Vendredi 15 avril 2016

Vendredi 15 avril 2016
« Si tu t’en prends à Monseigneur Barbarin, toute la famille finira en enfer ! »
La mère d’une des victimes
Frédéric Pommier réalise le week end, une étonnante et souvent poétique revue de presse sur France Inter. Le 2 avril il est revenu sur un sujet qui concerne l’église catholique et notamment l’église Lyon : <http://www.franceinter.fr/emission-la-revue-de-presse-de-frederic-pommier-la-revue-de-presse-du-2-avril 2016>
Sur ce sujet, il a rapporté les points suivants :
« Et puis, si l’on revient en France, on ne peut pas ne pas parler des suites des affaires de pédophilie qui secouent le diocèse de Lyon. Le sujet fait d’ailleurs la Une du MONDE, qui évoque « l’onde de choc de l’affaire Barbarin ».
Alors que les enquêtes progressent, d’anciennes affaires, parfois classées, remontent à la surface. Et des victimes racontent donc maintenant leur cauchemar, quitte, parfois, à rompre avec leur famille. C’est ce que raconte Marion Van Renterghem, qui a mené l’enquête dans une ville partagée, dit-elle, entre l’exigence de justice et celle de miséricorde. Les catholiques lyonnais et la bourgeoisie font corps autour de l’archevêque, soupçonné d’avoir étouffé les agissements de prêtres pédophiles. Ils font corps et ne supportent pas le lynchage médiatique que subit, à leurs yeux, le si droit cardinal. La minimisation des faits, le déni et, bien sûr, la peur de faire scandale, la gêne de s’attirer les foudres de la communauté paroissiale : tels sont aussi les sentiments qui habitent certains des parents des victimes. De sa mère, l’une d’elle a ainsi entendu : « Si tu t’en prends à Monseigneur Barbarin, toute la famille finira en enfer ! »
Il n’empêche. Avec les deux nouvelles affaires révélées depuis jeudi, le cardinal est plus que jamais « dans la tourmente », estime LA NOUVELLE REPUBLIQUE, tandis que L’INDEPENDANT se demande s’il ne s’agit pas là du « scandale de trop ». Dans L’EST REPUBLICAIN, Alain Dusart, lui, se souvient de la “loi” édictée par le fondateur du scoutisme. Baden Powell avait écrit qu’un scout est « pur dans ses pensées, ses paroles et ses actes ». Et jamais, commente l’éditorialiste : « Jamais ce noble officier anglais n’aurait imaginé que ces jeunes garçons élevés dans un esprit de charité, tomberaient dans les mains lubriques de curés tripoteurs et d’un clergé complice de ces bergers transformé en loups prédateurs de tant d’innocence volée. » »
Le fond de l’affaire est constitué d’actes pédophiles dont se sont rendus coupables des membres du clergé de l’Eglise. Mais ce qui est dénoncé le plus fort est le fait que la hiérarchie ecclésiastique n’a ni dénoncé ces actes à la justice laïque de l’Etat et qu’en outre elle n’a pas pris, en son sein, les mesures appropriées pour éloigner les coupables de la fréquentation d’enfants dans le cadre de leur charge ecclésiale.
L’institution a agi comme une famille qui a toujours du mal à dénoncer un des siens, cela peut se comprendre même si cela ne justifie rien.
Mais il semble bien qu’il y a un autre sujet qui laisse à penser que certaines autorités de l’Eglise ne sont pas très averties de la gravité de la pédophilie. Je dirai que les hommes (du genre mâle) de l’église catholique ne sont pas très structurés du point de vue de la pédophilie. 
Ainsi, dans un entretien non préparé, donc où les fondamentaux et la structure de pensée réagissent et non les éléments de langage, l’évêque de Pontoise, Monsieur Stanislas Lalanne a déclaré de ne pas savoir si l’acte pédophile était un péché, je traduis une faute au sens religieux.
