Vendredi 15 Janvier 2016

«J’ai toujours été orienté par la modernité»
Pierre Boulez (1925-2016)

Pierre Boulez est mort le 5 janvier 2016.

Ce début d’année a été marqué par beaucoup de décès d’artistes célèbres. Cette accumulation a même eu pour conséquence que le compte twitter du président de la république est devenu un journal d’avis de décès, à force d’hommages.

Pour ma part, je ne saurai avoir un avis, un minimum original, que sur Pierre Boulez.

Pour moi, c’est d’abord un souvenir de 1987, je venais d’arriver à Paris pour travailler au Ministère des Finances.

Je m’étais abonné aux concerts de l’Orchestre de Paris, salle Pleyel.

A mon premier concert, Daniel Barenboim dirigeait l’orchestre. J’étais loin d’être convaincu, je ne trouvais pas l’orchestre très bon, ni d’ailleurs l’acoustique de Pleyel.

Et puis, moins d’une semaine plus tard, le même orchestre, la même salle et Boulez qui dirigeait Petrouchka de Stravinsky.

Je me souviens d’être allé à ce concert très fatigué et ma crainte de m’endormir. Dès les premières mesures j’ai été subjugué, un orchestre fabuleux, précis, dont le son remplissait la salle. Une expérience unique.

Mon frère qui avait joué sous sa direction à l’Opéra de Paris, m’avait confié que l’Orchestre de l’Opéra avait répété et joué le sacre du printemps de Stravinski avec lui. Expérience remarquable, mais c’est surtout la suite qui est intéressante :

« Lorsque nous jouions, par la suite, le sacre avec un autre chef, il n’arrivait pas à nous faire jouer le sacre autrement que de la façon avec laquelle Boulez nous avait appris à l’interpréter. »

C’est justement par l’interprétation du Sacre du Printemps de Stravinsky que Pierre Boulez fut découvert par le Tout-Paris mélomane. C’est à lui qu’il fut demandé, le 18 juin 1963, de diriger cette œuvre au Théâtre des Champs Elysées avec l’Orchestre National de l’ORTF.

Le critique musical du Monde Jacques Lonchampt écrivit alors cet article dithyrambique : <Un grand chef d’orchestre : Pierre Boulez >

« Quel beau spectacle nous a donné Boulez ! Très droit, ramassé sur lui-même, toujours prêt à bondir mais dompté, la tête vigoureuse un peu écrasée sur l’encolure, il dirige sans baguette avec des gestes d’une pureté vraiment lumineuse, non pas en pétrisseur de glaise, mais avec une sorte de perfection, comme un vol d’oiseau dans ses vastes mouvements planants ou ses plus fines arabesques. Les doigts sont expressifs comme dans une étude de Durer ou de Léonard, et tantôt s’écartent en dégradé, le pouce et l’index se touchant en forme d’anneau, tantôt se rassemblant, la main très droite, coupante à la verticale, ou bien à l’horizontale pacifiante et protectrice.

En tout cela, pas l’ombre de contorsion, de cabotinage ou de recherche de l’effet ; c’est la beauté ferme du geste parfaitement harmonisé à sa fonction. La magie de l’art de Boulez est une poésie de l’exactitude, informée par une science extrême et une extrême sensibilité, où la subtilité et la force de la polyrythmie, les progressions et les ruptures dynamiques, et au suprême degré l’équilibre et le mélange des timbres, se recomposent comme par miracle dans une vision tantôt apollinienne, tantôt dionysiaque, et toujours vivante. »

Tel était Pierre Boulez un homme avec une autorité et une personnalité hors norme.

Un extraordinaire interprète de Stravinsky, de Bartok, de la nouvelle école de Vienne, de Debussy, de Ravel et aussi de Wagner et de Mahler.

Mais comme Gustav Mahler, ce n’est pas cet aspect de son art qui lui était le plus cher.

