Jeudi 15 septembre 2022

« L’échec de l’impérialisme moral en Afrique ! »
Jean-Pierre Olivier de Sardan

« J’aime les gens qui doutent » chantait Anne Sylvestre :

« J’aime les gens qui doutent, les gens qui trop écoutent leur cœur se balancer
J’aime les gens qui disent et qui se contredisent et sans se dénoncer
J’aime les gens qui tremblent, que parfois ils ne semblent capables de juger »

Sur les quelques 1700 mots du jour que j’ai écrit depuis 2012, aucune série ne m’a donné autant de mal que celle-ci que j’ai initié sur ce livre et cette intuition de Samuel Huntington : « Le choc des civilisations ».

Alors faut-il se taire ? Ne pas en parler ?

J’ai l’intuition contraire, il ne faut pas être dans le déni.

Dans un certain nombre de domaines qui touche les libertés, les progrès dans le droit des femmes, des pratiques sexuelles, de l’écriture, du dessin, de la réalité des faits, de la démarche scientifique, de l’enseignement de l’Histoire nous sommes depuis le début de ce siècle en pleine régression.

Et je crois qu’il faut essayer de comprendre cela :

  • La colère des uns ;
  • Le totalitarisme des autres ;
  • L’aveuglement ou la naïveté d’autres encore
  • La peur, la lâcheté, l’indifférence du plus grand nombre

Pour donner quelques éléments de compréhension de cette énumération qui peut être énigmatique pour les uns ou plein de sous-entendus pour les autres, voici quelques exemples. Il n’est pas question d’exhaustivité ici.

Quand je parle de colère, je pense aux peuples qui ont été colonisés, soumis et exploités par un Occident arrogant et usant de toute la force que lui donnait ses capacités industrielles et militaires.

Le totalitarisme correspond à des régimes tyranniques ou plus simplement autoritaires et qui en utilisant d’une part des fautes des occidentaux et d’autre part le récit ancien et souvent déformé de leur civilisation rejettent en bloc toutes les valeurs de l’occident et imposent des pouvoirs cruels, carcéraux, liberticides, régressifs et abêtissant.

L’aveuglement ou la naïveté s’adresse aux politiques, intellectuels et journalistes de nos pays qui souvent aveuglés par leur anti-américanisme, qui peut avoir des justifications, défendent des mouvements, des idées ou des dictateurs. Il y a parmi eux des poutinologues, des pro-Xi Jinping, des compagnons de route des frères musulmans ou des salafistes ou d’autres causes ambigües comme le « Comité Vérité pour Adama ». La plupart de ces naïfs seraient parmi les premiers éliminés s’ils avaient le malheur de vivre dans un pays dirigé par les forces qu’ils soutiennent.

La dernière partie est ultra majoritaire et ne veut pas se mêler de ses querelles, soit parce que cela dérange sa quiétude, soit que l’esprit est occupé de tant de choses qu’ils ne faut pas perdre de temps pour réfléchir à ces sujets, soit parce que les menaces qui nous guettent ne sont pas perçues, soit, comme ceux qui ne veulent pas que le collège de leur enfant prenne le nom de Samuel Paty, parce qu’ils sont lâches, il n’y a pas d’autre mot.

Le chemin de crête pour parler de ces influences, de ce bouleversement sociétal et politique est extraordinairement difficile.

A force de nuancer et de volonté d’embrasser tous les éléments du puzzle, on pourrait aboutir à des phrases interminables, entrecoupées par des conjonctions (mais, or) ou des adverbes (cependant, toutefois).

Bref, des phrases qui sont illisibles.

Alors je ne vais pas agir ainsi.

Hier, je donnais un point de vue sur l’affaire Idrissa Gueye et les dissensions entre le Sénégal et La France qui en ont été la conséquence.

Jean-Pierre Olivier de Sardan présente une opinion tout à fait différente qu’il défend dans le remarquable magazine numérique « AOC » pour Analyse, Opinion, Critique.

Cet article d’opinion qui a été publié le 14 juin 2022 a pour titre « De quoi se mêlent-ils ? » : l’échec de l’impérialisme moral en Afrique »

Je ne connaissais pas Jean-Pierre Olivier de Sardan qui est désigné comme anthropologue dans l’article

Sa <Fiche Wikipedia> nous apprend qu’il est né en 1941 dans le Languedoc et qu’il a été professeur d’anthropologie à l’École des hautes études en sciences sociales de Marseille. Il était également directeur de recherches émérite au CNRS et professeur associé à l’Université Abdou-Moumouni (Niamey, Niger).

Il présente la particularité de disposer à la fois de la nationalité de naissance française, mais aussi de la nationalité, acquise en 1999, du Niger.

Nous apprenons qu’il a réalisé une grande partie de ses études anthropologiques en Afrique et que ses premiers travaux furent l’étude d’une société particulière, le peuple Wogo, sur les rives du fleuve Niger, à l’ouest du pays.

