Mercredi 14/05/2014
«La grande braderie européenne.»
Thomas Cluzel (journaliste de France Culture qui réalise la chronique la revue de presse internationale
Bien entendu, il y a eu de la part des gouvernants et des peuples européens des erreurs de gestion, d’anticipation et de réflexion sur les conséquences de la globalisation sur nos systèmes sociaux et publics.
Mais il faut quand même en deux mots rappeler ce que la dette des Etats signifie. L’Etat s’est endetté parce que pour faire face à ses dépenses plutôt que d’augmenter ses ressources par de l’impôt, il a fait appel à l’emprunt. Et il a donc demandé de l’argent à des gens qui en avaient et qui ne savaient pas quoi en faire ou du moins quoi de faire de mieux que de la prêter aux Etats.
Sur ce, est arrivé la crise des subprimes dans lesquelles nos banques avides s’étaient imprudemment aventurées et qui ont eu besoin de renflouement des Etats qui ont ainsi encore augmenté leurs dettes.
Et maintenant il faut rembourser ces dettes.
Une partie de ce remboursement vient de l’argent des contribuables. Grosso modo on demande aux classes moyennes et populaires de payer pour rembourser les riches prêteurs. C’est du Robin des Bois à l’envers.
Mais il y a une second scandale, c’est ce que Thomas Cluzel a appelé la grande braderie européenne et dont vous trouverez ci-après Trois exemples qu’il a donné lors de sa chronique du 05/05 plus un quatrième que j’ai trouvé ailleurs.
1° La Grèce a vendu 915 millions d’euros à un riche armateur domicilié en Suisse l’ancien aéroport d’Athènes et ses 3.5 km de front de mer, alors que sa valeur approche les 20 milliards d’euros.
Et de citer un journal grec : » Une fois de plus, sous la pression de la troïka, l’Etat grec a donc décidé d’accélérer le processus de vente de ses actifs publics, destiné à rembourser ses dettes colossales. Sauf que la précipitation avec laquelle ces biens sont vendus, sans la moindre stratégie commune entre l’Etat et les investisseurs quant à leur mise à prix, soulève aujourd’hui de sérieuses questions, à commencer par celle-ci : comment ce joyau public a-t-il pu être bazardé par l’État ? 915 millions d’euros, alors même, précise le responsable politique d’une commune avoisinante que sa valeur réelle est estimée entre 18 et 20 milliards d’euros !
Un véritable scandale financier. Sans compter que les contribuables grecs vont devoir payer les frais de mise à niveau des infrastructures du site, en eau, en électricité, en voirie, d’une valeur de plusieurs milliards d’euros et sans cela sans pouvoir en bénéficier puisque la destinée du terrain est déjà connue : ce sera un lieu touristique haut de gamme, avec marinas, hôtels, golfs, casinos, ou dit autrement un territoire de luxe, réservé à quelques nantis. »
2° L’Espagne : L’Etat a mis sur le marché 27% de son patrimoine : palaces, immeubles, propriétés terriennes et autres parcs naturels et… un aéroport, le gigantesque aéroport de Ciudad Real. Inauguré en grandes pompes il y a cinq ans, l’infrastructure dotée de la plus grande piste d’atterrissage d’Europe, avait coûté près d’un milliard d’euros, peut-on lire sur le site de la RTBF. A présent, symbole tout à la fois de l’éclatement de la bulle immobilière mais aussi de tous les excès dans un pays qui compte aujourd’hui 52 aéroports, soit deux fois plus qu’en Allemagne, le site est bradé à 100 millions d’euros. Et puis autre projet, la vente au privé pour 85 millions d’euros d’un joyau de la nature, un domaine forestier andalou qui s’étend sur 14 000 hectares et où l’on exploite entre autres la plus grande forêt espagnole de chênes-lièges. Les acheteurs, précise EL MUNDO, envisagent d’y créer un hôtel de luxe 5 étoiles, avec deux terrains de golf et un aérodrome. L’opposition du coup crie au scandale et dénonce la dilapidation des richesses du pays, sur l’autel de l’austérité, car jamais, dit-elle, l’Etat n’aura ensuite les moyens économiques de récupérer ces biens, dont certains sont historiques ou de grande valeur écologique.
3° L’Italie, où l’île de Poveglia, interdite d’accès, abandonnée depuis la fermeture de son hôpital psychiatrique, réputée pour être l’un des lieux les plus hantés au monde, pourrait bientôt devenir un havre de paix réservé aux touristes les plus fortunés. Un horizon pour le moins inattendu, précise le site BIG BROWSER, pour ce bout de terre situé dans la lagune vénitienne à quelques encablures de la place Saint Marc de Venise, mais qui servit surtout de lieu de quarantaine dès le XVIIIe siècle, puis de cimetière pour les pestiférés lors des épidémies. Alors le projet procède directement du gouvernement italien, lequel vient donc de mettre en vente l’île, précise le quotidien britannique THE TELEGRAPH. Car en quête de liquidités pour faire face à une dette abyssale, l’Etat italien s’est lui aussi engagé dans une politique de cession d’une partie de son patrimoine. Et c’est ainsi que l’Etat propose désormais sur une soixantaine de bâtiments historiques, châteaux, palais, casernes, prisons, des baux allant de 50 à 99 ans, destinés à une exploitation touristique des lieux.
Et enfin un autre exemple que j’ai trouvé ailleurs
4° Le Portugal qui met en vente chez Christie’s 85 toiles de Miro estimé à la valeur globale de 36, 4 millions d’euros par l’institution britannique. Cette décision du gouvernement de vendre les 85 œuvres de Miro pour renflouer les caisses de l’Etat a mis en émoi les milieux culturels et l’opposition socialiste portugaise.
Vous trouverez des compléments d’information sur ces deux sites
Je ne peux que vous conseiller d’aller rapidement visiter certains joyaux de notre patrimoine comme le château de Versailles avant qu’il ne soit vendu par exemple au Quatar et qu’il sera alors réservé à des personnes qui ont des revenus mensuels auxquels aucun de nous ne pourra prétendre pendant toute sa vie.
Demain pas de mot du jour, je vais encore rendre visite à un représentant de mes interlocuteurs favoris : les disciples d’Esculape