Jeudi 3 mars 2022

«  Guerre : quand un mot redécouvre son sens propre.  »
Clément Viktorovitch

Hier soir, le Président Macron a dit :

« Nous ne sommes pas en guerre contre la Russie. »

C’est factuellement exact.

Camus a écrit : « Mal nommer un objet c’est ajouter au malheur de ce monde, car le mensonge est justement la grande misère humaine, c’est pourquoi la grande tâche humaine correspondante sera de ne pas servir le mensonge. »

Mais il y a bien la guerre sur le continent européen.

Hier, je citais Clausewitz qui conceptualisait « la montée aux extrêmes » quand deux puissances s’affrontaient dans une lutte pour leur existence.

De manière moins martiale, quand nous parlons nous avons aussi parfois tendance quand nous voulons dire notre colère, notre sidération ou notre perception de l’importance d’un évènement, de faire monter la rhétorique aux extrêmes.

C’est particulièrement le cas pour le mot « guerre ».

Ces dernières années, nous avons fait la guerre au virus. Le Président Macron, moins mesuré de ce temps-là, c’était il y a deux ans, s’est exclamé :

« Nous sommes en guerre ! »

Lors du mot du jour du <19 mars 2020>, j’avais repris le beau texte de Sophie Mainguy : « Nous ne sommes pas en guerre et n’avons pas à l’être ».

Après le 11 septembre 2001, George W. Bush a déclaré la guerre contre la terreur.

Et lors des attentats qui ont frappé le sol français, beaucoup de responsables ont affirmé « Nous sommes en guerre ! ».

C’était faux, nous n’étions pas en guerre alors.

Dans le monde commercial ou publicitaire, on parle aussi souvent de guerre, notamment de guerre des prix.

Par exemple cet article : « La guerre des prix fait rage sur les smartphones 5G ». D’autres veulent faire la guerre au gaspillage.

Mal nommer un objet…

Clément Viktorovitch dans son émission « Entre les lignes du 24/02/2022 » a remis le nom de l’objet à l’endroit, redonné le sens exact, on dit propre, du mot « guerre » :

« En droit international, la guerre se définit comme un conflit armé entre plusieurs groupes politiques constitués, et notamment des États : c’est ce qui se passe entre la Russie et l’Ukraine. Mais ce qui est intéressant, c’est justement que nous semblons presque redécouvrir, en Europe, le sens véritable de ce mot.

Voilà près de 20 ans, en effet, qu’il est utilisé dans le débat public de manière plus ou moins métaphorique. Tout a commencé le 20 septembre 2001, quelques jours après l’attaque contre le World Trade Center, le Président George W. Bush déclare la guerre contre la terreur. Or, la terreur n’est pas un groupe politique constitué. C’est une stratégie, un moyen : on “lutte” contre, mais on ne lui fait pas “la guerre”.

Le mot, ici, était déjà employé en partie dans un sens métaphorique. En partie parce que, de fait, cette déclaration a été suivie d’une série d’interventions militaires à l’extérieur, en Afghanistan puis en Irak. En revanche, sur le sol américain, son emploi était contestable. D’ailleurs, il y a un autre contexte, similaire, dans lequel cette expression a été employée : c’est en France, à la suite des attentats de 2015 par le Premier ministre de l’époque Manuel Valls. “La France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l’islamisme radical”.

Cette phrase a été très critiquée, à l’époque, par une partie des chercheurs en relations internationales. Jean-Baptiste Jeangene Vilmer, le directeur de l’Institut de recherche stratégique de l’École Militaire, l’a par exemple qualifié de “non-sens sémantique”, en rappelant que si la France était bien ”en guerre” contre les terroristes du Nord Mali, elle ne l’était pas sur son sol. À force de parler de guerre pour évoquer autre chose qu’un conflit armé, on a fini par en diluer le sens. »

Comme le dit Clément Viktorovitch, c’est un mot trop lourd pour être utilisé avec légèreté

Et il ajoute :

« Maintenant qu’elle frappe l’Europe sur son sol, nous redécouvrons la guerre dans toute sa matérialité. Les bombardements aveugles, les déplacements de population, les morts. Cette réalité qui n’est que trop familière pour tant d’hommes et de femmes qui la subissent chez eux, mais que nous regardions d’au loin, sans trop y prêter attention. Peut-être cela serait-il une bonne occasion pour réfléchir, aussi, à la manière dont nous parlons. La guerre est un mot trop lourd pour être invoqué avec légèreté. »

Il existe d’autres mots lourds qu’il n’est pas raisonnable d’invoquer avec légèreté, par exemple le mot « dictature » que certains ont eu tendance à beaucoup utiliser en France.

Ils nommaient mal un objet…

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Vendredi 6 novembre 2020

« Résister, c’est d’abord et absolument faire face. Exprimer une force pour en contenir une autre »
Alain Rey

Entre 1993 et 2006, Alain Rey, concluait la matinale de France Inter que j’écoutais chaque jour, par une chronique intitulée « Le Mot de la fin ». Il s’emparait alors d’un mot de notre langue qui était présent dans l’actualité et qui, souvent, avait été cité plusieurs fois dans l’émission d’information qu’il concluait.

Alors, il déshabillait ce mot, l’inscrivait dans l’histoire, examinait les différentes significations, souvent éclairait un autre sens du mot. C’était un moment de poésie et d’érudition que j’attendais toujours avec impatience.

France Inter a republié un certains nombre de ces chroniques sur cette page <(Ré)écoutez “Le Mot de la fin”, la chronique d’Alain Rey>

Vous y trouverez sa dernière chronique, le 29 juin 2006, consacrée au mot « Salut ». Mais aussi :

  • Pandémie
  • Palabre
  • Caricature
  • Sage

Il avait fait sa chronique sur le mot « sage » lors d’une autre élection présidentielle américaine pendant laquelle il a fallu attendre longtemps pour savoir qui serait le président entre Al Gore et George W Bush. C’était sa chronique du 13 décembre 2000 et il s’en prenait aux juges de la Cour Suprême :

« Un mot que je trouve un peu immérité. C’est le mot “sage”. Les juges de la Cour suprême des Etats-Unis, qui viennent de rendre la décision que l’on sait, sont souvent appelés “Les Sages”. Sans commentaire. Mais les commentaires, justement, soulignent le caractère politique de leur décision. Cinq sages républicains contre quatre sages démocrates égalent un président républicain. Voilà la sagesse assimilée à une majorité politique d’ailleurs faiblarde et surtout une sagesse en morceaux puisqu’avec certes, cinq pro-Gore et quatre pro-Bush modèle W, on aurait eu le résultat inverse. »

Cette page a été mis en ligne suite au décès d’Alain Rey, le 28 octobre 2020, à l’âge de 92 ans.