Lui se vivait, avant tout, comme compositeur, un compositeur à la pointe de la modernité. L’exergue du mot du jour est cité par <Par le site de France Culture>

Il était né à Monbrison à 40 km de Saint Etienne et à 100 km de Lyon.

Il était entré en mathématiques supérieures aux Lazaristes de Lyon, mais avait rapidement quitté cette voie pour aller apprendre la musique à Paris. Et dans la musique qu’il a défendu et créé, les mathématiques n’étaient jamais très loin.

Il a été dans un courant musical dont il est devenu le chef de file. Pour ces compositeurs, les mathématiques, l’intellect, les expériences sonores étaient premiers.

Et ces gens-là, dont Boulez considéraient que tous ceux qui n’étaient pas dans cette réflexion et dans cette recherche étaient dans l’erreur.

Ainsi Boulez n’a jamais interprété ni dit des choses positives sur les deux compositeurs que je considère comme les plus grands du XXème siècle à savoir Benjamin Britten et Dimitri Chostakovitch.

Par exemple en 1989, Pierre Boulez déclarait (dans des propos recueillis par la revue Diapason) :

« Quant à Chostakovitch, l’ombre de Mahler pèse lourdement sur lui, ce qui n’arrange rien. Je ne pense pas du tout qu’il y ait actuellement nécessité d’un retour vers la tonalité. Faire du pseudo-Mahler, est-ce bien nécessaire ? Ce qui est fait et bien fait, pourquoi le refaire dans l’inactualité et l’amoindrissement ? ».

Et même la musique de son maître Messiaen ne trouvait pas grâce à ses oreilles, il a traité sa TurangalîlaSymphonie (1946-1948) de « musique de bordel ».

Messiaen qui était un homme plus bienveillant a dit de lui :

« Lorsqu’il entra dans la classe pour la première fois, il était très gentil. Mais il devint bientôt en colère contre le monde entier. »

Il détestait aussi le compositeur André Jolivet, <Jacques Drillon rapporte> que son ire débordait même sur la femme de ce compositeur à qui il a dit :

« Madame, avec un chapeau comme le vôtre, on ne parle pas, on pète. »

Le même Drillon raconte aussi son humour : ainsi le percussionniste de son ensemble, arrivé en retard à la répétition parce qu’il ne s’était pas réveillé, donne son premier coup de timbale, et crève la peau de l’instrument. Boulez :

« Si je comprends bien, toi, tu n’as pas le sommeil réparateur ! »

Il avait synthétisé son attitude en affirmant : «préférer une bonne polémique avec les épées et les sabres qu’une espèce de politesse de convenance»

C’était ainsi un polémiste qui pouvait traiter les autres avec un souverain mépris, ce qui lui a créé bien des inimitiés.

André Malraux a nommé directeur de la musique Marcel Landowski, alors que Pierre Boulez considérait que ce poste lui revenait de droit.

Mais il ne faut pas s’arrêter à cet aspect de sa personnalité qui je pense s’était beaucoup adouci avec l’âge qui n’est pas toujours un naufrage.

C’était aussi un homme très intelligent, d’une très grande culture, un pédagogue et un bâtisseur.

Il a créé l’IRCAM, l’ensemble intercontemporain et c’est grâce à son impulsion que la cité de la musique et il y a peu de temps la Philharmonie de Paris ont été bâtis.

Selon de nombreux témoignages, il savait être très bienveillant et disponible pour tous ceux qui acceptaient d’entrer dans son monde.

C’était aussi un perfectionniste qui plutôt que de multiplier les œuvres, revenait sans cesse sur celle qu’il avait déjà écrite pour les modifier et les approfondir.

Comme j’étais en congé, j’ai écouté la musique de Boulez, je n’en avais jamais écouté autant.

Et finalement on peut y trouver du plaisir.

J’ai particulièrement aimé une œuvre assez courte (8mn) pour 7 violoncelles « Messagesquisse » dont vous trouverez une interprétation étonnante <ICI>.

