Jeudi 10/07/2014

Jeudi 10/07/2014
«La notion de limite fait partie de moi
alors que j’avais l’impression d’être sans limite.>
Christian Streiff
Christian Streiff était le patron de Peugeot Citroën. Il travaillait comme un forcené.
Mais pour lui, tout a failli s’arrêter le 22 mai 2008. Ce Jeudi matin-là, éreinté, le patron de Peugeot et Citroën s’accorde une pause entre deux réunions. Une sieste de dix minutes, comme il en fait depuis quelque temps pour évacuer la pression. Avenue de la Grande-Armée, au siège parisien du groupe, il s’enferme dans son bureau du neuvième étage et demande que personne ne le dérange.
Mais la pause s’éternise. Quand sa secrétaire entrouvre la porte, elle le découvre gisant sur la moquette, nauséeux. Il respire mal. L’infirmière d’entreprise veut l’envoyer à l’hôpital. Il résiste : ce n’est qu’un petit malaise, non ? « Non, cette fois-ci, vous nous laissez faire », réplique son chauffeur, accouru lui aussi. Pied au plancher de la Peugeot de fonction, il emmène son patron à la Pitié-Salpêtrière. Diagnostic : un accident vasculaire cérébral. Sévère. Voilà le PDG du CAC 40 entre la vie et la mort.
Près de cinq ans plus tard, Christian Streiff est un autre homme.
Il était l'<Invité de l’émission le grand témoin du 26-06-2014> où il raconte sa nouvelle vie et détaille le livre qu’il a écrit pour raconter son AVC et sa très lente remontée vers une vie normale. Le fonctionnement de sa mémoire notamment est touché
Dans J’étais un homme pressé, aux éditions du Cherche-Midi, Christian Streiff fait le récit des trois ans qu’il va lui falloir pour se délivrer de son handicap et construire sa vie d' »après ». Obligé de quitter le rôle du capitaine d’industrie, il continuera malgré tout à se projeter dans l’avenir, à tout faire pour renouer avec ses projets et trouver un sens différent à son existence.
Ce livre, articulé autour de la perte d’une partie de soi, raconte son retour vers des passions simples qui avaient été progressivement chassées de sa course d' »homme pressé », ainsi que la reconquête de sa mémoire.
Ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre, Christian Streiff a retrouvé la souvenance des mots et recommence une carrière dans l’industrie, mais il protège désormais un temps pour ces autres facettes de lui-même que l’AVC lui a donné la chance de reconquérir.
Avant son AVC, il n’envisageait pas de prendre son temps. « Je courais de 5h jusqu’à 22h ou 23h. Aujourd’hui, je prends le temps de vivre, de retrouver ma famille, mes enfants, de lire, de me promener. »
Christian Streiff connaît aujourd’hui ses limites. « La notion de limite fait partie de moi alors que j’avais l’impression d’être sans limite. Chaque fois que je démarre quelque chose je pèse l’effort que cela va signifier. »
Christian Streiff est aujourd’hui vice-président de Safran. « Je pense prendre les problèmes beaucoup plus sereinement et beaucoup plus efficacement. »
Faire de nos épreuves une force, voilà le secret
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Vendredi 24/01/2014

Vendredi 24/01/2014
« Un geste de tendresse »
Wounda
Aujourd’hui, je veux partager avec vous une vidéo de Youtube.
Elle ne dure que 5mn, si vous êtes très pressé aller tout de suite à 3 mn.
Mais ce serait dommage parce que ce qui se passe avant explique ce qui va se passer.
C’est un moment rare où la frontière entre l’humain et l’animal s’évanouit.
C’est un instant d’éternité où il est question de tendresse, d’un geste de tendresse : le geste de tendresse de Wounda pour Jane
Mais Wounda est un chimpanzé et Jane est une femme.
Tout cela est filmé.
Suis-je naïf ? Je crois que ce geste est spontané.
En juin dernier, une jeune femelle chimpanzé prénommée Wounda recouvrait la liberté sur l’île de Tchindzoulou, en République démocratique du Congo.
L’animal, avait été secouru, tout bébé, par l’Institut Jane Goodall fondé une primatologue britannique du même nom.
Il avait été recueilli, entre la vie et la mort, alors que sa mère avait été tuée par des braconniers.
Après des moments difficiles ou ses soigneurs avaient pensé la perdre, suivis d’une longue convalescence au Centre de réhabilitation pour chimpanzés de Tchimpounga, Wounda était enfin prête à recouvrer la liberté, aux côtés des quatorze précédents chimpanzés relâchés, par l’institut, dans l’île.
Mais, avant de retourner à la vie sauvage, la jeune femelle chimpanzé a eu des gestes de tendresse poignants envers la directrice du centre de Tchimpounga, Rebeca Atencia, et, surtout, pour la primatologue Jane Goodall, qui a consacré sa vie à la sauvegarde des grands singes de son espèce.