Il était né en 1928, dans le Puy-de-Dôme. Entre autres études, il a fait des études de lettres et d’histoire de l’art à la Sorbonne. Après son service militaire en Tunisie, il répond en 1952 à une petite annonce de Paul Robert qui cherche des linguistes pour faire un dictionnaire. Alain Rey devient son premier collaborateur pour le Dictionnaire alphabétique et analogique.

Il devient alors l’âme des dictionnaires « Robert », il devient le Robert. Le premier dictionnaire « Le Robert » paraît en 1964. Alain Rey rédige et dirige ensuite les autres dictionnaires publiés par les éditions Le Robert dont le célèbre « Le Petit Robert »

Wikipedia écrit :

« S’il ne fut pas universitaire, il a cependant joué un rôle majeur dans le développement de la terminologie, de la lexicologie, de l’histoire du vocabulaire, de la sémantique historique et de l’histoire culturelle des dictionnaires. »

J’ai trouvé dans <un article du Monde>, publié le 24 mars 2016, une ode dont il avait le secret au mot « résister ».

Il me semble que le mot « résister » constitue un verbe important des temps présents.

L’hebdomadaire « Le Un » a consacré un de ces dernier numéros à « résister ».

Alain Rey écrivait :

« Le mot « résister » n’est pas très ancien. Il apparaît au tournant des XIIIe et XIVe siècles, par un emprunt direct au latin. C’est un terme d’origine intellectuelle, donc, qui n’est pas passé par les gosiers romans du haut Moyen Age. Dès son apparition, ce mot inventé par les clercs, en un temps où l’individu ne pèse pas, est posé comme collectif, à résonance plurielle. Du « resistere » latin, il tient sa force, son énergie.

Le préfixe « re » n’indique pas ici le redoublement ou la répétition, mais l’intensif appliqué à une racine, « sistere », qui dit l’arrêt, la station fixe. Une racine que l’on retrouve dans « insister », « persister », ­ « désister », « consister » aussi.

Résister, c’est donc d’abord se tenir debout et être capable de faire face. Faire front. Faire obstacle. Face à une menace, un péril, même intime, venu de l’intérieur en quelque sorte.

De façon frappante, on peut remarquer qu’il y a là comme un écho avec le « djihad », cet ­ « effort suprême » de la langue arabe. Dans les hadiths qui complètent le Coran, le Prophète distingue le petit djihad, qui concerne la guerre menée pour préserver l’islam, et le grand djihad, plus essentiel à ses yeux, qui désigne la lutte à mener en son for intérieur contre ses propres faiblesses, ses passions ou ses facilités.[…]

La notion de « résister » est si claire qu’elle n’a quasiment pas varié au fil du temps. Le mot est des plus stables. Un mot résistant en quelque sorte. Posture d’abord théorique, il trouvera plus tard ses emplois concrets, en métaphore.

Au XVIe siècle, il s’applique aux sentiments : désormais, on résiste à une tentative de séduction. Aux choses également, quand celles-ci, face à l’action d’un agent extérieur, parviennent à conserver leur intégrité sans se détériorer.

Mais c’est la progression dans le champ de la psychologie sociale qui sera la plus flagrante  : résister au sens de refuser, s’opposer à. Vocabulaire de l’opposition à une séduction autant qu’à une oppression, la notion originelle s’étoffe ainsi sans varier sur le fond. Les dérivés qui s’ensuivent sont particulièrement intéressants. Ainsi, le mot « irrésistiblement », employé au siècle des ­Lumières dans le champ psychologique pour signifier une promesse d’agréments. »

Et il compare le mot « résister » et le mot « résistance » en montrant la plus grande stabilité du verbe :

«  Le mot ­ « résistance » – d’abord orthographié « resistence » lors de ses premières occurrences médiévales – s’est coloré différemment selon les circonstances historiques qui en ont régulièrement popularisé l’emploi. Jusqu’à son actuelle acception majuscule – Résistance –, qui la réserve à l’action, menée durant la deuxième guerre mondiale, de ceux qui s’opposèrent à l’occupation de leur pays par les troupes des puissances de l’Axe. Comparé à cette variabilité, le mot « résister », lui, a conservé sa hauteur de vues originelle, intangible. ­ Résister, c’est d’abord et absolument faire face. ­Exprimer une force pour en contenir une autre, comme faire le choix de la non-violence pour s’opposer à l’oppression. »

Et il finit par une anecdote propre à nous encourager à continuer à aimer et défendre les caricatures :

«  Sur un plan plus intime, j’ai été assez séduit par la proposition que me fit naguère Jean-Michel Ribes de participer à la saison 2007-2008 du Théâtre du ­Rond-Point, consacrée au ­ « rire de résistance ». La dérision comme autre réponse que le sérieux pour faire face me convient assez. »

Je vous invite aussi à regarder cet entretien sur TV5 dans laquelle Patrick Simonin recevait Alain Rey à l’occasion de la sortie de son dictionnaire historique de la langue française. Vous apprendrez, entre autres, d’où vient le mot tomate et comment il a voyagé.

L’entretien ne dure que 20 minutes. Si vous disposez davantage de temps, en ces temps de confinement, vous pouvez écouter cette conférence passionnante sur la langue française donnée à l’Université de Genève < Le français, une langue à l’épreuve des siècles>. Elle dure 1:45 et vous verrez qu’il a aussi beaucoup d’humour et de la poésie.

