Europe
Mercredi 24 décembre 2014
L’Ethique est selon beaucoup de gens sérieux que j’ai entendu, une des œuvres de l’esprit la plus remarquable de l’humanité. Spinoza (1632-1677) l’a achevée peu de temps avant sa mort.
Dans ce monde où on zappe si facilement, où on nous assèche le désir par de multiples objets dont nous ne savions pas avoir besoin, et peut être particulièrement à Noël, Spinoza nous rappelle que nous ne pouvons aller à la quête du beau et du profond qu’avec effort et en sachant que ces instants sont rares.
Elle me parait aussi singulièrement appropriée après le mot du jour d’hier consacré à Zhu Xiao Mei.
Spinoza parlait surtout de la recherche spirituelle qui fût la quête de sa vie.
Voici la fin de l’Ethique :
« J’ai épuisé tout ce que je m’étais proposé d’expliquer touchant la puissance de l’âme sur ses passions et la liberté de l’homme.
Les principes que j’ai établis font voir clairement l’excellence du sage et sa supériorité sur l’ignorant que l’aveugle passion conduit. Celui-ci, outre qu’il est agité en mille sens divers par les causes extérieures, et ne possède jamais la véritable paix de l’âme, vit dans l’oubli de soi-même, et de Dieu, et de toutes choses ; et pour lui, cesser de pâtir, c’est cesser d’être. Au contraire, l’âme du sage peut à peine être troublée.
Possédant par une sorte de nécessité éternelle la conscience de soi-même et de Dieu et des choses, jamais il ne cesse d’être ; et la véritable paix de l’âme, il la possède pour toujours. La voie que j’ai montrée pour atteindre jusque-là paraîtra pénible sans doute, mais il suffit qu’il ne soit pas impossible de la trouver.
Et certes, j’avoue qu’un but si rarement atteint doit être bien difficile à poursuivre ; car autrement, comment se pourrait-il faire, si le salut était si près de nous, s’il pouvait être atteint sans un grand labeur, qu’il fût ainsi négligé de tout le monde ?
Mais tout ce qui est beau est aussi difficile que rare. »
Vous trouverez l’intégralité du texte de Spinoza ici : http://www.lituraterre.org/Spinoza-Ethique.pdf
Nous sommes à la trêve de Noël, après je vais prendre quelques congés et je reviendrai à mon travail le 12 janvier, date de mon prochain mot du jour.
Le silence est aussi, parfois, rempli de sens.
Passer de bonnes fêtes et si vous deviez vous ennuyer des mots du jour, lisez l’Ethique, cette œuvre est remplie de mots du jour.
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Mercredi 19 novembre 2014
7% de la population mondiale
25% de la production mondiale,
et 50% des transferts sociaux mondiaux »
Vendredi 06/06/2014
cela veut dire que quelque chose ne va pas.»
Mardi 25 février 2014
Si la progression permanente, depuis deux décennies, de l’inégalité sociale (une tendance empiriquement prouvée pour les pays industriels),
ne se laisse pas inverser, ce rapport se déchirera.»
Jürgen Habermas est né en le 18 juin 1929 en Allemagne.
Il est assez unanimement reconnu comme un, sinon comme le philosophe politique le plus important en Europe.
Le « Monde » vient de publier, le 23 février 2014, une tribune de sa part où il invite à re politiser le débat, sinon…pour aller vite « ça va mal finir… ».
Il met beaucoup en cause la politique allemande. La critique venant d’un allemand et même du plus grand intellectuel politique allemand n’en est que plus pertinente.
Lui aussi parle de l’inversion « d’une sorte de courbe » mais d’une autre ampleur que celle de notre Président, il déclare indispensable d’inverser la progression de l’inégalité, autrement dit d’amorcer la diminution des inégalités.
Notion scientifiquement plus explicite que l’inversion d’une courbe qui semble être l’invention d’un technocrate peu à l’aise avec des concepts mathématiques.
Ci-après un extrait de cette tribune que vous trouverez derrière ce lien : < Repolitisons le débat européen, par Jürgen Habermas >.
« Le modèle de société européen déploré par tant de monde repose sur le rapport interne de l’Etat social et de la démocratie. Si la progression permanente, depuis deux décennies, de l’inégalité sociale (une tendance empiriquement prouvée pour les pays industriels), ne se laisse pas inverser, ce rapport se déchirera.
Cette dérive vers une scission de la société se combine d’ailleurs à une tendance alarmante, à une paralysie politique croissante, ainsi qu’à un désintérêt prononcé des électeurs appartenant la plupart du temps aux couches les moins favorisées, c’est-à-dire à l’effritement de la représentation égale de l’électorat et du spectre entier de ses intérêts.
Il n’est nul besoin de partager les prérequis marxistes pour reconnaître dans le déchaînement du capitalisme des marchés financiers l’une des causes décisives de cette évolution – et pour en conclure qu’il nous faut mener à bien une re-régulation du secteur bancaire mondial se donnant toutes les chances de réussir, et avant tout dans un territoire économique ayant au moins le poids et la taille de la zone euro.
Le bon fonctionnement des banques européennes, qui ne peuvent plus investir de façon rentable un capital virtuel hypertrophié, coupé de l’économie réelle, exige justement en premier lieu une solution européenne commune. Et mis à part les sacrifices évidents consentis dans les Etats en crise visés au premier chef par les mesures d’austérité, sacrifices dont nous savons déjà aujourd’hui l’ampleur, ce n’est qu’à la fin de la crise que nous pourrons identifier ses victimes, qui aura payé les pots cassés. Tout cela dépend aussi de la politique que nous choisissons aujourd’hui.
[…]
Je me limite à justifier la nécessité d’un changement politique par trois problèmes urgents, mais jusqu’à présent largement niés. Le gouvernement fédéral allemand a, depuis mai 2010, et de façon tout à fait vigoureuse, fait avant tout valoir la position semi-hégémonique de l’Allemagne en Europe. Il a ainsi généré un effet déflagrant dans la politique intérieure européenne, qu’aucune rhétorique de l’apaisement ne vient juguler. En outre, la gestion de crise a conduit ces dernières années à une extension informelle des compétences du Conseil et de la Commission, qui aggrave de façon spectaculaire l’actuel déficit de légitimation de l’Union européenne, et provoque l’intervention de résistances nationales. Cette politique est véritablement inquiétante en ce qu’elle ne touche pas aux causes de la crise.
Le gouvernement fédéral, en raison de son poids économique et de sa puissance de négociation informelle, a imposé au Conseil européen les idées allemandes visant à surmonter les crises, des idées ordolibérales. Il a contraint les pays en crise à des « réformes » radicales, sans endosser la responsabilité, au niveau européen global, des conséquences plus que sévères de cette politique d’austérité manquant de tout équilibre en matière sociale.
[…]
La division de l’Europe entre pays payeurs et pays bénéficiant de ces paiements incite fortement, dans les vies publiques nationales, aux accusations mutuelles et à la désignation de boucs émissaires. La perception réciproquement déformée de destins inégaux dans la crise jusqu’à l’obscénité a aussi été renforcée en Allemagne par une fausse interprétation des causes de la crise.
Car, la Grèce exceptée, la cause immédiate du surendettement des Etats fut l’évolution de l’endettement privé, et non, comme on le prétend, la politique budgétaire des gouvernements concernés. Mais c’est avant tout la manière de se focaliser sur la problématique des dettes étatiques qui explique le refoulement actif, jusqu’à aujourd’hui, dans la gestion de crise, des problèmes structurels fondamentaux. »
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