Jeudi 16 Juin 2016

Jeudi 16 Juin 2016
« J’ai le seum »
David Kuhn & Violette Duplessier
Nouvelle expression de la jeunesse
Un mot du jour un peu plus léger.
David Kuhn, journaliste de 42 ans s’est associé à Violette Duplessier, collégienne francilienne de 16 ans pour écrire un livre pour les vieux comme nous afin que nous puissions comprendre la nouvelle langue des ados.
<Ce livre a pour titre : J’ai le seum> et pour sous-titre : «Le guide indispensable pour les parents qui souhaitent communiquer avec leurs ados et vice-versa. Il est paru le 2 juin 2016 et coute moins de 10 euros.
Avant de l’acheter vous pouvez aller sur ce site pour en comprendre un peu plus : http://que-signifie.org/langage-des-jeunes/que-signifie-avoir-le-seum/
«Avoir le seum est une expression que les jeunes emploient pour exprimer leurs frustrations, leurs rancœurs vis à vis d’un événement. Avoir le seum signifie être dégoûté, frustré. Il y a quelques années encore, on aurait entendu « j’ai les boules » ou bien « je suis dégoûté » pour manifester la même sensation. Cette dernière version pouvait être complétée par un suffixe rajoutant à l’emphase linguistique et donnant « je suis dégoûté de la vie ».
De la même façon, « avoir le seum » peut aussi être rendu plus intense par l’ajout du mot « trop » largement employé par les jeunes, voire les très jeunes, à la place du mot « très ». Vous savez, quand vos enfants vous disent d’un plat délicieux « c’est trop bon » au lieu de « c’est très bon ». »
Plusieurs sources s’accordent pour indiquer que l’origine la plus probable du mot seum serait un dérivé du mot arabe « sèmm » qui signifie « venin ».
Si vous voulez encore aller un peu plus loin avant d’acheter le livre, vous avez cet article sur le site de <Libération>
Cela donne le langage suivant : « Alors les yeuves, on se croyait pépouze ? Oui vous, les croulants (au moins quadra), on pensait chiller OKLM pendant que d’autres taffent pour le bac ? Sérieux ? Le seum, grave.»
L’article de Libé poursuit : 
Parce qu’il n’y a pas de raison qu’il n’y ait que les ados qui révisent en plein mois de juin, il en est deux qui ont décidé de remettre les parents au travail. Violette Duplessier, collégienne francilienne de 16 ans, et David Kuhn, journaliste, auteur de 42 ans («autant dire, un pied dans la tombe», plaisante-t-il) publient ce jeudi un guide (1) à l’usage des adultes qui souhaiteraient (enfin) comprendre leur progéniture. Au programme ? Une leçon de langage des 12-16 ans, et quelques clés pour se repérer au royaume du sébum.
«Ce n’est surtout pas un dictionnaire», précise David Kuhn, pour qui «on est plus proche du guide touristique sans prétention». Destination : l’adolescence. «Pour y avoir séjourné au moins une fois, n’importe quel adulte sait à quel point ce pays est un « Mordor existentiel », écrivent les auteurs en guise de prologue. C’est loin, c’est cher, pas forcément beau, les conditions d’hygiène y sont douteuses et l’autochtone est assez peu avenant, quand il n’est pas carrément hostile.»
[…] La dernière tentative marquante d’abaisser le pont-levis entre ces deux mondes remonte à 2014, lorsque parut le Dictionnaire des ados français, de Stéphane Ribeiro (lire Libération du 31 octobre de cette année-là). A ceux qui étaient trop saucés de se prendre pour de bons élèves parce que maîtrisant le swag, vous êtes trop des boloss. «C’est un langage évolutif, qui change rapidement», avertit David Kuhn. D’où les pages blanches à la fin du livre, pour compléter, personnaliser, ou procéder à une interro en règle. D’ici là, un cours de français stylé s’impose. A vos stylos, on ramasse les copies dans deux heures. Et silence dans les rangs. »
L’article donne quelques clés :
Règle 1 : abréger
Le Nokia 3310 a fait son temps, les smartphones et leurs correcteurs d’orthographe sont partout, et pourtant, l’abréviation continue, semble-t-il, de régner en maître dans les échanges virtuels : «TKT» («t’inquiète»), «SLT» («salut»), mais aussi GlaN («j’ai la haine») ou encore OKLM («au calme», sigle popularisé par Booba dans un single en 2014)… Mais pourquoi tant de flemme ?! La réponse est dans la question, bande d’insolents. «La flemme», souffle Violette Duplessier en levant les yeux au ciel. C’est cette même pulsion de glande qui poussera à lâcher un énigmatique «balec», plutôt que de s’échiner à écrire qu’on s’en frappe les parties ; à amputer «vas-y» de son «v» initial («azy»), ou encore à faire d’«askip» («à ce qu’il paraît») une poétique anaphore. C’est aussi cette délicieuse paresse qui leur fait parfois dire qu’un emoji vaut mieux qu’un long discours. «Moi, au moins, si un parent braque mon Facebook, il comprendra rien», dixit Violette Duplessier. «J’avoue !» («Je suis d’accord avec toi»).
