Jeudi 5 avril 2018

« Mais peu m’importe ce qui va m’arriver maintenant, car je suis allé jusqu’au sommet de la montagne. Je ne m’inquiète plus. »
Martin Luther King, le 3 avril 1968 à Memphis

Il s’en est passé des choses en 1968…

Le 4 avril 1968 à18h01, Martin Luther King est assassiné à Memphis dans le Tennessee. Il avait 39 ans.

Un article de Wikipedia est consacré à cet assassinat dont on n’a jamais trouvé les vrais coupables :

« Fin mars 1968, Martin Luther King se déplace à Memphis (Tennessee) pour soutenir les éboueurs noirs locaux qui sont en grève depuis le 12 mars afin d’obtenir un meilleur salaire et un meilleur traitement. Les Afro-Américains étaient payés 1,70 dollar de l’heure et n’étaient pas payés quand ils ne pouvaient pas travailler pour raison climatique, contrairement aux travailleurs blancs. Des violences éclatent autour des marches pacifiques, un jeune Afro-Américain est tué.

Le 3 avril, au Mason Temple, Martin Luther fait le discours prophétique « I’ve Been to the Mountaintop » (« J’ai été au sommet de la montagne ») devant une foule euphorique. […]

Le 4 avril 1968 à 18 h 1, Martin Luther King est assassiné alors qu’il se trouve sur le balcon du Lorraine Motel à Memphis dans le Tennessee.[…] Il est déclaré mort au St. Joseph’s Hospital à 19 h 05.

L’assassinat provoque une vague d’émeutes raciales dans 60 villes des États-Unis (125 au total5) qui fait de nombreux morts et nécessite l’intervention de la Garde nationale.

Cinq jours plus tard, le président Johnson déclare un jour de deuil national, le premier pour un Afro-Américain, en l’honneur de Martin Luther King. 300 000 personnes assistent à ses funérailles. […]

[…] La ville de Memphis négocie la fin de la grève d’une manière favorable aux éboueurs après l’assassinat.

D’après le biographe Taylor Branch, l’autopsie de King révéla que bien qu’il ait seulement 39 ans, son cœur paraissait celui d’un homme âgé de 60 ans, montrant physiquement l’effet du stress de 13 ans dans le mouvement des droits civiques. Entre 1957 et 1968, King avait voyagé sur [des] millions de kilomètres, parlé en public plus de 2 500 fois, été arrêté par la police plus de vingt fois et agressé physiquement au moins quatre fois. »

Beaucoup d’émissions et d’articles ont été consacrés à la commémoration de cet évènement. Notamment les matins de France Culture du 4 avril ont été consacrés à Martin Luther King.

La situation des noirs a un peu évolué depuis 1968, mais il reste aux Etats-Unis toujours d’immenses inégalités dont les noirs sont les victimes, comme ils sont les victimes de la violence des blancs et des policiers. Le titre de l’émission était : « 50 ans après l’assassinat de Martin Luther King, le retour de la question noire ? »

Une des invités de l’émission a dit justement :

« La représentation du corps noir comme source d’angoisse et de criminalité est permanent dans l’histoire américaine. Le problème n’est pas le policier qui tue, le problème est l’ensemble des Blancs derrière leur bureau qui considèrent qu’il n’y a pas d’injustice. »

Christiane Taubira qui était une des invités de cette émission a expliqué :

« L’Amérique est toujours travaillée par ses vieux démons. On a cru que l’élection de Barack Obama correspondrait à une Amérique postraciale, lui-même a reconnu s’être trompé »

Mais ce qui m’a marqué lors de cette émission c’est d’avoir entendu un extrait du dernier discours de Martin Luther King : « J’ai été au sommet de la montagne », prononcé un jour avant son assassinat.

Ce discours vous le trouverez en intégralité traduit en français sur ce site : https://nofi.fr/2018/02/suis-alle-jusquau-sommet-de-montagne-dernier-discours-de-martin-luther-king/37614

<Vous trouverez ici une version audio de ce discours>

<Ici un extrait vidéo de la fin de ce discours>

Martin Luther King est un militant de la non-violence, il est révolté par les injustices et il est du côté de celles et ceux qui combattent pour leurs droits sociaux.

Mais il est aussi un Pasteur, il est croyant et sa Foi chrétienne se rencontre souvent dans son discours dont je voudrais partager quelques extraits aujourd’hui :

« Notre nation est malade. Le pays est en proie à des troubles. La confusion règne partout. C’est là une demande bizarre. Mais d’une façon ou d’une autre, vous ne voyez les étoiles que s’il fait assez noir pour cela. Et je vois Dieu à l’œuvre, en cette période du XXè siècle.

