Mardi 10 mars 2015

Mardi 10 mars 2015
« Un  Etat illibéral »
Viktor Orban
La Hongrie est depuis 4 ans gouvernée par un Premier ministre, Viktor Orbán, et son parti le Fidesz.
Fustigeant l’attitude de Bruxelles vis-à-vis du Kremlin, il vient d’accueillir Vladimir Poutine à Budapest, rompant ainsi la distance tacitement observée depuis l’aggravation de la crise ukrainienne
Le 26 juillet 2014 lors de l’université d’été de son parti il a inventé ce concept d’un Etat« illibéral » qu’on peut aussi traduire par « non libéral ». Viktor Orban n’a pas dit ce qu’il entend par « Etat non libéral («illiberális») »
Mais il a cité ses modèles :  la Russie, la Chine et la Turquie.
Il a notamment souligné que ces systèmes politiques  « dont l’économie est plus compétitive que celle des pays occidentaux », doivent inspirer son pays « la Hongrie devra construire désormais un Etat« illibéral » basé sur le travail, la démocratie à l’occidentale ayant fait son temps».
Grâce à l’émission “Affaires étrangères” de Christine Ockrent du 28 février : <http://www.franceculture.fr/emission-affaires-etrangeres-l-exception-hongroise-2015-02-28> j’ai pu comprendre un peu mieux.
La démocratie, dans son esprit, c’est de permettre au peuple de choisir son chef.
Une fois le chef désigné, il va gouverner de manière autoritaire en éliminant ou du moins en diminuant fortement les contres pouvoirs : Le pouvoir judiciaire, les médias, les organisations non gouvernementales et tous les pouvoirs intermédiaires : syndicat, associations etc…
C’est à peu près ce qu’ont fait les nazis et Hitler, de manière certes plus brutale et eux, une fois élu par le peuple, ils ont supprimé la démocratie.
Orban ou ses modèles Poutine et Erdogan sont élus par des élections régulières et à peu près libres même si les opposants ont du mal à se faire entendre, voire à se présenter. Mais une fois élu, ils gouvernent avec une forte dose de nationalisme et l’idée qu’ils se font de l’intérêt général.
Les décisions sont prises plus rapidement que dans nos démocraties libérales mais la corruption est plutôt plus grande.
Le plus comique dans l’histoire est que ce même Viktor Orbán est celui qui, voici 25 ans, se réclamait d’un système libéral et l’ennemi acharné des Russes. Lui qui ne jure plus que par son ami Poutine et met en place un Etat hypercentralisé nationalisant à tour de bras, ennemi déclaré du monde occidental, … finalement proche de ce que nous a offert le régime communiste.
Pour ma part, je ne pense pas qu’un pays dirigé par un tel système politique a sa place dans l’Union européenne.
Mais j’ai le soupçon que certaines parties de la population européenne et française souhaiteraient pour leur pays la mise en place d’une démocratie illébérale, avec un dirigeant fort élu et qui ensuite gouvernerait de manière autoritaire.
Il y a bien longtemps, au siècle des lumières, la tentation du despote éclairé était apparue. L’expérience de l’Histoire ne nous a pas vraiment donné d’exemple positif.
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Mercredi 24 décembre 2014

Mercredi 24 décembre 2014
«Mais tout ce qui est beau est aussi difficile que rare.  »
Spinoza, Ultime phrase de L’Ethique de Baruch Spinoza (écrit entre 1661 et 1675)

L’Ethique est selon beaucoup de gens sérieux que j’ai entendu, une des œuvres de l’esprit la plus remarquable de l’humanité. Spinoza (1632-1677) l’a achevée peu de temps avant sa mort.

Dans ce monde où on zappe si facilement, où on nous assèche le désir par de multiples objets dont nous ne savions pas avoir besoin, et peut être particulièrement à Noël, Spinoza nous rappelle que nous ne pouvons aller à la quête du beau et du profond qu’avec effort et en sachant que ces instants sont rares.