http://www.youtube.com/watch?v=lf08i5vqIvQ

J’ai découvert ce moment de beauté ineffable grâce à un Article du Point : http://www.lepoint.fr/environnement/video-l-etonnant-elan-de-tendresse-d-un-chimpanze-rescape-pour-jane-goodall-23-01-2014-1783694_1927.php

C’est peut être l’occasion de faire remarquer, à celles et ceux qui ne l’auraient pas observé,
que ma signature se lit câlin.

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Vendredi 27 septembre 2013

Vendredi 27 septembre 2013
«C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches.»
Victor Hugo – L’homme qui rit – Livre deuxième, chapitre 11

Le paragraphe dans son entier :

«Oui, murmura Gwynplaine pensif,
c’est de l’enfer des pauvres
qu’est fait le paradis des riches.»

Je pense qu’aujourd’hui ce mot de Victor Hugo reprend tout son sens…

Lors de l’émission du 23/09/2013 de L’Eco du Jour de France Inter, Philippe Lefébure a montré une des faces du modèle allemand, ce modèle tant vanté, en racontant une histoire de l’économie quotidienne :

« Il y a quelques mois, cette jeune Française, installée à Berlin, depuis 2 ans, a raconté sur le site Rue89, ses déconvenues sur le marché du travail berlinois. Par la même, elle a décrit l’envers du décor d’une réussite allemande, beaucoup enviée à l’étranger (et, notamment, en France), le « boom », ici, des start-ups internet.
A tel point qu’on surnomme Berlin, la « Silicon Allee », dans une référence facile à la Silicon Valley californienne. […]C’est l’expérience malheureuse de Mathilde, qui ignorait, en arrivant ici, qu’il n’existe pas de salaire minimum en Allemagne: c’était un des thèmes de la campagne, on le sait. Mathilde, du coup, en a fait la douloureuse expérience: à son premier entretien d’embauche, elle a pensé qu’on lui proposait un mi-temps pour 650 euros par mois. Non, il s’agissait bien d’un contrat de 40 heures par semaine.
Dans les start-ups qu’elle a fréquenté par la suite, c’est la « précarité qui domine » raconte-t-elle. Quand ce n’est pas un statut de stagiaire, on y pousse, souvent, les jeunes dans le statut « indépendant ».
Des « free lance », qui, du coup, remplissent les cafés de la ville à la recherche d’une connexion internet pour travailler. Certains y trouvent leur compte. Pas Mathilde, une Française de Berlin qui se classe, sans hésiter, parmi les « déçus » du modèle allemand. »
Par ailleurs, saviez-vous que vous pouviez lire en ligne et télécharger « L’homme qui rit » et bien d’autres livres sur Wikisource ?
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Mercredi 18 septembre 2013

