Vendredi 13 novembre 2020

« L’école […] nourrissait en eux une faim plus essentielle encore à l’enfant qu’à l’homme et qui est la faim de la découverte »
Albert Camus, « Le premier homme », Page 138

Albert Camus était orphelin de père, mais il a rencontré des hommes qui ont joué un rôle considérable dans son développement et qui ont un peu rempli ce manque.

Et celui qui a probablement était le plus important fut son instituteur : M Germain et qui dans le livre porte le nom de « Monsieur Bernard ».

Et c’est pourquoi, immédiatement après avoir reçu le Prix Nobel de littérature, il lui a écrit la fameuse lettre qui est devenue tellement célèbre.

Mais je ne m’arrêterai pas sur cette lettre puisqu’elle a déjà fait l’objet du mot du jour du <6 octobre 2017> :

« Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé »

Camus raconte l’école dans laquelle officiait Monsieur Bernard et où son ami Pierre et lui obtenaient les premières places. Et il brosse un portrait de son instituteur :

« Ensuite c’était la classe. Avec M. Bernard, cette classe était constamment intéressante pour la simple raison qu’il aimait passionnément son métier. Au-dehors, le soleil pouvait hurler sur les murs fauves pendant que la chaleur crépitait dans la salle elle-même pourtant plongée dans l’ombre des stores à grosses rayures jaunes et blanches. La pluie pouvait aussi bien tomber comme elle le fait en Algérie, en cataractes interminables, faisant de la rue un puits sombre et humide, la classe était à peine distraite. Seules les mouches par temps d’orage détournaient parfois l’attention des enfants. Elles étaient capturées et atterrissaient dans les encriers, où elles commençaient une mort hideuse, noyées dans les boues violettes qui emplissaient les petits encriers de porcelaine à tronc conique qu’on fichait dans les trous de la table. Mais la méthode de M. Bernard, qui consistait à ne rien céder sur la conduite et à rendre au contraire vivant et amusant son enseignement, triomphait même des mouches. Il savait toujours tirer au bon moment de son armoire aux trésors la collection de minéraux, l’herbier, les papillons et les insectes naturalisés, les cartes, qui réveillaient l’intérêt fléchissant de ses élèves. »
Page135 & 136

Avec M. Bernard, cette classe était constamment intéressante !

Et pour agrémenter sa classe, M Bernard se débrouille pour disposer d’outils qu’il est seul à posséder dans ce lieu, comme « La lanterne magique » qui est l’ancêtre des appareils de projection et particulièrement du projecteur de diapositives. Elle permettait de projeter des images peintes sur des plaques de verre à travers un objectif, via la lumière d’une chandelle ou d’une lampe à huile.

« Il était le seul dans l’école à avoir obtenu une lanterne magique et, deux fois par mois, il faisait des projections sur des sujets d’histoire naturelle ou de géographie. »
Page 136

Cette école là savait nourrir l’intelligence des enfants qui avaient faim de découvertes et qui aimaient apprendre à apprendre

« Non, l’école ne leur fournissait pas seulement une évasion à la vie de famille. Dans la classe de M. Bernard du moins, elle nourrissait en eux une faim plus essentielle encore à l’enfant qu’à l’homme et qui est la faim de la découverte. Dans les autres classes, on leur apprenait sans doute beaucoup de choses, mais un peu comme on gave les oies. On leur présentait une nourriture toute faite en les priant de vouloir bien l’avaler. »
Page 138

Et en continuant immédiatement ce paragraphe, la plume de Camus dérape sur ce manuscrit et n’utilise plus le nom de Monsieur Bernard, mais écrit le vrai nom de son instituteur :

