Mercredi 24 septembre 2014

Mercredi 24 septembre 2014
« Le français est la langue dans laquelle j’ai décidé, un jour, de me plonger.
 J’ai adhéré à cette langue et elle m’a adopté…
C’est une question d’amour. Je l’aime et elle m’aime… ».
Akira Mizubayashi
Une langue venue d’ailleurs,
Cette fois ce n’est pas un podcast, un article ou une vidéo qui est à l’origine de ce mot du jour.
C’est Annie, ma compagne aimée, qui a lu « Une langue venue d’ailleurs » de ce japonais qui a choisi la langue française et qui a adoré ce livre.
Dans une correspondance avec Michel Murat, Akira Mizubayashi  écrit : « On ne choisit pas ses parents, ni son pays, ni son milieu social, ni ses origines ethniques et raciales, ni son époque, ni son lieu et sa date de naissance, ni a priori sa langue. Mais parmi ces choses qui nous sont définitivement imposées du dehors et qui nous fixent, nous arrêtent, nous enferment dans une série de déterminations préalables sans issue ou presque, seul l’espace de la langue semble, en fait, nous offrir une ouverture, une échappatoire, aussi infimes soient-elles. Oui, on peut choisir sa langue ou ses langues, si l’on veut, une langue ou des langues dans toute la symphonie communicante des langues.
Et ici, peut-être, une chose mérite d’être notée : c’est que les langues sont des biens communs, des espaces publics, des lieux non délimités et non délimitables qu’on peut traverser ou pénétrer sans être redevable de quoi que ce soit, à qui que ce soit. La langue est une terre généreuse sans propriétaire où se déroule une fabuleuse fête permanente à entrée gratuite.
La langue est la chose — et en disant cela j’éprouve déjà le besoin d’ajouter que ce n’est même pas une chose —, quelque chose qui relève du communisme absolu, c’est-à-dire quelque chose qui est, par-delà la situation babélique du monde, le plus universellement partagé et partageable, plus que le ciel qu’on regarde, plus que l’air qu’on respire. Quelle aubaine de savoir qu’on n’est pas inévitablement prisonnier de sa langue et sa culture propres ! »
Voici une présentation de ce livre étonnant : <http://www.lacauselitteraire.fr/une-langue-venue-d-ailleurs-akira-mizubayashi> dont je tire ces extraits : « Une langue venue d’ailleurs, paru en 2011 dans la collection L’un et l’autre de J. B. Pontalis, est tout à la fois une autobiographie, une méditation comparative (et comparatiste) finement insérée dans le corps du récit et une magnifique description de ce en quoi une langue est le lieu de la vie.
Au sortir de l’adolescence (début des années 70), un jeune Japonais prend conscience de son profond malaise par rapport à sa langue maternelle, à sa classe d’âge et au passé politique récent de son pays. Rien de négatif sur le plan familial qui l’y aurait disposé. Le père – homme admirable ! – aime ses deux fils, consent à des sacrifices pour soutenir l’apprentissage de la musique par l’un et celui de la langue française par l’autre. « Aucune marchandise n’est meilleur marché qu’un livre, à condition qu’on le lise. Tu achèteras autant de livres que tu voudras, si tu en as besoin et si tu les lis ». Des livres importés de France, assez chers donc.
Le contexte familial est celui d’une classe moyenne grâce justement à la volonté et aux efforts du père issu d’un milieu social modeste et devenu ingénieur. […] Mais plus que cet admirable parcours d’une vie où la volonté trace le chemin sans crainte des difficultés et des peines (il s’agit de parler la langue choisie sans accent, d’y « adhérer » entièrement tout en vivant au Japon, d’accéder à « l’univers du français »), cet ouvrage est aussi une réflexion continue sur quelque chose qui finalement transcende son propre sujet. […] « Le jour où je me suis emparé de la langue française, j’ai en effet perdu le japonais pour toujours dans sa pureté originelle. Ma langue d’origine a perdu son statut de langue d’origine. J’ai appris à parler comme un étranger dans ma propre langue.
Mon errance entre deux langues a commencé… ». « 
Que la langue française continue à vous permettre d’exprimer vos émotions, votre joie, parfois vos peines et souvent des mots de paix et d’amour.