Vendredi 8 juillet 2022

« Il faut montrer qu’on peut faire une prise de judo : Ceux qui ont cru pouvoir nous tromper, nous les démasquons. »
Patrice Arfi à propos d’Avisa Partners

Ce n’est pas du complot, c’est de la manipulation.

J’ai découvert cette affaire dans l’émission de Sonia Devillers du mercredi 29 juin 2022 l'<Instant M>.

Elle avait invité Fabrice Arfi, journaliste à Mediapart.

Mediapart héberge des blogs dans la partie de son site qu’elle appelle « Le Club ». Cet espace est prévu pour que des particuliers puissent exprimer leurs idées, leurs réflexions leurs questionnements.

Les journalistes de Médiapart ont constaté qu’il se passait des choses étonnantes sur ces blogs.

Leur enquête a permis de découvrir plus de 600 faux billets de blogs, rattachés à plus de 100 profils factices.

Parallèlement « Fakir » le journal créé par François Ruffin, le député de la France Insoumise, a publié un article d’un jeune journaliste pigiste Julien Fomenta Rosat : <Moi, journaliste fantôme au service des lobbies>. C’est un long article en accès libre.

Mediapart a publié aussi un article mais pour lequel il faut être abonné : <Opération intox : une société française au service des dictateurs et du CAC 40>

La société française dont il est question a une très belle adresse à Paris : 17 avenue Hoche, dans l’opulent 8ème arrondissement, à quelques pas du Parc Monceau, près de la Cathédrale Orthodoxe de Poutine, de l’Ambassade de l’Arabie Saoudite etc.

Elle a un nom qui n’est pas français « Avisa partners »

Elle a une page Wikipedia qui la présente comme <un groupe français de conseil spécialisée dans la cybersécurité, l’intelligence économique, l’investigation et les relations publiques> créé en 2010 et présent dans 7 autres pays que la France.

Fabrice Arfi parle de deux « fils à papa » qui sont à l’origine de cette aventure. D’après mes lectures il y a aussi d’autres personnes qui sont au cœur de cette entreprise.

Grâce au journal <Jeune Afrique>, nous pouvons disposer d’une photo de ces jeunes et brillants entrepreneurs :

Respectivement Arnaud Dassier et Matthieu Creux.

Arnaud est le fils de Jean-Claude Dassier, un journaliste et dirigeant d’entreprises. Il a été directeur général de la chaîne d’information en continu LCI de 1996 à 2008, puis président du club français de football Olympique de Marseille de 2009 à 2011.

Sur ce site mais qui est payant, on présente Arnaud comme un homme très à droite et < un vétéran des coups tordus sur Internet>

Le père de Matthieu Creux a une notoriété publique moins grande, mais dans les cercles du pouvoir, il est connu.

Fabrice Arfi explique :

« Matthieu Creux, est le fils d’un ancien patron du renseignement militaire. Le général Creux est quelqu’un d’extrêmement respecté et respectable sur la place de Paris. »

Matthieu Creux dispose d’un <site> sur lequel il se présente ainsi :

« […] spécialiste de l’influence et de la mobilisation politique sur Internet. Comme conseiller ministériel ou comme consultant Internet, il a participé à toutes les élections françaises depuis 2006. Il est personnellement intervenu auprès de nombreux clients internationaux en Afrique ou en Europe, toujours sur des problématiques d’activisme ou de contre-activisme en ligne. »

L’enquête de Mediapart révèle ainsi l’une des plus grandes manœuvres de manipulation de l’information intervenue en France ces dernières années en pratiquant l’infiltration des médias et la manipulation de l’information.

Julien Fomenta Rosat  était une des petites mains de cette agence de communication..

Journaliste pigiste, il se trouvait dans une situation précaire et gagnait quelques sous en rédigeant des articles à la demande.

Les sujets étaient variés.

Il travaillait sous différents pseudonymes. Les personnes qui lui commandaient les articles aussi. Il ne savait pas où ses articles étaient publiés. Parmi ses commanditaires il y avait une société implantée en France, puis ensuite, une société implantée en Slovaquie, à Bratislava. Mediapart est allé voir : il n’y a rien, il n’y a pas de société, c’est juste une boîte dans une HLM à Bratislava.

Pour Julien, le coup de trop c’est quand on lui a demandé de dézinguer François Ruffin :

Alors il a appelé Fakir et a tout « balancé ». L’article <Moi, journaliste fantôme au service des lobbies> que je vous invite à lire commence ainsi :

« On m’a commandé un article pour dézinguer Ruffin. Je l’aime bien, moi, Ruffin… Je réponds quoi ? ». Il y a quelques mois, on recevait un coup de fil de Julien, un copain journaliste qui fait des ménages dans la com’, pour payer les factures.
Articles bidon, médias complices, déstabilisations, grands groupes pleins aux as… Julien nous raconte le business secret des « agences fantômes ».