Lui qui écrivait le 24 mars 2020 :

« Confinement est sans aucun doute le mot du jour, jour un peu long, à notre regret, mais qui incite ou qui invite à la réflexion. […]
Acceptons d’être « confinés », mais au sens que ce mot eut à la fin du Moyen Âge : « aller jusqu’aux confins ».
Or, les confins de la langue française, c’est le monde. » 

<1483>

Lundi 21 septembre 2020

«Sais-tu […] que la perdrix cacabe, que la cigogne craquette et que si le corbeau croasse, la corneille corbine ?»
Fernand Dupuy, «L’albine»

Je reprends donc l’écriture quotidienne d’un mot du jour. C’est une discipline exigeante, parfois difficile et particulièrement complexe dans notre monde troublé par une pandémie, par des défis encore plus considérables de la destruction en cours de la biodiversité, du dérèglement climatique, de l’amenuisement des ressources naturelles.

Pour ce faire je ne dispose que du langage, cette structure verbale qu’utilise depuis des millénaires les humains pour échanger des informations, des récits, des injonctions et même des sentiments qui eux peuvent aussi s’exprimer différemment.

Mais aujourd’hui je vais m’intéresser aux sons qui sortent des la bouche des autres animaux ou des animaux non humains. C’est encore avec le langage humain qui a nommé ces sons que je vais pouvoir évoquer ce début de langage de nos colocataires sur terre.

C’est mon amie Marianne qui m’a signalé un texte qu’elle a trouvé sur une page Facebook.

Mais j’ai aussi trouvé ce même texte sur ce blog de <Henri Girard : Auteur de romans et de nouvelles>.

En réalité ce texte a été écrit par Fernand Dupuy dans un livre : « L’Albine, scènes de la vie en Limousin et en Périgord vert ».

Qui est Fernand Dupuy ?

Fernand Dupuy est né en1917 à Jumilhac-le-Grand en Dordogne à la limite du Limousin. Il sera instituteur puis résistant et s’engagera dans l’action politique. Il sera élu député et maire communiste de Choisy-le-Roi de 1959 à 1979.

Il fut aussi le secrétaire de Maurice Thorez (1948-1951) et membre du Comité central du PCF (1947-1964).

Il était aussi écrivain.

A son décès, en 1999, <L’Humanité> a écrit un hommage qui commence ainsi :

« Celui qui ne connaît pas le plaisir de voir se lever le jour sur le clapotis de l’eau ; qui, tapi dans les herbes, n’a jamais vu une biche venir boire ; celui-là est un infirme »

Et le journal ajoutait qu’il avait déclaré cela au Matin de Paris, en 1977.

Il a écrit des livres politiques comme « Jules Ferry, réveille-toi ! » (Fayard) et puis des livres sur la nature : « Histoires de bêtes » et « Pêcher la truite vagabonde ».

Et donc « L’Albine ». Ce livre est présenté par le site <Persée> :

« On appelle parfois Périgord Vert le pays qui prolonge au sud-ouest le plateau Limousin : même paysage de châtaigniers, de prairies plantées de pommiers et de cultures pauvres. Autour de l’Albine […]  une femme de tête qui anime la vie et le travail d’une ferme de moyenne importance en Périgord Vert, dont la mentalité présente un mélange d’ouverture au progrès et d’attachement à de vieux usages et superstitions, Fernand Dupuy a tracé un vivant tableau de la vie rurale en ce pays ; il montre les profondes transformations survenues dans les trente dernières années. Dans ce pays où la scolarisation s’est poursuivie avec retard, les transformations ont été d’autant, plus lentes. »

Voici donc le langage des autres animaux, les animaux non humains :

« Sais-tu que le chien aboie quand le cheval hennit ?
Que beugle le bœuf et meugle la vache,
Que l’hirondelle gazouille, la colombe roucoule et le pinson ramage.
Que les moineaux piaillent, le faisan et l’oie criaillent quand le dindon glousse.
Que la grenouille coasse mais que le corbeau croasse et la pie jacasse.
Et que le chat comme le tigre miaule, l’éléphant barrit, »

L’hirondelle gazouille, mais les animaux humains le font aussi sur ce réseau social qui a pour nom anglais : « Twitter ». Je vous donne ci-dessous quelques exemples de la polémique sur la 5G et le modèle amish

« Que l’âne braie, mais que le cerf rait. »

Mais enfin, le cerf brame allez vous me dire ! Oui, mais il rait aussi, du verbe <réer>.

Mais que pourrait nous dire ce cerf victime de ce jeu qu’ont inventé les homos sapiens : la chasse à courre.

« Que le mouton bêle évidemment et bourdonne l’abeille, brame la biche quand le loup hurle. »

Nous sortons masqués en ce temps de COVID. Certains ne sont pas d’accord et utilisent pour expliquer leur désaccord la comparaison avec ce pauvre animal bêlant qui se laisse faire. « Nous ne sommes pas des moutons » devient le cri de ralliement.

« Tu sais, bien sûr, tous ces cris-là mais sais-tu ?
Que si le canard nasille, les canards nasillardent,
Que le bouc ou la chèvre chevrote,
Que le hibou hulule mais que la chouette, elle, chuinte,
Que le paon braille et que l’aigle trompette. »

Mais Donald Trump, qui semble être un animal humain chevrote t’il ? ou chuinte t’il ? quand il affirme ça finira bien par se refroidir ?

« Sais-tu encore ?
Que si la tourterelle roucoule, le ramier caracoule et que la bécasse croule, que la perdrix cacabe, que la cigogne craquette et que si le corbeau croasse, la corneille corbine, et que le lapin glapit quand le lièvre vagit ».

Les humains aussi peuvent roucouler. Mais les humains ont créé des séparations, des groupes et des communautés dont il ne faut pas sortir pour roucouler. Ainsi une famille bosniaque et de confession musulmane n’a pas toléré qu’une de ses femmes, veuille se marier avec un serbe chrétien

« Tu sais tout cela ? Bien.
Mais sais-tu ?
Que l’alouette grisolle,
Tu ne le savais pas ? Et, peut-être, ne sais-tu pas davantage
que le pivert picasse.  C’est excusable !
Ou que le sanglier grommelle, que le chameau blatère
Tu ne sais pas non plus (peut-être…) que la huppe pupule. (Et je ne sais pas non plus si on l’appelle en Limousin la pépue parce qu’elle pupule ou parce qu’elle fait son nid avec de la chose qui pue.)
Qu’importe ! Mais c’est joli : la huppe pupule ! »

Le chameau blatère ! Je ne le savais pas. Les humains déblatèrent plutôt. Le dictionnaire du CNRS explique que ce verbe déblatérer signifie ; « parler avec violence et prolixité contre quelque chose ou contre quelqu’un. » . Ce verbe vient du latin deblaterare « dire en bavardant à tort et à travers ». Verbe latin qui vient de blaterare « causer de quelque chose ». Le chameau causerait-il de quelque chose ?