Et puis <Vous trouverez enregistré à la Philharmonie de Paris le 11 juin 2015 et joué par l’Ensemble intercontemporain une de ses œuvres majeures REPONS>

Au premier rang se trouve la lumineuse flûtiste Emmanuelle Ophèle qui fut notre voisine lorsque nous habitions Montreuil sous-bois. Alors que je lui concédais mon peu de goût pour la musique de Boulez et de ses épigones, elle me répétait ce conseil :

« Alain, il faut que tu viennes nous écouter en live, l’expérience est alors complètement différente ».

Je n’ai pas suivi ce conseil, aujourd’hui je le regrette.

Quoi qu’il en soit Pierre Boulez restera un musicien et une référence incontournable de la musique même si la voie qu’il a creusée a peut-être mené vers une impasse.

<Pour finir je vous donne ce lien vers le final de l’Oiseau de feu avec la Philharmonie de Vienne où vous admirerez la gestuelle sobre et d’une précision absolue du maître qui dirigeait toujours sans baguette>

<628>

Jeudi 14 Janvier 2016

Jeudi 14 Janvier 2016
« C’est chose tendre que la vie, et aisée à troubler… »
André Comte-Sponville est un philosophe français né en 1952 à Paris. Il vient de publier un ouvrage ayant ce beau titre : «C’est chose tendre que la vie», inspirée d’une citation de Montaigne que j’ai choisie pour mot du jour d’aujourd’hui.
Et pour compléter cette réflexion je partage avec vous une Interview qu’André Comte-Sponville a offert à Libération dans son édition du 28 décembre 2015 «Se désencombrer pour retrouver ce qui compte»
En voici quasi l’intégralité :
Cette année a été particulièrement difficile, avez-vous éprouvé le besoin de «couper» ? Comment faites-vous pour «faire le vide» ?
«Couper», ce n’est pas le mot qui convient. Il m’arrive de changer de rythme, notamment quand je m’installe à la campagne pour quelques jours ou semaines. Mais je n’en continue pas moins d’écouter la radio, de regarder les informations télévisées, de lire les journaux… Je n’éprouve pas le besoin de me couper du monde. «Faire le vide», oui, parfois, mais pour retrouver la plénitude du corps et de la vie, du présent qui passe et demeure, du travail ou du repos, de la solitude ou de l’intimité à deux… Peu de chose y suffit : un peu de calme, de silence, de tendresse, de sensualité, d’activité, d’attention… Moments de simplicité et de paix, qui n’abolissent aucun combat mais qui les mettent tous, au moins pour un temps, à distance. C’est bien ainsi. Si nous avons été bouleversés par les attentats de janvier et de novembre, c’est que nous pensons que la vie vaut mieux que la mort. Il serait incohérent de ne pas savoir profiter du simple fait d’être vivant, lorsque l’horreur nous épargne ou ne nous atteint qu’indirectement. Refuser de se laisser emporter par le malheur, l’angoisse ou la haine, c’est aussi une façon de résister au terrorisme.
