Et il y eut la « Révolution du Néolithique », «le nouvel âge de la pierre». Ce lien conduit à un diaporama publié par l’académie de Grenoble pour une classe de CE2.
Le climat se réchauffe. L’homme découvre l’agriculture, puis l’élevage et se sédentarise.
Ceci se produit il y a 10 000 ans au Moyen-Orient, au sein du croissant fertile, entre 3 Fleuves : L’Euphrate, Le Tigre et le Nil. C’est-à-dire en Mésopotamie (pays entre les deux fleuves) et en Égypte.
Wikipedia nous donne une carte de cette région, permettant de visualiser le « croissant fertile ».
Donc l’homme invente l’agriculture et une population de plus en plus immense sur terre devient paysanne.
C’est la plus grande partie de l’Humanité pendant des millénaires.
Michel Serres définissait le XXème siècle comme celui de la sortie du « Néolithique » le pourcentage de paysans dans le monde passe sous la barre des 50%.
En France, <Ce site> nous apprend qu’en 1856, la proportion de la population active qui était agriculteur était de 51,4%, en 1906 ce taux était tombé à 43,2% représentant à peu près 9 000 000 de paysans.
<Ce rapport parlementaire de 2005> nous explique que la population active agricole, composée des travailleurs salariés et non-salariés ayant une activité principale agricole, compte 929 000 personnes en 2004, soit moins de 4 % de la population active totale, contre 13 % en 1970.
Dans le monde cependant, en 2012 l’agriculture employait encore plus de 1,3 milliards de personnes, soit près de 40 % de la population active mondiale. Dans une cinquantaine de pays, l’agriculture employait la moitié de la population, voire jusqu’à 75 % pour les plus pauvres.
Mais cette histoire de la naissance de l’agriculture est complexe et finalement, il y a assez peu de certitudes et beaucoup de questions non résolues.
Pourquoi ? Comment ?
Qu’est ce qui fut premier : l’élevage ou l’agriculture ? La sédentarisation ou l’agriculture ?
Toutes ces questions sont largement débattues, mais les réponses données sont diverses.
Par exemple Jacques Attali, dans la première émission (nous en sommes toujours à la première émission sur huit) de la série « De quoi manger est-il le nom ? » affirme que c’est l’élevage qui fut premier et que ce sont les éleveurs qui ont inventé l’agriculture.
Souvent on considère que le terme agriculture comprend à la fois la culture des sols et la culture des animaux dont le synonyme est l’élevage. C’est en effet l’acceptation générale.
Mais dans la rigueur des principes et des mots : « ager » signifie « champ » en latin, l’agriculture est donc en premier la culture des champs. Il peut donc être légitime de distinguer l’agriculture et l’élevage.
Mais de quoi est-on certain ?
Il y eut bien un terme au cycle des glaciations du début du Quaternaire à ce moment. La dernière a pour nom « la glaciation de Würm » (- 125 000 à – 11 430).
Dès lors, le climat va se réchauffer et permettre à une flore et une faune nouvelles (forêt tempérée peuplée d’aurochs, cerfs, chevreuils et sangliers) de remplacer les étendues herbeuses de climat froid et sec comme la steppe ou la toundra qui nourrissaient les rennes, rhinocéros laineux, bisons.
Les premières traces de culture de plantes et de domestication d’animaux à des fins alimentaires sont originaires du Moyen-Orient. Les premières traces de ville se trouvent sur le lieu actuel de Jéricho, ville actuel de Cisjordanie. A l’époque Néolithique elle était un port au bord d’une mer qui n’était pas encore morte.
C’est encore dans la revue l’Histoire : « De l’Euphrate à la Chine : les premiers agriculteurs » que j’ai trouvé les explications les plus complètes et les plus nuancées sur ce sujet.
Notamment que si l’Europe n’a rien inventé à ce stade et n’a pu entrer dans l’agriculture que parce que des « sachants » du Croissant fertile ont migré vers notre continent pour apporter la connaissance, l’agriculture a été inventée dans le monde à d’autres endroits sans apport de la science du moyen orient :
« Car c’est sur plusieurs continents à la fois, au cours de très lentes mutations qui ont duré parfois des millénaires, que l’homme a vu se modifier son rapport à la nature. Cette nouvelle approche du phénomène est aujourd’hui au cœur des travaux des préhistoriens.
Ces sites des rives de l’Euphrate, des Andes ou de la Chine n’ont rien de spectaculaire : on y voit des fosses, des trous de poteaux… Il y traîne des pierres taillées et des déchets de taille, souvent des pilons et des mortiers, des os d’animaux. Des fragments de végétaux carbonisés sont parfois restés au fond des fosses. Loin de ce qu’on appelle les « splendeurs des grandes civilisations », ce sont de simples villages paysans. Mais dont les plus anciens témoignent du plus grand changement que les sociétés humaines n’aient jamais connu avant la révolution industrielle : la naissance de l’agriculture.
En effet, voici une humanité qui, durant deux à trois millions d’années – depuis qu’elle existe -, a toujours vécu en ramassant, cueillant, chassant ou péchant. Et un beau jour, la voilà qui change son mode de vie : sa nourriture, au lieu de la prélever, elle se met à la produire. C’est au cours des mêmes millénaires, entre 10 000 et 7 000 ans av. J.-C, qu’apparaissent en plusieurs régions du monde l’agriculture, l’élevage et les premiers villages sédentaires. Les hommes cultivent des champs et élèvent des troupeaux. Leur attitude à l’égard de la nature et du territoire se modifie radicalement. Dans les temps qui suivent, la population se multiplie par cent et l’histoire commence à se faire turbulente. Villes, temples, rois et guerres se devinent à l’horizon de la Mésopotamie, de l’Égypte, de la Chine. En se mettant à changer le monde, l’humanité a aussi changé de monde.»