Quelque chose est en train d’arriver à notre monde. Les masses populaires se dressent. Et partout où elles s’assemblent aujourd’hui – que ce soit à Johannesburg, en Afrique du Sud, à Nairobi, au Kenya, à Accra, au Ghana, dans la ville de New York, à Atlanta, en Géorgie, à Jackson, au Mississippi, ou à Memphis, dans le Tennessee – le cri est toujours le même: « Nous voulons être libres. » Et une autre raison pour laquelle je suis heureux de vivre à notre époque, c’est que nous nous trouvons, par force, à un point où il faudra nous colleter avec les problèmes que les hommes ont tenté d’empoigner pendant toute leur histoire, sans que l’urgence soit telle qu’ils s’y trouvent forcés. Mais il y va maintenant de notre survie. Les hommes depuis des années déjà parlent de la guerre et de la paix.

Désormais, ils ne peuvent plus se contenter d’en parler; ils n’ont plus le choix entre la violence et la non-violence en ce monde; c’est la non-violence ou la non-existence. Voilà où nous en sommes aujourd’hui.

Il en va de même pour ce qui concerne la révolution en faveur des droits de l’homme: si rien n’est fait de toute urgence dans le monde entier pour sortir les peuples de couleur de leurs longues années de pauvreté, des longues années pendant lesquelles ils ont été maltraités et laissés à l’abandon, c’est le monde entier qui ira à sa perte. Aussi suis-je heureux que Dieu m’ait permis de vivre à notre époque pour voir ce qui s’y passe. Et je suis heureux qu’il m’ait accordé de me trouver aujourd’hui à Memphis.»

Et puis il évoque le sujet pour lequel il se trouve à Memphis : la défense des éboueurs noirs et il en appelle au combat social :

« Nous devons nous donner à ce combat jusqu’au bout. Rien ne serait plus désastreux que de nous arrêter en chemin, à Memphis.

Nous devons en finir. Quand nous aurons notre manifestation, il faut que vous y participiez. Même si cela signifie que vous devez planter là votre travail, même si cela signifie que vous devez sécher l’école, soyez présents. Pensez à vos frères. Vous pouvez ne pas faire grève.

Mais ou bien nous progresserons tous ensemble, ou bien nous coulerons tous ensemble. »

Puis il évoque la parabole du bon samaritain à laquelle j’avais consacré le mot du jour du 8 mars 2017. Et il conclut à la fin du récit évangélique :

«  Vous savez, il est possible que le prêtre et le lévite aient vu cet homme allongé et se soient demandé si les brigands n’étaient pas encore dans les parages. Peut-être même ont-ils cru que l’homme faisait seulement semblant. Qu’il feignait d’avoir été dévalisé et blessé pour les piéger sur-le-champ, les tromper pour se saisir d’eux tout soudain et plus aisément. (Oh oui.) Aussi la première question que le lévite avait posée était-elle: «Si je m’arrête pour aider cet homme, que va-t-il m’arriver? »

Mais le Bon Samaritain était alors passé. Et il avait posé la question à l’envers: «Si je ne m’arrête pas pour aider cet homme, que va-t-il lui arriver ? » Telle est la question qui se pose à vous ce soir. Ce n’est pas: «Si je m’arrête pour aider les éboueurs, que va-t-il en être de mon travail ?» Ce n’est pas: «Si je m’arrête pour aider les éboueurs, que va-t-il en être de toutes ces heures que j’ai l’habitude de passer à mon bureau de pasteur chaque jour et chaque semaine? » La question n’est pas: «Si je m’arrête pour aider cet homme dans le besoin, que va-t-il m’arriver ? » Elle est: «Si je ne m’arrête pas pour aider les éboueurs, que va-t-il leur arriver? » Voilà la question.

Dressons-nous ce soir avec plus encore d’empressement. Levons-nous avec une plus grande détermination. Marchons, en ces jours décisifs, en ces jours de défi, pour faire de l’Amérique ce qu’elle doit être. Nous avons une chance de faire de l’Amérique une nation meilleure. Et je veux remercier Dieu, une fois encore, de m’avoir permis d’être ici avec vous. »

Il raconte alors un épisode de sa vie, une des premières tentatives d’assassinat et une lettre d’une jeune fille qui l’a ému :

« Vous savez, il y a plusieurs années, j’étais à New York, en train de dédicacer le premier livre que j’avais écrit. Et pendant que j’étais assis, en train de dédicacer des livres, une femme noire, une démente, a surgi. La seule question que j’ai entendue de sa bouche a été: «Êtes-vous Martin Luther King? » Sans lever les yeux de ce que j’étais en train d’écrire, j’ai répondu: «Oui. » Et la minute d’après j’ai senti un coup dans la poitrine. Avant même de m’en rendre compte, j’avais été poignardé par cette démente.