« Dans la classe de M. Germain, pour la première fois ils sentaient qu’ils existaient et qu’ils étaient l’objet de la plus haute considération : on les jugeait dignes de découvrir le monde. Et même leur maître ne se vouait pas seulement à leur apprendre ce qu’il était payé pour leur enseigner, il les accueillait avec simplicité dans sa vie personnelle, il la vivait avec eux, leur racontant son enfance et l’histoire d’enfants qu’il avait connus, leur exposait ses points de vue, non point ses idées, car il était par exemple anticlérical comme beaucoup de ses confrères et n’avait jamais en classe un seul mot contre la religion, ni contre rien de ce qui pouvait être l’objet d’un choix ou d’une conviction, mais il n’en condamnait qu’avec plus de force ce qui ne souffrait pas de discussion, le vol, la délation, l’indélicatesse, la malpropreté (…) »

Il est question de dignité ici, d’intelligence et de respect. Camus insiste aussi sur le strict respect de la neutralité laïque devant les religions bien que M Germain fut anticlérical.

Un épisode est particulièrement émouvant dans le récit que fait Albert Camus :

Mais surtout il leur parlait de la guerre encore toute proche et qu’il avait faite pendant quatre ans, des souffrances des soldats, de leur courage, de leur patience et du bonheur de l’armistice. À la fin de chaque trimestre, avant de les renvoyer en vacances, et de temps en temps, quand l’emploi du temps le lui permettait, il avait pris l’habitude de leur lire de longs extraits des Croix de bois de Dorgelès. […] Lui et Pierre attendaient chaque lecture avec une impatience chaque fois plus grande »
Page 139

Le jeune Camus découvre la vie au front, la Première Guerre Mondiale, les tranchées, le monde dans lequel son père a perdu la vie, sans en être pleinement conscient :

« Pour Jacques, ces lectures lui ouvraient encore les portes de l’exotisme, mais d’un exotisme où la peur et le malheur rôdaient, bien qu’il ne fît jamais de rapprochement, sinon théorique, avec le père qu’il n’avait pas connu. »

Mais l’émotion le rattrape et lui fait probablement comprendre ce qui échappe à sa raison :

« Et le jour, à la fin de l’année, où, parvenu à la fin du livre, M. Bernard lut d’une voix plus sourde la mort de D., lorsqu’il referma le livre en silence, confronté avec son émotion et ses souvenirs, pour lever ensuite les yeux sur sa classe plongée dans la stupeur et le silence, il vit Jacques au premier rang qui le regardait fixement, le visage couvert de larmes, secoué de sanglots interminables, qui semblaient ne devoir jamais s’arrêter. « Allons petit, allons petit », dit M. Bernard d’une voix à peine perceptible, et il se leva pour aller ranger son livre dans l’armoire, le dos à la classe. ».
Page 140

M Germain a aussi fait la guerre 14-18 et il lisait probablement avec beaucoup d’émotion ce récit qu’il avait vécu dans sa chair et son corps.

Et Camus raconte dans « Le premier homme » une visite qu’il fit à son ancien instituteur alors qu’il avait plus de quarante ans et qu’il avait déjà écrit de nombreux livres devenant ainsi célèbre. Au milieu de la conversation il se passe ceci :

« « Attends, petit », dit M Bernard. Il se leva péniblement […] et il fourragea dans un tiroir, le referma, en ouvrit un autre, en tira quelque chose. « Tiens, dit-il, c’est pour toi. Jacques reçut un livre couvert de papier brun d’épicerie et sans inscription sur la couverture. Avant même de l’ouvrir, il sut que c’était Les Croix de Bois, l’exemplaire même sur lequel M. Bernard faisait la lecture en classe. Non, Non, dit-il, c’est… » Il voulait dire : c’est trop beau. Il ne trouvait pas les mots. M Bernard hochait sa vieille tête. « Tu as pleuré le dernier jour, tu te souviens, Depuis ce jour ce livre t’appartient. »
Page 141

Voilà cette relation toute particulière que M Germain a noué avec ses jeunes élèves et Albert Camus en particulier.