Et voici la fin toute poétique de ce texte :

« Et encore sais-tu ?
Que la souris, la petite souris grise : devine ? La petite souris grise chicote ! Hé oui !
Avoue qu’il serait vraiment dommage d’ignorer que la souris chicote et plus dommage encore de ne pas savoir, que le geai cajole ! »

C’était un texte de Fernand Dupuy (L’Albine, scènes de la vie en Limousin et en Périgord vert).

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Mardi 10 mars 2020

« L’oursin vorace »
Anagramme de Jacques Perry-Salkow

Jacques Perry-Salkow est un génie de l’anagramme. Il a écrit un livre avec Etienne Klein « Anagrammes renversantes ou Le sens caché du monde » dont j’avais parlé lors du mot du jour 12 février 2015

Je rappelle qu’une anagramme (le mot est féminin) – du grec ανά, « en arrière », et γράμμα, « lettre », anagramma : « renversement de lettres » – est une construction fondée sur une figure de style qui inverse ou permute les lettres d’un mot ou d’un groupe de mots pour en extraire un sens ou un mot nouveau.

Il a donc trouvé cette anagramme.


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Lundi 15 avril 2019

« Die Heimat »
Mot allemand difficilement traduisible en français

Pendant ce moment d’absence, j’ai passé quelques jours auprès de mes frères, dans ma Lorraine natale.

Cette partie de la France a été très disputée, lors des siècles passés, entre les nations allemandes et françaises.

La partie Nord-Est, dont je suis issu, est cependant une région dans laquelle la langue allemande s’est enracinée dans les toponymes, les patronymes et probablement dans les esprits.

En retournant sur ces lieux, un mot allemand intraduisible en français s’est imposé à moi : « Heimat ». C’est ce qu’est cette région pour moi.

La racine de ce mot est « Heim » qui lui est parfaitement traduisible et signifie « maison » ou « foyer ». Il a la même étymologie que le mot anglais « home ».

Mais pour « Heimat », la traduction n’existe pas, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible de le traduire par un seul mot.

Vouloir le traduire par « patrie » serait une grande erreur. La patrie est le pays des « pères » dont l’équivalent allemand est le mot « Vaterland ». On porte les armes pour la patrie, on meurt pour la patrie. Il n’y a rien de guerrier dans le mot « Heimat ».

<Wikipedia> exprime cela ainsi :

« Heimat est un mot allemand qu’il est impossible de traduire par un seul mot français, bien qu’il corresponde à un sentiment universellement répandu. Il désigne à la fois le pays où l’on naît, le village où l’on a grandi, mais aussi la maison où on a passé son enfance ou celle où on est chez soi.

Ainsi quand on est loin de chez soi, on a le mal du pays, le « Heimweh »

[…] Le mot « Heimat » est donc à la fois de l’ordre du sentiment, de la foi religieuse, du souvenir d’enfance, d’un horizon familier ou d’une atmosphère bien précise. […] Depuis, la « Patrie », en allemand « Vaterland » est devenu un concept politique : elle a des frontières, un drapeau, une capitale et un gouvernement, tandis que la « Heimat » n’a pas de drapeau. C’est, selon Waltraud Legros, « le pays que chacun porte à l’intérieur de soi ». »

Pour moi la question ne fait pas de doute j’ai une patrie « La France » et une « Heimat » qui est ce lieu de mon enfance à Stiring-Wendel, dans l’agglomération de Forbach, à moins de 10 km de Sarrebrück. Je n’y finirai certainement pas ma vie, mais il y a un lien qui m’attache à ce lieu et le mot « Heimat » exprime parfaitement ce lien.

Ce n’est certainement pas un lieu de vacances où on a envie de retourner régulièrement parce qu’on s’y plait. C’est un lieu de racines, où on se sent chez soi.

La question qui peut se poser est de savoir si tout le monde possède dans ses sentiments, dans son vécu : un tel lieu ?

Il n’est pas certain que les nomades mondialisés connaissent ce sentiment. Eux qui prétendent, souvent, se sentir chez eux partout dans le monde.

Ils s’éloignent de cette pensée que le stoïcien Sénèque a écrite :

«Il n’est pas de vent favorable pour qui ne connaît pas son port d’attache.»

Les migrants qui cherchent refuge ou un monde plus doux économiquement en Europe, ont certainement une « Heimat » mais qu’ils fuient parce que ce lieu leur est devenu difficile soit parce qu’ils y sont menacés dans leur intégrité physique, soit parce qu’il est difficile d’y vivre économiquement.

C’est une question que chacun peut se poser, peut-être d’ailleurs plutôt à 60 ans qu’à 18 : ai-je dans mon vécu, dans mon univers affectif une « Heimat » ?

Et puis il y a une question plus vaste, plus politique est-il bon pour la société des hommes que ceux qui la composent se sentent proche d’une « Heimat ? »

Brice Couturier dans une de ses chroniques a fait mention d’un ouvrage de David Goodhart, « The Road to Somewhere », proche un temps du New Labour de Tony Blair :

« Goodhart estime que la division gauche/droite a perdu beaucoup de sa pertinence. Il propose un nouveau clivage entre ceux qu’il appelle « les Gens de Partout » et « le Peuple de Quelque Part ». Les premiers, les Gens de Partout ont bénéficié à plein de la démocratisation de l’enseignement supérieur. Ils sont bien dotés en capital culturel et disposent d’identités portables. Ils sont à l’aise partout, très mobiles et de plain-pied avec toutes les nouveautés.