«Faire le vide» peut être une nécessité mais n’est-ce pas aussi fuir la réalité ?
Qui peut fuir ce qui nous enveloppe ? N’ayez pas peur : le monde sera toujours là ! Il ne s’agit pas de fuir la réalité, mais pas non plus de courir après en permanence ! Savoir ralentir, savoir s’arrêter parfois, c’est plutôt se donner les moyens d’habiter le réel, de prendre du recul, de retrouver en soi une capacité d’attention, de réflexion, de résolution… Se désencombrer de l’inessentiel, pour retrouver ce qui compte vraiment. Fuir non pas la réalité mais l’agitation, la dispersion, le «divertissement», au sens pascalien du terme. On n’en agira que mieux !
Vous êtes un adepte de la méditation. Comment pratiquez-vous cette activité ?
C’est un exercice indissociablement corporel et spirituel : se tenir assis, le dos droit (c’est le contraire de l’avachissement, mais aussi de la prosternation), le corps immobile, l’esprit attentif. Attentif à quoi, puisqu’on ne fait rien ? Au simple fait de vivre, de respirer, à ce qu’on sent et ressent, l’air qui passe dans les narines, cette douleur dans le genou, ce bruit dans le lointain, cette angoisse qui sourd, cette sérénité parfois qui s’installe… Regarder ses pensées venir et se dissiper («comme des nuages dans le ciel», disent les textes zen), sans s’y attacher ni les combattre. Ne pas juger. Ne pas rejeter. Laisser venir et partir. Action minimale, attention maximale. Ne rien faire, mais à fond !
Que vous apporte cette pratique ?
Rien de miraculeux. Mais un moment de silence, de lucidité, de simplicité, de tranquillité… C’est le contraire d’une prière : pas de mots, pas de demande, pas d’adoration ; juste l’attention silencieuse au corps qu’on est, au monde qui nous contient, à la continuité changeante du présent. Cela fait – parfois, rarement – comme un moment d’éternité.
C’est quoi un «moment d’éternité» ?
Qu’est-ce que l’éternité ? Pas un temps infini (car alors ce serait terriblement ennuyeux) mais un présent qui reste présent. C’est donc le présent même, dont nous sommes ordinairement séparés par le regret ou la nostalgie, l’espoir ou la crainte. L’éternité n’est pas l’immuabilité, mais la perduration toujours actuelle du devenir. Non la permanence, mais l’impermanence en acte et en vérité ! Il ne s’agit pas de vivre dans l’instant, ce que nul ne peut, mais d’habiter le présent qui dure et change. Quel que jour qu’on soit, c’est toujours aujourd’hui. Quelle que soit l’heure, c’est toujours maintenant. Et ce perpétuel maintenant est l’éternité même. C’est cela, que la philosophie m’a aidé à penser, la méditation m’aide à le vivre, y compris quand je fais tout autre chose que méditer ! On ne court le plus souvent qu’après l’avenir. Mais on ne court qu’au présent.
Tout simplement se désencombrer de ce qui n’est pas essentiel pour retrouver ce qui compte vraiment et habiter le présent.

