Lundi 9 janvier 2017

« La paix »
Jean-Claude Carrière

En début d’année, les vœux que les humains échangent comprennent souvent le souhait de la paix.

Nous ne vivons pas la période la plus conflictuelle de l’histoire d’homo sapiens mais les médias rapprochent de nous tous les théâtres de conflits du monde et nous montrent des images insoutenables de guerre.

La menace terroriste, faible cependant au regard de tous les autres dangers qui peuvent nous faire mourir comme la voiture ou le tabac, nous entraîne aussi vers un désir de paix.

« La paix » est un ouvrage de Jean-Claude Carrière, le scénariste de Luis Bunuel, l’inoubliable collaborateur de Peter Brook pour le <Le Mahabharata>, l’auteur de <la controverse de Valladolid> et de tant d’autres œuvres érudites et passionnantes.

Pour parler de son livre, il était l’invité de l’émission <du grain à moudre : pourquoi n’aimons-nous pas la paix ? >

Jean Claude Carrière qui dit :

« On n’écrit jamais sur la paix comme s ‘il n’y avait rien à en dire, tandis que les ouvrages sur la guerre fleurissent de tout côté. Non seulement les ouvrages sur la guerre, mais les éloges de la guerre. Il y a deux chapitres dans mon ouvrage dans lesquels j’ai rassemblé des textes d’auteurs parfois très connus de Joseph de Maistre à Maurice Barrès, à Proudhon qui ont chanté l’aspect sublime de la guerre, l’aspect divin de la guerre d’une manière presque incroyable. Comme si la guerre était la plus belle et la plus souhaitable des activités humaines et comme si mourir à la guerre était le sort le plus beau. »

La Paix est d’ailleurs difficilement définissable, souvent on la décrit comme une période entre deux guerres. On la définit toujours de manière négative : « absence de perturbation, de trouble, de guerre et de conflit. »

Jean Claude Carrière est d’ailleurs optimiste :

« Ma génération a entendu pendant longtemps dire que toute paix était impossible en Irlande entre les protestants et les catholiques, or cette paix s’est établie et apparemment elle dure depuis plusieurs décennies […] Quand on dit que le conflit entre palestinien et israélien est insoluble, Non ! Certainement il y a une solution, il y a une possibilité pour les hommes de vivre ensemble.

Hitler disait : L’Allemagne a besoin d’une bonne guerre tous les 12 ou 15 ans. Or l’Allemagne est en paix depuis 70 ans, elle ne s’en porte pas plus mal, bien au contraire !

La paix n’est pas quelque chose d’impossible à atteindre. »

Et puis il évoque l’Histoire et porte un regard décalé sur la fin de l’empire romain, en évoquant la « Pax romana »

« L’empereur qui est mon favori est Antonin le Pieux qui a régné 25 ans au deuxième siècle de notre ère, à l’apogée de l’Empire romain. Il n’a pas connu une seule révolte dans un Empire qui allait de l’Ecosse à la Jordanie, Pourquoi ? […]

L’empire romain, à cette époque, accepte toutes les religions, toutes les croyances, toutes les manières de vivre à condition d’accepter les Lois de Rome.
Il y a même un temple à Rome « Au dieu inconnu » pour tous les dieux qui auraient été oubliés.

Quand un siècle plus tard, l’empereur Théodose édicte que toute la population de l’empire romain doit être chrétienne, sous peine de mort, quelques décennies plus tard l’empire romain est disloqué et disparaît ».

Il est vrai que l’évangile selon Matthieu (10-34) fait dire à Jésus : « Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. »

L’émission de France Culture avait invité un autre auteur : David Van Reybrouck, mais j’y reviendrai demain.

La paix Odile Jacob, 2016 Jean-Claude Carrière

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