice soi-même.
En résumé : éviter un mal social pire »
De la décision de la commission et du drame qui en découlera François Sureau a tiré un bref récit dont j’ai lu plusieurs critiques très enthousiastes :
François Sureau
Le chemin des morts
Collection Blanche, Gallimard
Parution 05-09-2013
<160>

Mardi 14 mai 2013

Mardi 14 mai 2013
« Sommes-nous capables de regarder en face (la vie de) ceux qui nous permettent de consommer comme nous le faisons ? »
Michel Wieviorka & Anthony Mahé
Après le drame de l’usine textile du Bengladesh, (l’immeuble de neuf étages qui s’est effondré près de Dacca le 24 avril, a fait 1 127 morts, selon le bilan rapporté par le Parisien du 13/05), deux chercheurs en science humaine posent cette question qui devrait nous interpeller : « Sommes-nous capables de regarder en face (la vie de) ceux qui nous permettent de consommer comme nous le faisons ? »
Cette question est le titre d’un article sur le site Atlantico, où ils écrivent également :
« Les « connaissances économiques » des consommateurs français leur permettent-elles de comprendre que le prix auquel nous payons nos produits découle forcément de main d’œuvre sous-payée ? »
<103>

Jeudi 21 mars 2013

Jeudi 21 mars 2013
«Les impôts sont le prix à payer pour une société civilisée,
trop de citoyens veulent la civilisation au rabais»
Henry Morgenthau, secrétaire au Trésor américain sous la présidence de Roosevelt, 1937
Tout le monde comprendra l’intérêt, en ce moment, de rappeler ce propos tenu il y a plus de 75 ans, aux Etats Unis. Henry Morgenthau avait écrit dans un rapport que lui avait commandé le président Roosevelt en 1937 sur la fraude fiscale : «Les impôts sont le prix à payer pour une société civilisée, trop de citoyens veulent la civilisation au rabais», (Citation originale «Taxes are what we pay for civilized society. Too many citizens want the civilization at a discount»)
Il avait aussi écrit dans ce rapport : « L’une des constatations les plus décourageantes faite lors de notre enquête est que des juristes de haut vol conseillent leurs clients dans l’utilisation des moyens les plus retors de frauder le fisc, et qu’ils en font eux-mêmes un usage intensif »
Donc rien de neuf sous le soleil.
Sauf qu’à l’époque Roosevelt était un homme d’Etat qui savait imposer des décisions drastiques : « En 1932, quand Roosevelt arrive au pouvoir, le taux de l’impôt fédéral sur le revenu applicable aux plus riches était de 25 % aux Etats-Unis. »
Le nouveau président décide de le porter immédiatement à 63 %, puis 79 % en 1936, 91 % en 1941, niveau qui s’appliqua jusqu’en 1964, avant d’être réduit à 77 %, puis 70 % en 1970. Pendant près de cinquante ans, des années 30 jusqu’en 1980, jamais le taux supérieur ne descendit au-dessous de 70 %, et il fut en moyenne de plus de 80 %. »
<78>