Mercredi 13 Janvier 2016

Mercredi 13 Janvier 2016
« La définition de la santé »
Michel Serres
En restant sur le sujet des vœux de bonne année, le mot qui apparait le plus souvent c’est «bonne santé».
Dans l’esprit de beaucoup cela signifie probablement absence de maladie.
Mais est-ce bien la bonne définition de la santé ?
Par ce mot du jour, je partage une réflexion de Michel Serres qu’il a déployée dans son émission hebdomadaire sur France Info <Le sens de l’info du 20 décembre 2015>
 
Michel Serres : 
« La santé il faudrait d’abord la définir […]
Je voudrais citer un livre fameux livre paru en 1940, signé d’un certain docteur <René Leriche> (1879-1955) qui était issu d’une famille de médecins lyonnais et qui s’intitulait « Chirurgie de la douleur ».
Ce médecin avait vécu les horreurs de la guerre 14-18 et avait tenté de créer une chirurgie moins agressive, moins douloureuse, un peu plus anesthésique. Il était devenu le champion de la lutte contre la douleur.
Dans ce livre, il cite une phrase qu’il avait prononcée en 1937 et qui l’avait rendu très célèbre : […] « La santé, c’est la vie dans le silence des organes »
Cette définition est simple, elle est géniale et correspond au vécu des gens qui oublient leur corps quand ils sont en bonne santé. Car quand vous êtes en bonne santé, aucun geste ne vous coûte, ce qui signifie qu’aucun organe ne proteste contre le geste que vous faites, l’action que vous menez. C’est bien le silence des organes. […].
J’ai une objection maintenant.
Cette phrase signifie que quand les organes bougent, s’expriment, parlent, ils n’expriment que la douleur, que la souffrance. Ce serait donc une définition que négative […].
Il y a eu une révolution médicale avec l’invention de la pénicilline [1928], des antibiotiques [dont la pénicilline fut le premier d’entre eux] et d’autres médicaments qui ont complétement bouleversé notre rapport à la maladie car il permettait la guérison de la maladie.
Et sont apparus à la même époque les antalgiques, les analgésiques, les anesthésiques etc qui ont complément bouleversé notre rapport à la souffrance et à la douleur. […] Dès lors, la définition de la santé change et la [définition du docteur Leriche n’est plus exacte.]
Collectivement, l’espérance de vie se met à croitre, l’arrivée des guérisons et des recouvrements de la santé augmentent considérablement.
On parle aujourd’hui de ce silence-là, du bien-être, de l’état de forme. Et par conséquence on dit bien que lorsque les organes parlent, ils expriment le plaisir.
Dans le passé la santé était définie individuellement par le rapport à la douleur et aujourd’hui la santé est définie collectivement dans les statistiques par rapport à l’espérance de vie et individuellement par rapport au bien-être.
Il y a eu un changement colossal, comme un renversement de la définition de la santé [de négatif à positif]. […]
On a démontré désormais que l’action des différents ministères,  la création de l’OMS, la création de la sécurité sociale ont tellement changé notre rapport au corps qu’on pense même que ces actions collectives sont plus importantes dans la révolution que je parle que les [inventions médicales] à proprement parler.
Autrefois la santé était un don du ciel, un don de la nature, un don du hasard et on ne faisait que se battre contre [la maladie] alors qu’aujourd’hui notre santé est entre nos mains en grande partie.
La définition aujourd’hui de la santé est statistiquement collective, deuxièmement le bien-être et troisièmement nous en sommes responsables. […]
En 2013, par exemple aux Etats-Unis, 17 citoyens américains sont morts pour cause de terrorisme et 400 000 sont morts pour cause de tabac.
Si 400 000 sont morts pour cause de tabac, c’est qu’ils fumaient et s’ils fumaient, c’est qu’ils voulaient bien fumer.
La santé devient un problème éthique, elle est grandement entre nos mains.
On voit donc combien la définition du professeur Leriche devient désuète.
Nous avons changé de médecine, nous avons changé de société et nous avons changé de morale. »
Bonne santé à tous pour 2016

Mardi 12 Janvier 2016

« Bonne Année »
Vœu que l’on formule le premier jour de l’année.

Je vous convie aujourd’hui à une réflexion sur la relativité. Réflexion qui n’a rien à voir avec la théorie d’Einstein sur l’espace et le temps.

Quoique …

Si nous revenons à cette question qui occupe tellement l’espace public ces derniers temps : la religion et que nous posons de manière rationnelle la question pourquoi un être humain a-t-il une telle religion ?

Du point de vue scientifique et donc statistique, l’explication quasi unique est : Parce qu’il est né dans une famille qui avait cette religion et plus largement dans un pays qui est majoritairement de cette religion. Les conversions existent mais sont, à l’aune de cette première réflexion, très marginales.

Je pense que cette prise de conscience ne peut qu’avoir une grande influence sur notre analyse de la croyance religieuse.

Mais ce n’est pas de cela que je souhaite parler aujourd’hui.

Quoique …

Bonne année, c’est le premier jour de la nouvelle année. Qui dit année, dit calendrier. Souvent le calendrier est lié à une religion.

Et nous sommes à nouveau plongés dans la relativité.

Notre bonne année est la bonne année de l’ère et du calendrier chrétien. Plus précisément le calendrier grégorien [du pape Grégoire XIII] qui a complété et modifié en 1582 le calendrier Julien créé sous Jules César.

La tentative des révolutionnaires français à modifier cette institution chrétienne a échoué.

Pour les chinois, les coréens et les vietnamiens, c’est-à-dire 1/5 de l’humanité, la bonne année se souhaitera le 8 février qui correspond au premier jour de leur calendrier.

Pour une beaucoup plus petite communauté, les sikhs, ce sera le 14 mars.