Mais pour que cette phrase : « Sans vous […] rien de tout cela ne serait arrivé » prenne toute sa consistance il fallait encore plus. M. Bernard va proposer à ses meilleurs élèves dont Jacques et Pierre de les présenter à la bourse des lycées et collèges, seul moyen pour ces pauvres de poursuivre des études :

« Le lycée vous ouvre toutes les portes. Et j’aime mieux que ce soit des garçons pauvres comme vous qui entrent par ces portes. Mais pour ça, j’ai besoin de l’autorisation de vos parents. Trottez. »

Mais cela est contraire aux idées de la grand-mère qui veut que Jacques travaille au plus vite pour ramener de l’argent à la maison, la famille en a tant besoin. Quand Jacques explique cela à M. Bernard, ce dernier décide d’aller voir la terrible grand-mère :

« Un moment après, M. Bernard, sous les yeux interdits de Jacques, frappait à la porte de sa maison. La grand-mère vint ouvrir en s’essuyant les mains avec son tablier dont le cordon trop serré fait rebondir son ventre de vieille femme. Quand elle vit l’instituteur, elle eut alors un geste vers ses cheveux pour les peigner. « Alors, la mémé, dit M. Bernard, en plein travail, comme d’habitude ? Ah ! vous avez du mérite. » […] « Toi, dit M. Bernard à Jacques, va voir dans la rue si j’y suis. Vous comprenez, dit-il à la grand-mère, je vais dire du bien de lui et il est capable de croire que c’est la vérité… » Jacques sortit, dévala les escaliers et se posta sur le pas de la porte. Il y était encore une heure plus tard, et la rue s’animait déjà, le ciel à travers les ficus virait au vert, quand M. Bernard déboucha de l’escalier et surgit dans son dos. Il lui grattait la tête. « Eh bien ! dit-il, c’est entendu. Ta grand-mère est une brave femme. Quant à ta mère… Ah ! dit-il, ne l’oublie jamais. »
Page152

Et puis la grand-mère apparait brusquement et revient vers l’instituteur :

« Elle tenait son tablier d’une main et essuyait ses yeux. « J’ai oublié… vous m’avez dit que vous donneriez des leçons supplémentaires à Jacques. – Bien sûr, dit M. Bernard. Et il ne va pas s’amuser croyez-moi. – Mais nous ne pourrons pas vous payer. » »

Et la réponse du « hussard de la république », de l’homme qui ne croyait pas en Dieu mais en sa mission sacrée d’enseigner les enfants et aussi les enfants des pauvres, fut celle-ci :

« M. Bernard la regardait attentivement. Il tenait Jacques par les épaules. « Ne vous en faites pas », et il secouait Jacques, « il m’a déjà payé ».

Et après le succès de Jacques à ce concours la conclusion de ces années d’enseignement de l’instituteur fut ce moment d’émotion et aussi de désarroi de l’enfant devant le monde inconnu qui se dressait devant lui :

« Dans la pauvre salle à manger maintenant pleine de femmes où se tenaient sa grand-mère, sa mère, qui avait pris un jour de congé à cette occasion, et les femmes Masson leurs voisines, il se tenait contre le flanc de son maître, respirant une dernière fois l’odeur d’eau de Cologne, collé contre la tiédeur chaleureuse de ce corps solide, et la grand-mère rayonnait devant les voisines. « Merci, Monsieur Bernard, merci », disait-elle pendant que M. Bernard caressait la tête de l’enfant. « Tu n’as plus besoin de moi, disait-il, tu auras des maîtres plus savants. Mais tu sais où je suis, viens me voir si tu as besoin que je t’aide. » Il partait et Jacques restait seul, perdu au milieu de ces femmes, puis il se précipitait à le fenêtre, regardant son maître qui le saluait une dernière fois et qui le laissait désormais seul, et au lieu de la joie du succès, une immense peine d’enfant lui tordait le cœur, comme s’il savait d’avance qu’il venait par ce succès d’être arraché au monde innocent et chaleureux des pauvres, monde refermé sur lui-même, comme une île dans la société mais où la misère tient lieu de famille et de solidarité, pour être jeté dans un monde inconnu, qui n’était plus le sien, où il ne pouvait croire que les maîtres fussent plus savants que celui-là dont le cœur savait tout, et il devrait désormais apprendre, comprendre sans aide, devenir un homme enfin sans le secours du seul homme qui lui avait porté secours, grandir et s’élever seul enfin, au prix le plus cher. »
Page 163

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Mercredi 20 novembre 2019

« Vivre sans lire c’est dangereux, cela t’oblige à croire ce que l’on te dit »
Dans le monde de Mafalda par Quino publié par Glénat

Il faut savoir parfois être court.

