Toutes les émissions de cette série dont j’ai parlé hier m’ont intéressé, mais celle qui a ma préférence est celle que Christophe André a intitulé « Rien que ».
Parce que je crois qu’il y a dans cette toute petite expression : « Rien que » un enseignement de vie fondamental.
C’est particulièrement vrai dans l’échange, l’échange à deux…rien que …davantage que disponible, être présent, présent à l’autre. C’est une discipline que je tente toujours de m’appliquer.
Parfois, je m’y efforce aussi quand je marche dans la rue, regarder les gens que je croise, la nature ou la ville, le ciel et les nuages, être présent dans l’instant. Non pas penser à ce qui va se passer dans une heure, dans une semaine, dans un mois etc., vivre le moment entièrement… rien que.
Quand j’écoute la musique que j’aime, je suis particulièrement attentif, sans toujours y arriver il est vrai, à simplement écouter, embrasser intégralement le son, reconnaître les instruments, les thèmes, les détails. Ne pas laisser les pensées s’échapper vers d’autres pensées et préoccupations. Elles viendront bien assez tôt, rien que me nourrir de la musique.
Christophe André cite Montaigne :
« Quand je danse, je danse; quand je dors, je dors ; et quand je me promène solitairement en un beau verger, si mes pensées se sont entretenues des occurrences étrangères quelque partie du temps, quelque autre partie je les ramène à la promenade, au verger, à la douceur de cette solitude et à moi. »
Il commence le chapitre consacré à « Rien que » de la manière suivante :
« Il y a une imposture contemporaine qui m’agace, c’est celle du cerveau multitâche. Certains vendeurs d’écrans voudraient nous faire croire que dans notre nouvel environnement très sollicitant (écrans et téléphones, multiconnexion et musique à flots), notre cerveau aurait évolué et serait capable de faire plusieurs choses en même temps : travailler ou lire en écoutant la radio, téléphoner en conduisant, etc.
Cela arrivera peut-être un jour, dans quelques dizaines de milliers d’années. En attendant, ça ne fonctionne pas : chaque fois que nous faisons deux choses en même temps, d’une part, nous les faisons moins bien et d’autre part, cela nous fatigue et nous stresse. L’équation est simple : multitâche = risque d’erreur + risque de stress.
C’est sans doute pour cela que de tout temps, les sages, comme Montaigne, comme les maîtres orientaux, ont encouragé la pratique régulière du « rien que » : rien que manger, rien que marcher, rien que lire, rien que conduire…
Malgré les apparences, le « rien que » est difficile : nous avons souvent la tentation de faire plusieurs choses en même temps : manger en lisant, parcourir ses mails en téléphonant ou de faire quelque chose en pensant à autre chose :prendre sa douche en pensant à sa journée de travail, être à table en famille en songeant à ses soucis. Ainsi, on fait tout en pleine absence et non en pleine conscience. On se fatigue, on commet des erreurs, des oublis…
http://www.franceculture.fr/emissions/trois-minutes-mediter/rien-que