Elle me parait aussi singulièrement appropriée après le mot du jour d’hier consacré à Zhu Xiao Mei.

Spinoza parlait surtout de la recherche spirituelle qui fût la quête de sa vie.

Voici la fin de l’Ethique :

« J’ai épuisé tout ce que je m’étais proposé d’expliquer touchant la puissance de l’âme sur ses passions et la liberté de l’homme.

Les principes que j’ai établis font voir clairement l’excellence du sage et sa supériorité sur l’ignorant que l’aveugle passion conduit. Celui-ci, outre qu’il est agité en mille sens divers par les causes extérieures, et ne possède jamais la véritable paix de l’âme, vit dans l’oubli de soi-même, et de Dieu, et de toutes choses ; et pour lui, cesser de pâtir, c’est cesser d’être. Au contraire, l’âme du sage peut à peine être troublée.

Possédant par une sorte de nécessité éternelle la conscience de soi-même et de Dieu et des choses, jamais il ne cesse d’être ; et la véritable paix de l’âme, il la possède pour toujours. La voie que j’ai montrée pour atteindre jusque-là paraîtra pénible sans doute, mais il suffit qu’il ne soit pas impossible de la trouver.

Et certes, j’avoue qu’un but si rarement atteint doit être bien difficile à poursuivre ; car autrement, comment se  pourrait-il faire, si le salut était si près de nous, s’il pouvait être atteint sans un grand labeur, qu’il fût ainsi négligé de tout le  monde ?

Mais tout ce qui est beau est aussi difficile que rare. »

Vous trouverez l’intégralité du texte de Spinoza ici : http://www.lituraterre.org/Spinoza-Ethique.pdf

Nous sommes à la trêve de Noël, après je vais prendre quelques congés et je reviendrai à mon travail le 12 janvier, date de mon prochain mot du jour.

Le silence est aussi, parfois, rempli de sens.

Passer de bonnes fêtes et si vous deviez vous ennuyer des mots du jour, lisez l’Ethique, cette œuvre est remplie de mots du jour.

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Mercredi 19 novembre 2014

Mercredi 19 novembre 2014
« L’Europe, c’est
7% de la population mondiale
25% de la production mondiale,
et 50% des transferts sociaux mondiaux »
Angela Merkel
Dans le numéro du 13 novembre 2014 « du Point », Nicolas Baverez rappelle ce propos de Merkel et il ajoute que, selon elle, cela résume le problème fondamental de l’Europe.
Et Nicolas Baverez applique le même calcul à la France :
la France compte 66 millions d’habitants, soit environ 1% de la population mondiale.
Son PIB est de 2 750 milliards de dollars, soit 3,7% du PIB de la planète.
Son Etat providence redistribue 670 milliards d’euros soit 15% des 4 500 milliards de dépenses sociales mondiales.
Remarquons que si pour l’Europe le coefficient multiplicateur entre le PIB et les transferts est de 2 (25% à 50%) en France il est de plus de 4 ( de 3,7 à 15%).
Baverez considère cette situation insoutenable.
A mon analyse, il me semble en effet que dans une économie ouverte cela doit certainement poser de grandes difficultés et la soutenabilité de ce déséquilibre pose question.
Maintenant ce sont ces transferts sociaux massifs qui caractérisent le modèle européen et le différencie du reste du monde.  C’est un système  moins dur que les autres.
Le drame est comme l’avait souligné le regretté Olivier Ferrand de terra nova, c’est que le système social est ce qui caractérise l’Europe par rapport aux autres ensembles économiques mais ne fait pas partie de la compétence de l’Union Européenne. Ce qui a été mis en commun c’est le marché unique et la libre concurrence qui ne constitue pas une singularité des Etats européens.
Autrement dit : le point commun des européens n’est pas mis en commun.
Vous trouverez derrière ce lien :  l’article du Point écrit par Nicholas Baverez qui cite ces chiffres et fait l’analyse de cette situation.
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Vendredi 06/06/2014