Court mais percutant.

Voilà un dessin trouvé sur facebook et qui me semble répondre à cette définition.


Je ne trouve rien à ajouter à la réflexion de Mafalda, cette petite fille qui découvre la vie à travers le talent de Quino qui l’a créé en 1963.

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Mardi 17 septembre 2019

«Les humains émettent du CO2, le CO2 est un gaz à effet de serre, l’effet de serre réchauffe la planète »
David Louapre

J’entends dire certains qu’il y en a assez de parler du réchauffement climatique et de l’effet de serre.

Et il est vrai que d’autres défis se dressent devant nous, les besoins en eau potable, le recul dramatique de la biodiversité, l’augmentation démographique humaine qui n’a pas encore atteint son apogée, la pollution et les déchets etc.

Mais les autres défis ne signifient en aucun cas que le problème du réchauffement climatique ne constitue pas un défi majeur pour l’humanité.

Alors, il reste que des journalistes comme Pascal Praud continue à remettre en cause le phénomène. Il en est même qui utilise le concept de « pseudo réchauffement climatique ».

Et puis il y a un « pseudo scientifique » du nom de François Gervais qui fait des conférences dans lesquelles il déclare :« L’urgence climatique est un leurre »

François-Marie Bréon, chercheur au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, réfute les arguments de François Gervais dans cet article de <France soir>.

A ce stade-là, il faut rappeler ce qu’est la science, la connaissance scientifique.

Comme l’écrit si justement Rachid Benzine, le contraire de la connaissance, n’est pas l’ignorance mais les certitudes.

Les certitudes c’est pour le domaine de la croyance, pas pour le domaine scientifique.

En science, il existe des modèles qui font l’objet d’un large consensus scientifique, parce qu’ils sont vraisemblables, argumentées et qu’aucune expérience ou observation n’a pour l’instant pu les réfuter.

Je vous renvoie vers ce mot du jour de 2015 : « Une théorie qui n’est réfutable par aucun événement qui se puisse concevoir est dépourvue de caractère scientifique. ». Cette phrase de Karl Popper constitue la base de la démarche scientifique qui se fonde sur le caractère réfutable d’une théorie.

Ce qui peut donc être dit, c’est que dans l’état actuel de nos connaissances la terre subit un réchauffement climatique dû à l’accumulation dans l’atmosphère de gaz à effet de serre produit par l’activité humaine. C’est l’hypothèse la plus vraisemblable. Et il n’y a pas d’observations suffisamment explicitées et argumentées qui ont été en mesure de réfuter cette théorie.

J’ai déjà évoqué la chaine Youtube <Science étonnante>, c’était le mot du 29 septembre 2017. L’animateur de cette chaîne est David Louapre

Je trouve ce jeune scientifique très pédagogue et il essaye avec simplicité de répondre à cette question : « Faut-il croire au réchauffement climatique ? »

Je trouve son approche remarquable et c’est pourquoi je la partage.

Il donne notamment ce schéma qui montre l’évolution de la concentration de CO2 dans l’atmosphère :


On peut remonter à l’an 1000 parce qu’on sait mesurer la concentration dans les bulles d’air qu’on trouve dans les glaces des pôles.

On utilise la mesure ppm qui signifie 1 / 1000 000. Actuellement la concentration est de 400 ppm, c’est-à-dire de 0,04 %.