Et le 20 mars ce seront les iraniens et les kurdes qui souhaiteront la bonne année avec Norouz.

Le 15 avril ce sera le tour des thaïlandais, des birmans, des sri lankais et d’une partie des indiens.

Le Nouvel an juif, ce sera du deux au quatre octobre, à peu près en même temps que le nouvel an musulman, du premier au trois octobre.

Enfin, le trente octobre, ce sera Diwali, la fête des lumières, pour plus d’un milliard d’Indiens.

Je serai, comme toujours, franc avec vous, je n’ai pas vérifié l’exactitude de toutes ces dates, j’ai fait confiance à Anthony Bellanger sur France Inter qui a donné cette énumération.

Mais ce qui m’intéresse ainsi est la prise de conscience que ce que je pensais universelle, la bonne année pour tous les terriens, comme l’exprime souvent nos chaines de télévision notamment en annonçant le matin du 31 décembre en France, « C’est déjà la nouvelle année en Nouvelle-Zélande » avec ce postulat que tous les terriens vont passer, en suivant les méridiens, dans un même référentiel, à la nouvelle année, unique et universelle.

Ainsi, si je vous souhaite une bonne année, c’est une bonne année du calendrier chrétien.

Et encore pas de tous les chrétiens, car certains chrétiens orthodoxes ont conservé le calendrier julien.

Et si on souhaite aller encore plus loin dans l’érudition on constatera que le premier janvier n’a pas toujours été le premier jour de l’année en France et qu’il existait même des jours différenciés selon les provinces : à Lyon, c’était le 25 décembre, à Vienne [France], le 25 mars.

Et c’est  l’édit de Roussillon de 1564 de Charles IX [le roi de la Sainte Barthélémy] qui harmonisa les pratiques et fixa le nouvel an au premier janvier.

En conclusion, dans un monde de relativité je vous souhaite une bonne année selon le calendrier actuel du plus grand nombre des chrétiens.

<625>

Lundi 11 Janvier 2016

« DEMAIN »
Film de Cyril Dion et Mélanie Laurent

La nouvelle année c’est le moment de fermer la porte à l’ancien et de penser à demain.

Alors je voudrais partager avec vous «Demain» qui est un film documentaire que je suis allé voir lors de mon abstinence épistolaire.

Beaucoup d’informations et de constats nous conduisent à nous inquiéter pour le demain que nous aurons à vivre ou que nous laisserons à nos enfants. Mais le film «Demain» apporte beaucoup d’optimisme. C’est un demain positif car Cyril Dion, Mélanie Laurent et quelques amis sont allés chercher dans le monde et même en France des expériences qui existent déjà et qui constituent une part de la solution aux défis que nous avons à affronter : diminuer notre empreinte carbone et notre dépendance aux énergies fossiles; être en mesure de nourrir de plus en plus d’habitants sur la planète bleue, surmonter l’impasse économique dans laquelle nous nous enfonçons et où la richesse produite est accaparée par une caste de plus en plus étroite.

Le film s’ouvre sur les conclusions d’une étude de la NASA publiée dans la revue Nature et annonçant un effondrement probable de notre civilisation dans les 40 années à venir. Les savants de Stanford qui ont piloté cette étude sont d’ailleurs interviewés au début du film.

Le film est ensuite divisé en 5 chapitres qui abordent les défis, les dysfonctionnements actuels et les pistes d’ores et déjà trouvées :

Le chapitre 1 concerne l’alimentation et tend à démontrer qu’il est possible de produire plus de nourriture, sans engrais ni pesticides, avec peu de mécanisation et en réparant la nature plutôt qu’en la détruisant. Nous voyons comment nos villes peuvent réintégrer l’agriculture et nos campagnes se repeupler. On voit ainsi l’expérience de la ville de Détroit qui est passée de 2000 000 d’habitants à 700 000 habitants lors de la crise de l’industrie automobile et où, dans un premier temps pour survivre, les habitants qui sont restés ont développé le concept de l’agriculture dans la ville. Cette expérience a débouché sur une nouvelle manière de vivre la ville et son approvisionnement avec 1600 fermes urbaines. Le film présente aussi des expériences en Angleterre en particulier la ville de Todmorden près de Manchester (14 000 ha) dont les habitants sont en train de reconstruire leur autonomie alimentaire (objectif 2018).