Enrichis par cette double culture française et africaine, il affirme l’aspect contre-productif des attaques françaises contre le joueur sénégalais :

« Attaquer publiquement et menacer de sanctions Idrissa Gueye, joueur sénégalais du Paris Saint-Germain qui a refusé de porter le maillot arc-en-ciel lors de la journée de lutte contre l’homophobie, est le meilleur moyen de renforcer à la fois l’homophobie au Sénégal et le rejet de la France. »

Il renvoie vers un autre article d’AOC : <un fait social total par Jean-Loup Amselle> qui tente de relater toute cette histoire en essayant de rester dans la plus grande neutralité possible, à équidistance, de l’indignation française et de l’irritation sénégalaise.

Olivier de Sardan souhaite se démarquer par un avis plus tranché :

Je me risquerai […] à prendre parti très clairement, car derrière cette affaire c’est aussi toute l’attitude des Occidentaux qui est contestée en Afrique, bien au-delà du Sénégal, jusqu’à et y compris l’aide au développement, dont tout montre qu’elle est en crise profonde. Je pense que les attaques radicales et outrées contre Ibrahim Gueye sont non seulement déplacées mais doivent être condamnées, et qu’elles sont de plus révélatrices d’un mal profond dès lors qu’il est question des pays du Sud en général et de l’Afrique en particulier.

À quel titre les dirigeants, autorités, intellectuels et experts occidentaux s’autorisent-ils à donner sans cesse des leçons de morale aux peuples africains, en oubliant les poutres qu’ils ont dans l’œil et en bafouant bien souvent les règles qu’ils veulent imposer aux autres ?

Ce sont cette arrogance, cette suffisance, cette condescendance, cette tartuferie, qui expliquent pour une grande part le rejet de plus en plus prononcé de l’Occident (France en tête) par une très grande partie des opinions publiques africaines, rejet massif dont on voit d’ailleurs dans l’actualité une conséquence que je trouve particulièrement déplorable mais dont il faut comprendre le pourquoi : un soutien envers Poutine très souvent affiché en Afrique, pour la seule raison qu’il s’oppose à l’Occident. »

Après avoir dressé le contexte, l’univers mental africaine et le ressentiment historique à l’égard des pays coloniaux et en particulier la France, il prend une position assez éloignée de celle que je défendais hier :

« Participer aux Gay Pride ou aux manifestations contre le racisme serait-il alors obligatoire, et ne pas le faire serait-il donc assimilable à un comportement homophobe ou raciste ? Ce serait absurde. Ne pas s’associer à une activité publique contre l’homophobie ne signifie pas être homophobe, pas plus qu’un joueur de tennis russe qui ne critique pas publiquement l’agression russe en Ukraine ne peut être accusé pour autant de la soutenir. Les critiques virulentes contre Gueye n’ont pas lieu d’être. On peut d’ailleurs penser qu’elles ne visaient pas son identité sénégalaise et que tout autre joueur ayant réagi comme lui aurait fait l’objet de cette intolérance. Mais c’est justement parce qu’elles ne tenaient pas compte de son identité sénégalaise qu’elles ont soulevé un tel tollé en Afrique. »

Le joueur est resté silencieux pendant toute la polémique. Il est parti en Angleterre à la fin de l’été. Olivier de Sardan explique l’embarras du joueur par sa peur d’être mal jugé dans son pays natal :

« En effet, pour comprendre mieux l’attitude de Gueye lui-même, le fait qu’il soit sénégalais est incontournable. En refusant de porter le maillot symbolique de l’homosexualité, qui l’aurait sans doute transformé bien malgré lui en militant pro-homosexuel aux yeux de ses compatriotes, Gueye ne voulait sans doute pas tomber sous le coup d’une avalanche de quolibets et d’insultes au Sénégal, où l’opinion publique est clairement homophobe. Cela me semble très compréhensible de sa part. »

Il explique que, selon lui, même si le joueur était hostile à l’homosexualité, rien ne pourrait lui être reproché s’il ne pratique pas personnellement des insultes ou des actes homophobes.

« Peut-être aussi (je n’en sais absolument rien) est-il hostile personnellement à l’homosexualité. Et alors ? Là aussi ce serait son droit : ce sont les insultes et les actes homophobes qui sont proscrits (non seulement légalement, mais aussi légitimement à mon avis), mais pas le rejet de l’homosexualité à titre personnel (« en son âme et conscience » selon la formule consacrée). La répression en France de l’homophobie et de toutes les discriminations ne doit pas empiéter sur la liberté d’opinion. »

Sur ce point je me permets une objection. La liberté dans notre civilisation s’exerce à l’égard de la sexualité qu’on souhaite vivre, hétéro, homo ou bi. Cela peut aller jusqu’à une hétéro sexualité contrainte par une homosexualité refoulée en raison d’interdits qu’on accepte en raison de ses croyances. Mais l’homophobie est désormais, dans notre civilisation, un délit et non une opinion. Ce n’est pas seulement le fait de s’abstenir d’insultes ou d’actes homophobes qui est ici en cause.

Ce qui à mon sens se joue ici, c’est l’intolérance des religieux, le fait de ne pas accepter que l’autre peut penser différemment de moi.

Et là, il y a un pas supplémentaire, qu’Olivier de Sardan néglige, l’homme tolérant intervient et défend celui qui pense différemment de lui, si on l’attaque.

Nous savons aujourd’hui que Voltaire n’a jamais écrit : « « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ».

Mais cette phrase est bien une phrase pleine de sens, dans ce contexte.