Les membres du Peuple de Quelque Part sont plus enracinés.  »

Il en tire une réflexion et des conséquences qui ne concernent pas totalement mon vécu mais qui méritent cependant d’être rapportées :

« Les membres du « Peuple de Quelque Part ». habitent souvent à une faible distance de leurs parents, sur lesquels ils comptent pour garder leurs enfants. Ils sont assignés à une identité prescrite et à un lieu précis. Ils ont le sentiment que le changement qu’on leur vante ne cesse de les marginaliser, qu’il menace la stabilité de leur environnement social. Ils sont exaspérés qu’on leur ait présenté la mondialisation et l’immigration de masse comme des phénomènes naturels, alors qu’ils estiment que ce furent des choix politiques, effectués par des politiques et des responsables économiques appartenant aux Gens de Partout. C’est pourquoi le Peuple de Quelque Part éprouve une très grande frustration : le sentiment d’avoir été exclu de la parole publique, marginalisé, alors qu’il est majoritaire ; d’avoir été accusé de xénophobie et d’arriération, alors qu’il réclame simplement que le rythme du changement soit ralenti ; et que l’Etat en reprenne le contrôle. »

Certaines élites sont très vigoureusement contre ces sentiments et regardent avec hostilité notamment ceux qui en Allemagne ont remis sur le devant de la scène la « Heimat ». Depuis la nouvelle coalition de 2018, le ministre conservateur qui occupe le poste de Ministre de l’Intérieur a accolé à ce titre le mot « Heimat » : « Bundesministerium des Innern, für Bau und Heimat. »

Un article publié par « Libération » et rédigé par sa correspondante à Berlin : Johanna Luyssen présente cette évolution comme problématique :

« […] lors de son premier discours au Bundestag, le […] ministre de l’Intérieur et du «Heimat» allemand, Horst Seehofer, est revenu sur le sens de ce terme […].

«Le Heimat, ça ne veut pas dire le folklore, la tradition ou la nostalgie. […] Cela veut dire l’ancrage, c’est un environnement culturellement enraciné dans un monde globalisé. Cela veut dire la cohésion et la sécurité, ce dont chacun a besoin dans ce pays.»

Vendredi matin, […] le conservateur bavarois Horst Seehofer, détaillait devant le Bundestag sa conception toute personnelle du mot Heimat. Une telle digression sémantique peut surprendre dans le cadre d’un discours sur les orientations de son ministère – le premier depuis sa prise de fonctions, mi-mars. C’est que ce terme lourdement connoté s’inscrit dans un débat agité en Allemagne, surtout depuis que le ministère de l’Intérieur fédéral a choisi de l’accoler à son en-tête.

Heimat : ce mot est passablement intraduisible en français. Disons qu’il évoque les notions de «patrie», de «terroirs», de «chez nous». Il désigne un sentiment d’appartenance régional plutôt que national, et fait appel à l’intime plutôt qu’au collectif. Cela pourrait presque s’apparenter à l’expression «au bled», ou au «petit pays» cher à l’écrivain Gaël Faye. Le terme a par ailleurs été, et c’est bien pour cela qu’il crée encore la controverse, utilisé par les nazis. Il fut également utilisé dans un slogan de l’AfD, le parti d’extrême droite allemand, lors de sa fondation en 2013.

Accoler «Heimat» à l’en-tête d’un ministère fédéral a fait réagir en Allemagne, beaucoup voyant dans la démarche la volonté de récupérer les faveurs d’un électorat d’extrême droite. »

Et puis il y aussi cet <article> qui en évoquant un film de Benedikt Nabben, Heimat Paris trouve ce concept de « Heimat » totalement incongru à l’heure du smarphone :

« Heimat » est-il vraiment un terme actuel ? Nous sommes en pleine mondialisation, nous écoutons du hip-hop américain, nous mangeons japonais, nous regardons des films argentins et connaissons la migration. Par ailleurs, il est aujourd’hui beaucoup plus facile de garder contact avec sa famille et ses amis grâce à Internet. Ainsi, nous gardons toujours notre « Heimat » dans la poche. Quoiqu’il arrive, ce terme restera toujours sujet à controverse à l’avenir, et il y a fort à parier qu’il ne trouvera jamais de définition figée non plus. »

Tout en me méfiant des arrières pensées du ministre allemand, je ne partage pas ce dernier avis. S’il suffit d’un smartphone qui permet d’accéder facilement et à tout moment à ses proches pour remplacer ses racines, c’est qu’on a rien compris à ce que c’est d’avoir des racines, ce que conceptualise admirablement le mot « Heimat »

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Jeudi 21 février 2019

« Un mot épicène »
Mot qui n’est pas marqué du point de vue du genre grammatical

Avant c’était simple, un enfant avait une mère et un père.

Quelquefois la mère était inconnue, beaucoup plus fréquemment dans nos sociétés soumis à la loi du mâle le père était  inconnu, et quelquefois les deux étaient inconnus, il s’agissait alors d’enfant abandonné.

Aujourd’hui la question du genre a évolué et crée des tensions dans nos sociétés.

Un technocrate ou un député mal inspiré a pensé pertinent de modifier des imprimés administratifs de l’éducation nationale en remplaçant «mère » et «  père » par parent 1 et parent 2 !

Florence nous a envoyé un dessin drôle sur ce sujet :

Il semble qu’une solution de compromis ait pu être trouvée.

 Le mot du jour d’aujourd’hui n’approfondira pas cette question contemporaine sauf à souligner deux points :

  • Quand un technocrate cherche à résoudre un problème de société et d’humanité, il est rarement inspiré. Sa spécialité reste l’analyse par les nombres et l’organisation de la productivité.
  • Il y a un problème de fond, lorsqu’on remet en cause une terminologie séculaire qui correspond encore à la réalité du plus grand nombre, pour prendre en compte les évolutions que l’on peut trouver, par ailleurs, tout à fait justifiées mais qui ne correspondent qu’à une toute petite minorité, même si elle est très visible.

Mais le problème de genre que j’entends développer aujourd’hui concerne non les couples et les familles mais un mot.

Ce mot est « hymne »

Hier la première phrase était : « Une hymne à la sacralité de l’Univers »

C’était l’auteur, ou selon certaines nouvelles pratiques l’Autrice, Louise Boisselier qui avait utilisé le féminin.

Comme certains d’entre vous, cela m’avait surpris.

« Un hymne » me paraissait la bonne formule.

Mais nous sommes dans le cas particulier d’un genre flou ou d’un bi-genre 

« Un hymne » ou « une hymne » sont tous les deux justes, l’un et l’autre se dit.

Hymne est en  même temps féminin et masculin.

C’est donc un mot très moderne.

