« Pause »
Un jour sans mot du jour
Annie me rappelle que si nous n’étions pas confinés, nous serions en congé. Je n’ai toujours pas trouvé l’inspiration d’écrire un mot du jour.
J’accompagne cette fois la photo des chats confinés par un lien vers les matins de France Culture.
Philippe Descola : « Face au monstrueux choc épidémique des grandes conquêtes, les peuples amérindiens ont utilisé la dispersion pour survivre »
C’était l’émission du 20 avril.
Elle est présentée de la manière suivante sur le site de l’émission :
Alors que le monde est à l’arrêt, nous observons de notre fenêtre le printemps s’épanouir. Et si, paradoxalement le fait d’être coupé de la nature nous en rapprochait ? Comment repenser la cohabitation entre l’homme et les non-humains ?
Alors que le lien de l’homme avec son environnement serait directement en cause dans cette crise sanitaire, faut-il repenser notre rapport à la nature ? C’est ce que propose Philippe Descola, que nous recevons aujourd’hui. En 1976, il est étudiant et part à la découverte des Achuars, un peuple Jivaro situé au cœur de l’Amazonie, entre l’Équateur et le Pérou. S’en suit une longue réflexion sur l’anthropocentrisme, qui ouvre la voie d’une nouvelle relation entre les humains et leur milieu de vie.
L’épidémie est-elle une conséquence de l’action humaine sur la nature ? Est-elle une maladie de l’anthropocène ? Que nous apprend le lien que certains peuples entretiennent avec leur environnement ?
Philippe Descola est professeur émérite au Collège France, titulaire de la chaire d’anthropologie de la nature de 2000 à 2019. Il est auteur notamment de Les natures en question (Ed. Odile Jacob, 2017)
Quelle réponse des Achuars face aux épidémies ?
« Il n’y a pas de souvenirs de la catastrophe. On estime qu’environ 90% de la population amérindienne a disparu entre le XVIe et le XIXe siècle. Il y a une sorte d’imaginaire implicite du contact avec la maladie des « blancs ». De ce fait, lorsque les « blancs » arrivent dans les environnements amérindiens reculés, le premier réflexe des Amérindiens est la méfiance par la distanciation. »
La maladie n’est qu’un élément dans un cortège d’abominations apporté par la colonisation. Philippe Descola
« Chaque peuple réagit à ses épidémies en fonction de sa conception de contagion. La notion de contagion a mis un certain temps à se propager en Europe, au contraire des peuples amérindiens. C’est ce qui leur a permis d’adopter les bons gestes. »
Parler de la « nature » : une erreur ?
« La nature est un concept occidental qui désigne l’ensemble des non-humains. Et cette séparation entre humain et non-humain a eu pour résultat d’introduire une distance sociale entre eux. »
On peut penser que le virus est une métaphore de l’humanité. Nous avons vis-à-vis de la terre, le même rapport instrumental qu’un virus. D’une certaine façon, l’être humain est le pathogène de la planète. Philippe Descola
« Cette idée très humaine que la nature est infinie a eu comme conséquence que ce système si singulier basé sur la productivité et la rentabilité a engendré une catastrophe planétaire. »
L’idéal du « Monde d’après »
« Je forme le vœu que le monde d’après soit différent du monde d’avant. La pandémie nous donne un marqueur temporaire. Cette transformation, je la vois avec intérêt se dessiner et qu’elle aboutisse à ce que des liens avec les non humains soient à nouveau tissés. Il faut vivre avec une mentalité non destructrice de notre environnement. »
L’idée n’est pas de posséder la nature mais d’être possédé par un milieu. Philippe Descola
Vous pouvez (ré)écouter l’interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.
Et pour approfondir, vous pouvez également retrouver Philippe Descola s’exprimer dans plusieurs vidéos de la chaîne YouTube du Collège de France consacrées aux sujets de l’émission
À ire en complément, la recension par La vie des idées de l’ouvrage « Les Natures en question »
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