De manière plus personnelle, je peux dire que je ne sais pas si Dieu existe. Mais ce que je crois c’est que le Dieu qui est décrit dans les Livres de Moïse des juifs, dans la bible chrétienne ou dans le coran des musulmans, lui, n’existe pas.

Ce que l’Histoire nous apprend sur la rédaction, la sélection des textes et leur utilisation par des hommes de pouvoir pour asseoir leur autorité m’autorise une grande force dans cette conviction.

Pourtant, non seulement j’accepte que cette croyance soit la réalité des gens qui y adhérent, mais bien plus, je les défendrai s’ils sont attaqués par des intolérants.

S’associer à une journée contre l’homophobie pour quelqu’un qui s’interdit d’être homosexuel répond à cette même logique.

Mais Olivier de Sardan place cette question dans un contexte plus général de relations ambigües entre l’Europe et l’Afrique :

« Passons maintenant aux relations avec l’Afrique, non seulement en ce qui concerne l’homophobie mais plus généralement les interventions des Européens en matière de normes sexuelles et familiales d’une part, de mœurs politiques d’autre part. Il y a beaucoup de valeurs morales considérées désormais au Nord comme « allant de soi » que les décideurs occidentaux de tous bords, depuis les grandes agences de développement jusqu’aux ONG grandes et petites, entendent imposer à l’Afrique, non certes par la force, mais par le biais de multiples conditionnalités de l’aide : la défense des droits des homosexuels, certes, mais aussi la promotion des femmes, la régulation des naissances, la lutte contre le mariage forcé et le mariage des enfants, la lutte contre la corruption, la démocratie électorale, la transparence et la redevabilité, la promotion de la société civile […]

Cela autorise-t-il pour autant les représentants de la France ou plus largement les décideurs de l’aide au développement et de l’aide humanitaire à donner des leçons aux autres peuples, et à se comporter en militants imposant de l’extérieur ces valeurs aux autres ? Certes, l’exportation systématique vers l’Afrique de valeurs morales devenues incontournables en Occident se fait avec les meilleures intentions du monde, au bénéfice des discriminés, des opprimés, des pauvres : il s’agit d’intervenir « pour leur bien ». Ceci rappelle d’une certaine façon les discours missionnaires des temps coloniaux. Le problème c’est que ce « bien » est perçu par la plupart de ceux auxquels il s’adresse comme un « mal », et que ces « amis qui nous veulent du bien » sont bien souvent considérés comme des hypocrites qui nous humilient. »

Cette réaction anti-colonialiste que décrit l’anthropologue est certainement une réalité, en outre, parfaitement compréhensible.

Il constate qu’en plus cette injonction moraliste de l’Occident échoue :

« Soyons clairs. Dans la plupart des pays d’Afrique, le patriarcat est la règle et les hommes dominent de façon écrasante la vie publique (même si les femmes ne sont pas démunies de contre-pouvoirs), la polygamie est très développée, la corruption est généralisée, l’homophobie règne ouvertement, la démocratie est contournée ou décriée. Le racisme et la xénophobie sont fréquents et souvent à visage découvert. Au Sahel, les mariages précoces et forcés sont toujours nombreux et largement validés socialement et religieusement. L’Afrique (pas plus que l’Europe ou l’Amérique) n’a rien d’un monde idéal qu’il s’agirait de préserver en l’état.

On ne peut donc se satisfaire de cette situation. Mais qui peut la changer ?

Une réponse s’impose. Le fonctionnement actuel de l’aide occidentale, avec ses injonctions éthiques liées à toute allocation de fonds, a échoué. Il va à l’encontre de ses bonnes intentions, car ses leçons de morale exacerbent le rejet de l’Occident et par la même favorisent la perpétuation des pratiques locales qu’il s’agissait de modifier »

Pour faire évoluer les pratiques que nous réprouvons son conseil est de plutôt s’appuyer sur les militants africains dont il reconnait qu’ils restent très minoritaires sans être pour autant isolés. Son expérience montre qu’une partie de la population n’approuve pas les mariages forcés ou la répression de l’homosexualité, accepte les contraceptifs, tolère les avortements. Mais cette partie-là reste silencieuse, dans la mesure où, sur la scène publique, la scène électorale et la scène religieuse, c’est le rejet des valeurs considérées comme occidentales qui tient de plus en plus le haut du pavé.

Il oppose ainsi « réformateurs de l’extérieur » issus de l’Occident inefficace et rejetés, aux « réformateurs de l’intérieur » qui peuvent aider à l’évolution lente des sociétés et qu’il faudrait aider de manière discrète mais réelle. Et il finit par cette conclusion :

« Les « réformateurs de l’extérieur » ne sont ni efficaces ni bienvenus sous les formes actuelles de leurs interventions. Leur impatience missionnaire et leur impérialisme moral sont bien souvent contre-productifs, malgré leurs bons sentiments, voire à cause d’eux. Leurs bons sentiments masquent en effet leur méconnaissance dramatique des réalités locales, et leur manque d’écoute des raisons pour lesquelles les gens font ce qu’ils font. »

Un autre éclairage du même sujet abordé hier.

Il montre toutes les forces souterraines à l’œuvre dans ce conflit de civilisation et cite la : « domination idéologique d’un salafisme revenant à l’époque du Prophète »

J’y apprends la difficulté de convaincre du bien-fondé des valeurs occidentales dans ces lieux hostiles à l’Occident à cause d’un lourd passé.