Le dictionnaire libre : « wiktionary » explique que hymne provient :

« Du latin hymnus, lui-même du grec ancien ὕμνος, peut-être une variante du mot qui nous donne hymen, hyménée. Le mot est passé du masculin au féminin en ancien français, « plus ordinairement féminin » au dix-septième siècle, puis étymologiquement rapporté au genre masculin. (Vers 1140) »

Et précise :

« hymne \imn\ masculin ou féminin (l’usage hésite) »

Et c’est ainsi que j’ai appris que l’adjectif  « épicène » correspondait au phénomène de ne pas être marqué du point de vue du genre grammatical et qu’un mot épicène peut être employé au masculin et au féminin sans variation de forme. Alors ce site : <Parler français> explique que le premier sens d’épicène définit un nom qui, bien que n’ayant qu’un genre, désigne indifféremment l’un ou l’autre sexe : la souris, par exemple, est un nom épicène féminin, en ce sens qu’il désigne aussi bien la femelle que le mâle. De même, témoin est un nom épicène masculin.

Le deuxième sens d’« épicène » se dit ensuite d’un nom, d’un pronom ou d’un adjectif qui ne varient pas selon le genre : ils ont la même forme au masculin et au féminin, et pourraient être qualifiés de neutres, d’androgynes. Par exemple : acrobate, adulte, artiste, camarade, concierge, élève,

Un prénom qui peut s’employer pour les garçons comme pour les filles est un « prénom épicène ». Camille, Claude ou Dominique sont des prénoms épicènes usuels dans le monde francophone.

Avec toutes ces précisions, il n’est pas certain que «hymne» soit un «mot épicène». C’est peut être simplement un mot au «genre indéfini» voire appartenant à un «genre douteux».

Pour être plus savant, il est aussi possible de consulter Wikipedia : <Mot épicène>

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Vendredi 20 avril 2018

« Dire, ne pas dire »
Site créé par l’Académie française pour répondre aux questions des personnes qui veulent bien parler français

L’émission « Répliques » d’Alain Finkielkraut du 31 mars 2018 avait pour sujet : « La langue française : état des lieux »

Il avait deux invités Alain Borer qui a écrit : « De quel amour blessée » et Jean-Michel Delacomptée qui a publié «  Notre langue française ».

L’état des lieux rapporté par cette émission est assez préoccupant.

Parallèlement, en entrant dans une librairie j’ai trouvé un de ces petits livres édités par l’hebdomadaire « Le Un », dans une collection appelée les « 1ndispensables » et ayant pour titre « Le Français a-t-il perdu sa langue ? »

Ce livre est une suite d’articles de linguistes, de lexicographes, de philosophes ou encore d’écrivains sur la langue française.

Il commence par un article provocateur de Nancy Huston. Nancy Huston est née en 1953 au Canada, c’est une femme de lettres, d’expression anglaise et française. Son article s’intitule « la morgue de la reine » et le rôle de la reine est joué par la langue française.

Elle raconte comment elle avait réagi au discours d’une élue municipale qui s’était adressé à un groupe d’enfants : « Quelle chance vous avez, d’apprendre notre si belle langue ! ».

« Comme je dois prendre la parole ensuite, j’en profite pour expliquer aux enfants que, certes, le français est une belle langue mais qu’on peut en dire autant de toutes les langues ; que disposer d’une belle langue ne suffit pas, encore faut-il s’en servir pour dire des choses intelligentes ; qu’il est tout à fait possible de se servir d’une belle langue pour dire des choses débiles ; et que , plus on connait de langues, plus on est susceptible de dire des choses intelligentes. »

Elle cite aussi Mme de Staël qui trouvait nulles les soirées mondaines à Berlin, car en allemand il faut attendre la fin de la phrase pour en connaître le verbe : « pas moyen de couper la parole à son interlocuteur, vous imaginez, cher comme on s’ennuie. »

Un des invités de Finkielkraut avait aussi relevé cette particularité du français qui met le verbe immédiatement après le sujet donnant plus rapidement le sens à la phrase et permettant à l’interlocuteur d’interrompre immédiatement celui qui parle. Selon cet invité cela créait des échanges plus dynamiques, pleinement en phase avec la remarque de Mme de Staël.

Pour ma part, cette manière de faire montre surtout une grande impatience et un manque de savoir-vivre de ne pas laisser son interlocuteur terminer ses phrases. Mais il est vrai que je suis presque germain.

Un des invités, Alain Borer, a aussi commis un article dans cet ouvrage, dans lequel il reprend les critiques qu’il a exprimé dans l’émission de Finkielkraut. Il prend soin d’abord de préciser que la langue anglaise est très belle et que ce qu’il combat n’est pas l’anglais mais « L’anglobal » ce que d’autres appellent « le globish ». Et sur ce point, il écrit :

« Les Anglo-Saxons n’ignorent pas leur dette envers les « Normands » mais ils refusent massivement, au fond, de savoir que leur langue procède du français à hauteur de 63% et à travers 37 000 mots (plus que l’intégralité du Dictionnaire de l’Académie française en 1835). La plupart s’étonnent à la façon de George W Bush : « The problem with te French is that they don’t have a word for entrepreneur ». […] Toutefois il y eut échange millénaire entre la langue française et sa bouture anglaise, une forme de tennis (du français tenez). Or, tel est le phénomène en cours : les francophones ne renvoient plus la balle. Pour la première fois dans l’histoire de la langue française, les mots anglais ne sont plus usinés sur place et renvoyés, mais au contraire ils se substituent aux mots français existants.
Air France au téléphone : « Vous avez fait un non-show » Comprendre je ne me suis pas présenté au départ.
Le Premier ministre qui appelle au « patriotisme alimentaire », parle de « France bashing ». »

Mais pour défendre le français, il faut le parler et l’écrire correctement.

Et c’est un autre article « Mais que fait l’Académie ? » de l’académicien Yve Pouliquen qui m’a appris l’existence d’un site simple et ouvert que l’Académie a mis en place pour aider à mieux parler et à mieux écrire le français.

http://www.academie-francaise.fr/dire-ne-pas-dire

Et sur ce site les internautes que nous sommes peuvent même poser des questions.

Ainsi un internaute a demandé, laquelle de ces deux formules est juste : 1. « Nous avons pensé À lui offrir… » ou « Nous avons pensé lui offrir… ».