On trouve sur Wikipédia cette carte qui montre l’apparition de l’agriculture dans différentes régions du monde. Dans un temps court au regard de l’échelle préhistorique.
Beaucoup de théories se succèdent en se contredisant. La concomitance de l’invention de l’agriculture, de la sortie du modèle chasseur-cueilleur et de la sédentarisation n’apparait plus comme une évidence.
Il semble selon cet article que depuis cinquante ans, une multitude de découvertes et de travaux a remis en cause l’idée d’une évolution linéaire, valable pour l’humanité entière. En effet, dans les diverses régions du monde où l’agriculture est apparue, on voit que cultures, élevage, sédentarisation et invention de la poterie s’enchaînent dans un ordre différent :
« Les villages ? Loin d’avoir été un résultat de l’agriculture, ils paraissent bien l’avoir précédée dans certaines régions. [sur] le site de Mallaha […] les habitants de ce village, sédentaires, vivaient en chasseurs-pêcheurs-collecteurs dans la meilleure tradition paléolithique. Ils disposaient d’un environnement assez riche en ressources diverses pour n’avoir pas à se déplacer, et péchaient beaucoup. Ces villages sans agriculture sont un des caractères essentiels de la civilisation appelée « natoufienne » qui s’est étendue au Proche-Orient, du Neguev à l’Euphrate entre 12 500 et 10 000 ans av. J.-C, avant les premières civilisations agricoles.
Les villages non agricoles ont été nombreux en Amérique aussi. Il y en avait dans la vallée de Mexico vers 7000 av. J.-C, dans un environnement de forêts et de lacs. Il a existé de vrais villages préhistoriques de pêcheurs le long des côtes du Pacifique depuis les États-Unis jusqu’au Chili.
A l’inverse, dans certaines régions, la sédentarisation n’a eu lieu que plusieurs milliers d’années après l’apparition des premières cultures. Au sud du Mexique, dans la vallée de Tehuacan, on a découvert au début des années 1960 que les premières cultures avaient précédé de quatre mille ans les premières communautés sédentaires. De même, dans les régions andines, les premières domestications, aussi bien d’animaux que de plantes, ont été le fait de groupes nomades ou semi nomades – et qui le sont restés longtemps. »
Les hommes du néolithique n’ont donc pas fait une « grande découverte » qui en aurait entraîné d’autres, mais plusieurs, en ordre dispersé.
Et l’article de conclure :
« Les recherches montrent donc que cette fameuse invention n’en a pas été une. Bien des sociétés paraissent s’être glissées dans le monde de la production sans en avoir eu conscience. »
Un encart de cet article m’a donné l’occasion de trouver l’exergue de ce mot du jour :
« La tracéologue Patricia Anderson et le paléobotaniste George Willcox se sont lancés depuis 1985 dans l’étrange expérience de cultiver du blé et de l’orge sauvages à la commanderie de Jalès, en Ardèche (base de l’Unité propre de recherche 7537 du CNRS). Tous les étés, ils récoltent (à la faucille de silex), tous les automnes (ou au printemps) ils sèment ; et prennent des notes. Ils ont ainsi pu voir que les grains récoltés verts avaient déjà leur pouvoir germinateur et qu’on pouvait les semer. Ils envisagent donc une période de culture de céréales sauvages antérieure à la transformation de ces plantes et qui a dû être longue : la sélection des épis qui conservaient leurs grains à maturité a pu se faire par la suite sans que les hommes le veuillent, au fil des siècles.
Mais une énigme demeure : l’action de semer suppose une décision et représente une rupture, la rupture… Même si les ramasseurs ou ramasseuses laissaient tomber quelques épis en chemin et si les premières ébauches de champs ont, elles aussi, été involontaires, il a bien fallu que quelqu’un, un jour, fasse le geste de mettre un grain en terre ! »
Mais <la révolution néolithique> implique d’autres transformations que simplement semer des graines. Au cours des millénaires suivants, elle transforme les petits groupes chasseurs-cueilleurs mobiles en sociétés sédentarisées qui modifient radicalement leur environnement au moyen de techniques agricoles de plus en plus sophistiquées.
Cette révolution va bien sûr avoir des conséquences essentielles sur l’alimentation, mais aussi sur l’organisation sociale et politiques des humains, sur la culture et le sacré !
Elle favorise le développement de grandes densités de population, d’une division du travail complexe, des économies de production puis de commerce, de structures administratives et politiques centralisées.
On inventera l’écriture pour compter la production puis pour écrire des livres sacrés.
Plus tard, l’effet fortement multiplicateur de l’irrigation sur le rendement a favorisé le développement d’une population nombreuse dans les vallées des grands fleuves, tandis qu’une forte densité de population était nécessaire à l’entretien et à l’extension des digues et canaux. Les premières grandes civilisations sont apparues le long de ces fleuves : le Nil, le Tigre, l’Euphrate, l’Indus et le fleuve Jaune.
On créera des empires, des hiérarchies, des guerriers des prêtres et des paysans asservis aux premiers.
Les premières plantes qui furent plantées étaient des céréales : le blé amidonnier (ancêtre du blé), le petit épeautre, l’orge, la lentille, le pois chiche, un peu plus tard les carottes et des salsifis
Le Moyen-Orient fut aussi la source de nombreux animaux domesticables tels que les chèvres et les cochons. Cette région fut également la première à domestiquer les dromadaires.
Au cours des millénaires, l’agriculture sélectionnera et hybridera les plantes les plus productives et transformera totalement notre alimentation.
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Il est dommage que cette « conquête » de la nature se soit naturellement accompagnée d’une perte de respect de notre environnement, il est à craindre que la nature arrive progressivement à se venger de ce manque de considération