Mercredi 18 septembre 2013
«Le Droit ne fait pas Justice.»
François Sureau
Ce propos, qui me paraît plein de sens, a été tenu le 14/09/2013 dans l’émission « les Matins de France Culture » par François Sureau.
François Sureau est avocat, il s’occupe notamment des réfugiés politiques pour les défendre devant l’Administration et les Tribunaux français.
Mais avant, il a été maître de requêtes au Conseil d’Etat.
Il a alors vécu un épisode qui l’a marqué à jamais et avec lequel il doit vivre.
Nous étions au début des années 1980. Fraîchement sorti de l’ENA, le jeune juriste débarque au Palais-Royal, émerveillé de siéger au milieu des maîtres du droit qui ont enthousiasmé ses études.
Le bonheur se teintant toujours de désenchantement chez Sureau, il se voit affecté dans une obscure section, où il traite de démembrement rural et de l’indemnisation compliquée des rapatriés d’Algérie.
Puis avec enthousiasme, il accepte de rejoindre la commission qui statue sur le sort des demandeurs d’asile ayant essuyé un refus de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).
Et c’est là que sa vie va croiser celle de Javier Ibarrategui, militant basque exilé en France. Ce dernier demande l’asile politique à la France, car il se dit menacé de mort dans son pays.
Pour la justice française, l’affaire est délicate. Accéder à cette demande, c’est nier le retour de l’Espagne à la démocratie et à l’État de droit.
Javier Ibarrategui, dit à la commission « si vous me renvoyez en Espagne, je serai assassiné. »
Dans cette affaire, le Droit a été dit : la demande de Javier Ibarrategui a été refusée.
Il est donc retourné en Espagne et des groupes d’extrême droite, des anciens franquistes, l’ont assassiné.
C’était le Droit, ce n’était pas la Justice.
François Sureau a expliqué pendant l’émission :
« Ce que le Droit vise à faire, c’est à maintenir l’ordre public.
Réaliser ce compromis tout à fait étrange entre les demandes individuelles, l’Intérêt Général, les nécessités du Bien commun, s’incarnant dans des normes quelquefois contradictoires.
Le Droit, sert à éviter l’arbitraire
L’arbitraire public, Javier Ibarrategui a pu s’expliquer devant un juge, la décision a été prise dans le cadre d’une procédure documentée.
L’arbitraire privé comme interdire à une personne à se faire justice soi-même.
En résumé : éviter un mal social pire »
De la décision de la commission et du drame qui en découlera François Sureau a tiré un bref récit dont j’ai lu plusieurs critiques très enthousiastes :
François Sureau
Le chemin des morts
Collection Blanche, Gallimard
Parution 05-09-2013
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Vendredi 06 septembre 2013

Vendredi 06 septembre 2013
«Je suis une femme […] qui vit dans un monde qui n’est plus seulement en noir ou blanc.
Parfois, le gris a du bon, c’est une planche de salut, un abri contre quelque chose qui aurait pu être bien pire. »
Suzanne Perryman
Suzanne Perryman est une bloggeuse sur le Huffingtonpost.
Elle a une fille handicapée et elle a mis sa voiture sur une place d’handicapé, comme il se doit
A son retour, un post ist d’insulte était collé sur son pare brise.
Alors elle a écrit un beau message à l’auteur anonyme, dont voici un extrait :
«Je pense que je vous connais… Vraiment. Avant de devenir maman, je vivais dans votre monde où tout est blanc ou noir, où chaque chose est à sa place.
J’avais un programme, un emploi du temps, des « to-do lists », etc.
Ce doit être merveilleux d’avoir une vie si structurée, si fiable, si prévisible que vous vous accrochez à cette ligne séparant le bien du mal, le blanc du noir et que vous vous sentez obligé de faire un commentaire lorsque vous pensez que quelqu’un franchi la ligne.
Mais cette fois, dans votre empressement à garder les choses bien nettes et ordonnées, vous n’avez pas tout vu. J’imagine que vous n’avez pas vu le permis « handicapé » pendant à mon rétroviseur, me donnant la permission de me garer près de l’entrée. Vous n’avez pas vu le système d’accès pour fauteuil roulant installé à l’arrière de ma voiture, et vous ne m’avez pas vue sortir le fauteuil manuel rose de ma petite fille que nous utilisons pour les déplacements « rapides ».
Peut-être que vous n’avez vu que ma fille aînée et moi, et pas le petit fauteuil rose bonbon de Zoé.
[…]
Je sais d’où vous venez. J’ai vécu là-bas aussi. […] Et puis je suis devenue maman.
Et contre toute attente, maman d’un enfant handicapé. Un enfant dont la durée de vie ne peut pas être garantie, dont le pronostic est non définitif, et qui n’a pas de programmes de traitements précis.
Heureusement, ma famille est entourée de bons médecins, a une attitude positive et une belle vie.
Ma vie est belle, mais elle ne peut plus être structurée aussi facilement. Ma peau n’est pas si saine, mes cheveux jouent souvent aux rebelles, les yeux sont souvent fatigués. Je me réveille plusieurs fois par nuit, je me lève à 5 heures et je marche à plein régime jusqu’à 21 heures, pourtant toujours déterminée à en faire plus, jour après jour. Mes amis me manquent, les réussites professionnelles autrefois si faciles à accomplir, mais votre monde, lui, ne me manque pas.
Je suis une femme plus généreuse qui vit dans un monde qui n’est plus seulement en noir ou blanc. Parfois, le gris a du bon, c’est une planche de salut, un abri contre quelque chose qui aurait pu être bien pire. Mes priorités ont été réorganisées et désormais, je ne penserai plus jamais à juger qui que ce soit.»
Pour l’intégralité du message c’est derrière ce lien :
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Mardi 12 mars 2013