On constate une augmentation sévère depuis l’apparition de la révolution industrielle

Je ne vais pas transcrire sa démonstration, mais j’ai appris quelque chose d’inquiétant. C’est que la vapeur d’eau est également un gaz à effet de serre. Mais la concentration de vapeur d’eau dans l’atmosphère n’évolue pas, en principe, parce qu’elle est régulée par l’eau des océans. Mais la concentration de vapeur d’eau dépend directement de la chaleur de l’atmosphère. Et si l’atmosphère se réchauffe, la concentration de vapeur d’eau augmentera ce qui aura pour effet d’augmenter encore la température dans un processus réflexif.

Il rappelle aussi cette évidence que la planète Mercure est beaucoup plus proche du soleil que Vénus. Mais la température moyenne de Vénus est de 462°C alors que celle de Mercure n’est (sic) que de 167°C. Et ceci s’explique probablement par le fait de la concentration de CO2 dans l’atmosphère de Vénus qui a créé un effet de serre terrible.

David Louapre a écrit des informations complémentaires sur son <blog>

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Vendredi 29 mai 2015

Vendredi 29 mai 2015
« – Les enfants, savez-vous ce qu’est un champ lexical ?”
– Maîtresse, c’est un champ de fleurs !
Et toi,  maîtresse, tu es très belle ! »
Échange entre une maîtresse et un garçon rapporté par Bernard Maris dans son livre posthume

Longtemps, j’ai lu beaucoup de livres. Aujourd’hui, j’en lis peu.

Je pourrais ajouter : et maintenant je me couche de bonne heure.

Ceux qui ont de la culture comprendront…

Toutefois, j’ai acheté «et si on aimait la France » de Bernard Maris et j’ai commencé à le lire.

En voici un extrait :

« Nous sommes dans une école de banlieue, dans cette si joliment nommée Ile-de-France, qui fut autrefois le paradis des rois.

La maîtresse est douce, avec son museau pointu sous ses lunettes.

“Les enfants, savez-vous ce qu’est un champ lexical ?” Elle attend, souriante “Alors ?”

Elle n’espère pas de réponse, bien sûr….
La classe de CE1 est sage.
Mais une main de petit garçon se lève :
“Maîtresse, c’est un champ de fleurs !”

Un champ de fleurs…Elle rit. Comme c’est mignon, un champ de fleurs, quel charmant petit garçon !
Elle secoue la tête, va pour expliquer, mais le petit crépu ajoute :
“Et toi,  maîtresse, tu es très belle”

Cette histoire m’a été racontée par mon ami Michel Bernard, écrivain, et de belle langue.

J’ignorais ce qu’était un “champ lexical”

Renseignement pris, on parle de champ lexical pour désigner “un ensemble théorique de noms, de substantifs, d’adjectifs et de verbes appartenant à une même catégorie syntaxique et liés de branches par leur domaine de sens”

[et il donne un exemple] “Le médecin guérit le malade” est  un champ lexical de trois substantifs. [D’après mon expérience récente, cette phrase est fausse, mais c’est un champ lexical].

Doit-on assener une telle horreur à des enfants ?

Des enfants qui ne demandent qu’à être ce qu’ils sont, des poètes, comme ce petit garçon qui voit d’abord un champ de fleurs, et dans ces fleurs une jolie maîtresse…»

« Doit-on assener de telle horreur à des enfants. »

Moi aussi je ne connaissais pas le champ lexical jusqu’à ce mes enfants entrent au collège et subissent des cours de français.

J’ai aimé lire la somptuosité des textes de Victor Hugo, j’ai été saisi par les poèmes de Baudelaire et tant de fois subjugué par la langue française, par Flaubert, Balzac, Zola et tant d’autres.

Mais je ne savais pas ce qu’était un champ lexical.

Et cela ne me manquait pas, comme tant d’autres concepts certainement intéressants, utiles, allons jusqu’à indispensables au niveau universitaire quand on veut étudier techniquement la langue.

Mais totalement inapproprié avant.