Vendredi 06/06/2014
« Si l’Europe m’explique dans le détail comment on doit pêcher l’espadon mais qu’elle ne me dit rien sur la manière de sauver un immigrant qui se noie,
cela veut dire que quelque chose ne va pas.»
Matteo Renzi
Le jeune premier ministre italien dont le Parti a pu obtenir 41% aux européennes et sortir nettement en tête en Italie, vient de donner une interview publié dans le Monde. J’aime beaucoup le style mais aussi ce qu’il dit au fond. Il explique notamment que «Si nous voulons sauver l’Europe, nous devons la changer.»
Il dit par exemple :
“Tant que l’Europe ne se dote pas d’une méthode pour combattre le chômage, toute discussion sur les postes sera inutile et inefficace.”
et aussi :
“Le prochain président de la Commission devra aimer l’Europe. Mais aujourd’hui, les vrais amoureux de l’Europe savent qu’elle ne fonctionne plus telle qu’elle est. Il devra aimer l’Europe avec le regard d’un innovateur.”
Et encore :
“L’Italie ne demande rien. Elle fait son travail qui est de sauver les migrants, grâce à l’opération Mare Nostrum. Laisser mourir des enfants dans la Méditerranée est un affront à la morale comme aux règles maritimes. […] Je me sens comme un citoyen européen qui veut voir une Europe avec une âme, pas seulement avec des règles. Si l’Europe m’explique dans le détail comment on doit pêcher l’espadon mais qu’elle ne me dit rien sur la manière de sauver un immigrant qui se noie, cela veut dire que quelque chose ne va pas. Je travaille pour donner une âme à l’Europe et j’espère que le PSE est conscient de ce problème. “
[…]
“J’aime l’idée qu’on fasse de la politique en CDD. Pendant des années, tu te consacres corps et âme à ça et après tu lâches. Le fait d’avoir un des gouvernements les plus jeunes de l’histoire d’Italie a un avantage. Dans dix ans, nous aurons passé la main. Je considère chaque jour comme une urgence. Chaque jour est bon pour commencer à changer l’Italie.”
Vous trouverez en pièce jointe l’article en intégralité.
Espérons qu’il garde cette fraîcheur et cette énergie.
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Mardi 25 février 2014

Mardi 25/02/2014
«Le modèle de société européen […] repose sur le rapport interne de l’Etat social et de la démocratie.
Si la progression permanente, depuis deux décennies, de l’inégalité sociale (une tendance empiriquement prouvée pour les pays industriels),
ne se laisse pas inverser, ce rapport se déchirera.»
Jürgen Habermas

Jürgen Habermas est né en le 18 juin 1929 en Allemagne.

Il est assez unanimement reconnu comme un, sinon comme le philosophe politique le plus important en Europe.

Le « Monde » vient de publier, le 23 février 2014, une tribune de sa part où il invite à re politiser le débat, sinon…pour aller vite « ça va mal finir… ».

Il met beaucoup en cause la politique allemande. La critique venant d’un allemand et même du plus grand intellectuel politique allemand n’en est que plus pertinente.

Lui aussi parle de l’inversion « d’une sorte de courbe » mais d’une autre ampleur que celle de notre Président, il déclare indispensable d’inverser la progression de l’inégalité, autrement dit d’amorcer la diminution des inégalités.

Notion scientifiquement plus explicite que l’inversion d’une courbe qui semble être l’invention d’un technocrate peu à l’aise avec des concepts mathématiques.

Ci-après un extrait de cette tribune que vous trouverez derrière ce lien : < Repolitisons le débat européen, par Jürgen Habermas >.

« Le modèle de société européen déploré par tant de monde repose sur le rapport interne de l’Etat social et de la démocratie. Si la progression permanente, depuis deux décennies, de l’inégalité sociale (une tendance empiriquement prouvée pour les pays industriels), ne se laisse pas inverser, ce rapport se déchirera.

