Mercredi 11 février 2015

Mercredi 11 février 2015
« Au palmarès des expressions absurdes,
le “paradis fiscal” occupe fièrement la troisième place »
Pour parler du sujet d’actualité : HSBC  et la fraude fiscale révélée par le “SwissLeaks”, je vous propose une introduction et l’avis d’« d’un homme de l’art »
L’introduction est celle de Nicolas Martin :
« Au palmarès des expressions absurdes et des attelages verbaux aberrants, juste après « dignitaires nazis » et «bombardier furtif », et juste avant « gala de charité », occupe fièrement la troisième place, l’inusable expression de « paradis fiscal».
« Paradis fiscal » ! Il fallait oser.
Oser arrimer la délectable pureté édénique, les insouciantes jouissances paradisiaques, le pur monde du « travailler quasiment pas pour gagner infiniment plus», avec l’emblème sinistre de toutes les turpitudes saisonnières, la hantise du laborieux : l’impôt, l’impôt et sa meute de suppôts : délais, abattement, tranche, contrôle et imposition.
Un paradis fiscal où n’accèdent d’ailleurs, bizarrement que les pécheurs : prévaricateurs et autres porteurs de mallette. »
L’homme de l’art est un grand serviteur de l’Etat ancien Directeur d’une des grandes directions nationales de l’administration fiscale : Roland Veillepeau
Le Monde a publié un entretien que vous trouverez en pièce jointe
Il dit notamment « Notre lutte contre la fraude fiscale internationale est inopérante »
« Le fisc suisse [est rétif à toute coopération], cela est inscrit dans ses gènes, soit  il ne répond pas, soit il s’arrange pour faire une réponse qui ne puisse être exploitée. Ce n’est pas nouveau, car il a toujours agi comme cela. Et penser qu’un coup de téléphone aux responsables suisses pourrait faire changer les choses relève au mieux de la naïveté. La crédibilité du fisc et celle du contrôle fiscal n’en sont pas ressorties grandies.
En 2008, des administrations fiscales ont porté, quasi simultanément, des coups au secret bancaire. C’est le fisc allemand, contre la banque LGT au Liechtenstein, le fisc américain contre la banque UBS et le fisc français contre la banque HSBC, en Suisse. Ces actions ont mis en évidence le rôle central et néfaste des banques spécialisées dans la gestion de fortune dans la mise en place de schémas de fraude fiscale, en assurant le transfert à l’étranger des fonds considérables provenant de la fraude, grâce à l’interposition de structures établies dans les paradis fiscaux.
Malheureusement, concernant les politiques] il y a un double langage permanent de nos Etats, qui sont les premiers à condamner les paradis fiscaux et dans le même temps à en profiter. Le pire exemple est donné par Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, qui, comme premier ministre du Luxembourg, a encouragé les multinationales à lui verser quelques milliards d’impôts en dépouillant les autres Etats européens de dizaines de milliards de recettes fiscales leur revenant. Combien de temps les citoyens européens et les Etats membres pourront-ils accepter ce conflit d’intérêts, sinon ce scandale ?
Évidemment [qu’il faut faire sauter le fameux « verrou de Bercy »]. En droit français, le ministère public a seul le pouvoir de décider ou non de poursuites lorsqu’une infraction pénale lui est dénoncée, et de déclencher ou de ne pas déclencher l’action publique. Sauf pour les poursuites pour fraude fiscale. Ce « verrou de Bercy » constitue une exception qui n’a plus aucune légitimité depuis la mise en place du Parquet national financier (PNF), qui a justement compétence sur les infractions fiscales graves. »
Je vous rappelle que le mot du jour du 6 novembre 2014 était justement « Le verrou de Bercy », ce mécanisme qui conduit à ce que nul ne peut être poursuivi devant un tribunal pénal sans l’autorisation de La Commission des Infractions Fiscales (CIF) qui est une instance du Ministère des Finances à Bercy.
Vous trouverez en seconde pièce jointe un autre article du Monde qui vous apprendra ce qui est arrivé à Roland Veillepeau lorsqu’on a voulu l’empêcher de poursuivre la procédure contre les délinquants fiscaux se trouvant dans la liste swiss leaks et comment malgré ces “coups tordus” il a sauvé le travail de sa Direction.
Je finirai par ce mot de Charline VANHOENACKER : Le Monde se divise en deux : « ceux qui croient aux contes pour enfants et ceux qui ouvrent des comptes pour adultes »