Toutefois l’histoire relaté hier parle non pas de ce qui se passe en Afrique, mais en France. Et je crois que sur notre territoire, tout en appliquant la tolérance telle que je l’ai évoquée précédemment, nous avons le droit d’affirmer nos valeurs et de demander qu’elles soient respectées par celles et ceux qui ne pensent pas comme nous, mais qui habitent, même temporairement, ce territoire.

<1709>

Mercredi 14 septembre 2022

« C’est juste un choc culturel ! »
Bacary Cissé – journaliste sénégalais à propos du refus d’Idrissa Gueye de participer à un match contre l’homophobie

Une civilisation, c’est une culture, ce sont des valeurs spirituelles souvent incarnées par une religion.

C’est une conception de la relation entre les droits individuels et les exigences de la société.

C’est une conception du sacré, des interdits et de ce qui est permis.

Car il y a toujours du sacré, même dans les sociétés très largement athées.

En France par exemple, la flamme du soldat inconnu, le drapeau, les tombes, la shoah sont sacrés, c’est-à-dire qu’ils sont susceptibles de faire l’objet d’un sacrilège, on utilise, dans le langage courant, le terme de profanation.

Idrissa Gueye est un joueur de football de nationalité sénégalaise. Il était dans l’effectif du Paris Saint Germain de 2019 à juin 2022, depuis août 2022 il a rejoint un club anglais.

Le samedi 14 mai 2022, se déroulait la 37e journée du championnat de Ligue 1,  journée dédiée à la lutte contre l’homophobie.

Pour l’occasion, tous les joueurs des 20 équipes arboraient un maillot floqué de l’arc-en-ciel des fiertés LGBT, en marque de soutien.

Idrissa Gueye avait été convoqué pour faire partie de l’équipe du PSG et devait donc porter ces couleurs arc en ciel. Idrissa Gueye n’a pas voulu jouer « pour des raisons personnelles »

La saison précédente, une journée identique avait été organisée et le joueur s’était également abstenu officiellement pour des raisons médicales.

Cette affaire a immédiatement agité le monde associatif qui a fait de la lutte contre l’homophobie une cause essentielle.

Ainsi l’association de lutte contre l’homophobie dans le sport, Rouge Direct, a réagi dès le 15 mai :

« L’homophobie n’est pas une opinion mais un délit. La LFP (Ligue) et le PSG doivent demander à Gana Gueye de s’expliquer et très vite. Et le sanctionner le cas échéant »

Ce message a été suivi par beaucoup d’autres. Je crois qu’on peut dire que quasi toute la France du sport, de la politique et des milieux d’influence s’est mobilisée et indignée devant le comportement de ce joueur.

Le joueur n’a fait aucun commentaire.

Alors, le 18 mai, Le Conseil national éthique (CNE) de la FFF a écrit à Idrissa Gueye:

« En refusant de participer à cette opération collective, vous validez de fait les comportements discriminatoires, le refus de l’autre, et pas uniquement contre la communauté LGBTQI +.
L’impact du football dans la société et la capacité des joueurs à représenter un modèle nous donnent à tous une responsabilité particulière ».

Nous pouvons conclure à une condamnation unanime en France.

Au Sénégal la réaction a été tout autre.

D’abord le président de l’État Macky Sall a affirmé son soutien au joueur :

« Je soutiens Idrissa Gana Gueye. Ses convictions religieuses doivent être respectées ».

Le ministre des Sports Matar Bâ s’est aussi joint à la défense du joueur en indiquant que

« Quand on signe (un contrat avec un club), c’est pour jouer au foot, ce n’est pas pour faire la promotion de quoi que ce soit ou mettre de côté ses convictions »

L’écrivain et intellectuel Boubacar Boris Diop, lauréat du très prestigieux Prix Neustadt, affirme, lui, sa

« Solidarité totale avec Idrissa Gana Guèye. Ils sont étranges, ces gens qui se donnent tant de mal pour imposer à tous et à chacun leurs opinions. Au nom, suprême stupidité, de la liberté d’expression. Savent-ils seulement qu’ils font de plus en plus rire ?  »

L’ex-Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne encourage Gueye en lui disant:

« Tiens bon, Gaïndé”, lion en langue wolof, surnom de la sélection nationale de football, dans un message sur Twitter accompagné de versets du Coran. »

Le président de la Fédération sénégalaise de football, Augustin Senghor a déclaré :

« Idrissa Gueye est dans son bon droit.  Il est resté ancré dans ses valeurs, dans ses principes, dans sa foi qui font la « sénégalité », qui font l’ africanité » de tout un continent ».

Pour démontrer le consensus politique, il faut citer l’une des principales personnalités politiques nationales et principal opposant au président Macky Sall, Ousmane Sonko:

« Les +toubabs+ (les Blancs, en wolof) croient que nous sommes des ordures et qu’eux seuls ont des valeurs.
Aujourd’hui, il faut qu’ils nous imposent l’homosexualité (…) Eux seuls ont des valeurs. Jusqu’à quand ?
Ce qu’il (Gueye) a fait, c’est un acte de courage. Nous tous, sans distinction de religion, devons le soutenir »

De nombreux Sénégalais ont aussi mis en statut Whatsapp le message de soutien du président sénégalais ou des photos de Gueye en pèlerinage à la Mecque.