Le chapitre 2 traite de la transition énergétique. Ainsi des villes et même des pays s’organisent pour se passer totalement de pétrole, de charbon et d’énergie nucléaire. Ainsi le film montre Copenhague qui vise à n’émettre plus aucun CO2 en 2025 et qui a construit un modèle d’urbanisme où 50% des habitants de la ville se déplacent en vélo et où ils habitent à moins de trois cent mètre d’un espace vert. En 2010, elle arrivait en première place des villes les plus résistantes au changement climatique, dans l’étude du chercheur américain, Boyd Cohen. À l’horizon 2025, 75% des tous les déplacements devront être effectués, à pied, en vélo, ou en transports publics.

Le chapitre 3 aborde la question de l’économie et nous apprenons l’existence de monnaies locales (complémentaires aux monnaies classiques) qui ont pour effet d’améliorer la circulation locale de l’argent et donc les circuits courts et l’économie locale. C’est d’abord, à ma grande surprise, La Suisse qui possède l’un des exemples les plus solides de monnaies complémentaires dans le monde et qui s’appelle WIR. Créé en 1934 par 16 entrepreneurs subissant de plein fouet la crise de 1929 et la frilosité des banques, elle propose un système de crédit mutuel, permettant aux entreprises de continuer à fonctionner même lorsque les crises paralysent le système bancaire et de réaliser leurs investissement à bien plus faible coût.

Aujourd’hui, 70 ans plus tard, elle est utilisée par une PME suisse sur cinq (75.000 membres). Une étude américaine qui a porté sur une quinzaine d’années démontre que cette monnaie contribue à la solidité de l’économie nationale. En effet, en cas de crise monétaire, les entreprises échangent davantage de WIR, échappant ainsi au phénomène d’assèchement du crédit. En revanche, quand l’économie va bien, les entreprises ont moins tendance à utiliser le WIR, et utilisent davantage le Franc Suisse. Le WIR montre donc, chiffres à l’appui, qu’une monnaie complémentaire peut non seulement se développer à grande échelle, mais que l’existence d’un véritable écosystème monétaire permettrait de mieux faire face aux aléas économiques et financiers. Mais de telles monnaies existent aussi aux Etats Unis et en Angleterre. Cette vision est complétée par les pratiques de l’économie circulaire : créer des chaînes de production sans déchets où le recyclage des matières est quasiment infini et où les déchets des uns deviennent les ressources des autres.

Le chapitre 4 donne des exemples d’éducation et d’enseignement innovants qui apprennent aux enfants à coopérer, à résoudre pacifiquement leurs conflits, à vivre harmonieusement avec eux-mêmes, les autres et la nature, à réapprendre des savoir-faire indispensables. C’est cette fois la Finlande qui démontre son excellence dans ce domaine.

Le chapitre 5 enfin parle du réenchantement de la démocratie par des initiatives qui impliquent vraiment les gens.

Je ne peux que vous inciter à aller voir ce beau film plein d’espoir et de pistes que chacun peut compléter par ses idées créatrices.

Gandhi disait :

« Soyez-vous même le changement que vous voudriez voir dans le monde »

En attendant il y a le site de crowfunding, c’est à dire de financement participatif qui a assuré une partie du budget du film qui présent cette belle réalisation et dont j’ai tiré une partie des précisions que je vous ai donné dans ce message : http://www.kisskissbankbank.com/demain-le-film

Et puis il y a le site spécifique au film qui est très riche d’enseignements : http://www.demain-lefilm.com/le-film

<Et ici la bande d’annonce du film>

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