Qui gagne ?
Qui perd ?
Jean-Luc Melenchon affirme que le Nouveau Front populaire a gagné et, qu’à l’intérieur du NFP, son parti a gagné .
Il en conclut que c’est au sein du parti le plus à gauche de l’échiquier politique qu’il faut désigner le premier ministre. Et avec tout cela, il veut appliquer son programme, tout son programme.
La secrétaire générale de la CGT Sophie Binet s’insurge
« Emmanuel Macron veut nous voler la victoire ! ».
D’autres pensent que c’est le Rassemblement National qui a gagné.
D’abord au premier tour comme au second, c’est ce bloc d’extrême droite qui a a obtenu le plus de voix.
Ensuite à l’intérieur de l’hémicycle, si on s’intéresse aux groupes politiques, c’est à dire aux députés qui ont suffisamment de convergence pour accepter de siéger dans un ensemble homogène et identifié au Parlement, le RN est nettement le premier groupe.
En outre, sa progression entre la législature précédente et celle d’aujourd’hui est la plus importante de toutes les formations.
Il existe aussi des hommes politiques comme Bruno Retailleau qui prétendent que c’est « la Droite » qui a gagné et qu’il est impossible de nommer un premier ministre de gauche :
« Notre pays est majoritairement à droite ! »
Personne ne s’aventure à dire qu’Ensemble, les formations politiques qui, avant la dissolution, formaient la majorité présidentielle, a gagné. Il y a des limites à l’outrance. Toutefois, le président de la république pour quelques mois encore, au maximum 34, a écrit une lettre le 10 juillet, dans laquelle on trouve cette phrase :
« Personne ne l’a emporté. »
Et, avec tous ces braves gens comment est-il possible de gouverner la France ?
Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Melenchon et quelques autres sont fondamentalement des autocrates, des bonapartistes, non des démocrates.
Il considère qu’il faut un processus de désignation d’un vainqueur, selon des méthodes quelconques.
Le fait que des électeurs votent pour leur parti pour éviter une catastrophe plus grande, sans partager leurs options politiques fait partie de ces méthodes. Une fois « ce truc de prestidigitateur » ayant donné un résultat, celui qui est premier pense pouvoir gouverner à sa guise, sans tenir compte des autres. Les institutions de la cinquième république donne d’ailleurs quelques outils pour ce faire.
Dans sa lettre du 10 juillet, Emmanuel Macron, exprime des réticences par rapport à cette méthode. Le problème c’est qu’il l’a appliquée depuis 2022, alors que lui aussi n’avait pas gagné les législatives, sa majorité présidentielle était seulement le groupe le plus important de l’Assemblée.
Que ferait des démocrates ?
Les différents groupes se réuniraient pour discuter d’un programme. Non pas pour choisir dans une liste de distribution de gratification, mais pour répondre à des questions :
- Comment envisagez vous la dette de la France ?
- Que pensez vous qu’on puisse faire pour le pouvoir d’achat des français ?
- Quel est votre plan pour affronter le défi climatique et écologique ?
- Quel est votre plan énergétique, sur les énergies renouvelables, sur le nucléaire ?
- Que pensez vous faire pour la réindustrialisation de la France et l’attractivité du territoire ?
- Quelle est votre politique européenne ?
- Quelle est votre position sur la guerre en Ukraine ? et à Gaza ? Quelle est votre position sur le budget de la défense ? Quelle est votre vision par rapport à l’OTAN ?
- Que proposez vous pour diminuer les tensions à l’intérieur de la société française ? Comment peut on rendre l’immigration compatible avec les craintes des français ? Quelle est votre modèle républicain et votre conception de la laïcité ?
- Quelle est votre position sur la demande de sécurité des français ?
- Considérez vous qu’il existe un sujet d’insécurité culturelle des français ou cette question est-elle en dehors de votre analyse ?
On pourrait continuer et notamment parler du scrutin proportionnel qui constitue, dans l’état actuel des choses, une arme efficace contre les autocrates.
Qui a gagné ? Qui a perdu ?
Peut être faut il poser la question autrement comment gagne t’on vraiment ?
Et comment perd t’on dignement. ?
Pour donner une piste, je voudrai évoquer un épisode sportif.
Le 2 décembre 2012, une épreuve de cross-country se déroulait à Burlada, en Espagne.
Le premier de la course, le Kenyan Abel Mutai (médaillé de bronze du 3 000m steeple cet été aux JO de Londres), s’apprête à remporter la course. Pensant avoir franchi la ligne, il coupe sa foulée et regarde son chronomètre… Seulement, il s’est trompé, et la ligne d’arrivée réelle est à quelques dizaines de mètres.
Derrière lui, l’Espagnol Ivan Fernandez Anaya arrive en pleine lancée. Il s’aperçoit immédiatement de la méprise de Mutai, et lui fait signe que la ligne est plus loin. Il essaye de dire au Kenyan de continuer à courir.
Mutai ne connaissait pas l’espagnol et ne comprenait pas. Alors Fernandez a poussé Mutai à la victoire. A ceux qui lui ont demandé pourquoi il a fait cela, Ivan Fernandez Anaya a déclaré qu’il ne méritait pas de gagner, car il n’aurait jamais pu rattraper Abel Mutai sans son erreur.
Ivan Fernandez Anaya, 24 ans, a été champion d’Espagne espoirs du 5 000 mètres en 2010.
On trouve sur les réseaux sociaux cette belle histoire avec des photos erronées ou des réflexions pleines de sagesse qui aurait été prononcées par l’espagnol et qui ne sont pas exactes.
L’histoire montre simplement un homme qui a une éthique et qui se pose la question : Comment gagne- t-on ? Je crois que c’est une bonne question.