Et l’Académie a répondu :

« Les deux formes sont correctes. Il y a entre elles une nuance de sens. Nous avons pensé lui offrir signifie « nous avons l’idée de lui offrir telle ou telle chose », alors que Nous avons pensé à lui offrir souligne « nous n’avons pas oublié de lui offrir… » »

La semaine prochaine je serai en congé, le mot du jour reviendra le 2 mai 2018.

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Jeudi 09/02/2017

«Le népotisme»
Mot utilisé dans l’actualité
Le terme a été emprunté en 1653 à l’italien nepotismo, lui-même dérivé de nepote qui signifie « neveu », par référence au favoritisme accordé par un pape à l’un de ses neveux par la cession indue de titres ecclésiastiques ou de donations réservés au Vatican.
Au Moyen Âge, le mot désigne normalement dans ce contexte, les enfants des frères et sœurs des ecclésiastiques. Mais souvent, par euphémisme, les mots « neveux » et « népotisme » désignaient aussi les propres enfants des ecclésiastiques. »
En politique, le népotisme est caractérisé par les faveurs qu’un homme ou une femme au pouvoir montre envers sa famille ou ses amis, sans considération du mérite ou de l’équité, de leurs aptitudes ou capacités.
Un mot du jour court aujourd’hui.
Il me semblait pertinent de rappeler la signification et l’origine de ce mot.
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Lundi 20 Juin 2016

« invisibilisation »
Substantif pour exprimer le fait de rendre invisible une réalité

Voici un mot au destin singulier. Il y a d’abord un mot de la langue française « visible » dont la racine vient du latin « visibilis » qui signifie la même chose.

Quand on y ajoute le préfixe «in», en latin comme en français cela signifie « ce qu’on ne peut pas voir. »

La langue anglaise, comme très souvent, a emprunté ce mot à la langue française pour le même usage. Mais c’est la langue anglaise qui a ensuite inventé le mot « invisibilisation » que la langue française vient de récupérer.

Pourquoi ce mot du jour ?

A cause de la tuerie d’Orlando, où un criminel se réclamant de DAESH a massacré des homosexuels !

Or beaucoup d’élus comme les journalistes ont dans un premier temps, le temps où on révèle son inconscient et ses vraies valeurs et avant que n’apparaissent les éléments de langage, ignoré ce fait.

Florian Bardou, journaliste à Slate écrit ainsi : «Chers élus, la tuerie d’Orlando n’a pas frappé une boîte, mais une boîte gay »

C’est la revue de Presse du 13/06/2016 de Nicolas Martin sur France Culture qui a attiré mon attention sur ce sujet :

« Pas un seul gros titre de la presse du jour ne mentionne que le club visé par le tueur d’Orlando était un club homosexuel.

Il est assez surprenant quand on regarde le panorama des Unes de la presse française ce matin de constater à quel point il y a un grand absent… un mot, une expression qui ne figure dans aucun des grands titres… on va faire le test tous ensemble si vous le voulez bien… « Attentat islamiste à Orlando, la terreur et la haine » dans le Figaro… « Tuerie de masse dans une boite de nuit en Floride » dans l’Humanité. « Les Etats-Unis frappés par la pire tuerie de leur histoire » dans les Echos. « Nuit d’horreur en Floride » dans Le Parisien. « Orlando, nouvelle plaie béante » dans Libération.

Voilà… il ne manque pas quelque chose ?

Eh oui… pas un grand titre qui inclut cette information, qui n’est pourtant pas accessoire… cette discothèque, ce club… c’est un club gay. Une information qui ne figure même pas dans les sous-titres du Parisien, ou de l’Huma. Le fait que ce soit la communauté homosexuelle qui ait été visée par cet attentat est donc a priori, une information accessoire, pas essentielle, pas de celle que l’on met dans les gros titres. Et on pourrait presque sourire, si ce drame n’était pas si tragique, au fait que le Figaro a choisi pour sa photo d’illustration une femme qui pleure dans les bras d’un homme.

Cette pratique a un nom, elle est souvent d’ailleurs assez inconsciente… ça s’appelle l’invisibilisation… un peu comme si au lendemain des attaques de Charlie Hebdo, la presse avait évoqué des attentats contre des bureaux… ou après l’Hyper Casher, contre un supermarché. Sans préciser la nature de la cible de l’attaque terroriste…

Parce que, s’il reste à déterminer les motivations exactes du terroriste… il n’y a pas de doute sur la nature de l’endroit qui était visé. Sur la cible de l’attaque. Et le problème avec l’invisibilisation, c’est qu’elle permet de faire « comme si », de minimiser en quelque sorte la portée du geste… C’est ce qui permet, par exemple, à des personnes qui ont pris des positions notoirement hostiles aux personnes homosexuelles, de faire « comme si » et de se fendre de messages de compassion et d’oublier comme par magie la nature de la cible visée… La Manif pour Tous par exemple s’est fendu d’un petit tweet hier, signifiant « sa peine immense pour les victimes et leurs familles »… alors même que son porte-parole, en septembre dernier, parlait dans la presse du « lobby gay » comme du « Daech de la pensée unique ». On mesure aujourd’hui encore plus amèrement la profondeur de cette réflexion… Ou Christine Boutin, récemment condamnée pour avoir parlé de l’homosexualité comme une abomination, d’envoyer sans sourciller « sa compassion pour les victimes »… ces abominables victimes, donc.

C’est encore cette invisibilisation qui préside lorsque, dans les messages de soutien de plusieurs personnalités politiques – de François Hollande à Nicolas Sarkozy, de Bruno Le Maire à Marine Le Pen, de Jean-François Copé à Alain Juppé, ne figure pas une seule mention du fait que c’est bel et bien la communauté homosexuelle qui paye aujourd’hui le tribut de la barbarie terroriste. Et que, quelles que soient les conclusions de l’enquête, il est incontestable que les terroristes cherchent à atteindre des cibles précises, pour leur importance symbolique : la communauté juive, un journal satirique, la jeunesse multiculturelle d’un quartier parisien ou aujourd’hui, la communauté homosexuelle américaine, autant de symboles que leur idéologie meurtrière vomit et qui payent une fois de plus le prix du sang.

Et pour conclure sur cette notion d’invisibilisation… le Pulse, cette discothèque gay et lesbienne d’Orlando, n’est pas qu’une discothèque gay et lesbienne. C’est une discothèque fréquentée majoritairement par des noirs et des latinos. Et ça, pour le coup, tout le monde semble s’en moquer éperdument.