L’écrivain El Hamidou Kasse a déclaré sur Twitter soutenir Gueye

« Au nom du principe de la libre croyance et du respect des différences. »

Enfin la Fédération Sénégalaise de Football (FSF) défend le joueur d’abord en affirmant qu’il n’y a pas de preuve qu’il était absent pour la raison qu’on lui reproche et accuse Conseil National Ethique (CNE) de racisme :

« Quand l’éthique se base sur l’hypothétique et le diktat, la liberté individuelle est en péril […]. [Un courrier du CNE que la FSF dit avoir accueilli ] avec une grande surprise (et une grande inquiétude sur le traitement de certains joueurs essentiellement d’origine africaine, disons-le clairement).

[Criant à l’illégalité de la démarche de la FFF, la FSF estime que sa requête revient à] contraindre le joueur à faire ce que son libre arbitre ne l’incline à faire. Est-on vraiment dans cette France que l’on nous avait contée et racontée dans nos écoles, celle qui a comme devise la liberté, la fraternité et de l’égalité pour tous ? Comment une instance qui prétend promouvoir l’éthique dans le Football peut se fonder sur des supputations pour s’adresser à une personne pour lui enjoindre de s’exprimer et pire encore de s’afficher avec le maillot aux couleurs LGBTQI+ pour mettre fin auxdites supputations ?»

Au Sénégal, pays musulman à 95% et très pratiquant, les relations homosexuelles sont interdites. La loi existante dispose que « sera puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 100.000 à 1.500.000 francs (152 à 2.286 euros) quiconque aura commis un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe. »

Loi assumée et défendue à 100% par le chef de l’État au nom des spécificités culturelles comme en 2020 alors qu’il recevait le premier ministre canadien Justin Trudeau.

« Ces lois sont le reflet de notre manière de vivre… elles n’ont rien à voir avec l’homophobie ».

On peut ne pas être d’accord avec Macky Sall et constater simplement que cette discrimination, cette violence et ces sanctions exercées à l’égard des homosexuels répond exactement à la définition de l’homophobie.

Un article du monde relate : « Ces derniers mois, la pression s’est accentuée sur la communauté LGBTI+ sénégalaise, mais aussi les militants et tous ceux qui, publiquement, osent réaffirmer les droits de cette communauté. « Avec l’implication nouvelle d’imams et de chefs religieux sur le sujet, l’homophobie a pris une nouvelle ampleur, juge Souleymane Diouf qui dénonce le soutien financier de certains pays – Turquie, Arabie saoudite et Iran –, aux organisations conservatrices. Les combattre demande des moyens dont on ne dispose pas, poursuit-il. Aujourd’hui, le niveau d’insécurité pour les défenseurs des droits LGBT au Sénégal est extrêmement élevé. J’ai dû quitter le pays et plusieurs autres activistes ont fait de même. »

L’excellent site SO FOOT rapporte :

« Invité de L’After Foot sur RMC, Bacary Cissé – journaliste sénégalais est revenu sur la polémique Idrissa Gueye. Le joueur parisien, qui avait refusé de porter un maillot au flocage arc-en-ciel symbole de la lutte contre l’homophobie, avait reçu les foudres de la Fédération française de football et de bon nombre d’associations. Selon le journaliste, il s’agit juste d’un « choc culturel » sur la perception de ce geste. Il assure qu’au Sénégal, les gens ont parfaitement compris son choix : « Aujourd’hui, Idrissa Gana Gueye a le soutien total de tous les Sénégalais, de tous les Africains. »

Cissé développe son explication et estime que la culture du joueur est juste différente du pays dans lequel il évolue. « C’est une incompréhension. Il ne faut pas oublier qu’Idrissa Gana Gueye est né au Sénégal, il y a grandi, il y a été éduqué.
Nous respectons tout ce que font les autres, mais nous ne sommes pas obligés de les suivre dans leur culture, déclare-t-il avant de réfléchir dans le sens inverse. Si Idrissa Gueye avait fait autrement, qu’aurions-nous dit ? On aurait été beaucoup plus choqué. »

Voici les faits et les interprétations.

Que dire ?

Qu’il s’agit bien d’un choc culturel entre l’Occident et un pays africain de civilisation musulmane.

Des deux côtés, il y a une incompréhension totale.

Du côté occidental, on crie au scandale et on explique qu’il ne s’agissait pas de faire la promotion de l’homosexualité, mais simplement de se lever contre les discriminations et les violences contre les personnes ayant des pratiques sexuelles autres qu’hétéro sexuel.

Le comportement du footballeur sénégalais, de ce point de vue, est moralement une faute.

Il faut cependant reconnaître que la prise de conscience occidentale est récente.

  • En 1954, un des plus grands génies scientifiques Alan Turing s’est suicidé parce que la justice britannique après l’avoir condamné à de la prison l’avait ensuite contraint à une castration chimique parce qu’il était homosexuel.
  • En France, ce n’est que le 4 août 1982 que la France dépénalisait l’homosexualité lors d’un vote de l’Assemblée Nationale obtenu par Robert Badinter sous la présidence de François Mitterrand.
  • Et ce n’est qu’en 1990 que l’Organisation mondiale de la santé a supprimé l’homosexualité de la liste des maladies mentales.

