Lundi 28/04/2014
«Il faut sauver les arméniens.»
Jean Jaurès
La guerre de 1914-1918 va être de plus en plus présente dans les prochains mois et années, dans les médias, les livres et probablement le mot du jour.
Je me suis intéressé à deux événements récents qui m’ont fait découvrir la publication d’un livre intitulé « Il faut sauver les arméniens » et qui rassemble plusieurs discours à l’Assemblée nationale de Jaurès à partir de 1896.
Le premier évènement est le fait que le premier ministre turc Erdogan a adressé ses condoléances aux petits enfants des morts arméniens, pour ce qu’il n’arrive pas encore à appeler le génocide arménien, mais pour lesquels il parle de souffrance. Il l’a fait le 24 avril, jour où les arméniens commémorent le génocide qui a commencé il y a 99 ans en 1915.
Le second est la visite « compliquée » du président de la république dans la « ville de Jaurès » Carmaux le 23 avril, officiellement en hommage à Jaurès à l’occasion du centenaire de sa mort.
Rappelons que Jean Jaurès a été assassiné le 31 juillet 1914, au Café du Croissant, rue Montmartre, vers 21 h 40 par un étudiant nationaliste, Raoul Villain qui tire deux coups de feu par la fenêtre ouverte du café et abat Jaurès à bout portant. Rappelons que le lendemain, le 1er août il y a mobilisation générale en France et l’Allemagne déclare la guerre à la Russie, puis le 3 août l’Allemagne déclare la guerre à la Serbie et à la France.
Ces deux faits m’ont conduit à découvrir le combat précoce de Jaurès en faveur des arméniens.
Ce livre rassemble plusieurs discours de Jean Jaurès à la tribune de la Chambre des députés entre 1896 et 1897 concernant les massacres des Arméniens de 1894-1896 ordonnés par le sultan de l’Empire ottoman, Abdul Hamid, dit le « sultan rouge », et qui ont fait plus de 200 000 victimes.
Dans le premier discours du 3 novembre 1896. il stigmatise la responsabilité du sultan mais aussi celle des puissances européennes, dont la Russie, et met en accusation le gouvernement de la République française pour sa politique à l’égard de l’Empire ottoman. Jean Jaurès initie alors de fait, le mouvement arménophile en France.
Dans son intervention du 22 février 1897. Il critique l’attentisme du ministère des Affaires étrangères qui stimule les violences et démontre que la démocratie implique de combattre la tyrannie même hors de ses frontières.
Dans sa 3e interpellation du 15 mars 1897, il s’élève contre l’impunité accordée au sultan qui fait massacrer à nouveau les Arméniens, contre le choix de collaborer avec lui pour réprimer les populations de la Crète et contre la puissance financière des porteurs de bons ottomans qui confondent la politique avec leur intérêt personnel. Il faut néanmoins noter dans la post-face de V. Duclert que c’est la défaite turque de Sarikamish face à la Russie en janvier 1915 qui engendra un » vaste procès collectif » de trahison arménienne déclenchant le Génocide. L’auteur ne dit pas que cette accusation de trahison était factice et que l’intention génocidaire existait avant Sarikamish. Il cite aussi 1.2 million d’Arméniens exterminés lors de ce Génocide, alors qu’il y en a eu 1.5 million.
Jean Jaurès avait déjà compris que le processus génocidaire était enclenché.
Ce mot du jour nous rappelle que la France a connu des grands hommes politiques humanistes et visionnaires.