Mardi 9 juin 2015

Mardi 9 juin 2015
« Ils sont fous ces Coréens »
Eric Surdej
Éric Surdej a été, pendant dix ans, d’abord directeur général, puis président de la filiale française du coréen LG. Il a raconté son expérience dans un livre publié chez Calmann-Lévy « Ils sont fous ces Coréens !»
Ainsi il pose la question :  « Savez-vous à quoi on reconnaît une entreprise coréenne ? ». La réponse est : « à l’emplacement du bureau de son président : juste au-dessus de l’entrée. C’est moins pour lui une façon de montrer son leadership sur sa société… que de surveiller les entrées et les sorties des membres du personnel. Flicage indispensable pour un manager coréen censé connaître parfaitement le temps que ses employés passent à leur travail.»
Ainsi dans un commentaire du Point on lit : « Ce qu’il raconte des méthodes de travail des Coréens est tellement excessif et stupéfiant que cela en devient comique. Au point que l’on finirait par trouver réconfortantes les folies du nouveau secrétaire général de la CGT réclamant pour les Français une semaine de 32 heures, ou les idées baroques des jeunes socialistes plaidant pour généraliser une année sabbatique à tous les salariés afin de réduire le poids du chômage.
Car dans une entreprise coréenne, même installée en France, la moyenne du temps de travail est de dix à douze heures par jour. Samedi compris. Des journées entrecoupées, il est vrai, de deux pauses de 40 minutes à la cantine de la firme. L’une pour le déjeuner, à midi précis, l’autre pour un dîner à 18 heures. Mais ce ne sont pas là de vrais moments de détente puisqu’il est exclu de parler avec ses voisins de table d’autre chose que du travail et de ceux qui le font. À condition que ce soit pour les dénigrer. Dans ces conditions, rien de surprenant à ce que l’Inspection du travail vienne enquêter et inflige souvent des pénalités à la société coréenne, qui n’en tient aucunement compte, joue la montre, multiplie les appels et préfère à la fin payer plutôt que de se remettre en question.
Le pire tient peut-être dans la façon de noter les collaborateurs. Sans qu’intervienne aucun critère objectif ni même qualitatif. Les Coréens ont découvert que, dans une entreprise, « toute tâche peut être découpée jusqu’à un niveau de détail infinitésimal ». Résultat : chaque employé ou cadre reçoit tous les mois une feuille de route qu’il n’a pas le loisir de discuter, mais qui définit précisément les dizaines d’objectifs qu’il doit viser. Le temps pour visser un boulon, comme le nombre de secondes mis pour répondre au téléphone. En effet, dans une entreprise coréenne, on doit décrocher à la première sonnerie pour montrer qu’on est à son poste. À la fin de la période de référence, le salarié devra cocher les résultats obtenus : en vert si l’objectif est atteint à 100 %, en jaune s’il n’a été rempli qu’entre 95 et 99 %, en rouge en dessous de 95 %. Et là, dit l’auteur, on frôle la catastrophe. Chacun vivant dans le stress permanent des trois couleurs dont il faudra répondre devant une commission.»
<Il était aussi l’invité de l’émission de Nicolas Demorand le 13 mars 2015> où il raconte notamment qu’à LG il y a 7 niveau de cadres, le dernier niveau comptant 400 membres. Seuls sont récompensés ceux obtenant les meilleurs résultats dans une compétition exacerbée.
Pour les 400 du dernier niveau, ils reçoivent en début d’année des objectifs et ceux qui n’arrivent pas à les atteindre sont virés. Aucune excuse n’est admise il y a une analyse binaire vous avez atteint vos objectifs ou non.
Un autre article nous montre « cette perception déshumanisée, effrayante, des Coréens, sortes d’automates uniformes prêts à prendre nos emplois : à quel point ils évoluent tels des robots dans des organisations inhumaines ; à quel point ils sont corvéables à merci, 12 à 14 heures par jour, jusqu’à leurs lits de mort, sans que ça les dérange.»
En résumé si nous sommes bien en compétition dans le cadre de la mondialisation avec des adversaires ayant ces valeurs et cette capacité à s’y soumettre, nous n’avons aucune chance.
Cependant des critiques semblent avoir été émises sur ce livre comme décrivant une réalité mais déjà dépassée. Car les jeunes coréens ne sont plus peut être tout à fait prêt à suivre l’exemple de leurs ainés.
Ainsi on lit : «Bien entendu que cette vie les dérange. Il suffit pour s’en convaincre, de consulter le classement des pays en fonction du taux de suicide établi par l’OMS, où la Corée du Sud figure en seconde position. Il suffit également de discuter avec un nombre croissant de jeunes diplômés coréens qui aspirent à autre chose que le parcours de leurs paternels éreintés par une vie entière au service de leurs employeurs, pour se retrouver au crépuscule de leurs vies avec une retraite précaire et un foyer en miette. Bref, il aurait fallu que l’auteur s’intéresse aux Coréens en plus de son expérience chez LG, avant se prononcer sur leur degré d’humanité, ou leur degré de folie. »
Nous avons peut-être un espoir que ces « forçats du travail » nous rejoignent dans nos aspirations à la liberté et à d’autres occupations que le seul travail professionnel.
Sinon …