Dans l’émission l’<Instant M>, Fabrice Arfi présente Avisa Partner de la manière suivante ;

« La société pour laquelle « Julien» travaillait est inconnue du grand public. C’est une entreprise, comme on dit pudiquement : « d’intelligence économique et de cyber sécurité », une « société privée de renseignements ». C’est l’une des plus réputées de la place de Paris. Elle travaille avec des institutions publiques comme Interpol, la Gendarmerie nationale, le ministère des Armées, mais aussi BNP Paribas… [mais aussi] La Société Générale, le Crédit Agricole, la Banque Palatine, Axa, CNP Assurances, Engie, EDF, Total, L’Oréal, LVMH, Chanel, Carrefour, Casino […] À peu près tout le CAC 40, mais aussi des clients qui sentent un peu plus le soufre : des Etats étrangers dirigés par des autocrates et des dictateurs… »

Sonia Devillers donne des exemples :

« Le Congo-Brazzaville, le Kazakhstan, le Qatar, le Tchad, la Société nationale pétrolière du Venezuela, pour du lobbying contre les sanctions américaines qui la vise, le géant russe de l’aluminium Rusal, la multinationale pharmaceutique et agrochimique Bayer pour du lobbying pour contrer l’activisme des anti-OGM… »

Fabrice Arfi a pu étudier le rôle d’Avisa Partners avec des témoignages et des documents à l’appui. Il a constaté :

« La manière dont elle a infiltré les plateformes participatives de sites français et étrangers pour créer de faux avatars, de faux profils, publier des billets de blog sous de fausses identités.

Or, les lectrices et des lecteurs pensent lire l’opinion d’un citoyen indigné, d’une responsable d’ONG, d’un cadre dirigeant, d’une entreprise ou d’un chercheur ou d’une chercheuse aguerrie. Et il n’en est rien. C’est le produit d’une commande chèrement payée par des clients pour manipuler le débat public pour le compte de multinationales parfois, ou de dictatures souvent. C’est une énorme opération de manipulation et de trucage du débat public. »

[Avisa Partners] ne cessent de racheter les principaux acteurs du secteur. Elle valorise son activité à près de 150 millions d’euros. C’est une énorme machine d’intelligence économique.

Avisa partner a essayé de s’offrir une forme de respectabilité vis-à-vis de l’extérieur. Pour cela, elle s’est associée à de très grands noms de la diplomatie française, des services de renseignements français, ou de la politique française.

L’actuelle porte-parole du gouvernement, Olivia Grégoire, a fait partie dans le passé des dirigeants, d’Avisa partner. Ce n’est plus le cas. L’ancienne plume d’Emmanuel Macron, Sylvain Fort, a été associé à Avisa partner. L’ancien numéro deux du Quai d’Orsay, l’ancien secrétaire général du ministère des Affaires étrangères sous Jean-Yves Le Drian, l’ambassadeur Maurice Gourdault-Montagne, était le président du comité d’éthique d’Avisa partners. Il vient de le quitter aussi pour des questions de temps, nous dit-il officiellement. Mais je peux aussi citer l’ancien chef des services secrets intérieurs, Patrick Calvar, dont le nom est associé à Avisa, précisément parce qu’il connaissait le père. »

Et Fabrice Arfi propose cette solution face à ces manipulateurs, solution qui me plait :

« Plutôt que de supprimer ces comptes, Il faut montrer qu’on peut faire une prise de judo. Ceux qui ont cru pouvoir nous tromper, nous les démasquons. »

Dans l’article Wikipedia, déjà cité, nous pouvons lire :

« Depuis 2015, des enquêtes du Journal du Net, de Challenges, du Desk, Complément d’Enquête, [montre que] Avisa Partners, via ses sous-traitants, a piloté des opérations d’influence et d’e-réputation sur Internet grâce à de faux articles ou fausses tribunes au profit d’entreprises clientes (Air France, EDF ou LVMH) ou de personnalités, comme le président tchadien Idriss Déby ou Mounir Majidi, le secrétaire particulier du Roi du Maroc. Des opérations auraient également été menées contre des concurrents ou ennemis de ses clients : Andrea Bonomi, Engie, François Ruffin ou des États comme le Monténégro, le Bénin et la junte thaïlandaise. Le Journal du Net qualifie alors le cabinet de « manipulateur de Wikipédia et des sites médias ». D’après Fakir, l’objectif est d’« abreuver internet de contenus flatteurs ou complaisants pour leurs clients afin d’influencer l’opinion publique, de faciliter leurs affaires ou de taper sur un concurrent ». Mediapart affirme que la société serait à l’origine de plusieurs centaines d’articles dans le « Club de Mediapart », l’espace participatif du journal, largement utilisé dans le cadre d’opérations de communication. D’autres clients sont cités, comme le comité d’organisation de la Coupe du monde de football 2022 au Qatar, Rusal, ou encore PDVSA.

Interrogés par les différentes équipes de journalistes, les dirigeants d’Avisa Partners nient l’implication de leur agence. »

La meilleure preuve qu’ils manipulent, c’est qu’ils s’en défendent.

Je reprends une phrase du Président Pompidou que j’ai déjà cité : « La meilleure preuve qu’il voulait la guerre, c’est qu’il s’en défendit »

Vous pouvez aller sur leur site sur lequel dès la page d’accueil, des animations vous donne l’impression d’être dans un film.

Et surtout écouter l’émission du mercredi 29 juin 2022 l'<Instant M>.et lire l’article de
Julien Fomenta Rosat : <Moi, journaliste fantôme au service des lobbies>

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Jeudi 9 juin 2022

« Pourquoi Le Monde, Libération, l’Obs n’ont pas parlé de l’assassinat d’Alban Gervaise ? »
Je n’ai pas la réponse à cette question délicate

Alban Gervaise était âgé d’une quarantaine d’années. Il était radiologue, médecin chef à l’hôpital militaire Lavéran de Marseille.

Il était marié et père de trois enfants.

Le 10 mai il est allé chercher deux de ses enfants de 3 et 7 ans, scolarisés en maternelle et en CP dans une institution catholique de Marseille.