J’ai été rapidement expédié à l’hôpital de Harlem. C’était par un sombre après-midi de samedi. Et cette lame m’avait traversé. Et les rayons X ont révélé que la pointe de la lame avait frôlé l’aorte, la principale artère. Une fois que celle-ci est perforée, votre propre sang vous étouffe; c’en est fini de vous. Le New York Times du lendemain matin disait que si j’avais éternué, je serais mort.

Eh bien, quatre jours plus tard environ, après l’opération, après que ma poitrine eut été ouverte et que la lame eut été extraite, on me permettait déjà de me promener dans une chaise roulante à l’intérieur de l’hôpital. On me permettait de lire une partie du courrier qui me parvenait; de tous les États-Unis et de toutes les parties du monde me parvenaient des lettres pleines de gentillesse. J’en ai lu un bon nombre, mais il en est une que je n’oublierai jamais. J’avais reçu des messages du président et du vice-président. J’ai oublié ce que disaient ces télégrammes. J’avais reçu la visite et une lettre du gouverneur de l’État de New York, mais j’ai oublié ce que disait sa lettre.

Mais il y avait une autre lettre qui venait d’une petite fille, d’une jeune fille, une élève du lycée de White Plains. Et j’ai regardé cette lettre, et je ne l’oublierai jamais. Elle disait seulement: «Cher pasteur King, je suis en seconde au lycée de White Plains. » Elle disait: « Bien que cela ne devrait pas compter, je voudrais mentionner que je suis blanche. l’ai appris par le journal le malheur qui vous est arrivé et combien vous souffrez. Et j’ai lu que si vous aviez éternué vous seriez mort. Et je vous écris simplement pour vous dire que je suis bien heureuse que vous n’ayez pas éternué. » Je veux vous dire que je suis heureux, moi aussi, de ne pas avoir éternué. Car si j’avais éternué, je n’aurais pas été là en 1960 quand les étudiants ont commencé à occuper, dans tout le Sud, les comptoirs des lieux de restauration. Et je savais que s’ils s’asseyaient devant ces comptoirs, ils n’en étaient pas moins debout, dressés pour ce qu’il y avait de meilleur dans le rêve américain; et je savais qu’ils ramenaient toute la nation aux grandes sources de la démocratie, profondément creusées dans le sol par les pères fondateurs, auteurs de notre Déclaration d’indépendance et de notre Constitution. »

Et enfin, il conclut dans un message prophétique et prémonitoire quand on sait ce qui va se passer un jour après :

« J’ai quitté Atlanta ce matin; au moment du décollage de l’appareil, nous étions six, le pilote nous a dit par l’interphone: «Nous sommes désolés d’avoir du retard, mais nous avons le pasteur Martin Luther King à bord. Et pour être sûrs que tous les sacs avaient été examinés, pour être sûrs que rien de mal n’arriverait à l’avion, il nous a fallu tout vérifier soigneusement. Nous avons fait surveiller l’appareil toute la nuit. » Et je suis arrivé à Memphis. Certains commençaient à énumérer ou à commenter les menaces qui circulaient. Et ce que voulaient me faire certains de nos frères blancs dont l’âme était malade.

Eh bien, je ne sais pas ce qui va arriver maintenant. Nous avons devant nous des journées difficiles. Mais peu m’importe ce qui va m’arriver maintenant, car je suis allé jusqu’au sommet de la montagne. Je ne m’inquiète plus. Comme tout le monde, je voudrais vivre longtemps. La longévité a son prix. Mais je ne m’en soucie guère maintenant. Je veux simplement que la volonté de Dieu soit faite. Et il m’a permis d’atteindre le sommet de la montagne. J’ai regardé autour de moi. Et j’ai vu la Terre promise. Il se peut que je n’y pénètre pas avec vous. Mais je veux vous faire savoir, ce soir, que notre peuple atteindra la Terre promise. Ainsi je suis heureux, ce soir. Je ne m’inquiète de rien. Je ne crains aucun homme. Mes yeux ont vu la gloire de la venue du Seigneur. »

C’est admirable ! Ce combat continue.

Aujourd’hui c’est probablement le mouvement « Black Lives Matter »(BLM), qui se traduit en français par « les vies des Noirs comptent » qui poursuit le chemin entamé par ce grand homme qu’était Martin Luther King.

Tombe de Martin Luther King et de son épouse Coretta à Atlanta sur laquelle on peut lire « Free at last » (Enfin libre).

<1050>

2 réflexions au sujet de « Jeudi 5 avril 2018 »

  • 5 avril 2018 à 11 h 37 min
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    Certains êtres donnent le vertige dans leur capacité à élever l’humain à un niveau supérieur tout comme d’autres sidèrent par la possibilité qu’ils manifestent d’être intérieurs aux animaux

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    • 5 avril 2018 à 23 h 39 min
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      Tu as raison. Ce sont deux exemples pour nous : le premier pour essayer de nous en approcher et le second pour nous montrer ce dont on doit s’éloigner.

      Répondre

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