Mercredi 29 mars 2023

« Nous devrions toujours célébrer les immigrés qui contribuent tellement à notre pays. »
Humza Yousaf qui vient d’être désigné premier ministre de l’Écosse

Il se passe quelque chose de l’autre côté de la Manche.

D’abord en octobre 2022, après l’épisode court et peu glorieux de Liz Truss et celui tonitruant et peu sérieux de Boris Johnson, les conservateurs britanniques ont désigné comme premier ministre Rishi Sunak

Rishi Sunak est né le 12 mai 1980 à Southampton dans le Hampshire en Angleterre.

Mais il est le fils de Yashvir Sunak, né au Kenya, alors colonie britannique, et d’Usha Sunak, pharmacienne née au Tanganyika, alors territoire sous mandat britannique.

Sa famille est originaire du Pendjab et fait partie de la diaspora indienne d’Ouganda, du Kenya et de Tanzanie .

Celui qui dirige le Royaume-Uni est donc issu de l’immigration indienne.

Mais en creusant un peu j’ai appris qu’il était pratiquant de l’Hindouisme. Lui-même a souligné que le jour de sa désignation, le lundi 24 octobre, correspondait au jour de la fête traditionnelle de Diwali.

Le Diwali célèbre la victoire de la lumière sur les ténèbres et est fêté à travers le monde entier par la communauté hindoue.

En Grande Bretagne, il n’y a pas de constitution écrite. Il est de tradition que les députés prêtent serment sur la bible. Mais, après son élection au Parlement en 2015, Rishi Sunak a prêté serment au Parlement sur la Bhagavad Gita, le livre sacré hindou.

C’est ce qu’on lit dans cet article du Huffington Post : < La victoire de Rishi Sunak tombe le jour du Diwali, tout un symbole >

Au nord des iles britanniques, en Écosse, la première ministre depuis 2014, Nicola Sturgeon, a annoncé sa démission le 15 février 2023.

Ce mardi 28 mars, le parlement local d’Ecosse a désigné pour la remplacer Humza Yousaf qui deviendra aujourd’hui, mercredi, officiellement le premier ministre de l’Écosse.

Le journal suisse « Le Temps » constate que c’est <la première fois qu’une démocratie occidentale élit un leader musulman> et ajoute

« A l’annonce de sa victoire à la tête du parti, lundi, Humza Yousaf s’est levé, tout sourire, a donné une accolade aux deux candidates qu’il avait battues, puis s’est tourné vers ses parents, assis derrière lui. Son père, collier de barbe blanche strict, sa mère, foulard musulman sur la tête et une larme à l’œil, débordaient de fierté. Le nouveau leader du Scottish National Party (SNP), le parti indépendantiste écossais, élu avec 52,1% des voix, fait rarement de ses origines un argument politique, mais en ce jour historique, qui doit faire de lui mardi le premier ministre d’Écosse, il a tenu à les souligner. «Je dois remercier mes grands-parents, aujourd’hui décédés, d’avoir émigré du Pendjab (au Pakistan) vers l’Ecosse il y a plus de soixante ans. […] Ils n’auraient jamais imaginé que leur petit-fils serait un jour sur le point de devenir premier ministre.» »

Sa page Wikipedia nous apprend qu’il est né le 7 avril 1985 à Glasgow.

Il est le fils d’immigrés de première génération : son père, Muzaffar Yousaf, est né à Mian Channu au Pakistan et à émigré à Glasgow dans les années 1960, pour travailler comme comptable. Son grand-père paternel travaillait dans l’usine de machine de couture Singer à Clydebank dans les années 1960. Sa mère, Shaaista Bhutta, est née au Kenya dans une famille originaire d’Asie du Sud qui a subi de nombreuses attaques car elle était perçue comme prenant le travail aux locaux et qui a émigré plus tard en Écosse pour échapper aux violences anti-indiennes au Kenya.

C’est donc un écossais issu de l’immigration pakistanaise qui va diriger l’Écosse en tant que chef du Parti National Écossais qui est un parti qui souhaite l’indépendance de l’écosse.

Jean-Marc Four dans sa chronique du 28 mars : <Un musulman à la tête de l’Ecosse après un hindouiste à la tête du Royaume Uni> a ajouté

« Et face à lui, en Écosse ; Yousaf aura pour premier opposant le chef du parti travailliste écossais, Anar Sarwar qui, lui aussi, est d’origine pakistanaise ! »

« L’obs » dans un article <5 choses à savoir sur Humza Yousaf> nous révèle que :

« Humza Yousaf dit avoir beaucoup souffert de racisme, en particulier après les attentats du 11 septembre 2001. En 2021, avec son épouse, il a porté plainte pour discrimination contre une crèche qui avait refusé d’accueillir leur fille »

Jean Marc Four cite Humza Yousaf :

« Nous devrions toujours célébrer les immigrés qui contribuent tellement à notre pays. ».

Il y a donc au Royaume Uni un homme issu de l’immigration indienne et de religion Hindou qui est premier ministre et en écosse un homme issu de l’immigration pakistanaise et de religion musulmane qui est premier ministre

Jean-Marc Four a analysé ce constat de la manière suivante :

« […] c’est très révélateur de la poussée spectaculaire des élus issus de la diversité chez nos voisins britanniques. […]

L’homme qui incarne désormais l’Écosse est donc musulman, originaire du Pendjab au Pakistan par sa famille paternelle.

[…] Et lorsqu’il est devenu député il y a 12 ans, Yousaf a prêté serment en anglais et en ourdou, l’une des langues du Pakistan.

[…] Un dirigeant musulman, c’est une première dans un pays occidental.

[…] Un phénomène similaire est donc à l’œuvre à Londres, au Parlement britannique.

Puisque vous le savez, le premier ministre britannique, depuis l’automne, est lui aussi issu de l’immigration.

Rishi Sunak est hindouiste, il a d’ailleurs prêté serment sur la Baghavad Gita, l’un des textes fondamentaux de cette religion. […]

Deux de ses principaux ministres sont également enfants d’immigrants: la ministre de l’Intérieur Suella Braverman, originaire de l’île de Maurice et le ministre des affaires étrangères James Cleverly, originaire de Sierra Leone.

Ajoutons d’autres figures du parti conservateur : Kemi Badenoch, originaire du Nigeria, ou Nadim Zahawi du Pakistan.

Quant au maire de Londres, c’est le travailliste Sadiq Khan depuis maintenant 7 ans. Origine là encore : Pakistan.

Ces exemples nombreux disent une évolution majeure de la vie politique britannique : les élus issus de la diversité accèdent désormais aux plus hauts postes.

Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de racisme en Angleterre ou en Écosse. Il y en a : le nouveau premier ministre écossais raconte que sa fille en a été victime.

Mais l’ascension sociale des élus de 2ème ou 3ème génération est rapide en politique. Parce que certains partis, comme le parti conservateur, ont imposé des quotas.

Et aussi parce que la société y est prête. Elle n’a pas de réticence à porter à sa tête un enfant de l’immigration. […]

En tout cas, le contraste entre la France et le Royaume-Uni, déjà frappant avec l’avènement de Sunak, devient saisissant avec celui de Yousaf : l’équivalent en France, ce serait un président ou un premier ministre issu des immigrations algérienne, marocaine, sénégalaise.

Déjà qu’un ou une ministre, une Dati, un Ndiaye, une Vallaud Belkacem, c’est rare. Alors un chef de gouvernement n’en parlons pas. »

Il me semble que nos amis britanniques ont, sur ce point, un peu d’avance sur la France

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