Depuis il est revenu sur ces propos, sous le conseil de communicants ?, il a demandé pardon à ceux qu’il aurait blesser et a expliqué : « Ce que je voulais dire aussi – et c’est peut-être là que je n’ai pas été compris – c’est que la question difficile qui se pose à chaque situation, qui est à chaque fois extrêmement douloureuse, c’est le degré de conscience et donc la responsabilité de celui qui commet des actes aussi atroces »
Admettons. Je voudrais savoir si L’Église Catholique manifestait la même rigueur intellectuelle lorsqu’en Irlande, elle faisait enfermer, dans des institutions détestables, des jeunes filles qui avaient commis un “soit disant” péché. L’Eglise avait-elle bien examiné si ces jeunes filles avaient  un degré de conscience et donc la responsabilité des actes commis. Si ces paroles vous paraissent obscures relisez donc l’Histoire des < couvents de la Madeleine> dont le dernier fut fermé il y a 20 ans.
La communication de ces derniers jours, semble indiquer que l’Eglise catholique veut mettre en place des dispositions nouvelles pour lutter contre ce crime et protéger les enfants.
Mais le centre du mot du jour est cette formule « Toute la famille finira en enfer ».
La culpabilisation ! Faire taire, obtenir la soumission par la menace, la menace suprême pour le croyant : c’est à dire hypothéquer ce qui est essentiel dans l’existence, ce qui se passe après la mort.
J’ai déjà écrit que j’avais poursuivi une quête spirituelle, autour de mes 20 ans, dans une église dans laquelle se trouvait aussi ma grand-mère.
Ma grand-mère était une femme simple, d’origine polonaise, qui a consacré sa vie à sa famille et aux autres, ne tenant aucun compte de son confort.
Au sens commun des mots, elle était une sainte femme : son seul défaut était qu’elle ne gardait jamais un cadeau mais qu’elle le distribuait toujours à quelqu’un d’autre qui selon elle en avait davantage besoin.
Disponible aux autres, elle partageait tout et aidait sans relâche toutes celles et ceux qu’elle connaissait et qui avait un besoin.
Les dernières semaines de sa vie m’ont profondément ébranlé, car elle était terrorisé devant la perspective, dans son esprit, de se retrouver devant son Dieu et se remémorait en boucle tous les actes et pensées qu’elle estimait non conforme à son idéal de perfection morale et de charité chrétienne. Elle se trouvait alors dans une inquiétude et une incertitude que je juge, encore aujourd’hui, terrible.
Je me suis alors interrogé sur cette religion qui échoue devant sa mission principale : permettre à ses croyants, surtout quand il s’agit d’une femme aussi extraordinaire et simple, comme l’était ma grand-mère, d’affronter avec sérénité le dernier combat de la vie.
Et c’est en creusant davantage cette réflexion que j’ai compris que pour ces institutions religieuses, pour leur pouvoir il était fondamental d’utiliser cette arme de la culpabilisation et de la menace pour obtenir la soumission et l’obéissance.
Bien sûr pour tous ceux qui ont vécu loin de la religion ou s’en sont beaucoup éloignés, cette facette du pouvoir religieux peut apparaître assez incompréhensible.
Mais elle réapparait dans des familles très croyantes et dans cette phrase que dit une mère qui certainement y croit profondément : si l’un de notre famille touche à l’institution, nous serons tous coupables et nous devons craindre le pire de notre Dieu.
Cette manière de réagir, cette culpabilisation fondatrice vient de siècles d’enseignement des églises qui sont arrivés à convaincre les âmes qu’il fallait vivre dans la peur, la peur de déplaire au Dieu que l’institution prétendait représenter.
Cette institution presqu’à l’agonie parvient encore, à instiller dans le cœur et l’esprit de certains de ses membres cette crainte effrayante du croyant si nous faisons quoi que ce soit qui pourrait nuire à l’institution nous irons en enfer.
Evidemment, je sais qu’il y a parmi les destinataires de ce mot des croyants sincères que je ne veux pas blesser.
J’avais tenté d’expliquer dans le mot du jour du 10 Juillet 2015 «Nous sommes pour la religion contre les religions.» (Victor Hugo), cette dichotomie entre l’aspiration au spirituel et à la transcendance que porte le religieux et le dévoiement de ces valeurs par les institutions humaines qui prétendent les incarner. Vous trouverez en pièce jointe, cette tentative d’explication.