Et Bernard Maris de continuer :

« Dans notre classe de CM1, notre maître M. Vergniaud – c’était un maître très sévère- nous faisait la lecture chaque vendredi soir, en récompense d’une semaine studieuse. C’était la Guerre du feu de Rosny aîné, ou Un marin de Surcouf de Louis Garneray. Bras croisés, muets de terreur et d’émotion, nous écoutions les courses et les ruses du Malouin qui échappait toujours aux Anglais. Il n’usait pas de  “champs lexicaux” ou autres inconvenances. Il nous donnait simplement envie de lire.»

« Il nous donnait simplement envie de lire. »

Vous savez ce que disait Montaigne ?

« Je n’enseigne pas,  je raconte. »

Laissons la conclusion à l’inoubliable Bernard Maris qui écrit un peu plus loin, page 31,

« La réponse du petit garçon était très encourageante et… très française. Il charmait sa maitresse par une phrase poétique. Il tournait un compliment. Bref, il parlait à une femme.»

A propos, à Lyon ce weekend end il y a des champs de fleurs sur toute les places. <Des champs de roses>

Et si vous voulez appeler cela des champs lexicaux, comme le jeune garçon, personne ne vous en voudra.

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Mardi 5 mai 2015

Mardi 5 mai 2015
«Le principe essentiel de cette progressivité est la notion d’acceptabilité (en fonction des genres, des situations d’énonciations, des effets recherchés et produits), notion qui permet à la fois le lien avec le socle et l’approche communicationnelle développée en langues vivantes»
Repères de progressivité sur l’étude de la langue
Programme du collège qui vient de paraître
Nicolas Boileau écrivait en 1674, dans  L’Art poétique «Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément.»
Il semble que des «facétieux» du Ministre de l’Education nationale ne soient pas de cet avis. Car le mot du jour est un extrait du programme du cycle 4 produit récemment par le Ministère, programme que vous trouverez en pièce jointe et que j’ai téléchargé à l’adresse suivante : http://cache.media.education.gouv.fr/file/CSP/04/3/Programme_C4_adopte_412043.pdf
Le cycle 3 de la scolarité s’achève avec la première année du collège. Le cycle 4 est donc celui du collège moins la première année.
A priori, au début l’objectif était fixé, dans une lettre au Président du Conseil supérieur des programmes datée du 4 décembre 2013, par le Ministre de l’éducation nationale qui a demandé au Conseil de formuler des propositions de programmes pour l’école élémentaire et le collège : « La refonte des programmes de la scolarité obligatoire doit être un chantier essentiel au service de cette mobilisation pour la refondation de l’école de la République. » Selon les termes de cette saisine, il est notamment attendu des projets de programmes qu’ils soient : « plus simples et plus lisibles pour que chacun sache bien ce que les élèves doivent apprendre ».
Je cite d’autres extraits :
Pour les langues étrangères et régionales : «Dans la continuité d’orientations notionnelles des programmes antérieurs la visée générale peut être caractérisée comme aller de soi et de l’ici vers l’autre et l’ailleurs.»
La course à pied devient : « Créer de la vitesse, l’utiliser pour réaliser une performance mesurée, dans un milieu standardisé.[…]
Se repérer dans l’espace athlétique et accepter les déséquilibres provoqués.
S’organiser pour construire une continuité spatiotemporelle d’actions.
Optimiser les trajectoires, les forces exercées et les vitesses produites, anticiper les actions à venir pour agrandir l’espace et raccourcir le temps»
La natation, souvent repris dans des articles de presse : « Se déplacer de façon autonome, plus longtemps, plus vite, dans un milieu aquatique profond standardisé.»
C’est certainement profond, mais ce n’est pas un langage standard.
Très naïf, je pensais que la pédagogie représentait cet effort de rendre simple des choses compliquées, force est de constater que nous sommes ici dans l’exact contraire.
Certains pour défendre ce jargon essaye d’expliquer qu’il faut bien manipuler un langage “précis” pour expliquer ces notions techniques.
D’autres articles parlent de cette pensée structurante et novatrice :
Je me répète, mais je pense vraiment que la personne qui a allégé son esprit de ces concepts complexes, en les formulant, doit se sentir beaucoup mieux après.