Un homme a surgi par-derrière et lui a asséné plusieurs coups de couteau. L’agresseur a été maîtrisé et désarmé par quatre passants.

Lors de son arrestation il a affirmé à la police avoir attaqué au nom de Dieu. Selon des témoins, l’homme aurait crié des allégations religieuses pendant l’agression.

Alban Gervaise est décédé dans la nuit du 27 mai de la suite de ses blessures.

L’homme qui a été arrêté est de nationalité française, il a 24 ans et se prénomme Mohamed.

J’ai appris cela sur Facebook, Céline Pina a publié cette information accompagnée d’un long commentaire.

Céline Pina est proche du Printemps républicain, ce mouvement politique de gauche créé en 2016 notamment par Laurent Bouvet a pour ambition de défendre les valeurs de laïcité et d’universalisme contre des dérives communautaristes et notamment l’islamisme politique pour lequel il dénonce la complicité qu’auraient certains mouvements et partis de gauche. Les premiers traitent les seconds d’islamo-gauchistes qui en retour les accusent d’islamophobes.

Pour celles et ceux qui ont un compte Facebook, vous pouvez aller voir la publication que Céline Pina a rédigé sur Facebook, pour les autres vous pouvez lire le contenu de cette publication <ICI>.

Ce qui m’a interpellé c’est le fait que je n’ai pas entendu parler de ce fait divers et que Celine Pina affirme que les grands médias n’ont rien dit sur cette affaire qui date de presque un mois.

Abonné au Monde, à Libération et à l’Obs, j’ai utilisé hier le moteur de recherche de chacun de ces médias pour vérifier s’ils ont publié un article, un petit entrefilet sur ce sujet.

Force est de constater que la réponse est négative !

Vous trouverez dans cet article la preuve en image.

J’ai fait des recherches et j’ai trouvé des informations sur des sites d’extrême droite.

Parmi les grands journaux nationaux, j’ai trouvé le « Figaro » qui a publié dès le 10 mai l’information :

< Marseille : un père de famille attaqué au couteau à proximité d’une école catholique>

J’en cite des extraits :

« Un père de famille âgé de 40 ans a été poignardé une dizaine de fois au niveau de la gorge, mardi 10 mai aux alentours de 18h, dans le 13e arrondissement de Marseille, a appris Le Figaro de sources concordantes. »

Celine Pina fait remarquer qu’il y a un mot français pour signifier « poignardé au niveau de la gorge » et ce mot est égorgé !

« Appelés sur les lieux, les secours ont entrepris un massage cardiaque. Grièvement blessée, la victime a été transportée à l’hôpital Nord avec un pronostic vital très engagé. Il est actuellement en réanimation intensive. « Une enquête pour tentative d’homicide volontaire est ouverte et confiée à la Sûreté Départementale», indique le parquet de Marseille au Figaro.

Les faits ont eu lieu à proximité du groupe scolaire catholique Sévigné, chemin du Merlan à la Rose. La victime, médecin militaire radiologue à l’hôpital Laveran, a été attaquée pour une raison encore inconnue alors qu’il était sur le point de reprendre sa voiture stationnée à une cinquantaine de mètres de l’école. Il était accompagné de ses deux enfants de 3 et 7 ans, scolarisés en maternelle et en CP dans l’école catholique, qu’il venait de récupérer. Assis sur un banc à proximité, l’agresseur a surgi par derrière avant de s’acharner sur sa victime, lui assénant plusieurs coups de couteau dans le thorax.

Maîtrisé et désarmé par quatre passants, l’agresseur a été interpellé par les policiers avec un couteau suisse en sa possession. Il s’agit de Mohamed L., 23 ans, né à Brignoles (Var). L’individu est connu des services de police mais pas du renseignement territorial. Selon plusieurs témoins, le suspect aurait crié des allégations religieuses lors de l’attaque, déclarant notamment « avoir agi au nom de Dieu ». Placé en garde à vue, l’homme a tenu des «propos délirants» évoquant «Dieu» et «le diable». Les policiers n’ont pas pu mesurer son alcoolémie en raison de son état « très agité ».

Les motivations du mis en cause restent floues

Les éléments recueillis ne permettent pas à ce stade d’établir les motivations du mis en cause, a indiqué le parquet de Marseille au Figaro mercredi 11 mai. La veille, une source policière indiquait à l’AFP que l’hypothèse terroriste avait été définitivement écartée par les enquêteurs et que l’agresseur souffrait de troubles psychologiques. »

Le FIGARO a publié un nouvel article à la mort de Monsieur GERVAISE : <le père de famille attaqué au couteau devant l’école de ses enfants est décédé> et le 1er juin un billet d’analyse de l’essayiste, biographe et haut fonctionnaire, Maxime Tandonnet  «L’affaire Alban Gervaise révèle la banalisation de la barbarie quotidienne»

Je n’ai pas trouvé un autre grand journal national ayant parlé de ce drame.

Il y a eu quelques journaux régionaux comme le <Républicain Lorrain> parce qu’il avait effectué une partie de sa carrière de médecin militaire en Lorraine.

Il y a aussi <Sud Ouest.fr> et des journaux marseillais.

Pour le reste, le silence.

Les médias auquel pour ma part je m’informe généralement, n’ont pas jugé utile de dire ce fait.

Ils ont laissé toute la place aux sites d’extrême droite pour en parler largement.

Et pour ma part de me plonger dans un abîme de perplexité.