Mardi 12 mars 2013
« Je l’ai su,
Mais je ne l’ai pas cru,
Et parce que je ne l’ai pas cru,
je ne l’ai pas su. »
Raymond Aron
Il y a des mots du jour qui parlent à l’intellect.
Il en est qui sont des traits d’humour, mais il en existe qui touchent au plus profond de l’âme humaine.
Raymond Aron vivait à Berlin en 1933, lors de l’arrivée au pouvoir d’Hitler, il a passé la guerre à Londres dans l’entourage de De Gaulle, il était donc très bien informé de ce qui se passait en Allemagne.
Bien après 1945 quand on lui a demandé : « Saviez-vous ce que les allemands faisaient aux juifs dans les camps de la mort ? »
Il a eu cette réponse extraordinaire :
« Je l’ai su, Mais je ne l’ai pas cru,
Et parce que je ne l’ai pas cru, je ne l’ai pas su. »
Quand une réalité se trouve en dehors de nos schémas de pensées, à l’extérieur de ce que nous estimons dans le champ du possible, nous ne croyons pas ce que nous savons et nous ne savons plus.
La lecture de ce mot du jour peut s’arrêter ici.
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Elle peut aussi continuer, si vous en avez la patience et souhaitez savoir pourquoi j’ai écrit ce mot du jour aujourd’hui et quel est le sens de l’introduction.
Si vous lisez les journaux, vous savez que se déroule actuellement le procès du fondateur de l’école en bateau et de ses complices.
L’école en bateau est, dans la suite de la pensée de 68, une expérience de pédagogie alternative à l’institution scolaire, où des enfants entre 9 et 15 ans, voire plus, apprennent non pas dans une salle de classe mais en voyageant sur un bateau, en prenant la responsabilité de son fonctionnement dans toutes ses dimensions.
Parmi les victimes se trouvent 3 garçons de ma famille proche.
J’ai rencontré plusieurs fois le fondateur et plus encore son second.
Cette expérience était pour moi à l’époque absolument passionnante et je la présentais sous les angles les plus positifs.
Si on reste dans les indicateurs objectifs et qu’on passe sous silence l’aspect humain, cette expérience a été remarquable.
Sachez que l’ainé de cette fratrie a quitté le système scolaire français pendant 4 ans, il l’a réintégré à 16/17 ans, en Terminale, c’est à dire sans aucune perte de temps dans son cursus scolaire.
Ce garçon a intégré, deux ans après, le nec plus ultra de la réussite scolaire française : l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm.
Le second est resté 5 ans sur ce bateau, il a réintégré le système en seconde. Il a réussi l’Ecole Centrale de Paris.
Le troisième qui n’est resté qu’un an poursuit également une belle carrière, il a fait Science Po Paris et a raté d’un rien l’ENA.
Ces 3 garçons parlent couramment plusieurs langues, ils sont très bricoleurs et très débrouillards dans la vie.
Mais sur le plan de l’équilibre et de l’épanouissement humain, la situation est plus difficile.
Le début du procès a déjà montré que la pédophilie du fondateur préexistait à cette aventure de l’école en bateau. Il est vraisemblable que toute cette expérience reposait sur la manipulation de cet homme organisant un harem d’enfants pour sa perversité, dans un lieu idéal pour assouvir ses fantasmes.
Les parents et moi-même, ne pouvions pas ne pas le savoir.
Il avait écrit un livre dont il est question dans les journaux et qui décrivait comment cet homme concevait les relations entre enfants et adultes.
Un jour j’ai montré le journal que l’école en bateau produisait, à un ami qui ne connaissait personne de cette aventure.
Au bout de 2 minutes, cet ami m’a regardé et m’a dit : « Mais enfin, ce que tu me montres là, c’est un paradis de pédophile ».
Je l’ai su, mais je ne l’ai pas cru.
Et parce que je ne l’ai pas cru, je ne l’ai pas su.
Tout cela doit rendre très humble.
Nous apprenons rarement de l’expérience des autres.
Mais la vie n’est finalement rien d’autre que d’essayer, chaque jour, de devenir moins stupide et moins naïf.
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