Cas pratique :
«Azy, askip la prof de français est pas là. TKT on va être OKLM.» («Il semblerait que la professeure de français soit absente. Nous allons pouvoir passer du bon temps.»)
Règle 2 : rester flou
«C’est un langage volontairement flou, qui louvoie. Un peu comme le jeune, cette anguille», blague David Kuhn. Il n’empêche qu’à bien regarder certains mots présents dans le livre, on ne peut effectivement s’empêcher de se sentir un brin lost in translation : ainsi, si par malheur vous vous épanchez un peu trop sur les platitudes pénibles qui meublent évidemment votre vie de vieux, ne vous étonnez pas de vous voir stoppé(e) d’un «staive» («c’est ta vie»), ou pire, d’un «osef» («on s’en fout»). Plus étonnant encore, les adjectifs à double sens : «dar» peut tour à tour signifier «bien» ou son contraire.
Cas pratique :
«Gava, être en mode «soum soum» chez les ados, ça déchire.» («Mon gars, cette immersion en sous-marin dans l’adolescence est fort plaisante.»)
Règle 3 : tacler
«Faites pas crari vous avez tout compris au bouquin» ou sa variante «Crari, vous avez tout compris au bouquin», aurait pu nous lancer n’importe quel spécimen de 15 ans. Comprendre : «Ne prétendez pas avoir tout assimilé, nous ne sommes pas dupes.» Inutile d’essayer de leur «mettre des disquettes» (de les arnaquer, d’abuser de leur confiance) à ces fins limiers, sous peine de passer pour une bouffonne, ou pire : un Kevin. Soit «un individu d’une débilité profonde». L’héritier du mythique et peu enviable Régis des Nuls, en somme.
Comprendre les ados, on l’avait pressenti, «c’est ghetto» (ça n’est pas simple), limite on se sent «gâtée». Mais pas comme à Noël quand Mamie tricotait des jolis pulls, plutôt comme une vieille tomate flétrie sur un étal, en fin de marché. «Hassoul» (mot arabe pour «bref»), on aura essayé. Précision importante en matière de survie : «ne vous faites pas de gifs» (de films), le «tête-à-tête» n’a rien de romantique, c’est une exhortation à la bagarre. Ayant renoncé à toute dignité, on se sent désormais «trop rincée». Traduction ? «Nulle, pourrie, qui ne sert à rien.» Merci Violette.
Cas pratique :
«Crari, tu vas me mettre une disquette ? Viens, on part en tête-à-tête.» («N’imagine pas pouvoir me berner, allons croiser le fer dans une ruelle.»)
Règle 4 : être stylé
Avant la rencontre avec le doctissime spécimen adolescent auteure de cette bible, une collègue chébran a glissé dans notre besace cette interrogation existentielle : peut-on encore dire «chanmé» ? «Non merci», a tranché l’intéressée, intraitable. Quid du «swag» ? «Les gens qui disent swag, je les dénigre, je les bannis, c’est pas mes amis», répond Violette Duplessier (l’adolescence frôle parfois la dictature). Trois heures de colle pour quiconque oserait nous traiter de «has been». Avoir de l’allure de nos jours se dit donc être «frais», «stylé». Les plus séduisant(e)s sont qualifiés de «peufra», verlan de «frappe», employé dans le langage militaire pour évoquer l’envoi de bombes. Vous l’avez ?
Les mecs craquants et un brin mauvais garçons (oui, on est restés québlo dans Hélène et les garçons) sont, pour leur part, des «bandidos», allusion, semble-t-il, au gang de bikers texans. Ce qu’on découvre là, c’est du «fat» (ça envoie du lourd). Alors pour fêter ça, «on s’enjaille» ? Selon le Robert, qui vient d’intégrer ce verbe venu de Côte-d’Ivoire et dérivé du enjoy anglais («Il a trahi en passant dans le dico, de l’autre côté», s’amuse David Kuhn), il s’agit là de «s’amuser, faire la fête». Variante : «On va se casser le crâne.» «Mais rien à voir avec l’alcool», jure Violette Duplessier.
Cas pratique :
«Téma le bandido trop frais de 3e C, il envoie du fat.» («Observe le bellâtre scolarisé en troisième C, il est absolument charmant.»)
Je ne sais pas ce que donnerai la Loi travail dans ce langage…