Est-ce protéger la communauté musulmane, toutes celles et ceux qui veulent vivre paisiblement leur foi en France en évitant de révéler qu’une nouvelle fois, un homme se réclamant de la religion musulmane a tué un autre homme en prétendant le faire au nom de sa religion ?

Cet homme est peut-être fou, mais pour autant ne faut-il pas en parler ?

Ne peut-on pas s’interroger pourquoi des déséquilibrés veulent invoquer le Dieu de l’Islam pour tuer ?

Chaque jour nous recevons des flots d’information plus ou moins pertinent. L’égorgement d”un père de famille devant ses deux enfants à proximité d’une école catholique marseillaise n’est-elle pas une information qui mérite d’être connue nationalement ?

Grâce au Républicain Lorrain, nous disposons d’une photo de Alban Gervaise.

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Jeudi 2 juin 2022

« Témoigner, dénoncer, donner à voir étaient au centre de ses choix professionnels et humains […] Sa courte vie a eu un sens »
La mère de Frédéric Leclerc-Imhoff

Frédéric Leclerc-Imhoff était un jeune homme de 32 ans.

Il est décédé lundi 30 mai, « touché par un éclat d’obus » lors du tournage d’un reportage sur les évacuations de civils de Lysychansk et Severodonetsk dans le Donbass qu’il réalisait pour BFMTV . Il s’agit du 8e journaliste tué depuis le début du conflit en Ukraine.

<Slate> nous apprend qu’il était diplômé de l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA) et travaillait pour BFMTV depuis plus de 6 ans après avoir travaillé en tant que réalisateur de reportages et de documentaire pour l’agence Capa, comme l’indique LCI. En Ukraine pour couvrir l’invasion russe, il effectuait sa deuxième mission sur place lorsque le véhicule dans lequel il se trouvait a été ciblé par un bombardement russe.
Il s’agit du 8e journaliste tué depuis le début du conflit en Ukraine.

Pourquoi parler de lui, alors que la guerre d’Ukraine fait tous les jours des centaines de morts ?

Parce que ce jeune homme a pris tous ces risques pour nous informer, pour que nous puissions disposer d’une information indépendante et pas seulement de propagande.

Aldous Huxley a écrit :

« La philosophie nous enseigne à douter de ce qui nous paraît évident. La propagande, au contraire, nous enseigne à accepter pour évident ce dont il serait raisonnable de douter »

Ainsi les alliés séparatistes du Kremlin ont affirmé à l’agence de presse russe Tass que Frédéric Leclerc-Imhoff n’était pas un journaliste, mais un mercenaire étranger et qu’il aurait livré des armes et des munitions à l’armée ukrainienne.

C’est de la désinformation, de la propagande russe.

Pour pouvoir lutter contre cette falsification de la réalité, les journalistes sont indispensables.

Christophe Deloire, le directeur général de Reporters sans frontières a rendu hommage à Frédéric Leclerc-Imhoff sur <France Inter> le 31 mai 2022.

Il a rapporté un entretien avec la mère du journaliste :

« Je suis très fière de mon fils et de son engagement. Témoigner, dénoncer, donner à voir étaient au centre de ses choix professionnels et humains […] Sa courte vie a eu un sens. ».

Ses collègues ont affirmé qu’il était le contraire d’une tête brulée. Mais les forces russes ciblent les journalistes qui peuvent contrecarrer leur récit mensonger des évènements.

Christophe Deloire précise que

« Depuis le début du conflit, des journalistes se sont fait tirer -pardonnez-moi l’expression- comme des lapins” par les forces russes, il y a une responsabilité du Kremlin, de Vladimir Poutine, sur ces crimes de guerre. Heureusement qu’il y a des journalistes sur le terrain pour dénoncer les mensonges des forces russes qui prétendent qu’elles ne visent pas les civils alors qu’elles le font, qui prétendent qu’elles ne visent pas les journalistes alors qu’elles le font ».

Nous ne pouvons qu’exprimer notre gratitude devant ces vigies de la vérité que sont les journalistes qui prennent ces risques pour nous informer. Frédéric Leclerc-Imhoff était l’une d’entre elles.

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Lundi 28 septembre 2020

«Les gardiens de la raison – Enquête sur la désinformation scientifique»
Livre de Stéphane Foucart, Stéphane Horel et de Sylvain Laurens

Entre les croyances et la Science, je suis résolument du côté de la science. Et je le reste !

La croyance, surtout dans le cadre des religions monothéistes, pense détenir la vérité et la réponse à toutes les questions.

La Science c’est le doute, le règne de l’incertitude, la capacité cependant d’écarter ce qui est faux et de trouver des réponses partielles aux questions. Réponses partielles qui cependant ont permis des progrès techniques extraordinaires et notamment de rallonger la vie des humains, comme de lutter très souvent contre la douleur, ce qui n’était pas possible dans les siècles d’avant le XXème. Michel Serres a expliqué plusieurs fois qu’on ne pouvait rien comprendre à la doctrine du « dolorisme » qui était omniprésente dans la religion chrétienne, si on ne se rendait pas compte combien nos ancêtres souffraient au quotidien sans disposer des médicaments ou des moyens médicaux pour l’empêcher.

Evidemment, il est possible que nous soyons un peu désemparé quand le docteur en physique, Laurent Toubiana, chercheur à l’Inserm, où il dirige l’équipe SCEPID (Système Complexes et Epidémiologie) au sein du LIMICS (Laboratoire d’informatique Médicale et d’Ingénierie des Connaissances) affirme que <la pandémie est terminée>, alors que d’autres affirment que la propagation virologique du SRAS V2 est très inquiétante et qu’il est nécessaire de prendre des mesures contraignantes pour la freiner.

