Le weekend end m’a permis de lire Intégralement le livre <4> d’Alexandre Laumonier dont j’ai parlé vendredi.
Ce livre est très détaillé et explique de manière précise cette course à la vitesse des traders haute fréquence.
Il explique aussi que la nature intervient dans ces communications. Ainsi lorsqu’il pleut les ondes radios sont ralenties. Ce qu’il traduit par cette belle phrase :
« Quand il pleut dans l’Ohio, la liquidité diminue dans le New Jersey ».
Dans le dernier mot du jour j’avais écrit :
« Mais avant de condamner, il faut comprendre pourquoi les hommes, dont nous faisons partie aspirent à cette vitesse. Mais cette réflexion attendra un autre mot du jour. »
Et c’est pourquoi je reviens au podcast de Xavier La Porte qui m’a fait découvrir cette histoire : <Le pylône qui valait 5 millions de dollars>
Xavier de la Porte interrogeait Alexandre Laumonier.
Et il a terminé son dialogue par cette réflexion et cet échange :
Xavier de la Porte :
« Est-ce que cela pourrait se ralentir. Sommes-nous condamnés à une accélération sans fin ? »
Alexandre Laumonier :
« Il faudrait trouver un cas où quelqu’un a décidé de ralentir. Je ne pense pas que cela soit arrivé. Il y a quand même une limite ultime : la vitesse de la lumière dans le vide. Le paradigme einsteinien reste d’actualité. Aux Etats-Unis ils sont à plus de 99% de la vitesse de la lumière pour la transmission des informations dans le trading de haute fréquence. C’est pour cela qu’is se battent pour des micros secondes. »
Xavier de la Porte :
« Ce qu’Alexandre Laumonier décrit c’est une tendance globale. Une sorte de pulsion humaine. Mais cela apporte une autre hypothèse.
Cette tendance à la vitesse, cette quête de la vitesse, elle n’est peut-être pas propre au trader à haute fréquence.
D’ailleurs, selon ce que j’ai pu voir, certains câbles, ont été cofinancés par des sociétés de trading mais aussi par d’autres qui n’ont rien à voir.
Et quand je pose la question à Alexandre Laumonier, il me parle spontanément d’Amazon. »
Alexandre Laumonier :
« Il y a tant d’ordres qui sont passés sur Amazon qu’il faut que les machines réagissent très vite. Et comme Amazon est dans le monde entier, il faut que ces informations transitent le plus vite possible. Je sais qu’Amazon est à une ou deux millisecondes près pour cela.
C’est parce qu’il y a tellement de gens sur le site qu’il faut que le système tourne à ces vitesses sinon vous allez cliquer et attendre 10 secondes une réponse. Dans le monde où on est, quand on clique on attend une ou deux secondes, s’il faut attendre 3 secondes on dit qu’il y a un bug, 4 secondes on dit que le site ne marche plus, au bout de 10 secondes on passe à autre chose. C’est pour cela qu’Amazon est à 2 millisecondes près. »
Xavier de la Porte :
« Le problème c’est que cette vitesse on la désire, tous.
On peut faire les atterrés, en trouvant fou que des sociétés de trading de haute fréquence dépensent des millions d’euros pour gagner des millisecondes mais ce ne sont pas les seuls. Et s’ils ne sont pas les seuls, c’est parce que collectivement nous ne supportons pas que ce qui pourrait aller vite, aille lentement.
Et c’est vrai que si on réfléchit à ce que c’est qu’un achat sur Amazon, on pourrait accepter quelques secondes entre l’ordre et sa réception.
En fait non, on ne le supporte pas. Et là ce ne sont plus les traders qui sont appâtés par le seul gain qui sont les commanditaires de la vitesse, là avec Amazon c’est nous qui sommes les commanditaires de cette vitesse, nous les consommateurs lambda.
Voilà, c’est un peu la leçon de morale du jour. »
Je pourrais m’en tirer en disant que je n’achète pas chez Amazon, ce qui est exact.
Mais hélas, je dois reconnaître ou plutôt me reconnaitre dans cette impatience derrière le clic et l’attente devant un site sur lequel je consulte ou achète.
Il est très simple de croire que la révolution n’est qu’à l’extérieur de nous, qu’il suffirait de faire dégager un certain nombre de « nuisibles » et « d’importuns » pour que tout aille mieux.
Ce n’est pas aussi simple une grande partie des problèmes se trouve à l’intérieur de nous, dans nos désirs sans limites, notre impatience…
<1360>
Il est assez logique qu’on ne supporte plus d’attendre car l’interconnexion permanente du monde et des gens fait que nous vivons à l’horizontale, soumis à des pressions permanentes des environnements technique et humain et partie prenante de ce maelstrom .
Pour retrouver le sens de la mesure, il faudrait réhabiliter l’axe vertical, celui du développement spirituel dans le sens premier du 1er du terme, celui de la vie de l’esprit.
L’humain idéal se situe normalement à l’intersection des 2 axes, ce que symbolise plutôt bien la croix chrétienne.