Mais peu importe qu’il s’agisse d’une prise de conscience récente, depuis 3 siècles, pour l’Occident quand il avait pris une position morale, il avait l’habitude que cela devienne une position universelle.

Ainsi, concernant la démocratie et les droits de l’homme, notamment de ne pas enfermer les opposants, l’Occident disait le droit, la morale et ce qu’il convenait de faire.

Et ceux qui ne faisaient pas comme l’Occident, s’excusaient de ne pas être arrivé au niveau « civilisationnel » de l’Occident et demandait un peu d’indulgence et de temps pour rejoindre les normes occidentales.

Dans cette affaire, on constate que ce n’est plus du tout le cas.

Tous les intervenants sénégalais cités partent du principe que « l’acceptation de l’homosexualité » est une valeur occidentale qui est contraire à leurs valeurs.

Ils n’envisagent, en aucune façon, une évolution future.

C’est un choc de culture et un choc de valeur.

Dans le monde des civilisations islamiques, cette vision est partagée.

Ainsi pour la coupe du monde de football au Qatar, fin 2022, les autorités qataries ont indiqué que les supporters LGBT qui assisteront à l’événement devront faire preuve de discrétion.

Abdulaziz Abdullah al-Ansari le directeur de la sécurité de la coupe du monde a déclaré :

« Si un supporter brandit un drapeau arc-en-ciel dans un stade et qu’on le lui enlève, ce ne sera pas parce qu’on veut l’offenser, mais le protéger […] il ne s’agit pas là de propos discriminatoires. Si on ne le fait pas, un autre spectateur pourrait l’agresser. Si vous souhaitez manifester votre point de vue concernant la cause LGBT, faites-le dans une société où cela sera accepté »

Dans le pays de l’Islam chiite <Le Parisien> dans un article du 5 septembre 2022, nous apprend que deux lesbiennes et militantes LGBTQ viennent d’être condamnées à mort.

Ces deux femmes, Zahra Sedighi Hamedani, âgée de 31 ans, et Elham Chubdar, 24 ans, ont été condamnées à mort par un tribunal dans la ville d’Ourmia (nord-ouest).

L’Autorité judiciaire a confirmé la condamnation à mort pour « corruption sur terre » des jeunes femmes. Il s’agit de la charge la plus grave du code pénal iranien.

Bien sûr, les ONG nous invitent à protester auprès des autorités iraniennes et de demander l’annulation de la sentence.

Ce sont deux mondes culturels.

Étant donné notre évolution morale en France, le Sénégal, le Qatar sont « des malveillants, des méchants » et pour l’Iran « des criminels ».

Mais pour ces pays, nous, autres occidentaux, sommes des êtres dépravés, immoraux.

Il n’y a plus d’hégémonie morale occidentale.

Alors que faisons-nous ?

Nous n’allons pas faire la guerre pour imposer nos valeurs !

Nous n’allons même pas, envoyer des missionnaires, pour essayer de convertir ces peuples parce ce que venant de l’Occident, ils seraient rejetés.

Mais devons nous accepter dans nos pays que ces représentants d’une autre civilisation transgressent notre morale ?

Parce que personne n’a demandé à Idrissa Gueye de devenir homosexuel, on lui a simplement demander de s’associer à la condamnation du rejet des homosexuels.

Le Qatar exige que les personnes LGBT venant d’Occident se dissimulent, restent discrets, se cachent.

De notre point de vue, dans nos valeurs, ces musulmans sont homophobes.

Alors pourquoi ne pourrait-on pas exiger, quand ils sont en Occident, d’être discrets et de cacher le fait qu’ils sont homophobes ?

Les éléments de ce mot du jour se trouvent derrière ces liens :

https://information.tv5monde.com/info/football-le-joueur-du-psg-idrissa-gana-gueye-au-coeur-d-une-polemique-sur-l-homophobie-456982

https://www.lemonde.fr/sport/article/2022/05/17/l-absence-embarrassante-d-un-joueur-du-psg-lors-de-la-journee-de-lutte-contre-l-homophobie-dans-le-football_6126445_3242.html

https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-monde-est-a-nous/derriere-l-affaire-idrissa-gueye-la-question-de-l-homosexualite-au-senegal_5119393.html

https://www.france24.com/fr/sports/20220517-homophobie-dans-le-football-une-absence-d-idrissa-gueye-cr%C3%A9e-la-pol%C3%A9mique

https://www.marianne.net/monde/afrique/acte-de-courage-valeurs-africanite-les-soutiens-a-idrissa-gueye-pleuvent-au-senegal

https://www.letemps.ch/sport/soutien-idrissa-gueye-accuse-dhomophobie-france-ne-faiblit-senegal

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/05/20/au-senegal-un-soutien-tres-politique-a-idrissa-gueye_6127039_3212.html

https://www.lefigaro.fr/sports/football/ligue-1/la-federation-senegalaise-s-en-prend-violemment-a-la-fff-apres-l-affaire-idrissa-gueye-20220520

https://www.sofoot.com/bacary-cisse-regrette-un-choc-culturel-dans-l-affaire-idrissa-gueye-516111.html

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Vendredi 10 mars 2017

Vendredi 10 mars 2017
« Steve Job a fini par reconnaître que le logo de la pomme croquée d’Apple faisait référence à la pomme empoisonnée avec laquelle Alan Türing avait mis fin à ses jours »
Michel Serres

J’ai écrit que j’ai acquis le livre « Darwin, Bonaparte et le samaritain » et j’ai donc pu vous en parler directement et non seulement à travers l’interview ou des articles qui lui sont consacrés. J’ai fait de même avec le livre sur Hergé et Tintin. En revanche, je n’ai pas fait de même avec le troisième ouvrage.