Dans son service Checknews, Libération fait appel à d’autres scientifiques pour contester les arguments de ce chercheur : < Sur quoi se fonde l’épidémiologiste Laurent Toubiana pour affirmer que «l’épidémie est terminée» ? >.

Dans le fond ce débat est normal, il est sain.

S’il vous choque c’est que probablement et sans le savoir vous êtes encore très influencés par la religion dont vous êtes issue et qui vous a fait croire, jusque dans vos recoins les plus intimes, que non seulement la vérité existait et qu’en outre il existait des humains qui étaient capable de vous la révéler.

Vous avez simplement remplacé « Dieu » par la « Science ».

Or cela n’a rien à voir.

Dans la Science le savoir est limité et l’incertitude grande.

Et je rappelle toujours cette phrase de Rachid Benzine qui explique cela :

« Le contraire du savoir ce n’est pas l’ignorance mais les certitudes. »

Mais pour que la Science joue ce rôle éminent que je pourrai décrire par des mots simples comme : « ça oui ! ça c’est peut-être possible ! ça ce n’est probablement pas vrai ! ça c’est faux et surtout, surtout ça je ne le sais pas », il faut qu’elle soit éthique.

C’est-à-dire que le scientifique parle en toute liberté par rapport aux expérimentations et aux études qu’il a menées ou qu’il a pu lire parce qu’elles ont été décrites dans des revues scientifiques rigoureuses contrôlées par des comités de lecteurs qui le sont autant.

Or il y a un problème et ce problème c’est l’argent. L’argent qui corrompt.

Un livre vient de sortir. Je ne sais pas s’il donne toutes les clés, mais il est intéressant qu’il pose le problème et qu’il donne des exemples de ce qu’il prétend.

Ce livre est l’œuvre de Stéphane Foucart, journaliste d’investigation, chargé de la couverture des sciences au sein du journal Le Monde, en particulier des sciences de l’environnement et des sciences de la Terre, de Stéphane Horel également collaboratrice du Monde, ayant réalisé plusieurs enquêtes sur les conflits d’intérêts et les lobbys et Sylvain Laurens, sociologue, maître de conférences à l’EHESS.

Le titre de ce livre édité par les éditions de la Découverte et paru le 24 septembre est « Les gardiens de la raison – Enquête sur la désinformation scientifique »

La première fois que j’ai entendu parlé de ce livre c’est dans l’émission <L’instant M du 24 septembre> de Sonia Devillers dans laquelle les deux journalistes du Monde étaient invités.

Cette émission qui s’est donnée pour titre : « Désinformation scientifique : quand la raison est instrumentalisée par des intérêts privés » explique que l’enquête des journalistes analyse les nouvelles stratégies de lobbying pour peser dans le débat scientifique et médiatique.

Et Sonia Devillers a présenté l’ouvrage ainsi :

« Les auteurs criblent tous les canaux, toutes les voies et les voix qu’empruntent les lobbys de l’industrie pour battre en brèche le principe de précaution et disqualifier les combats pour la santé ou l’environnement. Et ce, au nom de la science. Au nom de la « bonne » science, celle qui n’entraverait en rien le progrès. Traduire : qui n’entraverait en rien la loi du marché. Quels sont ces canaux ? Des maisons d’édition, des journaux, des radios, des chaines de télé et une myriade de blogs, comptes Twitter ou chaînes Youtube. Ainsi que des agences de relations publiques qui fabriquent des arguments scientifiques tout prêts pour journalistes paresseux ou simplement ignorants. Ce livre est dense, précis, fouillé, très polémique, édifiant et passionnant. »

Le journal <L’Humanité> ne tarit pas d’éloges :

« Dans cet ouvrage remarquable, les journalistes Stéphane Foucart et Stéphane Horel démasquent, avec le sociologue Sylvain Laurens, les discours et démarches au service des intérêts privés. Ou comment la science et la raison sont désormais instrumentalisées par un camp réactionnaire. Un travail d’un intérêt public.

Le discours rationaliste est aujourd’hui mis à mal par des acteurs scientifiques et médiatiques qui, prétendant s’appuyer sur les principes de la science, défendent principalement les intérêts des industriels. La remarquable enquête de Stéphane Foucart et Stéphane Horel, deux journalistes, et d’un sociologue, Sylvain Laurens, à propos de ces pseudo-rationalistes met en exergue les logiques argumentatives et les tactiques politiques à l’œuvre dans cette vaste entreprise de désinformation. »

Leur journal « Le Monde » publie bien sûr un article sur ce livre : <C’est la possibilité même de la diffusion de la vérité scientifique auprès du plus grand nombre qui se trouve désormais attaquée.>.