Le motif homophobe semble pourtant se dessiner dans le parcours du tueur […] »

Et je reviens sur l’article de Slate évoqué qui explique :

« La timidité des réactions pour qualifier le massacre homophobe du Pulse, en France comme aux Etats-Unis, démontre que les politiques et certains journalistes sous-estiment plus ou moins inconsciemment la violence structurelle envers la communauté LGBT.

Comment encore en douter?

Au lendemain de l’attentat revendiqué par Daech dans un bar LGBT d’Orlando, en Floride, qui a fait au moins 50 victimes et 53 blessés, le caractère homophobe d’un tel massacre est incontestable. Il est incontestable car viser un espace communautaire et revendiqué comme tel, qui plus est en plein mois des marches des fiertés à travers le monde, ne peut traduire qu’une volonté délibérée de s’en prendre ouvertement à la communauté LGBT pour ce qu’elle est –communauté par ailleurs habituée à être la cible de la violence gayphobe, lesbophobe, biphobe et transphobe dans ses propres espaces de refuge.

Pourtant, depuis dimanche, en France comme aux Etats-Unis, de nombreuses réactions occultent la dimension haineuse et LGBTphobe, de l’attentat comme si l’identité du lieu et des victimes n’était qu’une donnée secondaire… Dans les heures qui ont suivi l’attaque du Pulse, «qui n’est pas n’importe quel club gay» d’Orlando, rappelait par exemple USA Today, le New York Times a, dans un premier temps, omis d’évoquer la nature du club avant de progressivement modifier ses titres. Mais le quotidien américain ne souligne pas franchement le caractère homophobe de la tuerie.

En France, même topo. Sud-Ouest est l’un des rares journaux, très rares journaux à mentionner dans son titre la cible visée et la nature de la haine: un massacre homophobe liée à Daech.»

Il existe cependant des hommes politiques qui ont su dire les choses :

« Compassion et solidarité avec le peuple américain. En frappant la communauté gay, l’attaque effroyable d’Orlando nous atteint tous ».-
Manuel Valls (@manuelvalls) 12 juin 2016

«Toutes mes pensées vont vers #Orlando atteinte par l’abjecte et lâche violence homophobe. Unis contre la terreur et la haine.» –
Najat Belkacem (@najatvb) 12 juin 2016

« Soutien à tous les gays lesbiennes, bi et trans meurtris par une attaque qui vise à remettre en cause leur droit de vivre en paix » #
Lovewins – Anne Hidalgo (@Anne_Hidalgo) 13 juin 2016

Mediapart a également publié un article sur le même sujet : « En France, l’homophobie est soigneusement dissimulée. »

Cette « invisibilisation » révèle deux tabous :

  • Le premier est la violence qui continue à s’exercer sur les homosexuels de manière atroce dans de nombreux pays du monde et de manière plus insidieuse dans notre beau pays.
  • Le second est l’ « homophobie » constante et destructrice de l’Islam et des autres religions monothéistes. Il y a bien cette parole de sagesse récente du pape François : « Qui suis-je pour juger ? » mais elle est bien isolée dans un univers de condamnation et d’intolérance, tant il est vrai que les religions établies, paralysées dans leurs dogmes et leurs normes rejettent violemment tout ce qui est à l’extérieur.

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Jeudi 12 février 2015

Jeudi 12 février 2015
« L’arôme des mots à l’infini »
Anagramme de « Les éditions Flammarion »
Étienne Klein & Jacques Perry-Salkow

Une anagramme (le mot est féminin) – du grec ανά, « en arrière », et γράμμα, « lettre », anagramma : « renversement de lettres » – est une construction fondée sur une figure de style qui inverse ou permute les lettres d’un mot ou d’un groupe de mots pour en extraire un sens ou un mot nouveau.

Étienne Klein, le physicien et journaliste est un adepte de ce jeu de l’anagramme mais il reconnaît bien volontiers  la supériorité, dans ce domaine, de son ami Jacques Perry-Salkow avec lequel il a écrit le livre « Anagrammes renversantes ou Le sens caché du monde » parue en 2011 chez Flammarion.

Il raconte dans <cet article> la genèse de ce livre et aussi que Flammarion était réticent de le publier jusqu’à ce que les deux compères dévoilent l’anagramme dont j’ai fait le mot du jour et qui révèle le sens caché des Éditions Flammarion.

Depuis que dans les différentes émissions qu’il anime, j’entendais Etienne Klein égrener des anagrammes, j’avais envie d’abord de parler de ce livre et plus généralement des anagrammes étonnantes et plein de sens.

En voici d’autres tirées de ce livre :

  • pirate = patrie
  • étreinte = éternité
  • sportifs = profits

Après pour comprendre les autres il faut avoir un peu de culture, de connaissance scientifique et aussi de connaissance de l’actualité :

  • le Médiator = la mort idéale
  • Claude Levi Strauss = a des avis culturels
  • la courbure de l’espace-temps = superbe spectacle de l’amour
  • le chat de Schrödinger = le choc d’hier est grand
  • La théorie de la relativité restreinte = vérité théâtrale et loi intersidérale
  • Le Radeau de la Méduse = au-delà de la démesure
  • Saint-Germain des Prés = matins nègres de Paris
  • Hôtel des ventes de Drouot = un lot de vestes d’Hérodote
  • L’origine de l’univers = un vide noir grésille
  • Le marquis de Sade = démasqua le désir
  • Être ou ne pas être, voilà la question = Oui, et la poser n’est que vanité orale
  • Et les particules élémentaires = tissèrent l’espace et la lumière
  • La gravitation universelle = loi vitale régnant sur la vie
  • Léonard Bernstein = l’art de bien sonner
  • Marie-Antoinette d’Autriche = cette amie hérita du Trianon = Reine, ta tête a dû choir matin
  • «Le Président Barack Hussein Obama » [doit beaucoup] = « à Rosa Parks, à ce bien humble destin »

Et à mon sens les 3 les plus fabuleux :

  • Le Maréchal Pétain = Place à Hitler, amen !
  • Le commandant Cousteau = tout commença dans l’eau

Et :

  • L’origine du monde, Gustave Courbet =  ce vagin où goutte l’ombre d’un désir


Voilà, voilà, je crois que vous allez courir acheter ce livre

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