Le dernier livre de Michel Serres évoqué lors de l’entretien KTO est « La légende des anges », publié en 1993 et republié le 12/10/2016.

Les anges sont porteurs de messages, de nouvelles. C’est pour cela que Michel Serres utilise ce vecteur pour « raconter » notre monde de communication et de réseaux ou des milliers de messages sont transportés chaque jour.

Michel Serres désigne 3 anges :

<Hermès> qui dans la mythologie grecque est le dieu de l’Olympe chargé de porter les messages des dieux. Il correspond au Mercure des Romains.

<Gabriel> Gabriel est quant à lui le porteur de messages des 3 religions monothéistes . Il semble qu’il apparaisse d’abord, dans la Bible hébraïque dans le livre de Daniel où il apparaît au prophète Daniel pour que ce dernier puisse annoncer ses prophéties.

Dans le Nouveau Testament, il annonce à Zacharie que sa femme Elisabeth aura un fils qu’il appellera Jean, puis il annonce la naissance de Jésus à la Vierge Marie : c’est l’Annonciation des chrétiens.

Enfin dans l’Islam, c’est encore l’ange Gabriel qui révèle les versets du Coran à Mahomet dans la grotte de Hira.

Mais de manière plus surprenante le troisième ange de Michel Serres est <Alan Turing>

J’ai fait référence la première fois à Alan Turing, lors du mot du jour du 31/12/2013, il s’agissait du mot du jour N° 212 et celui qui a exprimé ce regret était Chris Grayling Ministre de la Justice britannique :

«Son apport a été décisif pour briser le code Enigma, contribuer à mettre fin à la guerre et sauver des milliers des vies Sa vie a plus tard été assombrie par sa condamnation pour homosexualité, condamnation que nous considérerions aujourd’hui comme injuste et discriminatoire, et qui est désormais annulée.»

La reine d’Angleterre avait accordé, enfin, le 24 décembre 2013, une grâce posthume à Alan Turing, 59 ans après sa mort.

Alan Turing est resté dans l’histoire comme l’homme qui a mis au point la machine électromécanique ayant servi à “casser” le code « Enigma » utilisé par les sous-marins allemands pendant la Seconde Guerre mondiale.

Cette invention avait donné un avantage considérable aux Alliés face à l’Allemagne nazie.

Certains considèrent même que Turing est le père de l’informatique moderne parce qu’il est parvenu à définir les critères de l’intelligence artificielle.

Malgré son apport immense à la victoire des alliés, il a été condamné pour homosexualité. Il a été contraint à subir une castration chimique en 1952.

Il est donc assez normal que Michel Serres qui avait pour objet de décrire le monde de réseaux d’aujourd’hui, de mettre en lumière celui qui est un des inventeurs de l’informatique.

Et Michel Serres lors de l’interview avec Emmanuelle Dancourt reprend l’aveu tardif du créateur d’Apple que le fameux logo est un hommage à Alan Türing.

<Le site de France Info reprend cette thèse> :

« D’abord, le logo est une pomme car c’est le nom de la marque, en anglais. […]

Mais pourquoi la pomme est-elle croquée? En fait, c’est un hommage à l’anglais Alan Turing, génial mathématicien, qui pendant la Seconde Guerre mondiale, a réussi à décrypter le code secret des nazis, généré par leur fameuse machine Enigma. Sans Turing, les Alliés auraient perdu la bataille de l’Atlantique, et peut-être la guerre contre le nazisme. Turing est un héros immense. On considère qu’il a inventé l’ordinateur et l’informatique. Oui, mais il était gay, et à l’époque c’était un délit. La justice britannique le condamna à la castration chimique. Officiellement, il fut inculpé “d’indécence manifeste et de perversion sexuelle “. Désespéré, humilié, il préféra se suicider en 1954, à 42 ans, en mordant dans une pomme empoisonnée au cyanure, comme Blanche-Neige, qu’il adorait.