L’article rappelle d’abord ce que l’on sait désormais sur l’industrie du tabac :

« Les procès faits à l’industrie du tabac à la fin des années 1990 ont permis la mise en ligne de millions de documents confidentiels révélant les stratégies de leurs cabinets de relations publiques. Ironie de l’histoire, c’est l’important travail de sensibilisation de l’opinion publique et de diffusion de ces informations par des chercheurs, des ONG et des journalistes qui a précipité la mutation et l’accélération des formes de manipulation de la science par le secteur privé. L’industrie s’est adaptée à cette vague de scandales et de documentation de ses actes. Ce que nous explorons dans ce livre, en somme, ce sont les nouvelles frontières du lobbying et les degrés insoupçonnés de raffinement qu’atteignent désormais les stratégies des firmes pour défendre leurs intérêts en instrumentalisant le savoir. »

La stratégie est de s’appuyer sur des scientifiques ou des personnes qui se prétendent scientifiques pour accuser d’obscurantisme tous ceux qui entraveraient les intérêts des puissantes firmes et écarter toute critique de leurs actions et produits :

« L’enjeu consiste maintenant à prendre position dans l’espace de la médiation scientifique, dans ces lieux où l’on fait la promotion de la science et de son esprit auprès des citoyens, parfois avec l’aide des pouvoirs publics. Prendre position, mais aussi possession. Les arguments de l’industrie étaient parés des atours de la science, ils sont maintenant dissimulés derrière une défense de la science comme bien commun. Chacun a entendu ces affirmations dans le débat public : être contre les pesticides dans leurs usages actuels, interroger certains usages des biotechnologies, critiquer l’industrie du nucléaire, c’est être “contre la science”, c’est verser dans l'”obscurantisme”. La stratégie des marchands de pétrole, de plastique, de pesticides et d’alcool consiste désormais à dire ce qu’est la “bonne” science. De ce fait, nous n’assistons plus seulement à un dévoiement de l’expertise scientifique, mais à un détournement plus profond des logiques mêmes de fonctionnement d’un espace public reposant sur un idéal de vérité. »

L’article est plus précis :

« Les firmes s’emploient à faire passer leur matériau de lobbying scientifique pour l’état de la science. Elles veulent voir leurs études validées, agrémentées d’un coup de tampon officiel. Voire financées sur fonds publics. Mais elles ont aussi besoin de disséminer leurs informations et de recruter des défenseurs, parfois à leur insu. […] Mais ceux qui relaient les messages des firmes et de leurs consultants n’ont pas toujours conscience de ce qu’ils font. Et c’est justement là l’une de ces nouvelles stratégies furtives concoctées par le marketing digital. Pour certaines agences spécialisées dans la manipulation des réseaux sociaux, le nouvel horizon du lobbying scientifique est le citoyen ordinaire, le micro-influencer, comme dit le jargon du métier. Transformé en “relais de terrain”, il diffuse des argumentaires conçus et façonnés par d’autres. […]

La description de ces phénomènes risque de choquer des engagements sincères, de heurter ceux qui donnent de leur temps pour faire progresser l’idéal scientifique auprès de différents publics. Car les simples amateurs de science, aussi, sont enrôlés dans cette entreprise de propagande. Dans l’écosytème de la tromperie modern style, la cible privilégiée des influenceurs n’est plus seulement le ministre ou le haut fonctionnaire de la Commission européenne, mais le professeur de biologie de collège, animateur d’un “caféscience”, ou l’agronome éclairé, passeur de savoir sur son blog. Ayant pris conscience que leur monde était désormais traversé par ces ruses retorses, certains se plaignent de la récupération de leurs idées à des fins mercantiles. Ainsi, des animateurs de chaînes YouTube ou de blogs scientifiques ont déjà eu la mauvaise surprise de voir leurs logos repris sur des plaquettes de think tanks financés par le secteur privé. »

« Libération » consacre aussi plusieurs articles à ce livre

<La science perd-elle la raison ?> évoque les

« «rationalistes», une petite communauté d’acteurs du monde de la science peu connue du grand public mais dont les luttes internes peuvent avoir des répercussions dans la vie des Français. Il suffit pour mesurer le niveau de tensions de voir le cyclone de réactions qu’a fait naître, avant même sa parution, le livre des journalistes du Monde Stéphane Foucart et Stéphane Horel et du sociologue Sylvain Laurens»

Un autre dans lequel intervient Sylvain Laurens qui affirme : «Le rationalisme est devenu un combat pour le droit de dire des choses fausses»

Un dernier « La fabrique du doute » qui révèle que l’une des cibles du livre est le sociologue Gérald Bronner qui intervient dans beaucoup de médias que j’écoute et qui se veut, en effet, le pourfendeur de l’obscurantisme.

Grâce à Wikipedia on peut aussi lire la défense des personnes attaquées :

« [Stéphane Foucart] met en cause des personnalités faisant la promotion de la rationalité, comme le sociologue Gérald Bronner, le physicien Jean Bricmont, le politologue Virginie Tournay, le psycholinguiste Franck Ramus, le biologiste Marcel Kuntz, le journaliste Laurent Dauré ou encore le Youtubeur Thomas C. Durand. Ces derniers, dans leurs réponses (cf. liens ci-après) pointent les inexactitudes dont selon eux est truffé ce livre, présenté comme une enquête d’investigation, ce qui les amène à s’interroger sur sa réelle compétence journalistique ainsi que sur sa déontologie. »

Voici les liens donnés par Wikipedia :

« Des journalistes du Monde et un sociologue attaquent Jean Bricmont dans un livre : il répond »  sur Le Média pour Tous, 22 septembre 2020

« Un nouveau journalisme : de l’insinuation à l’inquisition. »  sur VIRGINIE TOURNAY, 23 septembre 2020

« Les champions de l’intox » sur Ramus méninges, 19 septembre 2020

Marcel Kuntz, « Merci aux auteurs du livre Les Gardiens de la Raison » sur OGM : environnement, santé et politique

« La RAISON n’est pas un trophée – réponse à Foucart, Horel & Laurens », sur La Menace Théoriste, 12 septembre 2020

« Les naufrageurs de la raison (et de la gauche) : réponse à Foucart, Horel et Laurens » , sur Ruptures, 23 septembre 2020

Ce livre me semble poser des problématiques très salutaires. L’exemple du lobbying de l’industrie du tabac dont on connait aujourd’hui l’histoire montre la réalité de cette menace de l’utilisation de « pseudos connaissance scientifiques » pour défendre des intérêts uniquement industriels et financiers.