Cette dérive vers une scission de la société se combine d’ailleurs à une tendance alarmante, à une paralysie politique croissante, ainsi qu’à un désintérêt prononcé des électeurs appartenant la plupart du temps aux couches les moins favorisées, c’est-à-dire à l’effritement de la représentation égale de l’électorat et du spectre entier de ses intérêts.

Il n’est nul besoin de partager les prérequis marxistes pour reconnaître dans le déchaînement du capitalisme des marchés financiers l’une des causes décisives de cette évolution – et pour en conclure qu’il nous faut mener à bien une re-régulation du secteur bancaire mondial se donnant toutes les chances de réussir, et avant tout dans un territoire économique ayant au moins le poids et la taille de la zone euro.

Le bon fonctionnement des banques européennes, qui ne peuvent plus investir de façon rentable un capital virtuel hypertrophié, coupé de l’économie réelle, exige justement en premier lieu une solution européenne commune. Et mis à part les sacrifices évidents consentis dans les Etats en crise visés au premier chef par les mesures d’austérité, sacrifices dont nous savons déjà aujourd’hui l’ampleur, ce n’est qu’à la fin de la crise que nous pourrons identifier ses victimes, qui aura payé les pots cassés. Tout cela dépend aussi de la politique que nous choisissons aujourd’hui.

[…]

Je me limite à justifier la nécessité d’un changement politique par trois problèmes urgents, mais jusqu’à présent largement niés. Le gouvernement fédéral allemand a, depuis mai 2010, et de façon tout à fait vigoureuse, fait avant tout valoir la position semi-hégémonique de l’Allemagne en Europe. Il a ainsi généré un effet déflagrant dans la politique intérieure européenne, qu’aucune rhétorique de l’apaisement ne vient juguler. En outre, la gestion de crise a conduit ces dernières années à une extension informelle des compétences du Conseil et de la Commission, qui aggrave de façon spectaculaire l’actuel déficit de légitimation de l’Union européenne, et provoque l’intervention de résistances nationales. Cette politique est véritablement inquiétante en ce qu’elle ne touche pas aux causes de la crise.

Le gouvernement fédéral, en raison de son poids économique et de sa puissance de négociation informelle, a imposé au Conseil européen les idées allemandes visant à surmonter les crises, des idées ordolibérales. Il a contraint les pays en crise à des « réformes » radicales, sans endosser la responsabilité, au niveau européen global, des conséquences plus que sévères de cette politique d’austérité manquant de tout équilibre en matière sociale.

[…]

La division de l’Europe entre pays payeurs et pays bénéficiant de ces paiements incite fortement, dans les vies publiques nationales, aux accusations mutuelles et à la désignation de boucs émissaires. La perception réciproquement déformée de destins inégaux dans la crise jusqu’à l’obscénité a aussi été renforcée en Allemagne par une fausse interprétation des causes de la crise.

Car, la Grèce exceptée, la cause immédiate du surendettement des Etats fut l’évolution de l’endettement privé, et non, comme on le prétend, la politique budgétaire des gouvernements concernés. Mais c’est avant tout la manière de se focaliser sur la problématique des dettes étatiques qui explique le refoulement actif, jusqu’à aujourd’hui, dans la gestion de crise, des problèmes structurels fondamentaux. »

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Jeudi 08 novembre 2012

Jeudi 08 novembre 2012
« Un jour viendra où l’on verra ces deux groupes immenses, les États-Unis d’Amérique, les États-Unis d’Europe, placés en face l’un de l’autre, se tendant la main par-dessus les mers, échangeant leurs produits, leur commerce, leur industrie, leurs arts, leurs génies, défrichant le globe, colonisant les déserts, améliorant la création sous le regard du Créateur et combinant ensemble, pour en tirer le bien-être de tous, ces deux forces infinies, la fraternité des hommes et la puissance de Dieu ! »
Victor Hugo
Après la réélection d’Obama et alors que l’Union européenne et les Etats Unis ne vont pas bien, rappelons ce mot de Victor Hugo, il y a plus de 160 ans
Discours d’ouverture du Congrès de la paix, Paris (21 août 1849)
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