En fondant Apple, Jobs et Wozniak lui rendirent cet hommage. Leur pomme (arc-en-ciel, signe du mouvement gay) porte la mortelle morsure. […]

Au passage, savez-vous pourquoi les ordinateurs portables Apple ont ils été baptisés “MacIntoch” (plutôt que s’appeler poétiquement D630 ou H-50-NF comme leurs concurrents) ? Parce que Jef Raskin, l’ingénieur d’Apple, qui a créé le premier modèle de Mac au début des années 80, adorait les pommes, et sa variété préférée était la MacIntosh… »

<Mais ce site donne une autre version> :

« Selon la légende, la pomme croquée serait un hommage au célèbre mathématicien anglais Alan Turing. […] Les fondateurs d’Apple se seraient donc inspirés de cette histoire pour honorer l’homme qui les a rendus milliardaires. Pourtant bien que cette version, plutôt favorable en termes d’image de marque, n’ait jamais été réfutée par la société, il semble que la réalité soit bien différente. Ainsi, selon Rob Janoff, le designer à l’origine du logo, la morsure dans la pomme serait seulement là pour montrer qu’il s’agit bien d’une pomme et non d’une cerise. La taille du croc donnant ainsi l’échelle du fruit. De plus, croquer une pomme est un geste universel, compréhensible par tous. Enfin, les couleurs arc-en-ciel de la pomme ne seraient pas un clin d’œil au drapeau gay, mais plutôt une référence au moniteur couleur qui équipaient à l’époque les produits Apple. »

<Toujours est-il que le parlement britannique vient de voter une loi Alan Türing>

Par cette loi à qui on a donné le nom du mathématicien de génie des dizaines de milliers d’homosexuels, condamnés à une époque où leurs mœurs constituaient un délit, ont obtenu une grâce du gouvernement britannique. L’agence de presse britannique estime que la loi concerne 100 000 hommes condamnés entre 1885 et 2003, lorsque les dernières lois hostiles à l’homosexualité ont été abrogées. Parmi eux figure notamment Oscar Wilde (1854-1900), condamné en 1895.

Dans l’entretien de KTO, Michel Serres fustigeait cette morbide habitude… qui consiste à orner nos places de statues de chefs de guerre et de généraux responsables de carnage et de massacre, alors qu’il y a si peu de statue des vrais grands hommes comme Alan Türing ou aussi de grandes femmes comme <Emilie du Chatelet> par exemple

Un film <Imitation Game> sorti en 2014 a tenté de retracer l’histoire d’Alan Türing.

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Mardi 31/12/2013

Mardi 31/12/2013
«Son apport a été décisif pour briser le code Enigma, contribuer à mettre fin à la guerre et sauver des milliers des vies
Sa vie a plus tard été assombrie par sa condamnation pour homosexualité,
condamnation que nous considérerions aujourd’hui comme injuste et discriminatoire, et qui est désormais annulée.»
Chris Grayling Ministre de la Justice britannique à propos du mathématicien de génie Alan Turing

La reine d’Angleterre a accordé, enfin, le 24 décembre, une grâce posthume à Alan Turing, 59 ans après sa mort.

Alan Turing est resté dans l’histoire comme l’homme qui a mis au point la machine électromécanique ayant servi à “casser” le code « Enigma » utilisé par les sous-marins allemands pendant la Seconde Guerre mondiale.

Cette invention avait donné un avantage considérable aux Alliés face à l’Allemagne nazie.

Certains considèrent même que Turing est le père de l’informatique moderne parce qu’il est parvenu à définir les critères de l’intelligence artificielle <Voir sur ce point l’article de l’express>

Malgré son apport immense à la victoire des alliés, il a été condamné pour homosexualité. Il a été contraint à subir une castration chimique en 1952.

2 Ans plus tard, il se suicida en mangeant une pomme trempée dans le cyanure. Il semble que c’était par référence à l’Histoire de Blanche Neige qu’il aimait beaucoup.

Il avait 41 ans.

Un long moment de silence et d’ignorance du grand public sur le rôle de cet homme dans la guerre et dans la science s’en suivit.

Mais des scientifiques britanniques dont Stephan Hawking se sont mobilisés pour le faire connaître et obtenir une réhabilitation de la part du gouvernement britannique.

En 2009, celui qui était alors Premier ministre du Royaume-Uni, Gordon Brown, avait présenté publiquement les excuses du gouvernement pour le « traitement écœurant » qui avait été réservé à Alan Turing.

Cette Histoire doit nous rappeler qu’aujourd’hui encore dans le monde beaucoup de pays traitent de manière ignoble les personnes qui vivent des amours homosexuels.

La répression est le fait de pays théocratiques, d’Etats totalitaires ou même d’exactions privées non condamnées par la Justice.

Ainsi, les actes homosexuels sont passibles de peine de mort dans sept pays de nos jours :

  • Afghanistan,
  • Arabie saoudite,
  • Iran,
  • Nigeria,
  • Mauritanie,
  • Soudan
  • Yémen.

Ces législations sont effectivement appliquées. Ils sont aussi condamnés par des châtiments physiques, ainsi que des peines d’emprisonnements dans plus de 27 pays par le monde. L’homosexualité est illégale dans plus de 100 pays dans le monde, et les homosexuels s’exposent à des procès systématiques (source Wikipedia)

Lors du débat sur le mariage pour tous, des relents d’homophobie sont réapparus en France.

Rappelons quand même que ce n’est que Le 4 août 1982 que la France dépénalisait l’homosexualité lors d’un vote de l’Assemblée Nationale obtenue par Robert Badinter sous la présidence de François Mitterrand.

Et ce n’est qu’en 1990 que l’Organisation mondiale de la santé a supprimé l’homosexualité de la liste des maladies mentales, mettant fin à plus d’un siècle d’homophobie médicale.

<Voici un article du Figaro qui évoque aussi la grâce au mathématicien Alan Turing>

A bientôt en 2014

<212>