Bien entendu, il n’est pas davantage possible de prendre pour vérité certaine toutes les affirmations de ce livre et il faut aussi lire la parole de la défense.

La science n’est jamais le domaine des certitudes.

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Mercredi 18 mars 2020

« Factuel »
Le fact-checking par l’AFP

Dans un premier élan, j’avais voulu écrire un mot d’humour du type : « L’humour au temps du coranovirus ».

Mais la multiplication de fake news ou d’opinions erronées, me pousse plutôt à renvoyer vers le remarquable site de l’AFP qui décrypte, analyse et démonte l’ensemble de ces « infox »

Ce site s’appelle « Factuel ». Son adresse est : « https://factuel.afp.com/ »

Vous apprendrez ainsi que contrairement à ce qui a été largement diffusé sur les réseaux sociaux, le joueur de football Christiano Ronaldo n’a pas décidé de transformer ses hôtels, au Portugal, en hôpitaux pour accueillir les personnes touchées par le nouveau coronavirus. Contactée par l’AFP, la chaine d’hôtels a démenti cette information.

Bien entendu, la propagation du nouveau coronavirus suscite de nombreuses publications qui préconisent des remèdes miracles dénués de tout fondement.

Pour certains, on se demande comment des gens peuvent y croire, la crédulité de certains est sans limite.

Vous trouverez donc sur cette <page> une liste de solutions publiées ainsi que les longs démentis argumentés des journalistes de l’AFP.

Par exemple :

  • Non, boire de l’eau ne fait pas partie des mesures de prévention contre le coronavirus
  • Non, la cocaïne ne soigne pas le coronavirus
  • Non, les personnes noires ne sont pas plus résistantes au coronavirus
  • Non, la viande de bœuf n’est pas le “meilleur vaccin” contre le coronavirus
  • Les autorités sanitaires ne recommandent pas de se raser la barbe pour se protéger du coronavirus
  • Non, le gel désinfectant pour les mains ne favorise pas le cancer
  • Non, boire de l’eau toutes les 15 minutes ne protège pas du coronavirus

Etc..

Le site précise aussi le nombre de fois qu’une de ces informations a été diffusée. Il ne s’intéresse donc pas à des informations baroques confidentielles mais bien à des infox largement transmises.

Vous pouvez aussi contacter le site, par rapport à une information largement diffusée, en envoyant un message à cette adresse : factuel@afp.com

Il est aussi possible de le contacter par facebook ou twitter

Il s’agit donc ce site :


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Jeudi 22 mars 2018

« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie »
Albert Londres dansTerre d’ébène

Pour répondre à question d’hier : « Comment lutter contre les fake news ? », la meilleure solution n’est certainement pas une loi nouvelle mais des journaux indépendants en qui on peut avoir confiance et des journalistes rigoureux et intègres.

Celui qui devant l’Histoire a incarné ce journalisme est Albert Londres. Et c’est d’ailleurs le prix Albert-Londres qui couronne chaque année, à la date anniversaire de sa mort, le meilleur « Grand Reporter ».

Albert Londres n’a jamais pris en considération les pouvoirs publics, les gouvernements pour écrire ce qu’il voyait pendant la première guerre mondiale, dans la Russie bolchevique, dans le bagne de Cayenne, en Chine.

Il part une première fois en Chine en 1920 et écrira :

« La Chine : chaos, éclat de rire devant le droit de l’homme, mises à sac, rançons, viols. Un mobile : l’argent. Un but : l’or. Une adoration : la richesse. »

Quelques années plus tard, il meurt dans le paquebot qui le ramenait de Chine, dans la nuit du 15 au 16 mai 1932, dans l’incendie du navire. Beaucoup pensent qu’il s’agissait d’un assassinat car il était sur une enquête d’ampleur, un scandale international. Ses notes ont brulé dans le même incendie. Il avait 48 ans

Et l’exergue de cet article est celui le plus souvent cité d’Albert Londres, sorte de devise du journaliste idéal.

C’est encore grâce à Mediapart et Edwy Plenel que nous savons que ces mots sont

« les premiers de Terre d’ébène, le grand reportage d’Albert Londres sur l’Afrique occidentale française, paru en 1929. Un livre en forme de réquisitoire sur la servitude coloniale, le travail forcé, le déni de la justice, l’inégalité instituée, etc. « Tout ce qui porte un flambeau dans les journaux coloniaux est venu me chauffer les pieds », ajoute Londres.

Or c’est dans le même avant-propos de ce livre qu’on trouve la formule désormais canonique, communément citée par les journalistes pour défendre leur indépendance professionnelle et leur liberté critique – la plume dans la plaie. Rappel qui mérite une citation intégrale :

« Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie ».

Entêté, Albert Londres y revient dans l’épilogue, élargissant le propos au-delà du journalisme professionnel pour viser à la responsabilité civique : « Flatter son pays n’est pas le servir, et quand ce pays s’appelle la France, ce genre d’encens n’est pas un hommage, mais une injure. La France, grande personne, a droit à la vérité ».

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Mardi 20 mars 2018

« La valeur de l’information »
Edwy Plenel

Un pré-projet avait été mis en ligne le 2 décembre 2007, mais le lancement du journal en ligne : Mediapart date du 16 mars 2008, il y a dix ans.

