Ce n’est pas la première fois que je m’intéresse à des scientifiques ou des études qui montrent que monde va dans le bon sens dans beaucoup de domaines.
Ainsi dans le mot du jour du 7 mars 2017 qui se situe dans la série consacrée à Michel Serres, ce dernier écrivait : « Le premier âge est plus long qu’on ne le croit ; Le deuxième pire qu’on ne le pense ; Le dernier meilleur qu’on ne le dit. », Michel Serres, « darwin, Bonaparte et le samaritain »
Plus explicite encore, le mot du jour du 19 décembre 2016 où j’évoquais un livre de Johan Norberg «Ten Reasons to Look Forward to the Future Progrès : dix raisons de se réjouir de l’avenir».
Cette fois il s’agit de l’évolution de la violence dans l’Histoire de l’humanité.
Steve Pinker, d’origine canadienne, est professeur de psychologie cognitiviste à l’université Harvard et vient de publier un livre : « la Part d’ange en nous » (Les Arènes)qui a pour sous-titre : « Histoire de la violence et de son déclin »
C’est un livre de 1000 pages qui nous apprend que la violence ne fait que régresser depuis les premiers temps de l’humanité, qu’il s’agisse de la violence guerrière ou de la criminalité.
Laurent Joffrin l’a interviewé dans <Libération du 17 novembre 2017>.
Mais avant d’en venir à cet entretien, je vous conseille de regarder une TED Conférence que cet auteur a tenu où il tente de démonter le <le mythe de la violence>
C’est une conférence de 2007, ses références sont le Darfour et l’Irak, aujourd’hui on parlerait des Rohingyas
ou des syriens
mais il dirait la même chose même si cela semble illogique voire obscène quand on pense à ces massacres d’aujourd’hui, nous vivons dans l’époque la plus paisible depuis que notre espèce existe.
Et comme premier exemple pour s’en convaincre, il en appelle au livre saint de notre civilisation, « la Bible » qui devrait nous enseigner l’amour, la paix et qui est a priori la source de nos valeurs morales.
Et il cite le livre des Nombres au chapitre 31 Nombres 31
« Moïse leur dit: Avez-vous laissé la vie à toutes les femmes? Voici, ce sont elles qui, sur la parole de Balaam, ont entraîné les enfants d’Israël à l’infidélité envers l’Eternel, dans l’affaire de Peor; et alors éclata la plaie dans l’assemblée de l’Eternel. Maintenant, tuez tout mâle parmi les petits enfants, et tuez toute femme qui a connu un homme en couchant avec lui; 18mais laissez en vie pour vous toutes les filles qui n’ont point connu la couche d’un homme. »
Si le texte biblique n’est pas assez clair, Moïse dit simplement à ses hommes qui ont déjà tué tous les hommes parmi la troupe ennemie, de tuer tous les enfants mâles même les plus petits et de tuer toutes les femmes et filles non vierges et de violer les autres.
En dehors de la description probablement réaliste de la manière dont se passait la guerre au temps de Moïse, Steven Pinker cite une étude qui conclut que dans les pays occidentaux lorsque le taux d’homicide par an était de 100 morts pour 100 000 habitants au moyen âge, il est désormais à moins d’un mort pour 100 000. Il y a eu baisse de deux ordres de grandeurs entre le moyen-âge et notre période concernant le taux d’homicide.
Selon Pinker, le point de bascule est situé au début du 16ème siècle, donc à l’entrée dans la renaissance..
De la même manière si on se place sur les dernières décennies depuis 1950, la diminution des guerres inter étatiques et des guerres civiles est très importantes.
Alors il pose cette question : pourquoi l’impression est contraire ?
Il donne 4 raisons :
- Parce que nous avons d’excellents journalistes et des moyens d’information qui nous renseignent de mieux en mieux.
- Il y a aussi une illusion cognitive que connaissent les psychologues cognitif comme moi : Plus on est en capacité de se rappeler de quelque chose plus on lui attribue une probabilité forte.
- Des titres alarmants accompagnés de photos montrant des situations affreuses marquent bien davantage notre esprit que les statistiques qui donnent le nombre de gens morts de vieillesse dans leur lit.
- Il y a aussi une dynamique du marché : Personne n’a jamais attiré d’observateurs de défenseurs de donateurs en disant les choses vont de mieux en mieux..
On compare à nos standards du moment. Nous sommes scandalisés à juste titre qu’on mette à mort quelques individus par injection létale au bout de 15 ans de procédures. Il y a quelques centaines d’année on envoyait au bucher massivement après un procès de 10 minutes parce que ces individus avaient critiqué le roi.
Dans l’article de Libération il évoque le terrorisme qui est la forme de violence la plus spectaculaire et souvent la plus redoutée aujourd’hui. . Cette réalité vient-elle contredire votre diagnostic ?
Mais cette réalité ne contredit pas son diagnostic :
« Le terrorisme est un phénomène terrible. Mais son importance statistique est minime. Cela correspond d’ailleurs à sa définition : ce sont des actes peu nombreux destinés à produire un effet psychologique massif. Les terroristes visent avant tout à manipuler les médias pour attirer l’attention sur une cause particulière. Statistiquement, le terrorisme d’aujourd’hui est infiniment moins dangereux que la jalousie des maris qui assassinent leurs femmes, ou le mauvais fonctionnement de certains appareils ménagers qui causent des accidents domestiques. J’ajoute qu’en Europe, le terrorisme jihadiste, qu’on appelle parfois «hyperterrorisme», cause moins de victimes que les terrorismes des années 70, ceux de l’IRA, d’ETA ou des «années de plomb» en Italie. En fait, son effet psychologique est important parce que la population estime aujourd’hui que le seul niveau acceptable de violence politique se situe aux alentours de zéro, alors qu’on se résignait dans le passé à des niveaux très supérieurs. »
Il reconnait cependant que la sensibilité à la violence a augmenté alors que le nombre d’actes violents diminue :
« Parce que notre système de valeurs évolue. Nous accordons aujourd’hui à la vie humaine un prix très supérieur à celui du passé. C’est peut-être aussi parce que le nombre des accidents et des morts par maladie diminue lui aussi sans cesse. On meurt moins que par le passé de noyade, de chute inopinée, d’accident de voiture, d’incendies ou de maladie. Le monde est de plus en plus sûr, c’est un phénomène fondamental. Sauf bien sûr dans certains pays comme l’Irak ou la Syrie. Mais partout ailleurs, la sécurité de la vie quotidienne ne cesse de progresser. »
Maintenant nous pouvons continuer à critiquer le temps présent et trouver qu’il y a toujours trop de violences et de massacres, mais en reconnaissant que nous avons beaucoup progressé.
Je vous renvoie vers l’entretien de <Libération du 17 novembre 2017>.
<971>
La violence physique est effectivement relativement peu répandue dans nos sociétés bien qu’elle attire énormément l’attention grâce à la « bienveillante » publicité qui lui est faite dans les médias.
Il n’en demeure pas moins que la société démocratique, libérale, occidentale, est très violente sur le plan psychologique parce qu’elle créée l’incertitude, la précarité et la confusion en tous domaines ce qui déstabilise les gens et les rend très inquiets.