Mediapart a dix ans !

A son lancement Alain Minc avait été catégorique : « Cela ne marchera jamais ».

Soyons précis : <Aller voir cette vidéo sur Youtube> et reprenons ce qu’il dit :

« La presse sur le net ne peut être que gratuite, la presse payante sur le net ne peut pas marcher »

Vérité des textes, lien vers les sources, il n’y a que cela de vrai !

Mediapart a réalisé une presse payante sur le net et cela marche.

Pour ces 10 ans, Edwy Plenel a publié un livre : « La valeur de l’information » qui est paru le 8 mars 2018.

La valeur cela signifie qu’il est important de disposer d’une information de qualité dont on peut raisonnablement penser qu’elle est juste et vérifiée.

L’information peut aussi être révélée et avoir cette valeur qu’elle nous permet de mieux comprendre les enjeux, les comportements de certains et aussi leurs intérêts. Il est fondamental dans une démocratie de savoir que le Ministre du budget, le patron des services du contrôle fiscal est un fraudeur.

Certains jeunes dont mon fils pensent que les journaux et probablement les journalistes sont inutiles dans le monde qui vient. Le réseau, le réseau des amis sur lesquels on peut se fonder suffisent pour être bien informé. La masse des individus saura toujours plus que quelques journalistes et quelques précautions de recoupement permettraient alors de s’assurer d’une information solide et sérieuse.

Je n’y crois pas un seul instant.

Qu’est-ce qu’un bon journaliste ? C’est une femme ou un homme qui cherche de l’information et qui la vérifie.

Un journaliste, un vrai c’est une femme ou un homme courageux qui va défendre la liberté non pas pour lui mais pour la démocratie, pour les autres.

Un journaliste, un vrai peut avoir beaucoup d’ennui. On parle beaucoup de mai 1968 en ce moment, mai qui a commencé le 22 mars 1968, ou peut-être même le 18 mars et après mai il y eut une vraie purge des journalistes à la télévision et à la radio de l’époque, ils ont perdu leur emploi s’ils avaient été trop critiques par rapport au gouvernement ou trop bienveillants par rapport au mouvement de mai.

C’était il y a cinquante en France.

Aujourd’hui la Turquie porte le nom peu enviable <de plus grande prison de journalistes du monde>

Des journalistes perdent la vie lors de conflits qu’ils veulent suivre pour informer le monde.

Mais des journalistes sont aussi assassinés parce qu’ils font leur métier et qu’ils le font bien.

Et cela est même le cas dans notre douce Union européenne : Daphne Caruana Galizia a été assassinée sur l’ile de Malte en 2017, et en 2018 c’est en Slovaquie que Jan Kuciak a été tuée.

Un journaliste peut donner sa vie pour produire ce minerai d’une valeur inestimable pour la liberté et la démocratie : l’Information.

Alors la valeur de l’information c’est aussi un prix qu’il faut payer.

Quand vous voulez un service de qualité ou un produit de qualité vous faites appel à un professionnel, et ce professionnel vous le payez.

Quand vous voulez une information de qualité, vous faites appel à un professionnel et ce professionnel est un journaliste.

Pour ma part, je suis abonné à Mediapart depuis le scandale Cahuzac,

Edwy Plenel m’énerve souvent, il a parfois des réactions totalement disproportionnées notamment lors de son conflit avec Charlie Hebdo. Mais il a créé un site de qualité, indispensable à la démocratie et à la liberté. Mais pour y accéder il faut payer, parce que ce que vous y trouvez possède de la valeur.

Il était invité de Laurent Ruquier du 17 mars 2018.

Et il est revenu sur l’affirmation péremptoire d’Alain Minc :

« Alain Minc est une boussole qui montre toujours le Sud. Il nous a servi. Nous avons fait de la pub : Comme il [Alain Minc] s’est toujours trompé, abonnez-vous à Mediapart. Et en fait cela nous a ramené beaucoup d’abonnés…»

Mais il a été juste, Minc n’était pas seul : « Personne n’y croyait, Laurent, Personne !» a-t-il lancé à Ruquier.

Il a aussi insisté sur l’intérêt du numérique qui permet de créer une relation de confiance entre les journalistes et les lecteurs qui peuvent réagir et aussi écrire, critiquer bref participer.

Mediapart a aujourd’hui 140 000 abonnés, 45 journalistes..

C’est eux qui étaient en pointe sur l’affaire Bettencourt, Cahuzac et maintenant sur l’affaire que Plenel désigne comme le plus grand scandale d’Etat, c’est-à-dire le financement par le dictateur de Lybie, Kadhafi, de la campagne présidentielle de 2007 de Sarkozy, affaire que Plenel affirme être certaine.

Dans toutes ces affaires il est question d’énormes sommes d’argent détournées du bien public, de fraude fiscale, c’est-à-dire toutes ces dérives qui affaiblissent la solidarité et la démocratie.

Edwy Plenel donne cette mission aux journalistes : « Apportez des informations d’intérêt public » et il cite un autre journaliste qui dit :

« Ce sont les journalistes qui lèvent des lièvres mais c’est à la société de s’en emparer ».

L’échange lors de l’émission de Ruquier fut très intéressant et même émouvant quand il fut question du père : Alain Plenel qui fut vice recteur en Martinique et fut aussi persécuté par le pouvoir en raison de son esprit de liberté et de justice.

Alors oui l’information a de la valeur et il faut savoir la payer.

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